Une grande frustration mais un auteur à revisiter.
Ce livre est comme ces clips érotiques de fin de soirée, éveillant l'intérêt et le désir mais laissant le spectateur sur sa fin en cachant l'essentiel.
L'histoire est construite sur 3 temps :
le premier avec les débuts d'Anna comme Vestale du Calix (sorte de grand vase en cristal transparent). Les vestales sont issues des classes les plus pauvres de la société, suivent une formation très dure, où la moindre erreur est punie de mort par ébouillantage.
L'épreuve d'admission est très symptomatique : les jeunes candidates (11 ans) doivent marcher une journée entière en plein soleil, jusqu'à ce que leurs sandales se détruisent littéralement sous leurs pas.
Anna, très appliquée mais pas très futée est responsable de la destruction du Calix. Condamnée à mort, elle est decorporée et envoyée quelque part.
Le deuxième temps se passe en 4066 à Paris. Anna y arrive suite à sa décorporation. C'est un Paris très surpeuplé. On y gagne un logement en choisissant un(e) co-locataire. Les vieux habitent à la campagne, les enfants sont enlevés aux parents dès leur plus jeune age pour être éduqués en maison d'éducation. Les match de foot génèrent des émeutes encouragées par le pouvoir et conduisant à de véritables massacres.
Le troisième est un voyage quasi-initiatique d'Ankh, la colocataire de Anna, à la recherche de celle-ci.
Le regret principal est l'absence de lien entre les différents temps de l'histoire. le lecteur à juste le temps de commencer à se repérer dans un univers, qu'il est jeté dans un autre.
Le style est agréable et donc on a envie de continuer, mais on cultive essentiellement sa frustration.
Une autre manière de décoder le livre est cependant possible.
Le livre est construit sur la violence, essentiellement celle faite au femmes. Viols, domination, rabaissement dans l'échelle sociale, cantonnement dans des rôles subalternes. Les références à
Simone de Beauvoir y sont d'ailleurs explicites.
On peut donc suivre le déroulement de l'histoire comme un exutoire de l'auteur par rapport à des sentiments très forts sur le sujet.
Le premier temps est celui du « deuxième sexe », exploité, utilisé et dont le corps même est aliéné. La vestale avec son image idéalisée n'est qu'une serpillière qu'on jette après usage.
Le deuxième temps est un monde plus égalitaire (logement homo- et hétérosexe, rôles égaux), mais ou la violence est celle du pouvoir sur le peuple.
Le troisième enfin est le voyage vers la libération de la femme, au travers d'épreuves initiatique la révélant pleine et entière.
La chute se faisant sur la punition des méchants et en route vers un avenir meilleur.
Anne Larue mérite d'être suivie dans son évolution, en espérant qu'elle prenne un peu plus soin de son lecteur, en laissant ses propres démons un peu au repos.