Au moment de commencer ma lecture, je craignais un peu d'être déçue. Ce livre a tellement été encensé que j'ai pensé que sa réputation était peut-être exagérée. Dès le début du livre, j'ai été rassurée.
Ce roman, beau plaidoyer contre l'intolérance, appelle à se détacher de ses préjugés, invite à la compassion et à l'empathie pour son prochain.
Le fait que l'histoire soit vue à travers le regard d'une petite fille, regard encore naïf et innocent (mais pas niais), donne une dimension pédagogique au récit, la petite fille, Scout, prenant le rôle de Candide et son père, Atticus, celui de professeur. Scout, petite fille très attachante, curieuse, fonçeuse, ne cesse de poser des questions, de réfléchir sur le monde qui l'entoure, pointant du doigt l'hypocrisie et l'absurdité de certaines situations. Ce regard vivifiant permet au roman d'éviter tout didactisme pesant et ainsi de conserver une fraîcheur.
L'intelligence de
Harper Lee est d'éviter tout manichéisme, tout simplisme et surtout de ne jamais se départir de son humanité.
L'auteure commence par nous dépeindre la communauté de Maycomb, ses communautés, ses habitudes, ses rumeurs, ses blessures.
La seconde partie, celle du procès, est passionnante, édifiante. Là aussi,
Harper Lee évite toute facilité.
Si le destin de Tom Robinson, injustement accusé d'un crime, fait ressentir une profonde compassion pour cet homme et provoque la colère face à l'injustice dont il est victime, l'auteure a la subtilité de ne pas faire de son accusatrice une harpie rongée par la haine. Si Mayella est raciste, ce n'est pas par idéologie mais par habitude (comme bon nombre de ses concitoyens), parce que dans cette société il ne peut en être autrement. Et sa pitoyable vie faite de violence et de misère, dénuée de tout espoir suscite la pitié, voire même la compassion.
On voit dans ce récit un monde traditionaliste enfermé dans ses préjugés et son archaïsme par réaction au monde autour d'eux qui évolue, qui change (à l'image des convictions naissantes de Scout et de son frère). Et c'est bien la peur, encore d'avantage que la haine, qui les fait résister au progrès.
Le thème de la transmission des valeurs est habilement traité à travers le personnage du père, Atticus. Celui-ci n'impose jamais ses convictions. Il laisse ses enfants comprendre par eux-mêmes. Il fait confiance en leur réflexion, en leur coeur. Il est un guide plus qu'un maître à penser. Il leur transmet des valeurs simples, la grandeur de la compassion, le courage de ne pas céder à la colère, la nécessité de se mettre à la place de l'autre pour le comprendre.
Si la seconde partie est passionnante (malgré un dénouement plutôt expédié), j'avoue que contrairement à la plupart des autres lecteurs, j'ai une petite préférence pour la 1ère partie, cette chronique de l'enfance qui distille beaucoup d'émotion sans jamais tomber dans la mièvrerie.
Le roman a beau être très ancré dans un contexte particulier, un Etat rural des années 30 avec toutes ses spécificités (ségrégation, disparités sociales, stéréotypes sur ce que doit être une "dame"),
Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur a une portée universelle, justement dans ce portrait très réussi de l'enfance.