Lotta La Filoute

" Mais qu'est-ce qu'elles sont pénibles, les petites soeurs" , diraient les grands frères et les grandes soeurs.
" Mais qu'ils sont pénibles, les grands", dirait les benjamins.
" Mais qu'ils sont pénibles, ces gosses", diraient les parents.
Ils ne peuvent se supporter, lorsque leur temps intime et personnel est mis en danger et pourtant ils s'adorent.
Il faut vivre avec et on ne pourra certainement pas vivre sans.
L'auteure Astrid Lindgren nous raconte le menu d'une salade composée familiale dont la saveur nous est très familière.
Les chapitres seront des chroniques, des anecdotes d'une vie quotidienne très ordinaire mais émaillée de tendresse et d'espiègleries enfantines.
La Lotta du titre n'est pas celle qui raconte, c'est Mia-Maria la cadette, 6 ans, qui s'y collera.
Elle racontera surtout beaucoup Lotta, 4 ans, la petite dernière qui ne les lâchera pas d'une semelle, elle et Jonas l'ainé.
Lotta a du caractère, elle est à croquer. Avec ce personnage, nous n'entrerons pas dans ses pensées, nous constaterons surtout ses intentions et ses multiples bêtises, ceci suffira à la décrire au plus près.

Pas facile d'être la petite dernière.
Lotta n'a plus envie d'être le bébé et la plus gâtée, non, elle veut suivre les grands sur leurs aventures, sur leurs privilèges de grands, dehors et dedans.
Le temps passera doucement au fil des chapitres, comme sur un mois ou une année.
Le premier chapitre nous fera déja sourire, notre Lotta prenant la pluie à la campagne, sur un tas de fumier, parce que le fumier et la pluie font grandir. C'est d'une logique tendre.

Le petit trio arrivera à jouer la pluoart du temps en harmonie, heureusement, avec juste assez de paix pour que les parents ne se déplacent pas et assez de bruit pour que les parents ne se déplacent pas.
Car en effet, plusieurs enfants qui jouent en silence, c'est parfois suspect. Les grands-parents et la vieille voisine du trio infernal seront d'accords.
Nous rigolerons de l'astuce des grands pour faire participer notre Lotta: la faire s'allonger sous le lit sans bouger pour le jeu des pirates et sur le lit, pour le jeu des anges gardiens et du docteur.

L'auteure Astrid Lindgren permettra de distinguer l'héroïne de la protagoniste principale pour le jeune public lecteur, faisant des deux les héroïnes des missions qui leur sera confiées.
Mia-Maria sera une parfaite soeur du milieu, celle qui profitera des avantages des grands et qui racontera tout, avec beaucoup de tendresse, surtout la naïveté et le caractère têtu de Lotta, ainsi que l'amour vache et les facéties des grands.
Lotta, de son côté, sera soit très astucieuse pour n'en faire qu'à sa tête et détournant les règles d'éducation à son avantage, soit très innocente faisant émerger les contradictions des histoires de grands par sa compréhension du premier degré.
Jonas l'aîné, chef de file pour le quart d'heure ludique du trio, ne sera pas mis en reste pour cette irrésistible mise en avant de la joie familiale.
"...les tartines aussi étaient bonnes.
Moi, je préfère celles aux boulettes de viande, et Jonas, celles aux oeufs durs et à la crème d'oeufs de cabillaud, alors on a échangé, il a eu ma tartine à la crème d'oeufs de cabillaud, et moi, j'ai eu sa tartine aux boulettes de viande. Lotta aime bien toutes les sortes de tartines et elle ne voulait rien échanger avec personne. Elle mange beaucoup, Lotta. Il n'y a qu'une seule fois où elle n'avait pas d'appétit, c'est quand elle était malade. Maman était désespérée de voir qu'elle n'avait envie de rien. Voila ce que Lotta a dit le soir comme prière avant d'aller se coucher:
- Seigneur, toi qui es si bon, redonne-moi l'envie de manger, s'il te plait. Sauf les boulettes de poisson!...".
Les lecteurs se reconnaitront sûrement dans les caractères et les situations ou peut-être réaliseront-ils en fait en secret qu'ils sont bien pires.

Les illustrations de Béatrice Alemagna croqueront comme il faut la bouille de filous en sous-pulls mangeurs de bonbons, la frimousse de fripouilles en culottes courtes et collants, la goule de chipies aux antennes de cheveux hirsutes.
On prend beaucoup de plaisir à chaque chapitre, profitant de la complicité indéfectible du trio.
On aime.
Ne manquez pas la suite, " Lotta dait tout faire", elle aura cinq ans.

Un texte d'Astrid Lindgren illustré par Beatrice Alemagna, impossible de ne pas y jeter un oeil !
"Lotta la filoute" tient plus du texte illustré que de l'album. Et attention pour les plus petits : l'un des chapitres parle de Noël d'une manière qui peut dévoiler le mystère du Père Noël.

Le personnage de Lotta est très amusant et attachant. Petite fille au fort caractère, elle multiplie les bêtises et les jeux de mots involontaires (la journée de trop vert, la jupe de veau lourd...).
Moins moralisatrices que "Les malheurs de Sophie", les aventures de Lotta sont rafraîchissantes et parfaitement illustrées par le trait plein de vie et les couleurs douces utilisées par Beatrice Alemagna.

Cette lecture partagée nous a fait passer un moment très agréable.

Ce livre est super, les illustrations sont formidables, mais ce n'est pas un album. On aurait aimé encore plus d'illustrations ! En fait, il faut le prendre comme un livre d'histoires (et on n'est plus tellement habitués à ces formats). le Ptitviking (3 ans et demi) a bien aimé, moi aussi, mais je ne sais pas si on le relira !