En 1838,
Edgar Allan Poe publie son unique roman : Les
aventures d'Arthur Gordon Pym. Un récit d'aventure menant au pôle sud.
C'est cette oeuvre qui a beaucoup marqué et inspiré
Howard Phillips Lovecraft (ainsi que d'autres auteurs comme
Jules Verne) pour l'écriture de ces Montagnes hallucinées, un court roman d'exploration scientifique en Antarctique.
Le professeur Dyer et toute son équipe partent donc pour les terres australes, leurs esprits scientifiques motivés par les récentes découvertes des précédentes explorations et la perspective de nouvelles trouvailles dans cette terre désolée mais apparemment riche d'un passé recouvert par les glaces.
Dotée d'une solide organisation et pourvue d'un matériel de pointe, l'expédition de Dyer s'installe rapidement et commence sans tarder ses recherches grâce notamment à de nouvelles techniques de forage.
L'un des scientifiques, le professeur Lake, biologiste, se sépare du reste de l'équipe car il est persuadé de faire une découverte révolutionnaire dans une région inexplorée.
Et alors que Lake découvre en effet des trésors impensables, de hautes montagnes jusque-là inconnues pointent leurs cimes menaçantes sur un horizon incertain.
D'une manière très lovecraftienne, le récit est narré à la première personne (par le professeur Dyer) et rend compte des événements terrifiants s'étant déroulés pendant l'exploration, afin de tenter de décourager une autre expédition prête à se lancer dans la même aventure.
Lovecraft, au travers de son homme de science, pose son récit de manière très minutieuse, avec coordonnées géographiques et données scientifiques.
On est d'emblée accroché par ce témoignage faussement véridique qui nous immerge dans l'installation du camp et des premières découvertes.
Puis
Lovecraft use de son talent pour faire monter la pression, l'inquiétude grandissante, l'incursion de l'innommable qu'il arrive à rendre peu à peu palpable malgré sa conception hors du commun.
Les nombreuses références aux légendes impies, aux peintures de
Nicolas Roerich et aux manuscrits sacrilèges tel que
le Necronomicon appuient le récit de mystères et d'une peur liée à ce qu'inspirent ces sombres archives occultes. Mais malheureusement, ces références alourdissent le récit par leur trop grande répétition.
Pourtant, l'ambiance est unique.
Perdu dans cette contrée désolée avec Dyer et ses hommes, à lutter avec les tempêtes et le climat, se sentant aussi misérable qu'eux, entouré de ces hautes montagnes à la promesse de terreurs sur le réveil, le lecteur est
dérouté, placé devant l'inconnu dans tout ce qu'il a de plus aberrant.
Lovecraft arrive à nous narrer un passé incroyable, tellement fascinant, immense et grandiose, là où l'humanité ne croyait pourtant rien trouver ou alors qu'elle n'avait même pas eu l'audace d'imaginer.
Les montagnes hallucinées mérite son statut de récit légendaire, qui marque à coup sûr le lecteur. La talent de
Lovecraft fonctionne encore une fois, même sur un format plus long que ses habituelles nouvelles.
Malgré les répétitions, il est impossible de ne pas se laisser embarquer dans cette expédition, aux côtés du professeur Dyer et de son assistant, Danforth, qui reviendront profondément marqués de leur périple...
La nouvelle "
Dans l'abîme du temps" complète ce livre.
Assez longue, elle raconte les étranges rêves ou souvenirs (là est toute la subtilité) du professeur Nathaniel Wingate Peaslee, suite à une amnésie de plusieurs années.
Un récit formidable où, à l'instar de celui des Montagnes hallucinées, le protagoniste est confronté à d'incroyables révélations concernant une civilisation inconnue, immémoriale. On y croisera d'ailleurs le professeur Dyer sur une autre terre désolée et antique.
L'imagination de
Lovecraft y déploie un luxe de détails tout droit sortis de ses idées les plus folles et nous happe encore une fois avec délice dans une histoire inoubliable.