Février 1951. Le Roi Jean est en pleine forme. Il ne s'en laisse pas compter. Pas de pile ou face, pas de " pari ", mais la raison. Pourtant - et c'est là une question capitale - n'a-t-il pas été trop raisonnable, n'aurait-il pas pu tenter alors ce qu'il fit ensuite, quelques mois après, dans des conditions tellement plus dramatiques et dangereuses ? Car, entre-temps, les Viets s'étaient complètement " regonflés ".
En fait, malgré toutes ses vantardises, malgré tout ce qu'il avait raconté dans les conférences de presses sans y croire complètement, de Lattre avait été à Vinh Yen bien plus vainqueur qu'il ne le pensait. La vérité, c'était que cette victoire lui avait fait peur. Et pourtant, sans qu'il le sache, les Viets, même si Giap avait arrêté les frais dès qu'il avait pu, étaient presque au bord de l'effondrement, en tout cas très mal en point. Un " coup " alors, un raid massif, aurait peut-être pu les achever.
page 520
De Lattre sait bien que tous ces messieurs s'abominent entre eux ; mais il croit que cela n'empêche pas les arrangements, même plâtrés, comme en France. Et puis il est là, avec sa poigne. Comment lui désobéir ? Il ne s'aperçoit pas qu'en Asie les haines sont encore bien plus inexpiables qu'ailleurs, que les " oui " et les promesses ne signifient rien, que ce ne sont que des ruses de guerre, comme au Moyen Age. Les Jaunes ne cèdent jamais, ne pardonnent jamais vraiment. Leur seul but, tout ce qu'ils comprennent, c'est la tromperie et l'écrasement. Tout ce qu'ils aiment, c'est le jeu, le risque, miser sans relâche pour tout empocher. Tout n'est que poker aussi, l'ancien confucianisme, la dialectique nouvelle, la spéculation éternelle de l'argent , du plaisir et de la mort. En tout cela, Bao-Daï est quand même le maître, bien plus que le général ne le croit. Evidemment, sans parler d'Ho Chi Minh, un " as " lui aussi.
page 456
Je n'ai jamais vu un acteur réussir une "entrée" comme de Lattre de Tassigny en Indochine. D'emblée, il campe un personnage du répertoire de Corneille - un Horace en moins vieux et en général à quatre étoiles, mais aussi farouche. Son rôle n'est pas celui de la Haine. C'est celui du Dédain.
Jacqueline Duhême Une vie (extraits) conversation avec Jacqueline Duhême à la Maison des artistes de Nogent-sur-Marne le 8 février 2020 et où il est notamment question d'une mère libraire à Neuilly, de Jacques Prévert et de Henri Matisse, de Paul Eluard et de Grain d'aile, de Maurice Girodias et d'Henri Miller, de Maurice Druon et de Miguel-Angel Asturias, de dessins, de reportages dessinés et de crobards, d'Hélène Lazareff et du journal Elle, de Jacqueline Laurent et de Jacqueline Kennedy, de Marie Cardinale et de Lucien Bodard, de Charles de Gaulle et du voyage du pape en Terre Sainte, de "Tistou les pouces verts" et de "Ma vie en crobards", de Pierre Marchand et des éditions Gallimard, d'amour et de rencontres -
"Ce que j'avais à faire, je l'ai fait de mon mieux. le reste est peu de chose." (Henri Matisse ).
"Je ne sais en quel temps c'était, je confonds toujours l'enfance et l'Eden – comme je mêle la mort à la vie – un pont de douceur les relie." (Miguel Angel Asturias)
+ Lire la suite