Je remercie les éditions Calmann-Lévy et NetGalley qui, en acceptant ma demande, me donnent leur bénédiction pour la rédaction de la présente chronique.
Si vous cherchez dans le dico (le Larousse en l'occurrence) le mot
apocryphe, vous trouverez les définitions suivantes :
Se dit d'un texte qui n'est pas authentique.
Se dit de tout écrit qui, se présentant comme un livre inspiré de Dieu, ne fait pas partie du canon biblique juif ou chrétien.
Alors le roman de
René Manzor est-il vraiment
apocryphe ? Si je me réfère à la première définition, la réponse est non ; en effet ce texte est un authentique thriller. En référence à la seconde définition je serai tenté de répondre à la normande ni oui, ni oui, mais aussi oui et non ; l'inspiration divine du roman est très lointaine et surtout très libre, de fait il ne peut absolument pas prétendre faire partie du canon biblique (nul doute même qu'il devrait hérisser le poil des grenouilles et crapauds de bénitier). Il n'en reste pas moins que
Apocryphe est un roman divinement agréable à lire et diaboliquement addictif.
En combinant des personnages historiques (Pilate, Caïphe ou encore Caligula), des personnages bibliques (Barabbas ou Joseph d'Arimathie par exemple) et des personnages issus de son imaginaire,
René Manzor s'invite (s'immisce même) dans l'Histoire et la revisite sans pour autant en modifier fondamentalement le cours. Un pari sacrément osé, pour ne pas dire complètement fou.
Pour ceux qui l'ignoreraient encore je revendique haut et fort mon athéisme et suis totalement hermétique (pour rester poli) à tout ce qui se rapporte à la religion ; c'est donc curieux, mais pas franchement convaincu que je me suis lancé dans la lecture de ce bouquin semblable à nul autre. Et le miracle s'est produit ! Saint René m'a donné la foi en son évangile
apocryphe…
Je n'ai pas eu besoin de réciter une palanquée de pater noster et une tripotée d'ave maria avant d'être touché par la grâce, le charme a opéré dès les premières pages et ne m'a plus lâché avant que je ne referme ce bouquin.
J'ai beaucoup aimé le trio composé de David (et l'impétuosité de son jeune âge), le fils de Jésus (Yeshua) et Marie Madeleine (Marimane de Magdala), Longinus (qui incarne plutôt la force tranquille, du moins aussi longtemps qu'on ne le pousse pas à bout), un ancien légionnaire converti qui a juré de protéger le jeune garçon et Farah, une jeune esclave affranchie par la force des choses qui ne manque ni de ressources ni de répartie.
René Manzor apporte le même soin à tous ses personnages, qu'ils soient historiques, bibliques ou fictifs ; il saura vous les rendre sympathiques ou a contrario totalement antipathiques (avec une mention spéciale à Ponce Pilate qui est juste exécrable de la première à la dernière page) selon les besoins de son intrigue.
Et quelle intrigue ! L'auteur nous plonge dans un véritable péplum biblique sur fond de chasse à l'homme, un thriller truffé d'action et de batailles épiques (celle du fort Garizim est un morceau d'anthologie). On sent que
René Manzor est aussi scénariste et réalisateur, son écriture est très visuelle, en lisant le roman on a l'impression de voir la scène se jouer sous nos yeux.
Mais l'auteur ne se contente pas d'enchaîner les bastons, ses personnages seront amenés à se poser des questions, voire même à douter, si leurs réflexions s'intègrent alors parfaitement à l'intrigue, elles sont pour beaucoup tout aussi valables de nos jours.
Ce roman est un sacré tour de force qui doit beaucoup au formidable talent de conteur de son auteur qui, au fil des pages, parvient à nous divertir avec brio, mais aussi avec beaucoup d'intelligence. Un roman totalement maîtrisé qui force le respect.
Je craignais quelques envolées mystiques, ce qui eut pour moi été rédhibitoire, il n'y en a que peu et, là encore, elles sont parfaitement intégrées à l'intrigue, à aucun moment
René Manzor ne tombe dans le piège du prosélytisme.
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