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sur 3495 notes
Le titre fait référence à la chanson « Les lacs du Connemara » que Sardou chantait dans les années 80. Une chanson nostalgie qui rappelle l'époque de l'adolescence.
Le lecteur suit les protagonistes de cette histoire dans leur vie de quarantenaire et les retours sur leur adolescence. Il y a Hélène, la surdouée qui a su s'extraire de sa classe sociale modeste grâce à des études supérieures. Et ça a marché. Après un début d'une carrière prometteuse à Paris, elle fait un burn-out et se retrouve senior manager dans une boite de conseil dans l'est de la France. Elle passe sa vie à courir les rendez-vous, à remplir des power point et faire défiler des slades. Tout cela en jonglant avec sa vie de famille car son mari, cadre supérieur, n'est pas souvent là pour leurs deux filles.
En alternance, on suit aussi la vie de Christophe, qui, depuis son divorce, vit avec son fils chez son père, dans une petite ville de province qu'il n'a jamais quittée. Il a u emploi de commercial et vend de la nourriture pour chiens. Il n'a pas brillé à l'école mais a eu son moment de gloire lorsqu'il a été, pour un temps très court, star du hockey sur glace de la région.
Ces deux-là, qui sont à un tournant de leur vie de quadragénaires, dans un flottement assez déprimant, vont se recroiser. Car ils se connaissent de l'époque du lycée et des fêtes entre ados, ce temps où Christophe était le jeune champion adulé par les filles et Hélène l'adolescente mal dans sa peau qui ne rêvait que de départ.
La réussite de l'une et la médiocrité d e l'autre les a placés dans des classes sociales éloignées et, malgré ou à cause de leurs destins que tout oppose, ils vont croire qu'un nouveau départ est possible.
L'histoire est construite avec des flash-back sur leur adolescence, leur vie en famille. On comprend mieux comment s'est construite leur personnalité. Et ce nouvel amour, comme un élan pour repartir, ressemble à cette chanson de Michel Sardou, pleine de la nostalgie d'un temps révolu.

L'auteur a épinglé la vie de l'entreprise avec ses enjeux et sa « novlangue corporate », parfois cela frise la caricature. Je me suis prise au jeu du récit avec ses protagonistes inquiets et qui se retournent sur leur passé mais, très vite, je me suis lassée de ce ressassement qui n'en finit pas, de ces atermoiements et de ces différences de classe un tantinet trop appuyées.
Lecture mitigée et déception car je m'attendais à plus de profondeur.


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Il y a tellement de choses à dire sur ce roman. En surface, bien sûr cette histoire d'amour entre Hélène qui a tout fait pour partir de cette petite ville médiocre et Christophe qui est resté, sans ambition que celle de vivre son histoire avec son premier amour. Entre eux cette chanson de Michel Sardou qui survit à toutes les générations, tous les mariages, toutes les fêtes. Celle qui, soi-disant, parle d'un lac. Mais cette histoire d'amour est glauque, c'est un résidu d'un désir d'adolescente. Leurs rencontres, leur intimité, rien n'est naturel et comme dans la vie professionnelle, c'est une représentation, une compétition. Elle est où la tendresse ? Pourtant pour eux c'est une bouffée d'air frais dans une vie compliquée. Hélène a fait un burn out et se rend compte que l'argent ne fait pas vraiment le bonheur et Christophe est séparé, apprend que son enfant va partir loin et son père chez qui il vit est atteint de cette maladie dont on parle tant : Alzheimer. Que du bonheur vous dis-je. Alors à travers ses deux personnages, on dissèque tous ces passages qui font une vie : l'enfance, l'adolescence, la honte de ses parents, les amis, les amours, les rencontres, les enfants, puis le travail, celui d'antan fatiguant et sain, et celui de maintenant avec ses ambiances délétères, ses injonctions contradictoires, ses bassesses entre collègues et ses histoires de cul, les collectivités territoriales qui font le jeu au milieu. C'est déjà beaucoup et le ressenti est bizarre car on a l'impression de lire sa vie en partie mais comme une bête monstrueuse et insidieuse, le social-politique englue et recouvre tout, le grignotage des acquis sociaux et des avantages année après année malgré les luttes de moins en moins présentes car la fatigue est là, le ras le bol et puis il faut lutter aussi contre l'extrême droite qui monte, monte, alors le gouvernement en place met les gens en face de leurs responsabilités et ils votent pour un Président qu'ils ne voulaient pas. Les lotissements avec ses propriétés bien délimitées où les gens sont persuadés d'avoir tous les droits au nom de la liberté.

Quand vous avez lu tout ça, vous êtes déjà dans un drôle d'état, essayant de reprendre votre respiration, essayant de vous retourner sur votre vie pour voir si c'est pareil, et là le coup final, la mise à mort : le mariage et sa fête. le mariage parce que qu'il y a un enfant en route, sur un malentendu, sans réelle histoire d'amour bien sûr, la cérémonie à la mairie vite expédiée, la salle des fêtes éloignée en pleine campagne et déjà on cherche des responsables qui vont rester sobres pour raccompagner les fêtard, la bouffe en quantité et insipide, les jeux débiles, celui de la jarretière, les enfants sans surveillance, l'auteur nous a évité le tragique fait divers, l'alcool qui coule à flot, les rails de coke dans les sanitaires, la musique trop forte et la décadence, l'accident inévitable et la remise en question de cette histoire d'amour bouffée d'oxygène, résidu d'un désir d'adolescente.

La vie continue dans cette petite ville et les autres car il y a souvent une suite, des chemins tortueux, des évidences lumineuses ou une médiocrité persistante, des retrouvailles fortuites et non désirées où la première chose que l'on a envie de faire c'est fuir, au bout d'un rayon dans un magasin de bricolage et on se demande alors pourquoi ?

Je suis sortie de cette lecture avec un drôle de ressenti, l'impression d'avoir passé un long moment dans la machine à laver sur le cycle essorage. Cela fait longtemps que je n'avais pas lu une telle fresque sociale. L'auteur, d'une écriture puissante, nous met en pleine face ce que nous ne voulons pas voir, c'est flamboyant et déroutant.
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Et le vainqueur est ? Michel S.....Pardon Nicolas Mathieu
Je viens de finir le plus beau livre que j'ai lu ces derniers temps. Je partais il en vrai en terrain favorable ayant beaucoup aimé ses deux romans précédents. Mais j'ai vraiment adoré celui-ci. Et ce n'est pas ici une formule creuse. Un roman impressionnant de réalisme, de profondeur, d'humanité. Un livre qu'il serait inutile et dangereux d'adapter au cinéma tant nous semble voir l'histoire se dérouler sous nos yeux.
Epinal, le hockey-sur-glace, Nancy, les écoles de commerce, la fusion des régions, les différences culturelles, la paternité, alzheimer...Un roman qui parle de tout cela magnifiquement. On n'est pas prêts d'oublier les personnages principaux et certaines scènes resteront durablement gravées en nous (je n'en dis rien pour ne pas spoiler le livre).
J'ai oublié l'essentiel, les qualités d'écriture du livre. On pourrait, ce n'est pas une formule, mais j'ai un peu la flemme je dois le dire, extraire des centaines de phrases superbes. Quel style ! J'ai commencé à y penser et ai renoncé devant le nombre. A-t-on le droit de citer tout un livre ? Il me semble que non, et dans le doute, je me suis abstenu.
Certains éléments du livre sont semble-t-il autobiographiques (il a parlé dans télérama récemment du retour avec son fils le dimanche soir pour le ramener chez sa mère) mais il ne nous raconte pas sa vie, il construit un roman puissant et universel, qui parle de chacun d'entre nous, et à chacun d'entre nous. On retrouve chez lui des thématiques que l'on retrouve chez d'autres (Aurélien Bellanger, Houellebecq...), mais pour moi c'est vraiment incomparable.
Un seul reproche, celui de nous mettre dans la tête une chanson qui est ensuite difficile à en déloger. Mais une fois le livre terminé ce titre prend tout son sens, à l'image du reste. C'est magnifique. Avec Ouistreham, Pas son genre, un livre qui peut-être nous incite à réfléchir aux rapports sociaux de manière forte et salutaire.
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Hélène, bientôt 40 ans, sur le papier, elle a tout, la maison d'architecte, le job à responsabilités, une famille comme dans Elle, un mari plutôt pas mal. Reste ce truc indéfinissable qui la mine, une lézarde qu'elle trimballe, l'impression d'être vieille. Christophe, lui, n'a jamais quitté le pays où il a grandi avec Hélène, mais sans se soucier de réussite, il vend de la bouffe pour chien, rêve de reprendre le hockey de ses 16 ans et croit encore que tout est possible.

Nicola Mathieu prix Goncourt 2019 pour « Leurs enfants après eux » poursuit sa fine analyse de la société en racontant avec Connemara le parcours de deux quadragénaires, deux âmes à la dérive, entre deux milieux sociaux, entre le passé et le présent. Cette évocation d'un couple adultère en proie au malaise existentiel est une fulgurante chronique sociale. Nicolas Mathieu décrit avec justesse et empathie la mélancolie d'avoir quitté l'adolescence, le temps qui passe, inexorable et cruel, les rêves inaboutis. Observateur précis, il évite les clichés, tout sonne juste, le fonctionnement des entreprises et des administrations, leur implacable logique capitaliste, l'adolescence où l'on trouve que sa vie est trop étroite, le désir de la réussite sociale, les scènes d'amour crues. Une fois de plus Nicolas Mathieu réussit avec talent à explorer l'intime d'une France dont on entend rarement la voix.
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La nostalgie imprègne ces pages qui oscillent entre présent au passé et passé au présent. L'adolescence des deux héros, marquée par la découverte de soi, de l'autre et le désir de grandir, vient rythmer leur morne quotidien de quarantenaires. À deux extrémités de l'échelle sociale, la lassitude est désormais la même, l'envie de rompre la monotonie tout en retrouvant ces jours enfuis, cette douceur de la jeunesse pourtant si vite chassée pour embrasser une vie d'adulte qui s'étiole déjà (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2022/02/01/connemara-nicolas-mathieu/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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Quatre ans après avoir obtenu le prestigieux prix Goncourt avec "Leurs enfants après eux", Nicolas Mathieu nous reviens avec un troisième roman "Connemara" au titre éponyme inspiré directement de l'hymne de Michel Sardou. Nicolas Mathieu n'a pas son pareil pour dépeindre une situation sociale difficile, celle des laisser pour compte, des gens de peu, des oubliés de nos sociétés. Ici aussi l'auteur reprend son ouvrage là où il l'avait laissé pour son précédent roman. Ici aussi le désenchantement est crépusculaire, les pavillons des petites villes sont gris, les habitants usés par les plans sociaux, l'oubli, le temps qui passe, trop occupé à oublier leurs soucis dans les bars, les petits resto d'antan. Une petite ville de l'Est de la France figée, comme si le temps s'était arrêté. Nous allons suivre tour à tour Christophe et Hélène, nés tous les deux dans un milieux ouvrier où l'on est habitué à prendre des coups, à serrer les dents face à l'injustice de leurs conditions. On parle peu, les attitudes et les regards se suffisent. Hélène n'a depuis l'adolescence qu'une seule envie : s'extraire de cet endroit, fuir cette ville et tous ces gens. Une sorte de honte la ronge, elle souhaite faire de belles études pour avoir un cadre de vie agréable, un salaire conséquent, une belle maison, des enfants, un mari. Ce rêve est accessible, l'ambition ne l'effraie pas bien au contraire. Hélène réussi et elle vit à présent dans la plénitude de ses quarante ans. Mais rien n'est simple, cadre supérieure, elle gagne très bien sa vie. Mais pourtant, il lui manque l'essentiel : l'amour. Son mari et elle ne se voit presque jamais, la fatigue des enfants, le boulot qui épuise et créé des tensions. Hélène se cherche. Lorsqu'un jour, par hasard, elle aperçoit Christophe, toute son adolescence refait surface. La vie passe si vite et Christophe ne s'en rend pas toujours compte, lui qui n'a jamais voulu quitter sa ville, lui le père divorcé avec un enfant qu'il voit de moins en moins du fait d'une séparation qui se passe mal. Christophe voit ses potes, il boit des bières, sniffe un peu de temps à autre pour oublier. La tristesse est là, lancinante et elle le broie. Il vit chez son père. A quarante ans, il souhaite reprendre le hockey sur glace dans son club, celui qui l'a vu grandir, lui qui était la star locale de ce sport, celui qui faisait tourner la tête aux jeunes filles. Christophe profite, il est au pinacle mais la volonté va lui manquer, où peut-être ce brin de chance qui fait basculer sa vie d'un côté ou de l'autre. Ce virage, Christophe L a manqué. C'est un roman sur l'abandon, celui des rêves et des lendemains qui déchantent, sur l'irruption de l'amour entre deux êtres si différents, si éloignés et pourtant si proche. Il y a comme une contradiction lorsque l'on y pense. Nicolas Mathieu en romancier talentueux qu'il est, nous plonge dans les tumultes de la vie, le poids des choix, le renoncement ou à l'inverse la réussite mais tout cela n'est qu'une façade, à l'intérieur d'eux mêmes, les personnages de cette histoire sont troublant car ils nous invitent à l'introspection car nous pouvons tous, selon les aléas de la vie, être davantage Christophe ou bien au contraire Hélène. Ce roman est formidable pour toutes les raisons explicitées plus haut. Nicolas Mathieu s'inscrit comme l'un des auteurs majeurs et il confirme, s'il en était besoin, tout son talent.
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A presque quarante ans, Hélène doute de sa réussite. Elle a quitté sa petite ville des Vosges, elle a une belle maison à Nancy, de beaux enfants, un beau mari, un travail valorisant. Mais comment va-t-elle ? Est-elle heureuse ? Pas complètement puisqu'elle cherche sur les sites de rencontres un moyen de s'évader d'un quotidien trop routinier. Lors d'une escapade, elle revoit par hasard Christophe Marchal. Et c'est toute son adolescence qui lui revient. Il était la star du lycée, le beau gosse de l'équipe de hockey, un idéal inaccessible pour Hélène accaparée par ses études. Que reste-t-il trente ans plus tard du héros de ses fantasmes ? Un homme qui n'a pas voulu ou pas pu quitter la région, un père en instance de divorce, un ex-sportif qui prend du ventre. Cette fois, Hélène est en position de force. Elle n'est plus l'adolescente bûcheuse invisible. C'est une femme accomplie, élégante, séduisante, cultivée qui met facilement Christophe dans son lit. Une histoire d'amour est-elle possible entre cette femme qui a tout et cet homme qui espère encore un avenir meilleur … ?

Comme à son habitude, Nicolas Mathieu situe son histoire dans le Grand Est et raconte le clivage entre ‘'la France d'en bas'' et les classes dirigeantes.
Sous couvert d'une banale histoire d'adultère, il se livre à une véritable étude sociologique du pays. Mais qu'on ne s'y trompe pas, derrière un point de vue éminemment politique, on lit tout l'amour et la tendresse de l'auteur pour sa région et ses personnages.
Des personnages qui abordent la quarantaine avec dans le coeur la nostalgie du passé. Christophe veut rechausser les patins, revivre les moments de gloire de sa jeunesse, malgré les kilos en trop, malgré les beuveries avec ses potes, malgré son père qui perd la mémoire, malgré son fils qui va partir loin avec sa mère. Hélène va faire l'amour avec Christophe, pour rattraper les années perdues à étudier, pour prouver qu'elle peut encore séduire, pour montrer que maintenant c'est elle qui a les cartes en main.
Nous sommes en 2017, Macron va faire son entrée en scène. Ce pourrait être l'heure de gloire pour Hélène et ses semblables, ceux qui ont fait HEC, ceux qui brassent de l'air (et des euros), ceux qui vendent du vent. La start up nation va faire exploser la classe politique, valoriser le néant et mépriser les classes populaires. Et pourtant, ils vont continuer à (sur)vivre, à se battre, ceux qui, comme Christophe, pensent qu'il fait bon vivre en province, que quand on n'a rien on peut toujours espérer un peu plus, que rien ne vaut un samedi soir entre potes autour d'une bière à hurler ‘' Terre brûlée au vent Des landes de pierres Autour des lacs, c'est pour les vivants Un peu d'enfer, le Connemara'' avec Michel Sardou.
Encore une fois, Nicolas Mathieu nous propose une vaste fresque sociale, psychologique et quasiment historique. Sa belle écriture se met au service de personnages qui nous deviennent proches, dans lesquels on se reconnait sans peine. Il ne faut rien savoir de la France, de l'Est, du peuple, pour le taxer de condescendance. Au contraire, il est la voix des petites gens, les petites commerçants, les résidents des lotissements, les amis du café du commerce, les sportifs du dimanche, les femmes de ménage, les buveurs de bière, les viandards, les gros fumeurs, les fans de barbecue et de Michel Sardou.
Elle est touchante la France de Nicolas Mathieu. Elle nous prend aux tripes et au coeur, elle nous renvoie aux bonheurs et aux espoirs simples et concrets, à la vie telle qu'elle est.
Un roman sociétal qui nous fait vibrer au son cadencé des lacs du Connemara. Coup de coeur.
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Bien que les livres pessimistes ne soient pas ma tasse de thé, j'ai beaucoup aimé Connemara de Nicolas Mathieu pour sa capacité à décrire le monde d'aujourd'hui, pour ses personnages profonds et son écriture si fluide.
Pas vraiment de rebondissements dans Connemara, plutôt le déroulement de la vie pas tout à fait quotidienne de plusieurs personnes à des moments charnière de leur existence, et des biographies détaillées. Tout est dans les personnages, les lieux et l'écriture.
Nicolas Mathieu n'est pas un grand optimiste, un reproche déjà encouru pour Nos enfants après eux où j'avais vu un peu trop de clichés. le manque de petits éclats de joie, tendresse, couleurs peut donner cette impression. Stagiaire n'est pas une profession. La scène du mariage est emblématique d'une vision tellement noire qu'elle en devient cliché.
Le livre se déroule en Lorraine, région que je ne connais pas du tout, mais dont la description me rappelle par certains aspects le Nord de la France. Et j'imagine que même en Lorraine, comme dans le Nord, il y a des gens attachants et des merveilles culturelles. Ce qu'en montre Nicolas Mathieu ne donne pas vraiment envie de visiter la région.
L'univers d'un cabinet de conseil est parfaitement dépeint (ça, je connais, même si j'étais plus du côté des conseillés que celui des conseilleurs). Eh bien sûr, il n'y a rien de positif dans la vision de l'auteur (bon, peut-être que là, il n'y en a pas beaucoup non plus).
Nicolas Mathieu décrit comme personne le monde contemporain.

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La chanson qui parle d'eux

Le prix Goncourt 2018 poursuit sa fine analyse de la société en racontant avec Connemara le parcours de deux quadragénaires qui se retrouvent dans leurs Vosges natales 20 ans après s'être quittés. Hélène et Christophe vont-ils réussir à se trouver?

C'est un matin comme tous les autres dans la famille d'Hélène et Philippe. Un matin au chronomètre qui commence dès 6h. Après la douche, il faut préparer les céréales des filles, ne rien oublier surtout, et prendre la route. Déjà fatiguée avant d'attaquer la journée. En colère aussi. «Pourtant, sur le papier, elle avait tout, la maison d'architecte, le job à responsabilités, une famille comme dans Elle, un mari plutôt pas mal, un dressing et même la santé. Restait ce truc informulable qui la minait, qui tenait à la fois de la satiété et du manque. Cette lézarde qu'elle se trimballait sans savoir.» Après son burnout à Paris, elle avait réussi à convaincre son mari de partir en province, mais si le rythme nancéen était un peu moins trépidant, les symptômes étaient semblables. Au sein d'Elexia, elle occupe un poste de consultante en ressources humaines, en particulier pour les collectivités territoriales. À près de 40 ans, et avec l'aide de Lison, sa stagiaire, elle se distrait en surfant sur les sites de rencontre, histoire de se prouver qu'elle reste désirable.
Changement de décor et de personnage. Nous sommes cette fois dans les Vosges, à Cornécourt. «C'était une petite ville peinarde, avec son église, un cimetière, une mairie des seventies, une zone d'activités qui faisait tampon avec l'agglomération voisine, des zones pavillonnaires qui champignonnaient sur le pourtour et, au milieu, une place flanquée des habituels commerces: PMU, boulangerie, boucherie-charcuterie, agence immobilière où s'activaient deux hommes en chemisette. À Cornécourt, le taux de natalité était bas, la population vieillissante, mais les finances municipales au beau fixe, grâce notamment aux abondantes taxes que payait une vaste fabrique de pâte à papier au nom norvégien que personne ici n'arrivait à prononcer. Cette prospérité n'empêchait pas le FN d'arriver en tête des premiers tours ni ses habitants de déplorer des incivilités toujours imputables aux mêmes.» C'est là que vit, ou plutôt que survit Christophe, commercial de 40 ans. Seul. S'il avait fini par conquérir Charlie, la fille qu'il avait voulue à tout prix. Charlie qui l'a quitté. Restait ce gosse qui était tout pour lui «et pour lequel il trouvait jamais le temps. le sentiment de gâchis, la lassitude et l'impossible marche arrière. Il fallait vivre pourtant, et espérer malgré le compte à rebours et les premiers cheveux blancs. Des jours meilleurs viendraient. On le lui avait promis.» En les attendant, Nicolas Mathieu remonte dans les jeunes années d'Hélène et Christophe, alors qu'ils étaient élèves dans le même établissement au moment où les exploits de hockeyeur du garçon lui avaient conféré une certaine notoriété.
Comme dans Leurs enfants après eux, Nicolas Mathieu, en retraçant la relation entre Hélène et Christophe, peint d'abord la France d'aujourd'hui. Un tableau de la société et des relations sociales d'une puissante acuité, surtout en cette année 2017, avant des élections présidentielles qui vont bouleverser l'échiquier politique. La politique qui va aussi s'inviter concrètement dans le roman quand le patron d'Elexia se réjouit de la création des nouvelles entités régionales: «Inventer une région, il fallait quand même être gonflé, et ne rien comprendre de ce qui se tramait dans la vie des gens, leurs colères alanguies, les rognes sourdes qui couvaient dans les villes et les villages, tous ces gens qui par millions, le nez dans leur assiette, grommelaient sans fin, mécontents d'être mal entendus, jamais compris, guère respectés, et se présumaient menacés par les fins de mois, les migrations et le patronat, grignotés depuis cinquante ans facile dans leurs fiertés hexagonales et leurs rêves de progrès. Aller leur foutre le Grand-Est pour règlement des problèmes, les mecs osaient tout.»



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Trois ans après l'obtention de son Goncourt, Nicolas Mathieu revient avec un formidable nouveau roman, Connemara qui raconte en parrallèle la destinée de deux personnages habitant dans l'Est de la France, sa région fétiche, entre quête de bonheur et désilusions professionnelles et personnelles.

Hélène est ce qu'on appelle une transfuge de classe . Après un burn out dans les open spaces parisiens, elle revient vivre sur les terres lorraines de son enfance tandis que Christophe, ex enfant prodige du hockey sur glace végète à l'aube de sa quarantaine, entre boulot alimentaire et divorce mal géré ..

Comme dans leurs enfants après eux, Nicolas Mathieu livre un grand roman social sur l'inhumanité du monde de l'entreprise, où la frénésie managériale et son langage singulier et débectant semblent complètement déconnectée du terrain.

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Romancier aiguisé de la casse sociale, plus encore que celui de la classe sociale, Nicolas Mathieu prouve aussi son immense talent pour rendre compte de l'intensité de l'adolescence (à ce titre, on notera que les nombreux flash backs sur l'adolescence sont racontés au présent, alors que le présent est raconté à l'imparfait).

Rarement cette période charnière qui cristallise tous les désirs et les espoirs les plus fous, hélas peu à peu brisés par les réalités du monde adulte n'aura semblé aussi vibrante et touchante que chez Nicolas Mathieu .

Surtout Connemara décrit avec énormément de justesse le vernis de cette France des périphéries urbaines, celle de l'entre deux, une catégorie sociale pas tout à fait populaire, mais pas vraiment classe moyenne non plus, celle des pavillons, celle qui connait la vraie angoisse du lendemain...

Le romancier affiche également énormément de tendresse pour ses personnages, tellement humains dans leurs renoncements et leurs mauvais choix et veut croire en la possibilité d'un amour.

Observateur précis et décapant qui manie avec maestria l'intime et le social, Nicolas Mathieu livre un panorama particulièrement bien senti de la France d'aujourd'hui .
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