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Maïté Billoré (Autre)Isabelle Mathieu (Autre)
EAN : 9782755807080
128 pages
Jean-Paul Gisserot (23/10/2017)
3.36/5   7 notes
Résumé :
Le crime médiéval se présente sous de multiples facettes depuis le délit mineur jusqu'au cas "esnorme". Ce sont les affaires les plus horribles qui retiendront ici notre attention. Parce qu'elles offensent l'opinion publique, qu'elles suscitent la répugnance, la peur mais aussi la curiosité. Ces crimes "horribles" représentent pour les historiens, une porte d'entrée précieuse pour appréhender les mentalités médiévales.
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
"Chaque époque laisse plus de traces de ses souffrances que de son bonheur : ce sont les infortunes qui font l'histoire."
(J. Huizinga, "L'Automne du Moyen Âge")

Comment ne pas être d'accord avec Huizinga ? L'histoire de l'humanité est mouvementée, et on garde davantage en mémoire les éprouvantes périodes des guerres, épidémies, famines et catastrophes naturelles que celles du calme et de la prospérité. Les anciens chroniqueurs et diaristes ne vont pas me contredire, ni tous ceux qui un beau jour vont décrire à leurs petits enfants le monde chaotique aux temps du Covid.
Il en va de même pour la criminalité.
Le crime a toujours existé, mais les registres officiels ne font pas grand cas des innombrables faits mineurs gérés par la "basse justice", souvent réglés à l'amiable ou par une simple amende. Querelles entre voisins, dettes impayées, insultes ou chapardages sont du pain quotidien de nos ancêtres, et cela n'a pas vraiment changé. le fait qu'Oldaric a mis une claque à Gislebert n'est guère passionnant, mais si Gislebert se venge en trucidant Oldaric d'une manière particulièrement atroce, voici ce qui est susceptible de défrayer la chronique et passer à la postérité !
Plus le crime est "horrible", plus il suscite l'indignation publique, et plus il fascine. Il est donc plus que probable que les nombreux témoignages dont on dispose, centrés presque exclusivement sur ces "crimes esnormes", ont largement contribué à l'image d'un Moyen-Âge sombre et violent, et à celle de sa justice cruelle.

Ce court livre s'appuie sur les sources de l'époque, et passe en revue des faits et méfaits criminels qui vont à l'encontre de l'esprit de la société médiévale, de sa morale et de sa foi.
On ne sera pas étonné de trouver d'abord le meurtre et l'infanticide (considéré comme summum de l'horreur), mais aussi les crimes sexuels. le mot "viol" n'existe pas encore, et le sort de filles victimes d'un "rapt" est peu enviable, même au cas où la justice est rendue, car elles sont souvent répudiées par leur propre famille. Cependant, même un meurtrier ou un violeur a plus de chance de se dérober à la punition, contrairement aux diverses déviations (comme le commerce charnel avec un animal), invariablement punies de mort. Ces faits sortent du cadre du crime ordinaire et sont davantage assimilés à l'hérésie, bien plus grave dans une société vivant dans la crainte de Dieu et de ses représentants sur Terre.
Le blasphème tombe dans la même catégorie.
Dans certains procès célèbres, une simple accusation d'un crime politique ou de lèse majesté ne semble pas suffisante pour discréditer la personne et la rendre répugnante aux yeux de la société. On y rajoute habilement et à force d'éloquence impressionnante des accusations de pratiques ignobles et même de sorcellerie. Tel était le cas des Templiers ou de Jeanne d'Arc, condamnée non seulement comme rebelle, mais aussi comme hérétique, apostat et schismatique.
Le suicide est un cas à part. Tout comme n'importe quel meurtrier, le suicidé était souvent traîné aux yeux de tous à travers la ville, parfois même pendu au gibet, sans parler du refus de la terre consacrée.
D'ailleurs, le gibet est hautement symbolique. Même s'il sert moins souvent qu'on ne le pense, il représente la puissance d'un seigneur : plus il possède de "places", plus celle-ci est grande, et les cadavres qu'on y laisse pourrir ont un fort pouvoir d'avertissement.

Qui dit crime dit aussi justice. La justice médiévale est loin d'être sommaire et expéditive, surtout à partir du 13ème siècle; une époque relativement prospère, marquée par un grand essor urbain et économique. Les universités apportent le savoir, on se tourne davantage vers la nature et on étudie Aristote. Un véritable système de justice se met en place, basé toujours sur l'ancien droit romain, mais aussi sur les dix commandements et les préceptes de St. Augustin. le roi reste le justicier suprême, et on peut faire appel à sa clémence. Les officiers royaux, baillis et juristes assurent les procès en bonne et due forme, en tenant des registres et en menant une enquête avec témoignages et preuves. En même temps, la réforme grégorienne renforce le pouvoir épiscopal et donne à l'Eglise certains droits qu'elle ne possédait pas jusque là, comme celui de la torture.

Bref, c'est tout un monde, condensé sur ces 120 pages bourrées d'information. Crimes, justice et punitions (parfois impressionnantes, mais respectant toujours plus au moins la loi du talion); la ville et la campagne, les marginaux, les organisations criminelles, les brigands et les hors-la-loi; les violences des soldats et celles des étudiants; les raisons qui font basculer les gens ordinaires dans le crime... Ajoutez-y de succulents extraits des chroniques de l'époque et des registres judiciaires, et vous en avez largement pour vos 5 euros !

4/5; le livre est vraiment intéressant, mais avec une petite centaine de pages de plus (pour développer certains sujets à peine abordés) il pourrait être excellent.
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Encore un essai, mais là, je savais que c'en était un quand j'ai acheté le livre !!!

Alors premier problème, j'ai lu ce livre après le Roi tué par un cochon de Michel Pastoureau, qui était franchement exceptionnel. du coup, mon avis est subjectivement influencé vers le bas.

Second problème, le titre ! Racoleur, et du coup, pas très en phase avec le contenu. Il ne s'agit pas d'un essai sur les crimes horribles au Moyen-âge, mais d'un essai sur les crimes, les criminels et la justice au Moyen-âge, ce qui de mon point de vue est plutôt mieux, mais bon, ce n'est pas ce qui était annoncé ;-)

Cet essai reste cependant très bien documenté et très intéressant, en faisant une sorte d'inventaire, de catégorisation des types de crime - et fait bien ressortir l'injustice faite aux femmes, guère mieux considérées que des biens meubles, et la description de l'appareil judiciaire.

Ce que je retiendrais longtemps, je pense, c'est d'abord que les exécutions, bien que spectaculaires, étaient beaucoup plus rares que ce qu'on pourrait croire, d'une part, et que des procès pouvaient être intentés aux animaux, oui oui. Des animaux, responsables par exemple de la mort d'un humain, pouvaient être condamnés à mort !

Une lecture très intéressante, que j'aurais davantage appréciée si je l'avais entreprise avant l'autre !
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Le titre de ce livre est mal choisi à mon sens car on ne traite pas ici de cas de crimes horribles mais on fait le point sur le fonctionnement de la justice et la société au Moyen Age en prenant appui sur plusieurs exemples. Si on s'intéresse à cette époque historique, c'est une bonne idée de lire ce livre qui regorge de "savoir". Ce qui est moins agréable ici, c'est la structure non chronologique des exemples et des thèmes. le Moyen Age étant long et donc multiple, il serait intéressant de comprendre l'évolution temporelle de la justice et des moeurs.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
L'interdiction faite aux clercs de verser le sang ou d'occasionner une mutilation de membre sous peine d'irrégularité canonique suffit pendant quelque temps à empêcher les clercs d'appliquer eux-mêmes les procédés ordinaires de la torture. Ils recourent au bras séculier, en déléguant cet exercice à un juge civil tout comme ils le font pour application de peines de mort. Mais dans le cadre de la lutte contre les hérétiques, cette forme de dépendance face aux laïcs dérange et en août 1262, une bulle de pape Urbain IV supprime cet obstacle en autorisant les inquisiteurs à se relever mutuellement de tous les cas d'irrégularité qu'ils pourraient encourir, ce qui revient à autoriser qu'ils pratiquent eux-mêmes la torture judiciaire.
Des règles très précises sont fixées à propos de l'administration de cette dernière. Tout d'abord, comme à l'époque romaine, elle ne peut concerner les fous, les femmes enceintes ou les mineurs. Mais, lorsqu'il y a atteinte aux intérêts de l'Etat, du prince, ou que les crimes sont secrets (sorcellerie, hérésie), ces exceptions ne sont guère respectées.
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Dans les sources, le blasphème est souvent associé à des déviances telles que ivrognerie ou la débauche sexuelle et le champs lexical utilisé est celui de l'animalité. Il sert à déshumaniser ceux qui le profèrent. Prononcés le plus souvent dans les lieux douteux (la taverne, les étuves qui servent de bordel public), les paroles blasphématoires peuvent être suscitées par les vapeurs éthyliques ou une colère excessive. Elles attestent un désordre, une incapacité de l'individu à contrôler son corps, ce qui le rend extrêmement dangereux pour l'ensemble de la société. A Dijon, au début du XVe siècle, une certaine Jehotte la Noire est accusée de maquerellage et de faire régulièrement "noise et débat" au beau milieu de la rue. Un jour, que les voisins lui demandent de faire cesser ces scandales, "elle jure la mort de Dieu et plusieurs autres vilains serments en montrant et détournant son cul devant et contre lesdits voisins". Elle est lourdement condamnée pour cela.
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