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sur 970 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Demeurée seule et sans ressources après la mort de sa mère en ce début de XIXe siècle, la jeune Mary Yellan se voit contrainte de quitter sa région natale pour aller vivre chez sa tante Patience, dont le mari Joss Merlyn tient une auberge. Planté aux quatre vents de la lande sauvage et désolée des Cornouailles, l'établissement a si mauvaise réputation que, déserté depuis longtemps par les voyageurs, son simple nom est devenu synonyme d'épouvante dans la région. Mary y est accueillie par une tante terrorisée, soumise à un époux alcoolique et violent qui menace d'emblée la jeune fille, l'enjoignant à fermer les yeux et à tenir sa langue sur ce qui se passe certaines nuits à l'Auberge de la Jamaïque, lorsque de mystérieux visiteurs s'y donnent rendez-vous.


L'Auberge de la Jamaïque existe bel et bien : l'auteur y a séjourné en 1935 avant d'écrire ce livre, assurant à cet ancien relais de poste, bâti en 1750 et devenu un temps un notoire repaire de contrebandiers, une renommée qui en a fait un haut lieu touristique, classé monument historique. Et s'il y a bien une composante qui fait la force du récit imaginé par Daphne du Maurier, c'est l'ambiance qu'elle a su recréer autour de cette vieille bâtisse isolée, dressant ses hautes cheminées sur un paysage de maigres landes et de traîtres marécages. Tantôt étouffés d'épais brouillards propices à perdre les voyageurs, tantôt lacérés par des vents jouant à l'infini de leur sinistre registre de gémissements, de glapissements et de hurlements, parfois fugitivement tachés de l'ombre mouvante des nuages filtrant les pâles rayons du soleil, mais le plus souvent trempés par une sournoise pluie fine ou battus par des trombes glacées, ces lieux ne sont le rude habitat que de quelques moutons et chevaux sauvages, mais aussi d'une humanité éparpillée dans quelques pauvres fermes solitaires, à plusieurs lieues de toute agglomération.


Une telle sauvagerie est bien sûr le terreau idéal de toutes les croyances et superstitions. Mais les rumeurs effrayées qui pointent à mots couverts l'Auberge de la Jamaïque semblent d'emblée corroborées par la peur manifeste de la tante Patience et par la brutalité dangereuse du patibulaire et fruste Joss Merlyn. Piqué par le mystère et talonné par l'angoisse, l'on se retrouve dès lors happé par les péripéties dans lesquelles Mary se lance tête baissée, très loin d'anticiper les développements que le lecteur saura, pour sa part, assez facilement deviner bien avant le twist final. Et même si parfois un peu facile et prévisible, ce roman porté par un grand souffle d'aventure, un soupçon de féminisme, et surtout par l'atmosphère magnifiquement âpre de ce bout de terre rongé par la mer et râpé par le vent, refuge de bandits aptes à frapper les imaginations, nous emporte, séduits et frissonnants, dans une lecture captivante, qu'Alfred Hitchcock a d'ailleurs adaptée au cinéma.


Certes dans un registre très différent, ces pages m'en ont à plusieurs reprises évoqué d'autres, peignant aussi superbement la lande et ses âmes perdues, cette fois au coeur du Cotentin, avec Les trois vies de Babe Ozouf de Didier Decoin et L'ensorcelée de Jules Barbey d'Aurevilly. Trois belles lectures pour explorer ces terres mélancoliques, rudement situées entre ciel et mer souvent chagrins.

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C'est un classique de ceux qui appartiennent à ces chefs d'oeuvre dont on dit volontiers qu'on devrait les relire, même quand on ne les a jamais lus.
C'est donc fait, et je n'ai pas le souvenir d'avoir déjà parcouru cette histoire , qui, du fait de la période où se déroule l'intrigue mais aussi, et là c'est plus étonnant, par le style d'écriture , qui évoque Bronte ou Collins. Bien sûr, les lieux évoqués renforcent ces analogies.

On est dès les premières lignes dans l'ambiance : la pluie est glaciale, la route cahoteuse, il fait nuit. Les passagers qui subissent les accidents du chemin et l'humidité du véhicule ne sont pas à la fête. Même le cocher vit un enfer. Dans l'habitacle, une jeune femme vient de quitter son village natal, pour rejoindre sa tante dans une auberge . S'occuper d'une ferme seule, en Cornouailles au 19è siècle, même si l'on séjourne dans le village de son enfance, est trop difficile.

Mais son arrivée dans cette bâtisse lugubre, fuie et honnie par tous les habitants de la région, car l'on se doute qu'il s'y passe des choses pas très catholiques, lui laisse entrevoir des lendemains qui ne chantent pas. Sa tante est dans un état lamentable, sous l'emprise d'un homme alcoolique, et violent . Les activités qu'il pratique et qui ont lieu à la nuit tombée plongent Mary dans une terrible angoisse.
C'est peu à peu que les faits se révèlent, peu à peu élucidés par Mary. le déroulement du récit évoque ainsi l'ambiance d'un thriller, même si ce terme n'existait pas lorsque Daphné du Maurier a publié le roman. Même si l'on finit par se douter du fin mot de l'histoire, le lecteur ne découvre le pot aux roses que dans les dernières pages.

Un bon point pour l'ambiance, habilement calquée sur les états d'âme de Mary. Les descriptions des paysages sont remarquables et on visualise sans difficulté les landes escarpées et les marécages embrumés.

Par contre la désuétude est manifeste dans les dialogues : on n'arrive pas à croire un seul instant qu'un être aussi rustre que l'aubergiste parle une langue aussi châtiée, même si on imagine que le vouvoiement et le passé simple soient une justice rendue à la langue anglaise.

Expérience très intéressante et très agréable, malgré la faiblesse des dialogues, largement rattrapée par le pouvoir d'évocation d'une ambiance qui n'est pas sans rappeler la lande bretonne, à la morte saison quand vent, brouillard et pluie noient les contours des paysages .
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Mystère, secret, glauque, poésie, ambiance, voici les pensées qui me viennent à l'évocation de ce roman, glauque, assurément, lugubre certes, mais tellement beau ! Tellement mystérieuse, cette lande des Cornouailles qui rappellent les récits au coin du feu, ou en groupes, récits dont le but était de capter l'attention de l'auditoire, et d'éveiller des sensations de peur, de produire quelque frisson et d'attiser la curiosité.

Si tel était l'objectif de Daphné du Maurier, je dois avouer que son but fut atteint en ce qui me concerne ! J'ai adoré ! Adoré l'ambiance et les descriptions de cette lande qui m'a toujours attirée, me suis délectée de l'écriture poétique de l'auteure qui par la pensée, nous offre une représentation de la lande digne des impressionnistes, choisissant ses mots comme si elle observait une palette de coloris auxquels elle mêle des élément naturels : vent, pluie, nuages et brume comme si tout était tristesse et mélancolie, que l'on évolue sur cette côte de Cornouaille ou que l'on pénètre dans le mental des personnages.

Daphné du Maurier a vraiment su jongler avec la psychologie de ses acteurs : Personnages au tempérament fort, forgés dans ce milieu hostile, avec pour contraste la faiblesse de la tante Patience, et une héroïne déterminée et combattive quoique jeune et sans expérience, ce qui lui jouera des tours, personnages révélateurs de la misère et des aptitudes à la nuisance de certains êtres humains, personnages qui travaillent dans l'ombre, gardant leurs secrets dans un texte qui ne fait que générer impatience et questionnement du lecteur.

Un très beau roman que je suis heureuse d'avoir enfin lu.
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Comme son nom l'indique, l'histoire de L'Auberge de la Jamaïque se situe bien en... Cornouaille anglaise.
Nous sommes au début du XIXème siècle, vers 1815. Perdue sur la lande pluvieuse où le vent souffle sans trêve dans les bruyères, se dresse l'Auberge de la Jamaïque.
La jeune Mary Yellan, vingt-trois ans, vient de perdre sa mère. Désormais orpheline et pauvre, elle accomplit la promesse faite à sa mère avant que celle-ci ne meurt, celle de quitter la ferme familiale, le pays de son enfance et de partir rejoindre sa tante Patience mariée à un aubergiste, sur la côte désolée de l'Atlantique, aux confins de la Cornouaille...
De sa tante Patience, elle se souvient d'une jeune femme belle et enjouée. Lorsqu'elle arrive à l'Auberge de la Jamaïque c'est une tout autre vérité qu'elle découvre. La tante est une femme vieillie avant l'âge, amaigrie, malheureuse, terrorisée par Joss Merlyn son époux alcoolique et violent.
Quant au lieu, celui-ci n'a d'auberge que le nom. C'est un endroit désolé, qui semble avoir mauvaise réputation auprès de la population locale, planté dans un décor inquiétant pétri de landes et de marécages, étreint par les brouillards, battu par les tempêtes. Autrefois, l'Auberge de la Jamaïque était un ancien relais de poste sur la grand-route qui mène de Truro à Penzance. Désormais, les cochers craignent le lieu comme la peste et si par malheur un voyageur a la mauvaise idée d'y faire escale comme la jeune Mary Yellan, on le dépose sur la route pour le laisser terminer à pied son chemin vers le bâtiment en retrait... Même les chevaux semblent craindre l'endroit...
Autant vous dire qu'ici le paysage est un personnage à part entière du roman. Il n'est pas sans m'évoquer celui déjà rencontré dans Les Hauts de Hurle-Vent d'Emily Brontë, ou bien encore l'Ensorcelée de Jules Barbey d'Aurevilly.
Mais qu'en est-il de l'histoire et de ses protagonistes ?
Dès les premières pages, j'ai été happé par un récit prenant, envoûtant, pour ne pas dire addictif... Incontestablement, Daphné du Maurier sait nous raconter une histoire, poser une ambiance. le roman tient beaucoup du ressort narratif d'un thriller.
Dès son arrivée à l'Auberge de la Jamaïque, Mary Yellan soupçonne de terrifiants mystères. D'emblée le ton est donné par l'aubergiste à Mary, le conseil tient davantage de la menace, celui de ne pas poser de questions sur les visiteurs de l'auberge. Auberge dans laquelle, d'ailleurs, aucun vrai voyageur ne s'est arrêté depuis longtemps... Mais qui sont donc ces étranges personnes qui fréquentent parfois l'endroit la nuit ? Des contrebandiers douteux ? Chut... Je ne vous en dis pas plus...
Mais c'est sans compter sur l'esprit rebelle de la jeune femme qui a le courage de tenir tête à l'horrible homme.
Et tout violent, tout alcoolique qu'est Joss Merlyn, il n'en est pas pour autant idiot et décèle rapidement l'intelligence dans le regard de sa nièce par alliance.
Car par-delà les marécages et les pierres acérées, il y autre chose dans le décor, il y a dans l'air un défi vorace qui aiguillonne Mary vers l'aventure, vers son destin, tandis qu'au loin dans l'océan bouleversé, des navires se fracassent et que les cris des naufragés continuent de résonner dans la mémoire de ceux qui ont le malheur de les entendre.
Ici saluons l'inspiration de Daphné du Maurier dans la manière de dessiner le personnage principal du roman, cette jeune femme campée avec beaucoup de caractères et de défi dans l'âme, avec cette touche de féminisme dans l'encre de sa plume et qui renverse les codes du genre de l'époque.
On imagine des personnages qui ressemblent au paysage dévasté par les éléments, à leurs regards tordus comme les touffes de genêts, à leurs silhouettes ployées par la bourrasque qui ne cesse jamais de souffler, à leur esprit détourné, à leurs pensées peut-être devenues mauvaises à force de vivre entourés de marécages et de granit... On imagine cela aisément à travers les pages broyées par les vents et c'est la puissance d'évocation de Daphné du Maurier qui nous restitue cette sensation captivante comme dans une vision cinématographique.
Roman essentiellement d'atmosphère dans la description âpre du paysage qui façonne les protagonistes de l'histoire, son intrigue pourrait paraître un tantinet convenue et prévisible mais il y a ce personnage haut en couleurs de Mary qui porte le récit et que je soupçonne d'incarner une forme d'alter-ego de l'autrice.
Tiens ! Je vous entends déjà me demander de manière pertinente : « Mais pourquoi la Jamaïque ? » Très bonne question les amis, je vous remercie de me l'avoir posée...
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Je gardais un très bon souvenir de ma première lecture de ce roman, chaleureusement conseillé par Maman qui l'avait dévoré étant jeune. Cette découverte remonte déjà à plus de vingt ans et mon opinion n'a pas changé pour autant.

"L'auberge de la Jamaïque" est un roman d'aventures à suspense très efficace, et séduisant pour qui, comme moi, aime les landes brumeuses et sauvages de Cornouailles. Lande qui, à l'instar des "Hauts de Hurle-Vent", prend ici la place d'un personnage à part entière. Les descriptions pleines de saveur de Daphné du Maurier, elle-même énamourée de ce coin de terre, sont saisissantes de réalisme : on a froid, on a peur, on sent chaque odeur, on ressent chaque souffle de vent, on entend le ressac de chaque vague ; tout ceci rend le roman extrêmement vivant. Et sans cela, la narration s'enliserait sans doute un peu dans les dangereux marais où ne s'aventurent que les moutons et les poneys sauvages car l'atmosphère est étouffante, c'est presque un huis-clos à ciel ouvert qui donne l'impression d'être enfermé.e dehors par un temps de chien, en compagnie d'une petite poignée de personnages, antipathiques pour la plupart.

Je ne dirai rien du pitch, il est suffisamment connu. "L'auberge de la Jamaïque" est juste en dessous de "Ma cousine Rachel" pour la qualité narrative et juste au-dessus de "Rebecca" pour le suspense et le rythme, voici mon avis tout à fait subjectif, n'ayant pas particulièrement apprécié ce dernier roman pourtant considéré comme le chef-d'oeuvre de l'auteure.

Toujours grâce à Maman qui m'a emmenée, enfant, gambader dans les landes au milieu des moutons et des poneys sauvages entre Land's End et Tintagel, mon immersion dans "L'auberge de la Jamaïque" aura été totale et l'effet page-turner aura parfaitement fonctionné. Toutefois, je recommande cette lecture en automne ou en hiver, saisons du roman, pour bien s'imprégner de l'ambiance ; en collection printemps-été, l'effet risque d'être moins séduisant.


Challenge MULTI-DÉFIS 2020
Challenge PLUMES FÉMININES 2020
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Ce n'est que ma deuxième lecture de Daphné du Maurier, mais elle conforte mon appréciation pour la modernité que ses récits dégagent par rapport à l'époque où ces romans ont été écrits, tout en jouant, paradoxalement, sur le genre gothique et l'ancrage dans le 19ème siècle.
Dans celui-ci, contrairement à Rebecca, l'héroïne se dévoile dès le début du roman comme une jeune femme forte, indépendante et intelligente qui ne se laisse pas manipuler par les hommes aussi inquiétants soient-ils. Car son oncle Joss, franchement, est clairement flippant, tout comme l'est son auberge, perdue dans les landes marécageuses des Cornouailles. Atmosphère atmosphère!

C'est donc une femme résolument moderne qui est dépeinte ici, même si je ne doute pas que des femmes comme elles existaient déjà dans des temps beaucoup plus patriarcaux et on ne peut que l'admirer de résister ainsi aux différentes tentatives de domination des hommes qui l'entourent, à une époque où une jeune femme célibataire et orpheline se retrouvait, comme un enfant, sous la tutelle d'un étranger pour ne pas mal finir.
J'ai été séduite par les personnages, tous aussi ambigu les uns que les autres, ainsi que par ce cadre angoissant dans lequel se déroule le récit. Mais, comme dans Rebecca, il me manque ce petit truc, ce je ne sais quoi que je ne peux définir pour que ce soit pour moi une grande oeuvre.

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L'Auberge de la Jamaïque n'a rien d'un ouvrage racoleur qui vous happe dès les premières pages. le lecteur devra faire preuve de persévérance avant de se faire bousculer par les péripéties d'une aventure mouvementée. Aussi, avant que le récit ne s'emballe il devra se laisser porter par la qualité de l'écriture et séjourner avec fébrilité dans ce galetas sombre, humide et froid qu'est devenue l'auberge de la Jamaïque. On ne peut imaginer mieux que cet établissement isolé dans la lande de Cornouailles, déserté par la clientèle, battu par les vents sous un ciel chargé pour en faire le décor d'un drame. Ce décor établira le goût de Daphné du Maurier pour l'oppression d'un jeune caractère par un environnement hostile et lugubre.

Quand on fait la connaissance d'un(e) auteur(e) avec son ouvrage phare on craint quelque peu de se frotter au reste de son oeuvre. On craint en fait de déchoir. Avec L'Auberge de la Jamaïque on évite l'écueil. On découvre certes en germe ce qui séduira le lectorat de l'ouvrage publié deux ans plus tard. Il y a comme une prise d'élan vers ce qui aboutira à Rebecca, dont on convient qu'il est un roman plus équilibré, plus homogène. Mais il y a déjà avec L'Auberge de la Jamaïque une formidable montée en pression, comme un bouillonnement littéraire qui met son héroïne à l'épreuve de la vie, plongée dans une solitude à laquelle une enfance tranquille ne l'avait pas préparée. Une jeune fille toutefois non dénuée de force de caractère pour affronter la férocité d'un monde nouveau et malsain.

Dans la très belle biographie qu'elle a rédigée de cette auteure, Tatiana de Rosnay souligne l'affection qu'avait Daphné du Maurier pour le roman noir. Avec L'Auberge de la Jamaïque on ne peut cacher qu'au milieu du roman on ne donne pas cher de l'avenir de la pauvre Mary Yellan. Alors que sa mère se sachant perdue croyait la mettre en sécurité aux bons soins d'une soeur autrefois proche d'elle.

Roman psychologique qui livre l'innocence à la perversité, aux malversations et vices de la nature humaine, la préservant toutefois de l'outrage ultime qui pourrait être fait à son innocence toute féminine. Car Daphné du Maurier bâtit autour de la pureté un rempart qui s'il était forcé annihilerait tout espoir de recouvrance. Une forme de prudence que cette auteure entretient avec le reste de la société. Ultime sanctuaire d'honneur dans un univers de perdition.

Avec L'Auberge de la Jamaïque la montée en intensité dramatique est lente et progressive mais obstinée. Elle répond à un subtil crescendo accommodé par le talent de l'auteure. Intelligence de construction, clarté du style, détermination dans l'enchaînement des événements, voilà un roman qui se suffit à lui-même dans le talent qu'il déploie, quant à l'intérêt qu'il suscite. Il ne préjuge d'un avenir encore plus prometteur du talent de son auteure que parce qu'on en connaît l'avenir. Excellent moment de lecture.
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Excellent moment avec ce thriller à l'ancienne, dans laquelle Daphné du Maurier excelle à la fois à baigner son récit d'une envoûtante et inquiétante atmosphère de lande aride balayée par de noirs nuages, et à replonger son lecteur dans une ambiance 19ème très réussie à la fois dans l'évocation et dans le style mais en même temps plus moderne.

Avec son intelligence saine, son courage et sa ténacité face à l'adversité, l'héroïne Mary est en effet on ne peut plus victorienne, mais on sent que quelques générations la séparent de ses consoeurs imaginées par les soeurs Brontë ou George Eliot en ce sens qu'elle n'est pas corsetée par la même morale et qu'elle va beaucoup plus loin que ses aînées dans la mise en danger.

C'est qu'il lui en faut du courage pour affronter le terrifiant Joss Merlyn, propriétaire de la maudite auberge de la Jamaïque que plus aucun client ne visite ni aucun coche n'ose approcher, mais dans laquelle elle se retrouve recluse avec sa tante brisée de terreur, découvrant peu à peu les lourds secrets du lieu...

Un vrai plaisir que de se glacer le sang avec ce page turner délicieusement désuet.
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Perdue au milieu des landes brumeuses de la Cornouaille, l'Auberge de la Jamaïque ne paye pas de mine : murs lépreux, chambres miteuses, hôtes inquiétants… Depuis que le nouveau propriétaire, l'ivrogne et violent Joss Merlyn, a pris possession du lieu, les bonnes gens ont cessé de venir à l'auberge et les diligences n'osent plus s'y arrêter. Pourtant, certains soirs, l'Auberge de la Jamaïque s'anime. de curieux et peu ragoutants personnages surgissent de la nuit pour se glisser en catimini sous sa devanture, souvent accompagnés de charrettes aux contenus inconnus. Malheur à celui qui sera témoin de leurs activités ! Il pourrait bien finir la gorge tranchée ou pendue à un tronçon de corde. Malheur surtout à la petite Mary Yellan qu'un destin malin a jetée sur ses berges isolées ! Après la mort de sa mère, elle est venue rejoindra sa tante Patience Merlyn mais se retrouve rapidement mêlée aux combines odieuses de son époux. Heureusement pour elle, la jeune fille est dotée d'un sacré de sang-froid et de beaucoup de ressources. Hélas, même la tête la plus solide est vulnérable à l'amour et quand Mary rencontre le jeune frère de son oncle, le beau et séduisant Jem Merlyn, la sienne ne tarde pas à tourner…

Ma première lecture de « l'Auberge de la Jamaïque » remonte maintenant à beaucoup d'années et j'en gardais un souvenir agréable mais un peu flou. J'étais plutôt romantique et j'avais gardé un souvenir affriolant de la romance entre Mary et Jem. Avec du recul et le cynisme (tout relatif) des ans, je la trouverais un peu facile et superficielle sans la dose d'ambiguïté subtile insufflée par Daphné du Maurier : impossible d'ignorer les nombreux points communs entre les deux frères et on peut se demander si, malgré tous les bons côtés apparents du jeune Merlyn, l'histoire de coeur de Mary tournera à la longue aussi dramatiquement que celle de sa tante.

L'histoire en elle-même est agréable à suivre et bien menée, mais n'est pas la meilleure qui m'ait été donnée de lire de cette auteure. Elle manque un peu de surprises et d'originalité à mon goût, mais compense par une atmosphère très prégnante, glauque et gothique à souhait. Les descriptions des landes et de la mer sont particulièrement magnifiques avec ça et là une petite pointe de fantastique noir qui vient rehausser agréablement le tout. Comme souvent chez Daphné du Maurier, le personnage principal est un peu plat (quoique moins que ceux de « Ma cousine Rachel » ou de « Rebecca »), mais les secondaires sont très réussis. J'ai apprécié notamment celui de l'oncle Joss dont on comprend par éclairs, malgré sa brutalité et son ivrognerie, la séduction qu'il a pu exercer sur sa pauvre épouse. Mention spéciale également au très énigmatique Vicaire d'Altarnum dont on ne cesse de remettre en question les motivations : ami ? Ennemi ? Ou témoin impassible et moqueur du drame qui se joue entre les quatre murs poisseux de l'auberge ?

Sans être mon préféré de du Maurier, « l'Auberge de la Jamaïque » est donc un livre réussi, riche en suspense et en portraits psychologiques savoureux. A lire comme la majorité de la bibliographie de cette auteure.
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Roman dramatique basé sur les naufrageurs opèrant leurs criminels actions sur les côtes de la Cornouailles. La jeune fille Mary Yellan se retrouve sans le prévoir au coeur d'une bande d'assassins dirigés par son oncle par alliance. le déroulement de l'action nous laisse avec une scène mémorable décrivant de manière crue et réaliste le naufrage provoqué d'une navire. En plus de suspense, d'une romance qui croît, il y aura un retournement de situation totalement imprévisible. Une excellente histoire d'aventure maritime.
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