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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Donne-moi des mots.
Donne-moi un sujet, un verbe.
Donne-moi des guillemets.
Donne-moi une histoire.
Donne-moi un livre.

Juste un livre.

Pour oublier la poussière des ruines.
Pour panser les plaies.
Pour inventer une autre réalité.

Juste des pages et des mots.

En place des maux.
« Un mémorial de mots, sans-domicile-fixe, pour la génération d'après. »
En place des tombes, des barbelés.

Des livres, s'il te plaît, juste un livre.

Pour rester humains. Dignes. Vivants. Nourris. Éclairés.

Quoi de plus beau qu'une bibliothèque au milieu de la guerre.
Comme une fleur sur les tombes.

« Une mélodie de mots contre le diktat des bombes. »

Donne moi l'histoire de Daraya, de la Syrie, du Battaclan, de Nices, de Bruxelles, de Manchester, de Liège, pour que le verbe s'offre à la mémoire, pour que le mot conjure l'obscurantisme, donne-moi l'histoire, celle de ces mots qui tiennent la main à la vérité, celle qui élève les mains contre l'absurdité.
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A Daraya, les jeunes résistants anti-Assad sont souvent des étudiants ou des fils de paysans devenus par la force des choses des passeurs d'informations, journalistes improvisés médiateurs d'une information inaccessible aux reporters étrangers. Ils sont aussi des passeurs de culture : Ahmad et ses compagnons ont décidé, eux qui lisaient peu avant la guerre, de sauver les livres, convaincus qu'ils sont les garants de la liberté. Ainsi, au fond du trou noir de Daraya — une ville à l'agonie — la bibliothèque clandestine encerclée par les ruines est devenue le sanctuaire de la réflexion, de l'intelligence et de la liberté.

C'est ce que raconte avec empathie et sensibilité la journaliste franco-iranienne, Delphine Minoui, en contact régulier depuis Istanbul, pendant quatre ans via internet, avec des jeunes opposants au président syrien, Bachar el Assad. Comme elle, on ne peut qu'être touché par l'énergie, la fraîcheur, la volonté d'aller de l'avant de ces jeunes gens en danger de mort permanent. Parce qu'elle passe par les livres, refusant de répondre à la violence par la violence, et repousse toute tentative d'embrigadement politique ou religieux, cette résistance exemplaire est une célébration de la vie, à découvrir.

" Nuit et jour, ces jeunes côtoient la mort. La plupart d'entre eux ont tout perdu : leur demeure, leurs amis, leurs parents. Au milieu du fracas, ils s'accrochent aux livres comme on s'accroche à la vie. Avec l'espoir de meilleurs lendemains. Portés par leur soif de culture, ils sont les discrets artisans d'un idéal démocratique. Un idéal en gestation, qui brave la tyrannie du régime. "

Challenge MULTI-DÉFIS 2018
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Daraya,

Sur la carte de ton pays lointain,
Loin de notre monde aveuglé,
Entre oasis et désert,
J'écris ton nom.

Sur les larmes rougeoyantes du ciel,
Que seules les bombes embrassent,
De l'aube au crépuscule,
J'écris ton nom.

Sur les murs encore debouts de ta cité,
Derniers remparts contre l'ignorance,
Fiers, dressés vers le ciel,
J'écris ton nom.

Sur les décombres qui les jonchent,
Sur les peines de ta terre,
Sur le sang de tes filles et fils,
J'écris ton nom.

Sur les grains de poussière des étagères
De ta bibliothèque secrète,
Au bout de ce souterrain clandestin,
J'écris ton nom.

Sur les manuscrits interdits,
Sur les parchemins et les pamphlets,
Sur les livres qui réconfortent,
J'écris ton nom.

Entre les mots, contre la censure,
Dans les éclats de phrases,
A l'encre de sang et de pleurs,
J'écris ton nom.

Sur de nouvelles pages vierges,
Pour réécrire l'histoire,
Ne jamais oublier,
Refuser la pensée unique,
Réveiller les consciences,
Pour ce droit universel de liberté,
J'écris ton nom.

Pour tous ces printemps qui fleurissent.
Égypte. Tunisie. Syrie.

Pour tous ces passeurs de livres.
Pour Ahmad, Shade, Ustez,
Hussam et tous les autres.

Pour toutes ces bibliothèques détruites,
Pour tous ces livres oubliés dans les flammes de la propagande,
Pour Bagdad, Sarajevo, Berlin...
Pour Beyrouth et Ramallah.
Pour toi, Daraya.

Inch'Allah.

J'écris ton nom.

Espoir...



(A la mémoire d'Omar.)


inspiré de liberté, poème de Paul Eluard, dans son recueil clandestin Poésie et Vérité, 1942.

- - -

Un cliché. Juste un cliché.
Celui de deux jeunes syriens. Dans une bibliothèque secrète. A Daraya.

https://observers.france24.com/fr/20151002-syrie-bibliotheque-daraya-bombardements-livres

Le point de départ du témoignage de ces passeurs de livres, ces jeunes syriens qui, au péril de leurs vies, exhumeront des milliers d'ouvrages des décombres et mettront sur pied une université clandestine sous les décombres de l'enclave de Daraya, leur espace de transgression contre la propagande du régime de Damas.

Un témoignage brut, direct, que Delphine Minoui, grand reporter et spécialiste du Moyen-Orient, retranscrit avec force et émotions, sans fioriture mais avec la volonté de ne rien laisser tomber dans l'oubli, pour que l'espoir persiste toujours.
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« Un livre doit être la hache qui brise la mer gelée en nous. » *

Daraya, une bibliothèque secrète, une ombre dans le coeur des syriens, un voile de fraîcheur sous les bombes où les passeurs de livres récoltent et sèment les mots. Face aux horreurs de la guerre, les insoumis poétisent et font du papier le blason le plus pur. Souveraine, la lecture est le refuge vers l'ouverture, le sanctuaire d'une vie où le rêve est encore permis, la tanière face au blocus.

« Une mélodie fragile, celle d'une ville à l'agonie qui résiste au creux de l'obscurité. »

Delphine Minoui écrit simplement, des phrases courtes rappelant la brièveté des échanges qu'elle a eus avec Ahmad, Shadi ou encore Amar. Entre la Turquie et la Syrie, un pont humain se forme grâce à internet et les appels en visio.
De ces conversations, Delphine Minoui offre son récit. Elle en retire la substance depuis l'expérience partagée de ces jeunes hommes courageux, issus de manifestations pacifiques contre le régime de Bachar al Assad. Jusqu'au bout, il sont restés fidèles à eux-mêmes, malgré la terreur, la faim, la fatigue, la douleur et l'attente.

J'ai été impressionnée par la volonté de s'instruire quel qu'en soit le prix. Fascinée par la curiosité de ces hommes, les menant à la connaissance, forts d'un savoir et d'un enrichissement gagnés au risque de leur vie.

« Ahmad et ses amis portent en eux cet instinct de survie par la culture. »

Dans la bibliothèque de Daraya, il n'y a aucune femme. Les femmes paient encore plus cher de leur chair, les sanctions de Bachar al Assad. Bébés affamés, jeunes mères sans ressources, elles vont s'unir et lancer un appel pour recevoir des vivres. Cette revendication est la force d'un courage spectaculaire, car les femmes n'ont pas le droit à la parole publique. Couches, lait, nourriture arriveront à la frontière de la ville mais resteront néanmoins bloqués comme les fragments d'une liberté ensevelie.

« Au fond du gouffre, un divan virtuel pour apaiser les âmes torturées. »

Comme Delphine Minoui, j'ai senti l'angoisse à chaque contact rompu. L'espoir d'une nouvelle, l'attente du mot unique signifiant qu'ils sont en vie, le bip d'une notification…
Le souffle coupé, la journaliste ne cesse d'espérer un écho entre les bombes. Elle écrit intelligemment que la guerre est pire pour celui qui ne sait pas, les jeunes hommes lui expliquent que la souffrance est ainsi multipliée pour celui qui attend à l'autre bout du pont virtuel.
Le point d'interrogation se fait suspension.

« L'espoir dans ces tournesols qui s'échappent d'une terre sèche et polluée. »

Les passeurs de livres de Daraya est de ces livres qui devraient faire partie de toutes nos bibliothèques, pour nous rappeler à quel point le goût de la liberté perd toute sa saveur quand la lecture n'est plus autorisée.

Lisez, lisez, sinon vous mourrez,
Faites danser les mots, faites vivre le papier...
Pina Bausch écrivait « Dansez, dansez, sinon nous sommes perdus. »

La lecture est une danse. le partage est une respiration.

Ce livre m'a été offert par Patricia l'année dernière, il est des livres qui doivent bouger et remuer le monde. À mon tour de le faire voyager…

Lu en mai 2021, offert à Sylvie en février 2023.


* Première citation de Franz Kafka, lettre à son ami Oskar Pollak, 1904.
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J'étais très émue, une fois tournée, la dernière page de : Les passeurs de Daraya de Delphine Menoui. A travers ce vibrant témoignage, c'est un bel hommage que rend l'auteure à ces "héros invisibles". C'est ainsi qu'elle nomme ceux qui sont les protagonistes de cette belle et tragique aventure humaine.
Ces héros venus tout droit de l'enfer de la guerre, nous les suivons pas à pas dans ce court récit qui va tour à tour leur donner la parole, tout en rappelant le contexte qui est celui du combat mené à Daraya, la ville rebelle, par les habitants et une faction de l'ASL depuis le soulèvement de 2011. La brutalité sans nom du régime de Bachar al Assad va se déchaîner contre la ville assiégée. Et en 2013, alors que les frappes aériennes se font de plus en plus meurtrières, va surgir un petit miracle de résistance et de résilience. Face à la terreur et l'obscurantisme, Ahmad, un jeune habitant de la ville va décider de sauver de la destruction et de l'oubli tous les livres trouvés dans les décombres des nombreux immeubles détruits . Avec ses amis, Abou el Ezz, Muhammad Shihahed et plus tard Omar et Shadi, ils vont parcourir inlassablement les ruines à la recherche de tout ce patrimoine littéraire en danger de perdition.
C'est une vraie bibliothèque qui va voir le jour, dans le sous-sol d'un immeuble , avec des rayonnages, un classement alphabétique et même un règlement ! Un ordre providentiel, un havre de paix au milieu du chaos, pour les quarante-cinq lecteurs qui pourront être accueillis quotidiennement.
Mais ces jeunes héros, dont l'auteure va cerner au plus près la personnalité à travers les échanges qu'elle aura avec eux sur WhatsApp, seront les premiers bénéficiaires de ces rencontres littéraires hors normes et hors du temps. Leur objectif commun : survivre par et pour la culture ! Et pour ce faire, chacun empruntera son propre chemin, trouvera l'ouvrage talisman, celui qui lui permettra d'oublier l'horreur du moment ou contraire lui permettra de plonger dans le passé pour mieux le conjurer, quand ce n'est pas pour y retrouver sa propre souffrance mais magnifiée par la magie des mots. Comment ne pas être ému(e) lorsque Ahmad répète comme un mantra les vers du poète palestinien Mamoud Darwich :
"Ici, sur les pentes des collines, face au couchant
Et à la béance du temps,
Près des vergers à l'ombre coupée,
Tels les prisonniers,
Tels les chômeurs,
Nous cultivons l'espoir."
L'espoir ! Je leur souhaite de ne pas l'avoir perdu dans la suite bien chaotique de leur parcours...
Pour clore ce billet, je préfère laisser la parole à Delphine Minoui, car je pense qu'elle évoque parfaitement, en peu de mots l'essentiel de cette aventure humaine hors du commun.
"Ce livre, c'est un peu tout ça à la fois : le récit, même inachevé, de ces héros invisibles. Je ne peux pas y renoncer. Ecrire pour ne pas oublier. Pour ne pas les oublier.
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Delphine Minoui, grand reporter nous livre un récit de la guerre civile en Syrie. Plus précisément, du siège de la ville de Daraya où des jeunes syriens vont tenter de résister au pouvoir de Bachar al-Assad.
Elle découvre, par le biais d'Internet , la création d'une bibliothèque souterraine qui va servir de rempart pour dire non à la terreur de la guerre.
" Face aux bombes, la bibliothèque est leur forteresse dérobée. Les livres, leurs armes d'instruction massive "
Pendant les quatre années de siège, de cette ville meurtrie et laminée, Delphine Minoui communique par les réseaux sociaux avec ces jeunes syriens qui résistent au fond de leur bibliothèque.
Un récit, éminament fort, bouleversant, quand plus rien n'existe, que l'espoir est anéanti, il reste les livres. Cette foi inébranlable dans les livres " fait penser à tous ces témoignages des soldats de la première guerre mondiale."
Ahmad, un jeune syrien dans cette bibliothèque secrète dira que dans des moments de détresse infinie, seule la lecture de témoignages de gens ayant vécu des expériences similaires lui est un soutien à l'instar des hommes et des femmes assiégés durant 4 ans à Sarajevo.
Oui, ce récit est remarquable, il est à lire, et la valeur d'un livre ne nous apparaîtra qu'encore plus si besoin était.
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C'est un documentaire extraordinaire sur le siège de la ville de Daraya.
Quelques jeunes hommes trouvent des livres dans les décombres de la ville et créent une bibliothèque clandestine dans un sous-sol. Ce lieu devient un lieu de culture, d'échanges et de débats pour la population assiégée. Un lieu contre l'obscurantisme.
Des livres contre des armes.
C'est puissant.
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Des bombes, des ruines, des livres récupérés, stockés, installés dans une cave protégée et ouverte à tous. L'idée germée dans la tête d'un étudiant, militant anti Bachar-el-Assad, fait école et intrigue, au point de créer un pont virtuel de conversations Internet chaotiques avec une jeune française installée en Turquie.

Delphine Minoui est notre guide dans cette découverte qui la fascine. Les liens d'amitié et de soutien se créent avec ses jeunes correspondants combattants qui parlent tous d'un espace de liberté par la connaissance, réponse cinglante à la dictature verrouillée du parti Baas syrien.

La petite bibliothèque est un ailleurs où la guerre disparaît, où n'existe nulle censure, où les mots et les histoires ouvrent vers d'autres mondes. Les livres en bouée de sauvetage entre deux combats de rues, pour éloigner la peur, pour se divertir, pour s'instruire, pour rêver, pour se discipliner et retrouver une forme de normalité.
Et surtout les livres en "bouclier contre l'obscurantisme".

En décor de cette belle idée humaniste de bibliothèque secrète, le récit éclaire le quotidien dramatique de la population de Daraya*, le courage et la détermination, le terrorisme d'Etat, l'émergence des groupes djihadistes et de l'Etat Islamique. Par des chapitres courts et oppressants, on accompagne les combattants dits rebelles pendant plusieurs années de résistance, jusqu'à l'évacuation totale en été 2016, laissant un champ de ruines.

Un documentaire littéraire remarquable, extrêmement touchant, qui fait admirablement écho à notre amour des livres, à nous lecteurs, si douillettement installés dans un cocon de tranquillité pour s'adonner au plaisir de la lecture.

*Banlieue de Damas, qui subit près de 4 ans de siège et fut détruite à 90%.

Sélection Document pour le Grand Prix des Lectrices ELLE 2018
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Ce récit est une belle parenthèse d'espoir dans un monde en guerre. Malheureusement, nous en connaissons tous la chute…

Le sujet affiché « Des passeurs de livres » n'est qu'un prétexte pour nous plonger au coeur du siège de Daraya et partager le quotidien de ces « combattants » de la liberté. Leurs armes : les livres, la connaissance, le témoignage…

Ce livre, écrit comme une enquête journalistique (l'auteur est journaliste), se lit tout seul, même s'il nous rappelle l'horreur de cette guerre qui se déroule à la porte de notre pays.
Il nous conte l'histoires de jeunes gens courageux qui aiment leur pays, la Syrie, et qui rêvent (ce rêve se réalisera-t-il un jour ?) de démocratie et de paix.

C'est une lecture intéressante.
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Dans l'enclave de Daraya coincée entre les bombes de Bachar et les drapeaux noirs des djihadistes résistent de jeunes mercenaires de la paix, amoureux des livres.

' Si ils ne peuvent soigner les plaies, ils ont le pouvoir d'apaiser les blessures de la tête. '

Oubliés des Nations Unies, agonisant dans la ville assiégée, gaz sarin, attaque de l'hopital au napalm, partir ou mourir, témoignages  recueillis via internet par la journaliste Delphine Minoui basée à Istambul.
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