La mouche

Alfred de Musset s'est certainement amusé ici dans cette courte nouvelle à reconstituer l'atmosphère poudrée et galante du règne de Louis XV. Rien ne manque, des robes à panier au rouge sur les joues, des fêtes dans Versailles, des dorures de la Galerie des glaces aux jardins du Trianon, et des masques qui dissimulent le visage mais non les formes à l'opposition avec le Parlement à propos des impôts - même si l'aspect politique est bien secondaire. Car oui, ce qui est central, c'est l'amour et le désir. Dans la langue classique, faire l'amour c'est en parler, les personnages parlent donc d'amour, ils l'écrivent, mais surtout, ils désirent.
Et la mouche du titre, petit morceau de tissu, cherche à attirer le regard sur les épaules - c'est-à-dire sur la poitrine d'une femme. Et ce n'est pas n'importe quelle femme qui la porte, celle qu'une moitié du pays considère comme une prostituée et l'autre moitié comme une reine, Mme de Pompadour.
Bref, un petit récit léger et sympathique pour son atmosphère qui dépayse. On sent néanmoins que c'est un auteur du XIXème siècle qui écrit, car le chevalier - le persocnnage principal - refuse le pouvoir arbitraire du roi qui régit par ses caprices amoureux la destinée de tous ses sujets, est prêt à se battre quand on lui explique qu'en raison de sa trop petite noblesse ou de recommandation il ne peut rencontrer directement le roi... La Révolution est passée par là, un auteur libertin du XVIIIème siècle aurait pu écrire le même texte sensuel, mais pas le même texte politique.