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sur 927 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Qui est véritablement Norma Jeane Baker?
Joyce Carol Oates, dont toute l'oeuvre s'appuie sur un solide travail de documentation et qui use ici d'une palette variée de modes d'expression, n'hésitant pas à entrecouper son récit d'extraits tirés du vrai-faux journal de Marilyn Monroe, ou de vrais fausses déclarations de ceux, maris, amants, amis, professionnels du cinéma l'ayant bien connue, ne prétend pas répondre à cette question, nul ne le peut. Mais il est fort possible, et même probable, que son roman se soit approché au plus près, bien plus près qu'une biographie rigoureuse et exhaustive, de la véritable Norma Jeane.

Qui est Norma Jeane Baker? Et qui cela intéresse-t-il au fond?
Parce que le monde, lui, ce qui l'a captivé, ce qui l'a fasciné et le captive encore aujourd'hui, c'est Marilyn, pas Norma Jeane. C'est l'être imaginaire, l'être fabriqué, l'être de fiction, c'est l'être de pellicule, pas l'être de chair, d'humeurs et de sang.
« Pourquoi le monde voulait-il baiser Marilyn ? Pourquoi le monde voulait-il baiser baiser baiser Marilyn ? Pourquoi le monde voulait-il s'enfoncer jusqu'à la garde sanglante comme une grande épée tumescente dans Marilyn ? »
Pourquoi le monde se soucierait-il de la femme derrière le masque de poupée blond platine ? de son âme et de son coeur meurtris? de ses réflexions et de ses inflexions, de ses désirs et de ses peurs? de ses lectures, de son goût pour la poésie, un goût directement hérité de sa mère qui composait des poèmes — d'ailleurs elle aussi compose, mais qui cela intéresse-t-il? Qui s'est jamais demandé ce qui se cachait derrière son sens de l'humour caustique et dissonant, ou derrière son obsession pour la perfection qui la poussait à refaire, éternellement, la même prise — « S'il vous plaît. Je peux faire mieux, je le sais » ? Et son jeu, qui cela intéresse-t-il au fond? Elle est fascinante à contempler, ça, c'est sûr. Enfin, son cul monté sur ressorts, ses seins, sa bouche sont fascinants… Mais elle? du reste, elle ne joue pas, regardez-là, elle n'a aucune technique. Elle est intense, incandescente, une allumette que l'on frotte, une flamme qui jaillit soudain… une actrice-née, un génie. Mais elle ne sait pas jouer. À l'instar du chorégraphe et danseur Vaslav Nijinski dont la figure charismatique et blessée parcourt le livre tel un fil rouge, elle joue juste sa vie à chacun de ses films, à chacune de ses prises inlassablement recommencées, mais elle ne joue pas au sens où un acteur joue. le génie n'a pas besoin de technique. Or la « technique », n'est-ce pas justement ce qui autorise une distance entre l'acteur et son rôle, n'est-ce pas le meilleur garant de sa santé mentale?

« Certains jours, elle brûlait de talent. Il y avait en elle une fièvre qui faisait rage et cherchait à s'exprimer. On voyait que c'était du génie et peut-être que le génie tourne à la maladie s'il ne réussit pas à s'exprimer. »

Alors, qui s'intéresse à Norma Jeane? Joyce Carol Oates, indubitablement, sinon elle ne lui aurait pas consacré un bouquin de près de mille pages. Et moi, qui ai lu le bouquin. Et aussi les copines qui ont lu le bouquin avec moi, Chrystèle, Nico-Choute et Marie-Caro. Et aussi les millions de lecteurs qui ont lu le bouquin avant moi. Et pourquoi? Qu'est-ce qui a poussé l'autrice prolifique JCO à mener sa double enquête? Sur Norma Jeane d'abord puis, à mesure que celle-ci disparaissait, insidieusement phagocytée par la créature qu'elle contribua à créer, sur Marilyn. Pourquoi?
Parce que la folie?
La folie d'une femme à la beauté incandescente qui, de film en film, d'amant en amant, aux prises avec l'alcool et les médicaments, finit par s'effondrer, par perdre son âme puis sa vie alors qu'elle est au faîte de sa gloire? Une folie puisant aux sources mêmes de la vie, mère schizophrène paranoïaque ayant manqué de peu la brûler vive ? Parce qu'arrachée à sa mère malade mentale, placée dans un orphelinat à l'âge de huit ans? Parce que les larmes de honte et de douleur jamais étanchées? Est-cela qui a fasciné Joyce Carol Oates? La douleur, la honte, la rage d'une petite fille mal aimée?

« Elle avait assez de maturité pour exprimer ce souhait : J'ai tellement honte, personne ne veut de moi, j'ai envie de mourir. Elle n'en avait pas assez pour comprendre la rage contenue dans un tel souhait. Ni les transports de folie que cette rage alimenterait un jour, l'ambition démente de se venger du monde en le conquérant. »

Parce que la rage?
La rage comme moteur d'une ambition démente, conquérir le monde? Mais la célébrité est un leurre, c'est bien connu. Chercher le bonheur en elle, c'est comme attendre le soleil dans une grotte orientée au Nord… Ce n'est pas elle qui comblera le désir éperdu, inassouvissable d'être aimé. Est-ce cela le drame de Norma Jeane?
Le désir d'être aimée toujours, mais jamais, jamais véritablement aimée?
Est-ce ce désir ardent, désespéré qui consumera Marilyn, fragile, fascinante et hypnotique « flamme dansante »? Est-ce que JCO s'est reconnue dans ce besoin éperdu, jamais comblé ?A-t-elle été touchée, bouleversée par l'abîme entre les aspirations de l'actrice, ce à quoi son talent, sa sensibilité, son génie pouvaient prétendre et ce à quoi le monde l'a cantonnée : un objet de fantasmes? A-t-elle voulu dénoncer l'iniquité, la violence d'un système de domination, celui des hommes sur les femmes, de l'industrie du cinéma sur les acteurs, des puissants sur les faibles ? A-t-elle voulu montrer que Marilyn était également et avant tout sa propre victime, prête à vendre son corps, et aussi son âme, pour être désirée, aimée, admirée?

« Je n'étais ni une poule ni une pute. Mais il y avait le désir de me percevoir de cette façon. Parce qu'on ne pouvait pas me vendre autrement je crois. Et je comprenais que je devais être vendue. Car alors je serais désirée, et je serais aimée. »

Parce que la beauté sans l'amour est un piège effroyable, une véritable malédiction?
C'est toute l'ambivalence et la fragilité du personnage imaginé par Joyce Carol Oates. Norma Jeane effrayée par sa beauté, blessée à l'idée que l'on puisse la confondre avec elle, et pourtant soignant son apparence avec une attention maniaque, consacrant des milliers d'heures à faire renaître, sous les doigts agiles de son maquilleur, l'icône « Marilyn ».
Condamnée à chercher dans les yeux des autres la confirmation de sa propre existence. Condamnée à contempler éternellement son reflet dans les miroirs ou dans l'oeil de la caméra au risque, tel Narcisse, de s'y perdre.
Parce que la mort si souvent appelée, enfin, est venue la délivrer.

« La mort est venue à l'improviste parce que je le voulais. »
Vaslav Nijinski



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Sous la plume boulimique de Joyce Carol Oates, Marylin Monroe n'est pas seulement une star mythique, un canon de beauté à la plastique hallucinante, un sex-symbol wharholisée, elle n'est plus une vulgaire poupée peroxydée, plus une fragile grue camée, nymphomane, suicidaire et schizo, c'est une vraie femme, enfin ! Une femme tout simplement emblématique de son époque et de son temps.

Ce pavé de près de 1000 pages est tout bonnement stupéfiant. le génie de Joyce Carol Oates est indéniable. Elle réussit à nous fasciner, page après page, que nous aimions ou que nous soyons totalement indifférent à la mythique Marylin Monroe, comme c'était le cas pour moi je dois bien l'avouer. Et sans doute, grâce à ce livre, je vois désormais au-delà du mythe. En cela, JCO a réussi un vrai tour de force. La plume est fluide et le livre un véritable page-turner.
Oui, un livre véritablement captivant malgré tout ce que nous connaissons déjà de cette artiste emblématique, depuis l'enfance chahutée marquée par l'absence du père, une mère névrosée et le placement dans de nombreuses familles d'accueil, en passant par son ascension de simple pin-up à icône suprême, ou encore de ses multiples amants jusqu'à la relation adultérine avec JF Kennedy, jusqu'à sa mort encore aujourd'hui mystérieuse à l'âge de 36 ans seulement…


Et pourtant, il y a un côté « poil à gratter » dans ce livre…tout au long de ma lecture, j'ai éprouvé une sorte de malaise car nous naviguons tout du long entre réalité et fiction, l'auteure ayant voulu faire un roman se basant sur quelques éléments vrais, sans tous les mentionner, et surtout en en romançant une bonne partie, c'est donc une sorte de biographie mais pas tout à fait non plus. Une « biofiction » sur le principe de la synecdoque, une partie seulement est révélée, censée représenter le tout. le tout étant plus que la somme de ses parties, les parties dévoilées sont ainsi hautement allégoriques. Pas de révélation de la vie entière donc et part belle faite aux sentiments de Marylin, aux sensations, aux affects comme se les représente en tout cas Joyce Carol Oates, au point parfois de se demander si finalement l'auteure ne révèle pas des choses d'elle-même, la frêle brune se cachant derrière la pulpeuse blonde
L'auteure, en reprenant et en renouvelant quelques éléments du parcours de Marylin, donne ainsi vie à la fille derrière la star, à Norma Jean, fille pleine de failles que le produit marketing et iconique Marylin Monroe allait ensuite venir boucher, colmater…

N'empêche, j'ai ressenti cet entre-deux, ne m'abandonnant jamais tout à fait car dès que je commençais à lâcher prise, je m'interrogeais aussitôt sur la véracité des faits, j'essayais de percevoir à quoi correspondant tel ou tel événement. Ma lecture a été sans cesse ponctuée d'aller-retour sur Internet pour chercher, voir, comprendre…Oui, j'étais troublée par cette façon de faire de JCO, celle de s'approprier la vie de Marylin pour finalement nous avertir que non, c'est un roman, ne vous méprenez pas. Où est la frontière entre le vrai et le faux, quelle place donnée à la mémoire de la personne, voire à son respect, l'auteure pouvant finalement inventer ce qu'elle veut et nous la rendre soit attachante, soit détestable ?

Parfois, en parlant avec mes proches, j'évoquais un fait de la vie de Marylin (il faut dire que lorsque nous lisons ce livre, celui-ci ne cesse alors de nous hanter), parfois de simples petites anecdotes (comme les 5h de maquillage nécessaires avant un événement public) et aussitôt, j'étais troublée, m'arrêtant de parler…ah oui, c'est vrai, ce n'est pas-être, sans doute, pas vrai…Finalement qu'ai-je vraiment appris de sa vie ? Je ne sais pas. Mais n'est-ce pas cette façon même de faire qui m'a tant fait aimer ce livre ? En supplantant les biographies innombrables qui existent sur Marylin Monroe ?

Bref, vous percevez comme je suis troublée et partagée sur cette notion de bio-fiction…
Je veux bien admettre surtout qu'avec ce procédé l'auteure permet d'atteindre l'universelle : celle de toute belle femme, à la fois victime, proie, incarnation de tous les fantasmes masculins, dans les années 50, aux Etats-Unis. Celle de la condition féminine qui prévalait alors où les viols, les intimidations, les avortements, les mariages précoces, les violences conjugales, les humiliations, la condescendance, le fait de devoir passer à la casserole pour atteindre ses objectifs sur le plan professionnel, étaient légion. Rien n'aura été épargné à la star, elle semble condenser tous les maux de ce qu'on pouvait faire aux femmes à cette époque. En ce sens, pour narrer l'épopée de la condition féminine, partir de Marylin est un matériau de choix pour l'auteure.
Après soulignons cependant que l'auteure ne dénonce pas vraiment, ce n'est pas son objectif ici, au contraire elle ne fait que constater et enfoncer tout en nous faisant entrevoir des pans insoupçonnés de la personnalité de la jeune femme, nous la rendant complexe, touchante, mystérieuse, comme peuvent l'être toutes les femmes réifiées qui, au-delà de l'objet manipulé et abusé qu'elles deviennent au sein d'une société patriarcale, cachent des pans entiers de personnalité et de singularité. Tel est à mon sens le véritable sens de ce livre.


Près de 1000 pages donc, en cinq actes telle une tragédie, dans lesquelles Joyce Carol Oates jongle avec virtuosité avec tous les styles littéraires, tous les tons, tous les angles de vue. Nous y trouvons les pensées intimes de Marylin, comme si nous étions réellement dans cette tête aux boucles blondes, des extraits de son journal, des discours, les témoignages – vrais, faux, mystère - de toutes les personnes ayant côtoyé de près ou de loin la fille puis la femme, voix multiples secondaires donnant de la profondeur au personnage, des lettres, des cauchemars…permettant de multiplier les points de vue, de faire le tour des différentes facettes du personnage et du mythe.

« Comme la mer, cette beauté changeait constamment. Comme sous l'effet de la lumière, des gradations de lumière. Ou de la gravitation lunaire. Son âme, mystérieuse et effrayante à ses yeux, ressemblait à une sphère en équilibre précaire au sommet d'un jet d'eau : frémissante, toujours en mouvement, tantôt montant, tantôt descendant… ».

Quelques scènes marquantes et archétypales, supposées ou réelles d'ailleurs, sont décrites de façon éminemment romanesque pour bien mettre en valeur cette incarnation du rêve américain et de ses failles. L'agression sexuelle de son agent juste avant l'audition qui lancera sa carrière, la fausse couche lors de son mariage avec le dramaturge (Henri Miller), ses souffrances incroyables chaque mois lors de ses menstruations qui sont doublées en réalité d'endométriose, maladie à cause de laquelle elle commence à prendre des cachets puissants, sa rencontre et sa relation avec le Président JF Kennedy, le fameux Happy Birthday chanté dans cette robe moulante brillante de mille feux, et la fin de sa vie nimbée de mystère, autant de scènes revisitées avec talent par l'auteure américaine. Sans oublier les différents films, les conditions de tournage, comment Marylin Monroe s'approprie à chaque fois les personnages, ses exigences pour refaire sans cesse chaque scène, sont décrits avec sensibilité et empathie.

Des scènes marquantes donc et un personnage ô combien touchant…Derrière ces cheveux blonds barbe-à-papa si peroxydés qu'ils en paraissaient blancs et exhalaient une odeur de produit chimique, derrière les épaisses couches de maquillage, derrière ces robes chatoyantes quasi-transparentes mettant en valeur ses seins « mammouthesques » et les « deux fesses jumelles de son cul fantastique », robes parfois décolletées dans le dos quasiment jusqu'au coccyx, derrière cette sensualité incandescente telle qu'aucun homme ne pouvait résister - alors qu'elle-même ne savait pas comment avoir des rapports autres que sexuels tout en éprouvant si peu de désir et de plaisir - il y a une femme terrifiée, il y a une femme qui vit une tragédie, qui recherche son père dans tous les hommes aimés, une femme abusée, méprisée, une femme bien plus intelligente que sa timidité le laisse entrevoir, une femme effrayée par sa propre beauté, une femme poète, sensible, délicate…Une enfant fourrée à l'intérieur d'un mannequin voluptueux…Une femme bouleversante et drôle à la fois ingénue et tentatrice. Une mendiante d'amour et de reconnaissance…
Cette femme-là, grâce au talent de JCO, m'a touchée en plein coeur !


« Nous courons sans souci vers le précipice, après que nous avons mis quelque chose devant nous pour empêcher de le voir » - Journal d'écolière de Norma Jean.

Un livre ainsi inoubliable, mais aussi perturbant pour moi, que j'ai eu bonheur de partager avec Anna, Nico, Marie-Caroline et que je n'aurais sans doute pas lu sans cette lecture commune. Merci mes amies blondes et brunes, la « blande » que je suis a aimé ce partage riche en sororité !
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Joyce Carol Oates (Ou JCO pour les intimes) est une bavarde, une incroyable bavarde !
1110 pages pour raconter Marylin Monroe...ça peut paraître trop et pourtant, quand vient la fin, on a presque envie de dire : « C'est déjà fini ? Il manque des passages, non ? »
Alors, bien sûr, certains paragraphes peuvent paraître trop verbeux mais on pardonne tout de même à l'auteure (comme souvent) parce qu'elle a une façon bien particulière de vous mettre dans l'ambiance. Et quand je dis dans l'ambiance, je devrais plutôt dire, dans la peau de Norma Jeane Baker.


Norma Jeane, Miss Golden Dreams, l'Actrice blonde, Marylin Monroe...autant de qualificatifs qu'use Oates pour nommer cette sublime actrice, cette divine Blonde, cette femme-enfant aux multiples facettes.
Et on sent là toute la fascination et l'implication de Oates, toute sa volonté à exposer ce mythe hollywoodien dans toute sa complexité, à la mettre à nu devant les lecteurs, à la rendre à la fois intouchable et vulnérable, à la fois si mystérieuse et si ordinaire, à la fois si belle et si misérable...
Après avoir lu Blonde, on ne pourra plus associer Marylin Monroe à la simple image d'un Sex Symbol à la vie dissolue et auto destructrice.
Il apparaît indéniablement dans ce roman que Norma Jeane fut victime de sa beauté et de son sex appeal. Joyce Carol Oates dénonce bien évidemment une société bien trop misogyne et tient particulièrement à rappeler que Marylin Monroe, malgré ses allures de cruche blonde, était une actrice studieuse, douée d'imagination et de sensibilité.
Elle n'en fera pas pour autant une héroïne modèle et c'est tout à son honneur de rétablir sans fard ni artifice la divine et sublime Marylin dans une fiction qui, finalement, ne semble pas si éloignée de sa véritable vie.


Cette biographie – qui n'en est pas une- est digne d'intérêt et j'ai pris beaucoup de plaisir à la lire.
Il est vrai que j'ai parfois peiné et trouvé certains passages répétitifs et inutiles. Je n'ai pas aimé/ pas compris l'emploi de groupes nominaux ou d'initiales pour désigner les personnages tels que « L'Ex-Sportif » ou « Le Dramaturge » à la place de Joe Dimaggio ou Arthur Miller. Etait-ce pour signifier ou rappeler aux lecteurs qu'il s'agissait bien d'un roman et en aucun cas d'une biographie ?

Néanmoins, cette plongée dans la vie de Marylin fut une expérience véritablement inattendue !

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Née Norma Jeane, immortelle Marilyn.

Il fallait bien une pointure de la littérature pour faire face au challenge d'écriture d'une biographie-fiction, concernant la plus grande icône féminine de l'âge d'or d'Hollywood.
Marilyn Monroe possède tous les atouts d'une héroïne de roman et sa personnalité multiple et extrême est un terreau fertile au décryptage psychologique et à l'extrapolation.

Joyce Carol Oates se métamorphose en Blonde platine, elle voyage dans la tête de l'actrice, elle « est » Marilyn, elle vit, respire, s'enthousiasme, séduit, panique et souffre avec elle. Elle permet néanmoins l'incursion de quelques voix complémentaires pour ouvrir d'autres points de vue et mettre en perspective le contexte cinématographique hollywoodien: la rapacité masculine, la soumission féminine, le glamour au détriment du talent, l'usine à dollars des grands studios, la sensualité face à la pudibonderie anglo-saxonne.

Mais l'essentiel est cette mise à nue d'une double personnalité: cette énigme magnifique, conquérant produit d'une industrie avide d'images et de rêves, et fragilité extrême et névrose intrinsèque d'une femme cachée derrière les spotlights.

Voilà ! J'ai coché la case de mon roman annuel de la prolifique JCO.
Et quel roman! Un pavé de chapitres denses et serrés, un marathon d'écriture et de lecture à vous laisser sans voix, comme asphyxié. Je suis toujours fascinée par la puissance d'écriture de ce petit bout de femme qu'on imagine attelée "au métier" avec force et discipline.
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Quelle performance littéraire ! Impressionnée par ces 1100 pages cohérentes. Voilà bien longtemps que je boudais cet écrivain à cause d'un titre ‘Viol' et de la grosseur de ses romans. Mais vu que nous échangeons souvent des romans avec une collègue qui me dit que c'est son auteur préférée… Belle immersion dans la vie de Marilyn Monroe : son enfance, sa mère, sa quête du père, son métier, ses amours, ses doutes, ses poésies, ses maris, ses avortements. Roman et non biographie. Donc, où est la part du réel et de l'imaginaire de la romancière ?

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Ce livre retrace, de manière plus ou moins romancée, la vie de Marilyn Monroe. C'est une femme qui m'a toujours fascinée, et Joyce Carol Oates est définitivement l'une de mes auteurs préférés, donc j'avais très hâte de découvrir ce livre ! Comme je vous le disais, c'est assez romancé donc ne vous attendez pas à une biographie très précise et fidèle à la réalité. Les noms des personnes sont souvent modifiés, l'auteure utilise ce qui ne sont parfois que des rumeurs sur Monroe pour construire la trame de son roman. Il n'empêche, c'est fantastique.
Je suis définitivement séduite par le style d'écriture de cette romancière. Un style âpre, des mots parfois crus, mais c'est ce qui rend tout ses romans si crédibles. Par exemple, certaines scènes de sexe sont décrites assez explicitement. J'ai mis très longtemps à lire ce pavé - tout de même plus de 1000 pages - mais j'ai adoré de bout en bout. le simple fait que ce soit Marilyn Monroe suffit à rendre le livre digne d'intérêt, tant sa vie fut captivante. Une femme rayonnante et solaire sur les photos, une beauté à couper le souffle mais une âme noire et une vie très dure. Une des plus grandes actrices que le monde ait connu, aussi.
Joyce Carol Oates développe incroyablement la psychologie de celle qu'elle nomme l'Actrice Blonde. Cette dernière apparaît comme très touchante. Par exemple, sa volonté de se cultiver, de lire des livres de psychologie, de s'interroger sur le monde alors que tout ce qu'on lui demande c'est de sourire en permanence. Elle est réduite à sa beauté, à son physique qui semble être une malédiction. On lui refuse souvent des personnages plus profonds, lui demandant simplement de se trémousser et de chanter. Les démons de cette femme sont nombreux, on les voit l'entraîner vers l'abîme tout au long du roman, et nous sommes impuissants. C'est une vraie grande artiste, qui emmène ses rôles toujours plus loin, creuse toujours plus ses personnages, jusqu'à l'épuisement. Un talent et un charisme hors norme.
La déchéance de cette femme splendide est bouleversante : à la fin elle est droguée aux médicaments en permanence, incapable de se lever, n'est que l'ombre d'elle-même. Elle est brisée par la vie, contrôlée par ses névroses. Il m'est difficile d'ordonner mes pensées, de résumer un personnage aussi fouillé et profond en quelques lignes. Sa relation complexe avec sa mère malade mentale, avec les hommes, les dirigeants du Studio qui l'exploitent en permanence, sa liaison avec Kennedy... tout y est
C'est vraiment un livre puissant, et malgré le grand nombre de pages pas une n'est à retirer selon moi.
Lien : http://lantredemesreves.blog..
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Blonde est la réinvention du destin de Marilyn Monroe dont la vie et la mort restent un mystère.
C'est un roman long, très long avec une écriture exigeante.
On y découvre le parcours d'une petite fille qui n'arrive pas à grandir, qui cherche en vain l'amour de sa mère.
Née de père inconnu, elle verra dans tous les hommes la figure paternelle ; elle en consommera des hommes dans cette quête impossible.
Nous subissons, dans ce récit, la descente aux enfers, la consommation de drogues, d'amphétamine, de tranquillisants, d'alcool et la manipulation des hommes qui profitent de cette naïveté.
Que Marilyn est vulnérable, attachante et sensuelle.
Il est question d'un besoin absolu de se faire aimer, respecter et admirer.
C'est sombre, déprimant mais le style poétique de Madame Oates est fascinant.
A quand le Prix Nobel ?
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Une lecture éprouvante. Je ne connaissais que peu la vie de l'icône Marilyn Monroe. Oates dresse le portrait romancé de Norma Jeane Baker, enfant abandonnée, avide d'amour et d'appréciation, qui fut exploitée du début de sa carrière à la fin tragique de sa vie, beaucoup plus intelligente et cultivée que ne le laissent deviner son image et ses rôles de Nunuche Blonde. L'envers du décor n'est pas joli... Avant les #MeToo et #Balancetonporc , Oates met en lumière comment la carrière d'une belle jeune actrice sexy des années 50 et 60 était liée à son acceptation obligée des abus sexuels des Weinstein de son époque. et même jusqu'à JFK qui la traita comme une putain... triste, dur, j'ai le vague à l'âme en refermant ce livre. Néanmoins, je n'ai pas pu le lâcher avant la fin, 976 pages quand même ! Je n'ai pas pu lâcher Norma Jeane, une femme extraordinaire et attachante, racontée (imaginée) avec amour par la grande JC Oates.
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En exergue une phrase de Jean Paul Sartre : "Le génie n'est pas un don, mais la façon dont on invente dans des circonstances désespérées."

Je ne sais pas si Marilyn Monroe, pseudonyme de Norma Jeane Baker était une actrice géniale. Elle est en tout cas un magnifique personnage de roman sous la plume d'une Joyce Carol Oates, ce qui n'a rien d'étonnant, finalement. Encore une fois, une histoire d'épaisseur de peau.
"C'est dans la prime enfance qu'émerge l'acteur né, car c'est dans la prime enfance que l'on perçoit d'abord le monde comme mystérieux. A l'origine de toute interprétation, il y a l'improvisation face au Mystère.( T. Navarro The Paradox of Acting.)"

Tout le monde connaît la triste histoire de Marilyn Monroe, et JCO n'est pas la première à s'y intéresser. Mais je crois que sa faculté de se glisser dans la peau même des personnages qu'elle décrit fait que ce roman, basé sur une documentation très fouillée,et même si elle y invente beaucoup de choses, de comportements, de dialogues, etc, est certainement le plus vrai écrit sur cette artiste.

Née d'une mère folle,qui a tenté de la supprimer, et d'un père inconnu qu'elle recherchera toute sa vie ( ah les très cruelles lettres écrites soit disant par son père, mais en fait par Cass Chaplin..), élevée dans un orphelinat, bombe sexuelle à 15 ans , mariée d'autorité à 16 et considérée apte au viol conjugal, elle ne va finalement jamais cesser de tenir un rôle. Celui que l'on voudra bien lui donner. le plus souvent, celui d'une pute ( les derniers épisodes décrivant ses rapports avec les frères Kennedy sont terrifiants de violence.) Celle que les hommes veulent qu'elle soit. Tous ou presque. Pas Brando, qui lui offre les Pensées de Pascal. Ni Miller, la conscience morale du roman, qui apparaît trop tard dans sa vie .
Alors que c'était une enfant rongée par sa culpabilité, son complexe d'infériorité, en perpétuelle quête d'amour. Retournant constamment vers sa mère en espérant échanger de l'amour contre les preuves de succès qu'elle dépose à ses pieds. Pour exprimer les songes et les désillusions de celle qu' Hollywood traita comme un pur objet sexuel , celle qui fut condamnée à chercher dans les yeux des autres la confirmation de sa propre existence , celle qui, dit Oates, fut complice de sa propre exploitation, qui ne s'extirpa jamais de la machine à broyer, qui accepta son calvaire , la romancière donne libre cours à son style habituel, lyrique, exalté, avec des moments de colère et même de rage, et ponctué de quelques phrases en italique de réflexion, qui permettent de respirer un peu. Et dieu sait si on a besoin de respirer tout au long de ces 975 pages! C'est un livre très étouffant, dont on sort un peu sonné , et ce n'est pas étonnant d'apprendre JCO dire que l'écriture de ce roman l'avait presque tuée..

Mais elle dit aussi:
"La vie de Marilyn a été plus noire encore que ce que j'ai raconté dans mon livre. Mais Norma Jean a réussi à sa manière. Quand Hollywood la prenait pour une grue, elle a prouvé contre tous son immense talent d'actrice. Elle a travaillé, elle s'est battue pour s'élever, se cultiver, aimer. J'espère qu'elle aurait été touchée que quelqu'un cherche à la comprendre, à dire qui elle était réellement."
La lectrice que je suis a été très touchée également.

Quelques extraits:
"La voix de Gladys exprimait le respect et l'enthousiasme habituels, mais il y avait au dessous une rage calme, implacable. « Là..la plus célèbre de toutes: Falcon's Lair. La maison de feu Rudolph Valentino. Lui n'était absolument pas doué pour le cinéma. Il n'était pas doué pour la vie. Mais il était photogénique, et il est mort au bon moment. Rappelle-toi, Norma Jeane… meurs au bon moment."
Gladys est la mère de Norma Jeane. Peu de temps après, elle va essayer de la mettre de force dans un bain brûlant..

"Norma Jeane était dans les bras d'Elsie.. Elsie pensait qu'elle ne s'était jamais sentie aussi mal de sa vie d'adulte.. Si elle avait pu ,elle aurait fichu Warren dehors à coups de pied dans le cul et gardé Norma Jeane.. mais bien sûr c'était impossible. « C'est un monde d'hommes et pour survivre une femme doit trahir ses pareilles. .. Arrête, Norma Jeane. Pleurer ne sert jamais à rien. Sinon, il y a longtemps que ça irait mieux pour tout le monde."
Norma Jeane a 15 ans. Elle a été placée par l'orphelinat chez ce couple qu'elle aime, oui, mais le mari commence à s'intéresser à elle de trop près..

"Etre l'objet du désir masculin, c'est savoir « J'existe! » L'expression du regard. le durcissement du sexe. Bien que bonne à rien, vous êtes désirée.
Bien que votre mère n'ait pas voulu de vous, vous êtes désirée.
Bien que votre père n'ait pas voulu de vous, vous êtes désirée.
« La vérité fondamentale de ma vie, que cela ait été la vérité ou une parodie de vérité: quand un homme vous désire, vous êtes en sécurité. »"

Et..
"C'est juste que quelquefois, j'ai l'impression…que je n'ai pas de peau. Qu'une couche manque. Tout peut faire mal. Comme un coup de soleil."



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Lire ce livre fut un de mes défis de cette année. J'ai de nouveau goûté la plume originale de Joyce Carol Oates, et ce fut une expérience vraiment intéressante.
Rien ne me prédestinait pourtant à cette lecture : enfant des années 90, Marilyn Monroe n'est dans ma culture cinématographique qu'une icône des années 60 mais sans plus. Je m'étais dit que si le livre ne m'intéressait pas au bout de trois chapitres, j'en resterai là.
Mais très vite, j'étais embarquée dans cette aventure humaine.
Bien que ce soit une biographie romancée, l'auteur a travaillé finement sur son personnage. On ressent avec acuité ses émotions et ses sentiments d'enfant, d'adolescente et d'adulte. La vie de Marilyn est marquée par la solitude : un père inconnu qui la hantera jusqu'à la fin de ses jours, une mère peu aimante qui sera par la suite internée dans un hôpital psychiatrique, de longs séjours dans un orphelinat puis une famille d'accueil.
On sent que chacun de ses gestes sert à combler ce vide qui la noie. Elle veut se faire aimer des autres, elle que ses parents n'ont pas aimé. Tout chez elle est cette quête impossible et destructrice.
Le lecteur découvre aussi l'univers sordide de Hollywood : entre les murs du studio se cachent les viols, les agressions sexuelles, la drogue et l'alcool à outrance. Les femmes ne sont que les jouets des producteurs et des agents : Norma Jean deviendra Marilyn Monroe, une poupée blonde idiote tout juste bon à jouer des rôles secondaires au cinéma.
En lisant ce livre, on découvre à quel point sa vie est d'une tristesse infinie, que le bonheur n'a jamais été à portée de sa main et que ce fut même une vie maudite.
Le style d'écriture est riche, parfois complexe et alambiquée mais avec de belles descriptions et un personnage principal merveilleusement travaillé. Je n'ai toutefois pas mis le 5ème coeur car j'ai senti qu'il y avait quand même des passages répétitifs. D'ailleurs c'est étonnant mais certains personnages sont seulement cités par leur qualificatif (ex : le Dramaturge) et jamais par le nom.
En tout cas si vous cherchez un pavé complexe mais riche, un challenge de lecture qui vous emmènera dans des méandres inconnus, ce livre est fait pour vous ! To be read !
Lien : https://leslecturesdehanta.c..
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