AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,97

sur 397 notes
Il n'a ni prénom, ni visage, tout ce qu'on sait de lui c'est qu'il est orphelin de mère, que son père a disparu et qu'il est élevé avec amour par un grand-père ébéniste qui manie ses outils avec magie et une grand-mère soucieuse de son bien être. Enfant aimé, enfant à part : il est né sans pousser un cri, sa voix muselée par deux lèvres scellées qu'un chirurgien séparera à la force du scalpel et au prix d'une greffe douloureuse et non sans séquelles, car la peau de sa jambe, un fois sur ses lèvres, pousse ses poils fins et légers que les autres, à l'école, railleront durement.
Comme tous les enfants trop seuls et trop sensibles, le garçon s'invente des compagnons, Miira, l'éléphante morte qui a vécu sur la terrasse du magasin d'où on n'a pu l'enlever qu'avec grue et palan, Indira, petite fille disparue mais certainement cachée dans les fissures du mur, elle était si petite !
Alors, au détour d'une de ses promenades, l'enfant décousu- recousu fera la connaissance d'un être étrange, ex-conducteur de bus mais devenu si énorme (il se goinfre de délicieuses pâtisseries préparées par lui), qu'il est contraint à un poste de gardien du foyer des jeunes travailleurs. Avec ahurissement, on le découvre dans son autobus-maison, entièrement aménagé pour lui, autour de lui pourrait-on dire car il est si énorme qu'il ne peut en franchir la porte. Jusqu'au jour où, comme dans un film des Monty Python sans le rire, il est désincarcéré, mort , de son véhicule-tombeau.
Pourtant, c'est lui, le « Maître », celui a tout appris au garçon en matière d'échecs, notamment avec ce conseil-clé : « Ne te précipite pas mon garçon ».
Et notre petit garçon de onze ans devient un adulte qui n'a pas grandi, sa croissance bloquée le jour de la mort du Maître, tout comme son cri s'est bloqué dans ses lèvres cousues. Pourtant, la vie est devenue jeu, jeu à tout prix, jeu tout le temps mais il subjugue les foules car il ne sait jouer que sous la table-échiquier, au grand dam de ses adversaires. Là, il suit la partie, il la vit avec ses oreilles, son coeur, son génie. le bruit des pions se fait musique, les déplacements se font poèmes, les espaces de réflexion deviennent soupirs. Jusqu'au bruit de l'horloge qui rythme la partie, tout devient jeu, musique et poésie.
Quand on lui propose de se cacher derrière une marionnette – automate pour jouer, sa vie prend un autre tour et l'auteur donne libre cours à une imagination tour à tour délicate et cruelle.

Que l'on s'intéresse ou non aux échecs, on ne peut que se laisser porter par la poésie et la musique du texte et conduire par l'approche du monde d'un petit garçon différent et hypersensible qui ne manque pas de profondeur .
Commenter  J’apprécie          33
Un petit garçon naît avec les lèvres scellées. Par une opération elles ont été
séparées, mais une greffe a fait de sa bouche une chose monstrueuse : un fin
duvet y pousse. Enfant solitaire, il se lie d'amitié avec un gardien d'usine obèse qui
vit dans un autobus désaffecté. Celui-ci l'initie au jeu des échecs…
Le jeu d'échec est une figure récurrente dans la littérature. S. Zweig, V.
Nabokov, ou plus récemment B. Henrichs avec «la joueuse d'échec», se sont
emparés du sujet. Yoko Ogawa, auteur majeur et prolixe de la littérature japonaise et un des
meilleurs écrivains mondiaux, parvient encore une fois avec ce roman à emmener son lecteur sur
les rives mouvantes de son univers. A travers la vie de ce garçon qui refuse, à l'instar du héros du
«Tambour», de grandir, apparaissent tour à tour une éléphante devenue si grosse qu'on ne peut
plus la déplacer ; une petite fille emmurée ; une jeune fille violée ; un chat appelé « Pion » ; un
maître d'échec obèse ; un automate alter ego du garçon. Grâce à une écriture toute en fluidité,
Yoko Ogawa qui excelle dans la description des sensations, arrive à dire l'indicible.
Un conte sensible et cruel à l'atmosphère feutré que l'on n'oublie pas.
(Jean-Pierre)
Commenter  J’apprécie          30
Très bon Ogawa, un roman qui pourrait être un conte pour l'univers semi-parallèle dans lequel évoluent ses protagonistes.
Il est question d'un garçon né les lèvres scellées, il va être initié aux échecs suite à un concours de circonstances dans un bus immobilisé. Ses amis sont imaginaires et il trouvera dans les échecs un univers dans lequel il pourra s'épanouir tout en restant invisible, il jouera toutes ses parties à l'aveugle sous la table de jeu.
Il va être convié à prendre place dans un automate construit pour lui, dans lequel il jouera ses parties dans une piscine réformée, dans le sous-sol d'une piscine désaffectée.
Il deviendra une sorte de légende alternative des échecs, son jeu ayant quelque chose de poétique.
Il s'agit de poésie, de sensations, d'impressions et de symboles associées au jeu.
Les personnages,tous aussi baroques les une que les autres sont très attachants et nous passons avec eux un moment hors du réel, dans le monde si particulier de cette romancière.
Commenter  J’apprécie          30
C'est un talent exceptionnel qui se révèle au travers de ce roman. D'une finesse d'observation et d'écoute puissante qui nous font ressentir la pensée silencieuse d'un personnage unique dans la littérature.
Commenter  J’apprécie          30
C'est le 3e livre que Yoko Ogawa que je lis, et même si j'ai à chaque fois bien aimé, je dois avouer qu'ils souffrent tous un peu du même problème : c'est agréable à lire, l'idée de départ est intéressante, mais petit à petit le récit se perd et la fin est souvent ratée, ou du moins pas au niveau de ce qu'elle aurait pu être.

Dommage :(
Commenter  J’apprécie          20
e n'est pas mon premier roman de cet auteur prolifique, puisque j'avais lu et beaucoup aimé : « La formule préférée du professeur ». Si je me suis lancée dans cette lecture, c'est pour rendre hommage à ma façon à Goran comme l'avait suggéré Eva le lendemain de sa disparition.

C'est un tout autre état d'esprit de lire un livre en pensant à quelqu'un dont j'aimais les articles et qui, en tout cas c'est que je supposais, devait aimer ce livre. de plus ce roman est un récit entre le conte et la réalité vue à travers le regard d'êtres purs et j'ai eu peur d'abimer quelque chose en le critiquant. Donc, même si j'exprime quelques réserves, je finirai avec Goran et retrouverai mon âme d'enfant.

Ce roman raconte la vie d'un enfant orphelin élevé avec son frère par une grand-mère aimante mais écrasée de chagrin d'avoir perdu sa fille. Son mari est menuisier et répare les meubles abimés par le temps. L'enfant est né avec les lèvres soudées, le chirurgien lui ouvrira la bouche d'un coup de scalpel, et prendra sur son mollet la peau nécessaire à la greffe. Toute sa vie il aura comme un duvet sur les lèvres. Cet enfant est captivé par les êtres difformes, que ce soit l'éléphante qu'on avait installée sur le toit d'un grand magasin pour amuser les enfants et qui grossira tellement qu'elle ne pourra jamais en descendre. Ou pour cette petite fille qui a disparu dans l'interstice trop étroit entre sa maison et celle des voisins. Ou encore pour son maître des échecs, ce personnage qui vit dans un bus et qui devient obèse à force de manger des sucreries. L'enfant va vieillir mais refuser de grandir. Avant sa mort son maître, lui apprendra à devenir un excellent joueur en s'inspirant de la vie d'Alekhine . La mort de son ami et maître des échecs est une horreur, trop gros pour sortir de son bus il faudra une grue pour évacuer son corps de plus de deux cents kilos. L'enfant est terrassé par le chagrin, et à partir de ce moment tragique, ne grandira plus. L'autre particularité de cet enfant c'est qu'il ne peut jouer que sous l'échiquier, sa taille et le fait qu'il n'a pas besoin de voir son partenaire va lui permettre de se cacher dans une sorte d'automate qui portera le nom de « Little Alekhine ». Il connaîtra alors un grand succès et les champions des échecs veulent tous affronter cet automate. Mais lui l'enfant qui ne grandit pas, ne voit dans ce jeu qu'une occasion de connaître l'âme humaine et est fasciné par ce que la façon de jouer des hommes révèle de leur être profond. Il ne cherche pas à gagner à tout prix. Il y a un charme certain dans ce roman, on est fasciné par ces êtres purs confrontés à la réalité de la vie, et puis, si on aime les échecs la façon dont sont décrits tous les coups possibles rend ce roman intrigant. La tour qui laboure, le fou qui s'envole, la dame qui est libre, le cheval qui saute par dessus les obstacles, et le pion ce petit personnage sans importance mais qui donne tout son charme à ce jeu.

J'ai quelques réserves sur ce roman, il y a une forme de grâce dans la pureté des êtres à laquelle j'ai du mal à croire, d'ailleurs l'auteur ne cherche pas à les rendre crédibles, tout est symbolique aussi bien les personnages que le jeu d'échecs mais la force du roman c'est d'embarquer le lecteur dans l'univers de Yôko Ogawa et que ce lecteur accepte de ne plus se poser de questions sur la vraisemblance. Hélas, je suis française formée à l'esprit logique et j'ai un peu de mal à faire cela. Si je n'avais pas été soutenue par toute la bienveillance de Goran, j'aurais été encore plus critique. Je me répétais sans cesse : « quel mal y a t'il à retrouver son coeur d'enfant ? N'est ce pas une force que de chercher en chaque être brisé par la vie (l'obésité morbide, la vieillesse) la part d'humanité ? » J'ai donc lu ce roman facilement et agréablement en mettant mon esprit cartésien de côté.

Qu'en pensez-vous ? Merci de m'avoir lu.
Lien : https://luocine.fr/?p=13448
Commenter  J’apprécie          20
C'est un petit garçon pas tout à fait comme les autres. Il est né avec les lèvres soudées et semble en avoir gardé une préférence pour le mutisme. Pour réparer cette anomalie, on a greffé de la peau de mollet sur ses lèvres qui s'orneront ainsi, à partir de l'adolescence, de longs poils incongrus.
C'est aussi un enfant solitaire, dont les amis sont imaginaires, et inspirés du souvenir d'êtres qu'il n'a pas connus. Il y a Indira, l'éléphante exposée jusqu'à sa mort sur la terrasse du centre commercial que fréquente régulièrement le garçon, et où il peut contempler à loisir le panneau commémorant sa présence. Et il y a Miira, fillette dont la légende prétend qu'elle est malencontreusement restée coincée entre deux murs, à qui il parle longuement la nuit. Il est significatif qu'hormis ces deux êtres fictifs -et le chat évoqué plus bas-, aucun des protagonistes du roman, à l'image de celui qu'on ne connaîtra jamais que comme "le petit joueur d'échecs", n'est désigné par son nom…

Orphelin, le héros est élevé avec son petit frère par des grands-parents aimants et tranquilles.

Une rencontre va bouleverser sa vie et révéler son extraordinaire talent. Celui qu'il va bientôt considérer comme "le maître" est condamné par son incroyable obésité à vivre enfermé dans un autobus aménagé en logement, dont il ne peut plus sortir. Il y passe son temps à se gaver des pâtisseries qu'il confectionne et à jouer aux échecs sous le regard placide de son chat Pion. Il initie le garçon au jeu, et surtout lui enseigne la philosophie, et l'esthétique pourrait-on dire, à laquelle il l'associe.

Plus qu'un jeu, il considère en effet les échecs comme un poème, une mélodie que l'on interprète à deux, et qui révèle le caractère de celui qui déplace les pièces, ses émotions, ses désirs, sa mémoire, son éducation, sa morale… le coup le plus fort n'est par conséquent pas toujours le meilleur : sur l'échiquier, ce qui est bien fait a plus de valeur que ce qui permet de gagner. le garçon se révèle très doué, et comme en osmose avec cette philosophie, qui répond à son intériorité patiente et profuse. Il apporte par ailleurs sa singularité à la pratique, en jouant caché sous l'échiquier, devinant les mouvements des pièces de son adversaire au son autant qu'à l'intuition, se concertant parfois avec ses amies imaginaires pour déterminer ses propres coups.

À la mort du maître, terrifié par les conséquences de son obésité, le petit garçon cesse de grandir. Il gardera toute sa vie sa taille de pré-adolescent, les poils poussant sur ses lèvres constituant l'unique concession de son corps au passage du temps.

"Grandir est un drame"

Les circonstances lui permettront de concilier son amour des échecs et son besoin de discrétion indispensable à la préservation de la bulle protectrice qui lui permet d'habiter le monde à sa façon. le petit joueur déploiera ses talents dissimulé dans un automate de bois dont il actionnera en secret le mécanisme, devinant dans les coups de ses adversaires leurs états d'âme et leurs intentions, atteignant paradoxalement dans l'anonymat une célébrité presque équivalente à celle d'un prédécesseur auquel on le compare : Alekhine, dont le jeu s'élevait au niveau de la plus belle des poésies.

Il mène une existence à l'image de sa singularité, à la fois modeste et extraordinaire, souvent solitaire mais pas vraiment seul, car accompagné du souvenir prégnant et intensément vivant de ses chers disparus, et suscitant chez les rares personnes qu'il côtoie un intérêt toujours bienveillant et jamais intrusif. On devine chez le petit joueur d'échecs une très grande sensibilité, qui reste intérieure, dont l'expression est empêchée par une sorte d'inadéquation entre la particularité du héros et l'attente de "normalité" du monde qui l'entoure. Les échecs représentent sa seule manière de communiquer, d'exprimer ce qu'il est dans toute sa complexité.

Et c'est une belle histoire que nous livre là Yôko Ogawa, sorte de fable à la fois merveilleuse et mélancolique où se mêlent naturellement étrangeté et poésie, en équilibre sur la frontière séparant le réel de l'imaginaire. J'en ai aimé l'atmosphère, les lieux improbables et les personnages hors normes qui les habitent, à travers lesquels l'auteure rend un bel hommage à la richesse de la différence.

J'exprimerai juste un bémol, lié à la nature même du personnage principal, dont l'impénétrabilité laisse toujours le lecteur un peu à distance, mais cela fait finalement aussi partie du jeu…
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
Commenter  J’apprécie          20
Un petit retour de ma lecture du roman « le petit joueur d'échec » de Yoko Ogawa.

La plume de cette auteure a cette spécificité de nous embarquer dans son monde, qui lui est propre, cette atmosphère, ces métaphores qui jalonnent l'histoire.

Son écriture est belle, fluide, poétique mais terriblement profonde qui nous amène à réfléchir sur les thèmes de prédilection de l'auteur : la solitude, l'amitié, la différence. Ma gorge s'est nouée de nombreuses fois, au coté de ce petit joueur d'échec. Je recommande cette oeuvre délicate, émouvante.
Commenter  J’apprécie          20
2e roman de Yôko Ogawa que je lis, 2e fois que je ne suis pas convaincue. Non pas qu'il soit mauvais, au contraire, il y a beaucoup d'éléments qui me plaisent. Mais il y a quelque chose dans le style qui me dérange. Je le qualifierai de "trop esthétique". On est dans la beauté de la phrase, on a l'impression d'avancer parmi des images dans la brume ; peut-être que c'est beau mais en attendant on ne voit rien. On ne sait pas où on va, il ne se passe pas grand chose. Sans compter les nombreux rappels à la cicatrice/moustache du jeune homme, qui la caresse souvent ; d'autres personnages y font aussi allusion, notamment sa grand-mère qui la touche également. Très gênant à lire.
Commenter  J’apprécie          21
"Le petit joueur d'échecs" nous ouvre une porte vers le monde imaginaire de Yoko Ogawa, écrivaine japonaise contemporaine dont la renommée se répand.

Le petit joueurs d'échecs, désigné sous le vocable "le garçon" durant tout le livre, est un enfant solitaire, né avec des lèvres soudées qu'un médecin a dû ouvrir. Élevé et protégé par ses grands parents, il vit dans son univers imaginaire avec comme ami Indira l'éléphante devenue trop grosse, qui finit sa vie sur la terrasse d'un grand magasin et Miira la petite fille morte après s'être glissée entre deux murs trop étroits.
Il rencontre un gardien trop gourmand et trop gros qui vit dans un autobus et qui deviendra son maitre aux échecs.

Voici donc le livre : un enfant effrayé par le fait de grandir et de grossir qui stoppera sa croissance; un enfant surdoué aux échecs mais incapable de jouer sans se cacher sous l'échiquier et qui deviendra joueur caché dans un automate, appelé Little Alekhine ... et des parties d'échecs qui s'enchainent .... fascination et lassitude s'entremêlent.... on ne sait pas où on va .. d'ailleurs pourquoi aller quelque part ...

Le garçon joue aux échecs mais est absent au monde, toujours en dessous la table ou coincé dans l'automate! Pourtant il joue, sa seule communication. Il ressent de l'affection pour ses grands parents, pour son maitre, pour l'infirmière chef, pour la vraie Mira avec sa colombe; mais son affection semble rester enfermée à l'intérieur : il faut l'entendre dans la seule relation de la partie d'échec.
La quatrième de couv indique " Yôko Ogawa interroge, tel un écho silencieux, l'attachement à ceux qu'on aime, éternel. "

Je l'ai lu comme un livre sur la solitude et le lien au monde, apparemment distendu, mais malgré tout profond quelles que soit les voies que prend ce lien pour "Llittle Alekhine"
Commenter  J’apprécie          20




Lecteurs (882) Voir plus



Quiz Voir plus

Le petit joueur d'échecs.

Suite à quelle circonstance le petit joueur d’échecs rencontrera t'il l’homme obèse dans le bus ?

La maison d'à coté a brulé.
Un tremblement de terre a lieu dans la ville.
La noyade d'un homme dans la piscine.
Le câble d'une grue rompt.

13 questions
17 lecteurs ont répondu
Thème : Le petit joueur d'échecs de Yôko OgawaCréer un quiz sur ce livre

{* *}