La Terre a soif : Petit précis de mondialisation Tome VI

« La Terre a soif.
L'air s'échauffe, les sols se dessèchent, les plantes souffrent et les forêts brûlent.
Une ère nouvelle a commencé. L'obsession de l'eau ne va plus nous quitter. »

La Terre a soif, Erik Orsenna @editionsfayard

Titre ô combien évocateur! Dès le départ, le ton est donné: le livre s'ouvre sur ces quelques mots, cinglants, sans appel, comme une plaidoirie!

Et c'est un peu cela que l'auteur réalise dans ce livre, un plaidoyer pour les fleuves, pour la vie…

« Gardant en mémoire ces leçons, je commençai mon tour du monde. Élève perpétuel, je vois des professeurs partout. Je ne doutais pas que le Danube et le Nil, le Mékong, l'Amazone et tous leurs confrères géants m'attendaient pour continuer à m'apprendre la Vie. Jamais je n'avais été si joyeusement torturé par une telle soif de savoirs. »

À travers son voyage autour du monde, à la rencontre des grands fleuves, voyage qu'il a réalisé sur plusieurs années, cet amoureux des cours d'eau nous les conte de manière unique et formidable.

« C'est là que la Chine est née, il y a cinq mille ans. Comme l'Égypte est le don du Nil, la Chine est fille du fleuve Jaune. Un très grand fleuve qui, contrairement à la plupart de ses confrères géants, coule à l'horizontale, d'ouest en est et uniquement sur un seul pays. le fleuve Jaune est une affaire chinoise, pour le pire ou le meilleur. »

Ce livre foisonne de références multiples d'autres auteurs, comme celle de Pascal Bourdeaux ci-dessous:
« le fleuve est une fontaine de Jouvence, une source de vie, une voie menant à l'immortalité. On retrouve de telles représentations dans les mythologies et les panthéismes des peuples gréco-romains, celtes, indiens. Mais aussi dans les textes sacrés des religions révélées, les représentations cosmologiques des religions d'Asie, les littératures orales des peuples sans écriture d'Afrique, d'Océanie et des Amériques. Cette universalité du fleuve, métaphore de la déesse mère, autrement dit du culte de la fécondité, évoque la clarté, la pureté, la lumière, une douce musicalité, l'ascension céleste. […] »

Lire Erik Orsenna c'est faire un voyage littéraire avec des escales, géopolitiques, culturelles, historiques…

« Mississippi, dans la langue des Indiens Ojibwas, veut dire « le père de toutes les eaux ».
Mississippi, la rivière emblématique du Sud, des plantations de coton, la rivière des bateaux à aubes, des dames en crinoline et des esclaves.
Mississippi, l'hymne du vieil homme. »

C'est être bouleversé par un récit climatique, notre demain qui s'écrit aujourd'hui, mais aussi être charmé par la prose talentueuse de l'auteur aux mille et unes références et connaissances 🌟

« Lorsque j'étais enfant, c'est ainsi que ma mère m'envoyait me coucher:
« Erik, tu as vu l'heure? Allez, le toit du monde t'attend. » Et pour m'endormir, elle me racontait le Tibet. Ou plutôt elle me parlait et me reparlait de son héroïne, de son modèle, de sa nostalgie: […] Alexandra, née à Saint-Mandé le 24 octobre 1868? Te rends-tu compte, Erik? Elle était féministe et anarchiste et s'est convertie au bouddhisme à 20 ans! »

Une véritable pépite de la rentrée littéraire Fayard ✨

Erik Orsenna, dans un ouvrage qui allie érudition, engagement et qualité d'écriture nous présente l'histoire et la situation de quelques uns des grands fleuves du monde en naviguant d'un continent à l'autre : du Brahmapoutre à l'Amazone au Congo en passant par l'Oyapock, le Maroni, le Mississipi, le Saint Laurent, le Jourdain, le Tigre et l'Euphrate.

Selon les cas, il s'agit de géopolitique, d'hydraulique, de navigation et/ou d'hydrologie. Comment ils sont utilisés, trop souvent surexploités et quel est leur avenir ? Vont-ils continuer à couler et à apporter les milles bienfaits qu'ils apportent aux hommes depuis des temps immémoriaux ?

Ces fleuves ont joué un rôle essentiel dans le développement et la croissance de l'humanité, offrant irrigation, voie de circulation, ressources énergétiques, ressources vivrières et développement culturel.

Aujourd'hui, ils sont menacés par le réchauffement climatique qui fait disparaitre les glaciers qui les alimentent, par la destructions des forêts qui font tomber la pluie ou au niveau des deltas par la remontée des eaux de mer qui empêche l'écoulement et, en plus d'inonder ces zones fragiles, freine les cultures en raison de la salinité.

Ils sont menacés par des barrages trop nombreux, mal gérés ou gérés de façon strictement nationaliste qui empêchent l'écoulement aval et les autres usages de l'eau ou encore les usages des autres pays. Ainsi, la Chine maitrise le flux des fleuves qui prennent naissance dans les montagnes du Tibet (Brahmapoutre et Mékong). La maitrise de l'eau est un enjeu stratégique majeur : l'importance du Tibet pour la Chine y trouve son origine. C'est la même chose pour la plus modeste Jourdain et Israël.

Ils sont également menacés par la pollution des industries et de l'extraction minière qui a un grand besoin d'eau, mais se préoccupe peu, dans de nombreux pays, de l'état de l'eau qu'elle rejette et des populations en aval.

Pourtant, l'analyse d'Erik Orsenna n'est pas totalement alarmiste : il semble convaincu que beaucoup de ces fleuves peuvent être sauvés et gérés avec intelligence par les humains. On perçoit le diplomate sous le visage du militant et de l'écrivain. Il cite la gestion du fleuve Sénégal ou la façon dont la Chine, malgré tout, a évolué dans sa gestion au cours des années récentes.

Le sens de ce recueil, selon moi, est de dire : allons, bougeons nous! Il y a du possible pour concilier la préservation des fleuves et les besoins de l'humanité : en associant à la fois une modération des appétits, un recyclage plus important, une production plus importante notamment avec la désalinisation et en apprenant à partager. Il fait un plaidoyer pour une approche globale de la gestion des bassins dépassant les frontières nationales, pour le respect de ces fleuves et pour la protection des deltas.

L'excellente critique de read_to_be_wild m'incite à la modestie.
La plume de l'académicien trempée dans l'eau des fleuves du monde, à la fois érudite et légère, rend agréable ce grand voyage liquide, noyant les pages d'images, d'histoire et de constats alarmants.
Le tour du monde de 33 grandes petites et moyennes coulées dépayse ainsi que mobilise sur l'urgence de préserver une ressource vitale. Il souligne l'importance économique de grands bassins d'eaux producteurs d'électricité et le développement de voies d'eau transporteuses de marchandises. Erik Orsenna montre aussi les vertus de la concertation (au Canada notamment) lorsqu'il s'agit d'aménager des sites sensibles. Mettre toutes les parties autour de la table vaut mieux que de mettre devant le fait accompli.
Je salue la naissance d 'une nouveau genre : l'écologie littéraire... et déplore le nombre indigne de lecteurs (7) d'un essai à la portée de tous.

Aujourd'hui je vais évoquer La terre a soif le nouvel essai stimulant d'Erik Orsenna. C'est le sixième tome de ses Petits précis de mondialisation. Après les moustiques ou les villes « un nouveau voyage s'imposait, cette fois aux pays des grands fleuves. »
L'intention de l'auteur est de : « tirer le portrait de ... trente-trois fleuves ». Il propose une balade autour du monde en suivant le cours de fleuves et de rivières. L'ouvrage est organisé géographiquement avec des chapitres qui se rapportent aux différents continents. La plupart des géants (Nil, Amazone, Loire, Yang-Tsé) sont évoqués dans ces pages souvent lyriques mais une brève rivière bretonne qui lui est chère est également mise en valeur. Erik Orsenna participe à des réunions, des colloques internationaux, des visites de terrain à travers son engagement dans différentes organisations en charge de la préservation des fleuves. le livre est une véritable balade à travers la planète une auscultation des cours d'eau qui se révèlent en danger en raison de la surexploitation dont ils sont l'objet, de la pollution galopante et du réchauffement climatique dont les traces et les impacts sont visibles et indéniables. La terre a soif est un livre qui est aussi un cri d'alarme qui montre le danger dans lequel se retrouverait la planète en cas de manque d'eau. Les situations de pénurie existent déjà et la guerre de l'eau est une réalité inquiétante. La répartition des ressources hydriques est inégale sur la planète et la situation de chaque fleuve est différente. le lecteur apprend que : « toute l'eau de la Chine qui détient le Tibet abreuve la moitié, ou peu s'en faut, de la population mondiale. » de plus l'essayiste indique que l'importance des certaines zones : « moins de 1% de la surface de la Terre, mais 8% de la population mondiale, soit 500 millions de personnes : les deltas, zones fertiles par excellence, donc toujours densément peuplés. » le texte est parfois un peu professoral et démonstratif, l'auteur veut convaincre et étayer son propos avec des chiffres, des cartes et des statistiques. Cependant, la lecture est fluide et agréable. L'une des conclusions est que : « de notre capacité à économiser et à recycler dépendra, pour une bonne part, la paix des époques à venir. » Erik Orsenna est lucide il sait l'importance des enjeux relatifs à l'eau douce et la menace qui pèse sur les fleuves souvent maltraités. Il ne cache pas sa passion pour les fleuves. Lui, le grand voyageur a déjà mis en scène dans ses romans des points qu'il développe et approfondit ici en particulier sur le Brésil. Les histoires qu'il raconte sont des histoires vraies ; il met en exergue les risques provoqués par la surexploitation des fleuves notamment pour produire de l'énergie. Les barrages hydrauliques sont à l'origine de modifications de l'environnement, de déplacements de populations et de ravages irréversibles. Mais la mise à disposition d'électricité pour les populations est indispensable au progrès humain. Il montre que l'agriculture est la plus grande consommatrice des ressources aqueuses. Les démonstrations sont passionnantes et montrent l'urgence de prendre conscience de la nécessité de protéger les fleuves pour assurer l'avenir du développement humain.

La terre a soif est un texte facile à lire qui a le mérite de proposer des actions simples à mettre en oeuvre pour tenter de ne pas aller dans le mur.

Voilà, je vous ai donc parlé de la terre a soif d'Erik Orsenna paru aux éditions Fayard.

Lien : http://culture-tout-azimut.o..

Écrivain voyageur, Erik Orsenna nous livre un témoignage sans faille de l'état de santé de ces fleuves ô combien nourriciers. du Brésil à la Chine, des États-Unis à l'Égypte en passant par la France, le lecteur est embarqué dans un formidable tour du monde à la rencontre de fleuves mythiques. En quelques pages, l'académicien nous donne l'état de santé de ces cours d'eau aussi essentiels à l'Homme pour la navigation, pour la production d'électricité que pour l'irrigation. Erik Orsenna nous conte l'histoire de ces fleuves, berceaux de l'humanité, qui jouent un rôle clé pour de nombreux pays. Il faut tout l'inventivité des Hommes, la force de persuasion de quelques-uns, passionnés et visionnaires afin que les pays s'unissent pour que chaque peuple bénéficie des bienfaits du fleuve. C'est là le point clé de ce livre, dresser un état des lieux des fleuves, en évoquant les dangers auxquels ils sont exposés tout en mettant en avant les solutions pour qu'ils continuent de faire naître la vie.