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EAN : 9782930235561
Les Carnets du Dessert de Lune (01/01/1900)

Note moyenne : /5 (sur 0 notes)
Résumé :
Recueil poétique et cinéphile
Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Les éditions Les Carnets du dessert de lune ont fêté leur dixième anniversaire en décembre 2005. Pour l'occasion, un livre1 rassemble poèmes et chroniques de cinéma publiées dans diverses revues. Antonello Palumbo, leur auteur, vivait dans la banlieue de Charleroi. Animateur et fondateur des revues RegArt et Remue- Méninges, des éditions L'horizon vertical, il fut emporté par un cancer foudroyant, en quelques jours, en 1994, à l'âge de trente ans.
Pour de nombreux lecteurs comme pour moi, les trois recueils rassemblés dans ce livre seront une découverte. Une aubaine. Avec le recul des années passées depuis la mort de ce jeune poète, un hommage poignant à une vie, à la vie.
Elle lui touche le cou
Pour remettre en place le col de sa chemise Cela fait plus de six mois
Qu'une femme ne l'a touché là
Le lendemain
Il n'arrangera pas son col
Et il attendra
À peine un geste, l'esquisse d'une anecdote. Une brève histoire, celle d'une rencontre. Entre elle et lui, personnages anonymes, représentatifs de l'humaine aventure, usée à force de recommencements. Unique pourtant, à chaque élan du coeur et comme magnifiée par l'oeil attentif du poète à l'affût. Elles se passent souvent ainsi, les histoires que nous racontent les poèmes d'Antonello Palumbo, pareilles à de courts scénarios empruntés à un quotidien que nous reléguons au rang de banalité parce qu'il est celui de nos sentiments cachés, de nos plaisirs inaboutis, de nos velléités : attendre une lettre sans qu'elle arrive, restaurer sa maison sans plus savoir pourquoi, refaire des lits dans des chambres d'hôtel, prendre sa pause de midi quand on est petite employée et qu'on la consacre à écrire, rouler à vélo, consoler une amie... nous y sommes, dans l'ordinaire. Mais comme on ne fait pas de film avec des mots et que les mots, c'est bien connu, ont tellement de mal à dire ce que nous voulons et encore plus ce que nous sommes, il faut que les images suggèrent en couleur l'épaisseur et le vide que viennent masquer nos silences et la lumière terne de nos miroirs.
Puits de mine / Plus personne qui descend / Il y a un terril aussi / Tout est arrêté / Comme cet autocollant / À moitié enlevé / À l'arrière d'une voiture / Bébé à bord / de l'auto / Sort un grand / D'au moins un mètre vingt / Sa maman ne le prend plus dans les bras / Elle passe devant / Et lui traîne un peu derrière / Derrière / le terril / le puits de mine / Plus personne ne descend
Sans avoir l'air d'y toucher, la réalité sociale d'une région économiquement sinistrée se profile. Toutefois, le drame du désoeuvrement n'apparaît qu'en filigrane. Par- dessus tout, ces faux frères de faits divers nous restent dans la mémoire comme une odeur entêtante, celle du chou au lard partagé à l'improviste après un rendez-vous manqué, par exemple. Ou mieux, comme une de ces mélodies à la mode, le temps d'une saison, qui nous est entrée dans l'oreille alors que celle-ci voulait rester distraite. Elle ne veut plus nous lâcher quand bien même nous trouvons ridicule de continuer à la fredonner... Trop tard, elle nous a dans la peau. Notre esprit a beau se débattre. Alors, quelques paroles que nous avions jugées jusque là sans importance reviennent nous exploser au nez : Nous finissons au bord de la mer, avec nos yeux incapables de la voir. ... Nous n'avons qu'un but : attenter à la misère du monde. ... Sans nous en rendre compte, nous en revenons là où tout avait valeur de découverte, ...
Et nous comprenons que derrière les impasses, les rendez-vous manqués, la grisaille ou l'insuffisance même du poème se tramait toute la saveur, la belle musique de la vie.
Elle aura dans sa bouche peu de mots mais choisis, sans efforts, naturels, qu'elle dira entre deux souffles parallèles sur lesquels rouleront
ses trains toujours en partance.
Elle arrivera à l'heure juste, jouant un peu avec ses ongles pour masquer l'absence de bagages.
Elle sera là, entière, et la gare sera jalouse
de tous ces chemins qu'elle apercevra dans ses yeux.
Il l'attend. Elle arrive. Elle est là. Tous les mots descendent.
© le Carnet et les Instants
Jean-Louis Massot fête les dix ans de ses éditions et commémore la disparition d'Antonello Palumbo décédé au même moment, en 1994. Trois recueils édités de son vivant pour le premier à l'Horizon vertical dont il animait les éditions, deux autres posthumes au Dessert de lune et à Echo Optique. Donc un fort volume bâti en triptyque. La partie centrale rappelle l'aspect cinéphile du poète puisque ses chroniques reconstituent les années 1995, aussi bien critiques de films que réflexions sur le cinéma. Les deux autres parties à clairement parler plus poétiques incorpore bien cette donnée puisque son écriture est très visuelle, avec la souplesse et l'accélération propres au scénario, dans la fluidité du style et la propension à raconter de menus faits du quotidien avec le souci constant d'une vérité expérimentée et étalonnée sur son vécu. La chose la plus remarquable que je note avec l'écart de relire cet auteur, c'est la simplicité de son écriture, allant quelquefois vers la parabole ou la fable, dans un paradoxe où le réalisme du propos décolle vers une morale du merveilleux.
© Jacques Morin, Décharge.
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Cette anthologie de trois recueils (deux poétiques, un de “critiques” – on devrait plutôt dire “ressentis” – de films) est un beau condensé d'une vie en poésie : au fil des pages se dessine une âme sachant lire, dans le quotidien, “la recherche du vrai nous-même“, les “approches / maladroites / insensées” qui font le lit des histoires, les griffures / biffures / questions façonnant les “amours tronçonneuses” et les hésitations perpétuelles, entre silence et cri, qui rythment la langue poétique.

Il y a de la tendresse naïve, chez Antonello Palumbo, de celle qui, nourrie par l'enfance aux yeux de songes (“nous avons la certitude / d'un moment pur, / innocent, secret…/ notre chemin“), enlumine les regards quotidiens (“regarder autour de nous / dans un excès de confiance aux choses… / ouvrir notre imaginaire : / sentiers périlleux“), tresse des silhouettes d'êtres purs (“elle était de l'autre côté, / à l'inverse du temps, du moment“) et permet d' “attenter à la misère du monde” en transformant les hommes en “ces petits oiseaux / qui sautillent sur les dents des crocodiles, / criant de plaisir à chaque fois, d'avoir vécu /cette seconde entre la fin de la bouche / qui écrase et la liberté du vent, du monde“.

La suite par ici : http://www.delitteris.com/au-fil-des-pages/carnet-dun-poete-assis-sur-l-horizon/
Lien : http://www.delitteris.com/au..
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