C'es au détour de mon exploration de la littérature française vue par nos cousins canadiens que j'ai redécouvert
Daniel Pennac. Eh oui, outre-Atlantique "
la petite marchande de prose" est au programme d'un intelligent séminaire universitaire sur la littérature populaire de notre bonne vieille France et l'érudition du propos m'a donné envie de me replonger dans la saga de la famille Malaussène que j'avais explorée il y a bien, bien longtemps...
Commençons donc par le premier roman "
Au bonheur des Ogres" ... Coup de coeur absolu ! de l'humour, de la tendresse, des références culturelles évidentes ou cachées, on sent la plume de celui qui se dit cancre absolu mais qui a quand même obtenu une maîtrise en lettres avant de mener une carrière d'enseignant.
L'histoire est totalement déjantée et aussi totalement délicieuse . Une famille entière d'enfants de tous âges est confiée au grand frère Benjamin qui se substitue à une mère absente toujours en quête du grand amour, toujours enceinte, toujours en cavale.
Comme il faut bien faire bouillir la marmite, le voici embauché dans un grand magasin pour remplir le rôle difficile de contrôleur technique des objets vendus. En fait il est chargé de supporter le mécontentement des clients insatisfaits et de déplacer sur sa personne leur colère légitime. Et oui, nous avons reconnu les fonctions traditionnelles du bouc émissaire cher à
René Girard qui a écrit sur ce thème un essai resté dans les annales !
Tout irait donc pour le mieux possible si Benjamin n'était pas témoin direct de plusieurs explosions mortelles se déroulant dans le magasin...
Aucun lien direct ne permet de rapprocher les victimes et on se demande si un tueur fou ne sévit pas dans ce temple de la consommation...A moins que Benjamin lui-même ,lassé de servir de repoussoir à sa hiérarchie, ait décidé de se venger ...
L'intrigue policière se faufile dans le récit comme un fil rouge mais ce qui suscite avant tout l'intérêt du lecteur c'est la description savoureuse du quotidien familial de cet anti-héros tellement sympathique , la tendresse pour le quartier multiculturel de Belleville, la tolérance pour toutes les personnes, la loufoquerie de certaines scènes.
Chacun des personnages, que l'on retrouvera bien sûr dans les romans suivants, est attachant avec en ce qui me concerne, une petite préférence pour le chien Julius ....
Voici une lecture superbement rafraichissante qui par certains côtés fleure bon son "Amélie Poulain" et procure une détente bien méritée en ces temps difficiles ....