Le livre d'
Alain Prigent s'annonce, par son titre même, comme une biographie historique : celle d'une femme née dans une famille très modeste en Bretagne, devenue institutrice, militante communiste, résistante puis députée après la deuxième guerre mondiale. Mais sa lecture fait naître une certaine déception : quelle place l'auteur a-t-il finalement accordé à cette femme qui aurait dû en être le centre ? Difficile de comprendre comment il a construit son ouvrage : consacrant de longs chapitres à deux frères Marzin et accordant finalement bien plus de place à l'évolution de la situation du parti communiste dans le paysage politique français qu'à Madeleine Marzin elle-même au risque d'ailleurs d'assommer le lecteur à coups de tableaux qui ne présentent d'intérêt que dans le cadre d'un travail de recherche et qui ne parlent guère à un lecteur lambda.
Et pourtant il apparaît que cette femme, remarquée par son institutrice pour son intelligence, accédant elle-même à cette fonction après un parcours de boursière, qui a consacré, voire sacrifié sa vie au parti communiste a été bien seule, en particulier pendant la Résistance. Elle est chargée d'organiser une manifestation de femmes contre la vie chère rue de Bucci en 1942, mais elle n'est pas informée qu'elles seront encadrées par des hommes armés. C'est un désastre qui entraîne l'exécution de plusieurs de ses camarades et sa propre condamnation à mort. Graciée par Pétain elle est transférée, avec d'autres résistantes, en Centrale à Rennes. Elle seule prend alors l'initiative de son évasion. Où est donc alors l'efficacité de l'organisation ? La seule aide qu'elle reçoit est celle, ponctuelle, de deux cheminots qui ont compris sa situation. Et alors qu'elle est devenue « la femme la plus recherchée de France », le PC lui refuse tout contact pendant 17 mois qui ont dû lui paraître bien longs… !
Quand on apprend dans le livre que dès les années 30, elle a dit de Staline : « Ce type me dégoûte ! » on aurait aimé connaître aussi ses sentiments lors des événements de 1956 à Budapest alors que certains de ses proches étaient jetés du PC pour avoir osé protester et contester ou en août 1968 lors de l'invasion de la Tchécoslovaquie par les chars soviétiques. Cette femme était trop intelligente pour ne pas au moins se poser des questions. Or tous ces événements sont abordés comme des difficultés rencontrées malencontreusement par le parti communiste.
On peut être convaincu qu'elle ait été modeste et ait refusé de se mettre en avant, ce n'était pas une raison pour ne pas lui accorder toute l'attention dont elle aurait dû être l'objet dans un livre qui lui était prétendument consacré