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EAN : 9782882506320
320 pages
Noir sur blanc (09/04/2020)
3.13/5   15 notes
Résumé :
A Taipei à la fin des années 1980, juste après la loi martiale, Lazi, une jeune étudiante en art, nostalgique et quelque peu perdue, passe une grande partie de son temps seule à lire, écrire et à décoder ses obsessions jusqu'au bout de la nuit. Dépitée par son inébranlable attraction vis à vis d'une camarade un peu plus âgée qui s'acharne à souffler le chaud et le froid, épuisée de danser sans relâche sur la frontière du désir et de la haine, Lazi cherche du réconfo... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Impossible d'aller au delà d'une dizaine de page. La traduction qui semble littérale rend la lecture plus que laborieuse...J'abandonne !
Impossible d'aller au delà d'une dizaine de page. La traduction qui semble littérale rend la lecture plus que laborieuse...J'abandonne !
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J'ai arrêté un peu avant la moitié du livre, car je ne veux plus me forcer à aller au bout de chaque lecture.

Je suis mitigée. Il y a des moments que j'ai appréciés, où j'étais emportée par les mots. Mais hélas, beaucoup d'autres, où je n'arrivais pas du tout à m'intéresser à ce que je lisais. Où j'étais ennuyée ou juste indifférente. La curiosité et certains moments m'ont fait insister un peu, mais au final, je n'ai vraiment pas réussi à ressentir pour Laz quelque chose d'assez profond pour rester jusqu'au bout.

Ça reste une oeuvre que je conseille, pour celles et ceux qui hésiteraient.
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Citations et extraits (74) Voir plus Ajouter une citation
« Tu l’as déjà heurté, le “mur d’absurdité”, n’est-ce pas ? » Tuntun, après
m’avoir apporté mon bol, s’est assise en face de moi.
« Oh oui, très tôt, à seize, dix-sept ans, simplement à l’époque je ne
savais pas ce que c’était, un “mur d’absurdité”. »
Les nouilles sont un vrai régal, je les attaque à belles dents.
« C’était dans quelles circonstances ? Je peux savoir ?
– Pas de problème – je lève un pouce en signe d’assentiment –, il suffit
que tu reconnaisses par contrat que tu dois cent bols de nouilles à Laz. »
De copieuses pâtes bien blanches, ainsi qu’un beau morceau de bœuf
tendre, baignent dans le bouillon délicieusement parfumé.
« Hé, c’est mon père en personne qui a mitonné ce bouillon ! proteste
Tuntun après avoir fait semblant de se concentrer. Le père et la fille seraient
tous deux tes esclaves cuistots, pour cuire ta viande et préparer tes pâtes ?
– Vous vous y prenez comme vous voulez, ce n’est pas mon problème !
dis-je, avant de reprendre sérieusement : À ce moment, j’ai eu l’impression
que le monde avait brusquement changé en une seule nuit. En quoi il s’est
modifié, ce n’était pas très clair pour celle que j’étais alors, tout ce que je
sais c’est que j’ai été brutalement jetée dans l’inconnu, et que tous mes
proches se trouvaient coupés de moi, si éloignés qu’ils n’auraient pu
m’entendre, pas même si je criais de toutes mes forces. Je n’aurais jamais
imaginé, j’attendais tous les jours que le monde d’avant réapparaisse, qu’on
vienne me repêcher de l’état où je sombrais en silence. Tous les matins,
quand j’ouvrais les yeux et que je voyais le soleil, je me mettais à pleurer :
ce jour serait pareil et ce que j’étais devenue était désormais ma cruelle
réalité.
– Comment t’es-tu sortie de cet état ?
– Sans doute, le sentiment qu’il fallait abattre ce “mur d’absurdité” m’a
quittée. Car ça, ce n’était qu’un début et une fois passé le prologue, mes
relations avec le monde n’ont fait qu’empirer. En fait, les disputes n’ont
plus cessé. De l’absurdité ? Ça aurait encore été simple ! Quand tu respires
un air qui se raréfie, à la longue, tu finis par te forcer à t’y faire, sinon tu
risques de suffoquer encore plus vite. Le jour où ta réflexion devient la plus
forte, l’absurdité tombe d’elle-même.
– Ça fait penser aux disputes d’un couple qui se chamaille : il suffit qu’un
des deux prenne un couteau de cuisine ou un pistolet pour que les disputes
cessent d’elles-mêmes, pas vrai ? avait-elle poursuivi – en riant comme si
elle parlait de tuer un moustique.
– Oui, c’est tout à fait ça, en tout cas pour moi. Et ton mur à toi, comment
c’est venu ?
– Je n’ai jamais eu cette impression que le monde changeait brusquement
en une seule nuit, mais celle d’un état où l’on sombre en silence, ça oui. Et
aussi de ne pas savoir ce qui m’arrivait. Cela s’est dressé sans prévenir
devant moi, voilà pourquoi je parle d’un “mur d’absurdité”. Pour dire
précisément les choses, ce serait comme un véhicule qui tombe en panne et
qu’on envoie à la casse. Dès le plus jeune âge, je montrais une vraie
maestria dans tout ce que j’entreprenais, probablement parce que mes
parents me laissaient parfaitement libre : je ne cherchais pas à avoir les
meilleurs notes, à plaire et à être la plus belle, mais j’y parvenais sans
problème, j’étais la première et savais me faire apprécier de mon entourage.
Physiquement, je commençais à être pas mal et je mettais la même maestria
à être ce qu’on appelle une enfant heureuse. Si l’on excepte les boutons
d’acné et mes premières règles qui ont été très pénibles, je reléguais aux
oubliettes tout ce qui m’embêtait. Au collège, j’étais un vrai tournesol, mon
emploi du temps était très sage, après mes cours je faisais tout de suite mes
devoirs, sans aucune difficulté parce qu’il me suffisait de bien écouter en
classe pour avoir de bonnes notes. Alors le reste du temps était à moi.
J’aimais bien lire des livres qui aident à s’instruire, du genre Mille et Un
Pourquoi, je fabriquais mes meubles et les peignais, c’est moi-même à
l’époque qui ai créé le décor de ma chambre. Apparemment tout me faisait
plaisir. C’est à partir du lycée que l’ambiance m’a paru étouffante, je me
demandais : comment les autres font-ils pour ne s’intéresser qu’aux
devoirs ? Moi, au contraire, j’aimais surtout me détendre, je n’avais plus
tellement envie de faire sagement mes devoirs et j’étais à la tête de toutes
sortes d’activités, organiser une équipe de volley, s’entraîner au basket,
initier des échanges avec l’école de garçons, essayer, juste pour voir, la
classe d’excellence en vue d’intégrer l’Academia Sinica. Là-bas, pour le
concours de théâtre, j’ai même monté une pièce super ambitieuse. Et puis
j’y ai rencontré un garçon qui depuis n’a jamais cessé de me courir après.
J’y ai eu des résultats moyens, mais c’était devenu très différent, l’ambiance
était tout autre, en grandissant au milieu de ces filles, même si j’ai continué
à passer du bon temps. Je me souviens, alors, je demandais à mon grand
frère de m’accompagner le soir à bicyclette, la nuit était si fraîche, nous
roulions chacun de notre côté en nous parlant à peine, je me concentrais sur
les coups de pédale, un après l’autre, on faisait un tour et puis on rentrait à
la maison, c’était comme ça, ces années de lycée, une impression que
j’aimais vraiment beaucoup… »
Elle parlait, parlait, et puis elle souriait.
« Apparemment il n’y avait aucune raison pour que les choses en arrivent
à la situation actuelle, tu saurais dire ce qu’il s’est passé ?
– Peut-être est-ce la faute de notre mode de vie, à l’université ? C’est
terrible, ce doit être tout ce qu’on cache depuis longtemps sous les tapis, les
microbes s’accumulent au fil du temps, ils sont si ténus qu’on ne peut les
voir qu’au microscope, mais ils s’amassent et se multiplient d’une façon
absolument effrayante. C’est ça, l’existence des étudiants, à moins que tu ne
t’y décides par toi-même, personne ne t’oblige à quoi que ce soit, aussi s’il
y a des comptes non réglés sous les tapis, dans ce climat de laisser-aller, des
moutons se forment, ça bloque l’aspirateur et on finit par ne plus avoir la
moindre capacité de se défendre contre l’apathie. On est soi-même aspiré,
on cherche à tendre la main pour attraper quelque chose et pouvoir s’en
sortir. La première à laquelle j’ai voulu me raccrocher a été Zhirou.
Je voulais qu’elle me tienne compagnie tous les jours, jusqu’à lui demander
de rester dormir chez moi, c’était terrible pour moi de me retrouver toute
seule dans mon logement, un sentiment que je n’avais jamais eu auparavant.
Le soir, surtout, le temps me pèse énormément. Chaque seconde semble
s’écouler de manière autonome, à l’infini, comme si je devais briser une
vitre pour pouvoir avancer, c’est insupportable. Avec une personne bien
vivante auprès de moi, je me sens beaucoup mieux. Mais elle, dans son
souci de tous les cours à avaler, est très inadaptée à la vie étudiante, avec
moi en plus qui n’arrivais pas à exprimer ce que je ressentais, elle ne voyait
pas dans quel chaos je me trouvais. Je devenais de plus en plus incapable de
lui parler, j’insistais pour qu’elle fasse des choses qui étaient au-dessus de
ses forces, comme de tout laisser tomber pour rester avec moi, je lui disais
qu’elle était la seule à qui je pouvais demander ça. Nos relations partaient
en vrille. Elle était déjà pessimiste, rarement joyeuse, avant c’est moi qui
devais lui remonter le moral et maintenant que je faisais la grève elle me
montrait un visage inexpressif et ne savait pas me réconforter. Cela me
rendait malheureuse à pleurer quand je lui voyais ce visage, mais il fallait
me retenir, je ne pouvais rien dire. Mon silence l’a meurtrie, à la longue, et
ma dépression a fini par la contaminer. Un soir, je lui ai dit, tu voudrais bien
essayer de sourire ? J’ai dit aussi que je ne supportais plus de voir cette
mine inexpressive, alors elle s’est levée, le visage toujours sans expression,
et elle est partie en disant qu’elle n’y arrivait pas, qu’il ne fallait plus qu’on
se voie… »
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Je ne voulais de personne. Inutile. Superflu. Des présences m’auraient
blessée et m’auraient nui.
Cette carte de crédit à couverture bleue qu’était la maison, je n’avais
vraiment plus besoin d’y retourner. Inutile de rentrer chez moi. L’université
me fournissait provisoirement une sorte de profession, ce qui m’épargnait
de me sentir écrasée sous le carcan des obligations de l’existence, il me
suffisait de la considérer comme une simple scène de théâtre et de remonter
le ressort pour suivre la frénésie générale – la mascarade des « tire-au-flanc
qui vont le payer », la production d’ordures vides de sens et de
constructions étranges qui en résultait –, ce qui contraignait mon corps à
poursuivre son chemin mais excluait mon âme, sans que personne – là est le
plus effrayant ! – le sache ni daigne le reconnaître. Ces deux
« composantes » coexistaient concrètement chaque jour comme mes
principales constituantes reconnues par autrui, l’une et l’autre sans cesse à
ramper pour exiger toujours plus de moi, alors qu’en réalité sous leurs
dénominations abstraites elles ne me constituaient pas plus que le
supermarché d’à côté.
Je ne voulais pas de journaux. Pas de télé. N’assistais pas aux cours,
hormis celui d’éducation physique, où on faisait l’appel. N’avais pas le
moindre contact avec les humains dont j’avais pu faire la connaissance
auparavant, n’adressais pas davantage la parole à ceux avec lesquels
j’habitais. Le seul moment où je parlais, c’était le midi ou le soir à la
Société des débats, pour ses séances d’échanges et de révisions où chacun
se lisse les plumes et vient faire la roue.
Je le sais depuis trop longtemps, je suis à la base un magnifique paon,
peu enclin à renoncer à sa nature et toujours prêt à exhiber inlassablement
son plumage, je ne peux m’empêcher d’aller me mirer dans le regard
d’autrui et m’extrais difficilement de la fascination profonde qu’exerce sur
moi cette danse de reconnaissance mutuelle. C’est ainsi : là est une de mes
pires addictions.
Cependant, c’était assurément un monde à l’écart de la foule des vivants.
Disons que, pour nous construire un système clos propre à nous satisfaire, il
fallait nous habituer au fait que « ce qu’on appelle le monde c’est soi-
même ». Le moi, cette conscience si étrange, qu’il faut mettre en scène, de
manière vive et incisive, aux yeux de ce qu’on appelle le monde des autres.
Il y a l’air du temps, il faut donc se servir de toute cette inconsistance
pour être dans la course. En anglais on dit run through, le terme est plus
adapté
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« Tu supportes, toi, de décevoir les membres de ta famille ? »
La façon dont elle renvoyait la question pour éviter de répondre était du
grand art, je lui ai répondu avec sincérité :
« Depuis le moment où j’ai commencé à comprendre des choses, je n’ai
cessé d’imposer à ma famille des déceptions, de détruire une par une toutes
les images idéales qu’ils s’étaient forgées à mon sujet. Bien que cela les
fasse souffrir, faire autrement aurait signifié me sacrifier, juste pour me
cacher derrière de fausses images. J’ai lutté jour après jour pour dissimuler
ma rancœur, dont le poids n’a probablement rien à envier aux souffrances
que je leur inflige.
– Et tu en es venue à bout, de ces images idéales te concernant ? a repris
Zhirou d’une voix douce.
– Difficilement. Quand j’y arrive, tout le monde en sort blessé, moi la
première, et je me heurte immédiatement à leurs efforts pour en élaborer de
nouvelles. Une sorte de compensation de leur part, mais qui crée sans cesse
des conflits. Entre nous il y a toujours de l’amour et, de mon côté, toujours
le besoin qu’ils m’acceptent, alors il m’a fallu prendre mon courage à deux
mains pour rompre une bonne fois. Sinon je finis toujours par monnayer ma
liberté et par battre en retraite dans les moments de conflit ouvert, à cause
de l’amour et de mon besoin d’être acceptée. »
Raconter mon expérience familiale à ces deux filles ne me gênait en rien,
au contraire, mon besoin d’en parler allait grandissant.
« Pour moi, cela s’appelle abdiquer sans combattre. On dirait une
maladie mentale qui interdit le moindre mouvement parce que cela risque
de faire mourir tout le monde sur Terre, pas vrai ? » a raillé Zhirou de sa
voix si agréable, tout en prenant la paille du verre de Tuntun et en la
triturant. Une sorte de vague relent masochiste m’a chatouillé les narines,
son sourire me faisait penser tout d’un coup à une beauté sur le retour qui se
démaquille en montrant ses rides.
« La comparaison paraît un peu exagérée…, a dit Tuntun en secouant la
tête, et puis elle a récupéré sa paille, l’a redressée et replongée dans son
verre et a essayé d’aspirer son thé glacé avec. Ce que t’explique Laz, c’est
qu’on a toujours du mal à accepter le fait qu’on déçoit ses parents. Surtout
ceux qui veulent que leur enfant choisisse la filière “commerce
international”, les familles de ce genre, ce sont des citadelles
imprenables ! »
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J’ai longtemps cru que tous les hommes devaient avoir un « archétype »
féminin au fond d’eux, toute leur vie, et que la femme qu’ils aimeraient
serait celle qui ressemblerait le plus à ce modèle. Moi, bien que je sois une
femme, mon archétype était féminin lui aussi. Un archétype qui tour à tour
baignait ma réalité ou la fuyait, telle une merveilleuse hallucination
s’élevant aux confins des plus hautes cimes, sur des territoires figés par le
gel. J’étais sûre qu’on ne pouvait pas avoir plus beau modèle dans la vie, et
je l’ai cru pendant quatre ans. J’ai usé l’intégralité de mes années d’études,
l’époque où on est le plus courageux et le plus sincère envers l’existence, à
ne croire qu’en cela.
Aujourd’hui, j’ai cessé d’y croire, à cette histoire, elle n’est plus qu’une
toile improvisée par un peintre du dimanche, un petit tableau resté chez moi
accroché au mur. Quand j’ai commencé, allègrement, à ne-plus-y-croire, je
me suis mise peu à peu à tout oublier, me débarrassant à vil prix des trésors
que j’avais amassés. Mais j’ai été traversée par une inspiration : il faut que
j’écrive tout ça, sinon mon réceptacle à souvenirs sera bientôt vide, et il est
à craindre qu’un jour en me réveillant je ne sache même plus où j’ai rangé
la liste des prix.
Il s’agit de deux nécessités indissolubles, fixées l’une à l’autre par du
scotch à double face. Au verso : « N’y crois pas » ; et au recto, bien en
évidence, ce qui va avec : « Fais preuve de cruauté et tranche dans le vif ».
À un moment, de la même façon qu’un jour j’ai réussi à écrire pour la
première fois mon propre nom, j’ai fait connaissance avec ce mot-ci, la
« cruauté ». La cruauté, en fait, c’est comme la charité, toutes deux existent
sur cette terre, où mal et bien ont des places égales, la cruauté et le mal ne
sont que naturels et leur emprise sur la moitié de cette Terre est également
utile et efficace. Aussi, face à la cruauté du destin, ne me restait-il qu’à user
de plus de cruauté, et j’ai agi comme le boucher du Tchouang-tseu, au geste
si libre et délié, quand il découpe un bœuf.
J’ai cruellement tranché dans le vif – de l’existence, de moi-même,
d’autrui. C’est cela qui convient à l’instinct animal, à la rationalité, à
l’esthétique, à la métaphysique, et qui se trouve à l’intersection de ces
quatre branches d’un même ensemble.
J’ai vingt-deux ans, point à la ligne.
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Le jour venu, dès que sonnait mon réveil, je sautais du lit pour aller
« travailler » dans mon association. Il me fallait filer à tire-d’aile, sans
même me laver la figure ni me brosser les dents, pour me rendre à
l’université sur ma bicyclette, si ce n’était pour un rendez-vous avec les
membres du bureau ou pour porter d’urgence des formulaires au groupe
d’activités hors les murs, ce pouvait être pour préparer les documents en
vue d’une réunion prévue à la mi-journée, ou encore pour peindre des
affiches, envoyer des invitations, classer des dossiers, aller acheter des
fournitures ou remplir n’importe quelle autre tâche qui était à exécuter
toutes affaires cessantes, mais dont personne n’avait jamais le temps de
s’occuper. Il m’arrivait, devant un jeu dépourvu d’intérêt qu’il fallait traiter
en affaire d’État et organiser avec autant de sérieux, de me bâtir tout un
scénario pour y parvenir. Il en irait de même quand j’aurais intégré la
société et un emploi : puisque c’était mon choix, j’aurais à m’y plonger à
fond, sinon l’intérêt retomberait et je serais gagnée par le sentiment
d’accomplir un travail fastidieux et dépourvu de sens.
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Video de Miaojin Qiu (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Miaojin Qiu
Sous les feux de la critique cette semaine, deux livres :
"Terra Alta" de Javier Cercas - Sur des terres catalanes qui portent encore les stigmates de la bataille de l'Èbre, Terra Alta est secouée par un affreux fait divers : on a retrouvé, sans vie et déchiquetés, les corps des époux Adell, riches nonagénaires qui emploient la plupart des habitants du coin. La petite commune abrite sans le savoir un policier qui s'est montré héroïque lors des attentats islamistes de Barcelone et Cambrils, et c'est lui, Melchor, qui va diriger l'enquête. Laquelle promet d'être ardue, sans traces d'effraction, sans indices probants. Or l'énigme première – qui est l'assassin ? – va se doubler d'une question plus profonde : qui est le policier ?
Car avant d'être un mari et père comblé, coulant des jours heureux dans cette paisible bourgade, le policier converti en justicier obsessionnel fut un ancien repris de justice, élevé par une prostituée dans les bas-fonds de Barcelone. Alors qu'il se pensait perdu par la rage et par la haine du monde, la lecture fortuite des Misérables de Victor Hugo est venue exorciser ses démons et bouleverser son destin. Il aurait pu être Jean Valjean… s'il ne s'était changé en Javert.
À Terra Alta, plus qu'ailleurs, bien des secrets plongent leurs racines dans la guerre. Et, pour résoudre l'affaire qui lui est confiée, Melchor doit avoir conscience que l'amour de la justice absolue peut s'avérer la plus absolue des injustices. Il va lui être donné de partager le dilemme de Jean Valjean : “Rester dans le paradis et y devenir démon ! Rentrer dans l'enfer et y devenir ange !”
"Les carnets du crocodile" de Qiu Miaojin - Laz, jeune étudiante taïwanaise, passe une grande partie de son temps seule à écrire et décoder ses obsessions jusqu'au bout de la nuit. Amoureuse d'une camarade qui s'acharne à lui souffler le chaud et le froid, épuisée de danser sans relâche sur la frontière du désir et de la haine, Laz va chercher du réconfort auprès de sa bande d'amies et d'amis, tous vifs d'esprit, artistes quelque peu moroses, amants autodestructeurs, insoumis et surtout queers.
Dans son journal, Laz écrit l'urgence de vivre, le désir, les sentiments brûlants... elle parle aussi de crocodiles qui portent des manteaux d'humains ! Les médias les traquent, craignent une épidémie : peuvent-ils se reproduire ? Quand, de leur côté, les crocodiles échangent sur leurs goûts littéraires et musicaux, adorent la glace à la crème, font des courses, prennent des bains...Un guide de survie pour les inadaptés de tous bords, pour tous ceux qui s'identifient parfois à un monstre caché dans un manteau humain.
Pour en parler, aux côtés de Lucile Commeaux : Marie Sorbier, rédactrice en chef du magazine I/O Gazette et productrice de Affaires en cours sur France Culture et François Angelier, producteur de l'émission Mauvais Genre sur France Culture.
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