Début du 20ème siècle, Victoire a été mariée, (bien davantage qu'elle ne s'est mariée), à Anselme de Boisvaillant, notaire de son état.
Mais à l'époque c'est l'usage et perdue dans une fratrie de soeurs, aucune autre destinée n'était prévue pour elle que de se "bien marier". Alors, elle s'est pliée aux exigences familiales pour remplir son rôle d'épouse et tenir sa maison avec l'aide indéfectible de Huguette et Pierre, domestiques fidèles depuis toujours au service des Boisvaillant. Mais de cette union imposée ne naît aucun enfant, Victoire redoutant entre tout " l'enchevêtrement immonde" avec son époux, auquel son éducation de jeune fille bourgeoise ne l'avait pas préparée. Anselme, déjà marié une première fois, se pense infertile et va maladroitement chercher du réconfort auprès de la très jeune bonne Céleste chez laquelle il " s'invite" occasionnellement et avec une grande brutalité. de cette relation contrainte va naître un enfant, Adrien. Ayant découvert la grossesse de Céleste et la vérité sur l'identité du père, Victoire impose ( plus qu'elle ne propose ) un marché à la jeune domestique : la garder auprès d'eux mais faire passer l'enfant pour le leur. Victoire se dit donc mère d'Adrien mais ne parvient à donner aucune tendresse au nouveau-né... Pas beaucoup d'amour(s) jusque là me direz-vous...oui mais l'amour est protéiforme et évanescent et s'invite là où on s'y attend le moins. Dans ce foyer, de multiples sources d'
amours finissent par sourdre : celui d'Huguette pour son mari, blessé depuis la guerre, celui de Pierre pour Anselme qu'il considère presque comme un fils, l'amour naïf que la douce Céleste porte à la Sainte Vierge, celui plus inattendu et sensuel entre Céleste et Victoire et enfin celui que tous porteront à Adrien, point de convergence de tous ces
amours.
Un court et très beau roman, dans lequel la musique s'invite, comme souvent chez
Leonor de Recondo, violoniste avant d'être écrivain, même s' il s'agira ici de piano...j'ai désormais hâte de me jeter dans "
le grand feu".