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EAN : 9782322413027
104 pages
BoD books on demand (01/02/2022)
4.75/5   8 notes
Résumé :
Le corps d'un homme décapité est retrouvé près du port, rejeté par la mer.
La tête est prise dans les filets d'un pêcheur.
Il y a une enquête.
Qui était-il ?
Quelle était sa vie ?
Que s'est-il passé ?
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Simplement parfait.
Takotsubo pourrait être la suite de Seth Et le Garçon-Sirène, roman que j'avais adoré, une histoire profondément touchante d'amours gays dans le monde frappé par le sida et l'homophobie ordinaire des combats pour le mariage pour tous. Il en a toutes les spécificités, et techniquement, il se positionne chronologiquement après, et les personnages s'y retrouvent.

Mais je considère Takotsubo comme étant le compagnon de Seth Et le Garçon-Sirène. Ils peuvent se lire indépendamment, ils se croisent sans jamais piétiner les plate-bandes de l'autre, et leur abord de la même histoire est à la fois diamétralement opposée et parfaitement enlacée. A l'image des relations amoureuses belles et dévastatrices entre garçons que Yves Rozier empoigne et restitue avec une tendresse et une force sans nom, ces deux romans sont un couple d'amoureux à la recherche d'une chimère, merveilleux ensembles, mais tout aussi beaux à part.

Le roman est une collection de rapports de témoins et de proches de Seth, retrouvé noyé et décapité dans les flots, pendant l'enquête destinant à éclaircir les circonstances de sa disparition. L'interrogatoire est muet, les questions ne sont pas posées, mais elles sont cependant tout à fait compréhensibles tant les réponses sont orientées et guidées par un flic invisible. Au travers des témoignages de ceux qui ont croisé le défunt, ceux qui ont trouvé son corps, puis, petit à petit, son cercle proche d'amis et d'amants, on reconstitue le puzzle complexe d'une vie menacée par la montée fulgurante du sida, par la haine crasse des institutions et des idiots, et par un coeur grand, mais de plus en plus fragile.

Fidèle à lui-même, Yves Rozier possède un style d'écriture aussi particulier que précis, et aussi unique que précieux. Chaque ligne, chaque phrase, chaque expression est soupesée et minutieusement sculptée pour maximiser son impact, tant sur la reconstitution de l'histoire que sur les émotions immenses qui se cachent dans cette chorale qui chante la même chanson, mais sur différents accords. On sent que l'auteur a crée les voix de chaque personnage de façon totalement indépendante, en donnant à chacun un rôle, une vie, une couleur, une force et des faiblesses, et parfois, les traces de l'homophobie et du racisme ordinaire, et les racines de ce qui fait tant de mal dans la société moderne.

Il y a une fantastique progression dans l'ordre des témoignages, comme un cercle éloigné de Seth qui se rapproche petit à petit, et aide à raconter l'importance que les gens ont eu pour lui, et ceux qu'il a aimé plus que les autres. Il y a aussi une façon tout à fait particulière de raconter les romances sans les juger, pas seulement en transformant les amoureux gays en des couples immortels par leur beauté et leur force, mais aussi en caressant doucement les erreurs d'un soir, les choix lâches, les fois où la société finit par l'emporter sur la romance. Jamais les personnages ne tombent dans un extrême en pointant du doigt les haines qui ne sont pas manichéennes ou motivées par une envie viscérale de faire le mal, mais elles sont le produit d'un manque d'éducation, des influences religieuses, de préjugés ancestraux, et des contradictions humaines. Il faut une grandeur d'âme toute particulière pour tricoter un récit si engagé sans jamais prendre le parti de la facilité. Et, pour enfoncer le clou, le seul acte de violence homophobe pure et dure, qui finira par tuer un homme, se place comme la gifle qu'on prend en pleine figure et qui vient faire comprendre que c'est bel et bien cette haine-là, commune et quotidienne, qui vient alimenter les horreurs commises en son nom. Mais ce n'est jamais fait autrement que par le constat navrant de ce qu'on laisse passer.

Un des trésors de ce récit-et il y en a tellement qu'une seule chronique ne peut décemment pas suffire-réside dans la maîtrise absolue du principe de roman chorale. Tous les chapitres présentent un acteur dans la vie de Seth, que ce soit un premier rôle ou de la figuration vague. Aucunes des voix ne se ressemblent, même un peu, que ce soit par les histoires, les idées, les envies, les besoins de tous qui sont articulés et façonnés personnage par personnage, mais aussi par leur façon de parler. Les tics de langage, les expressions, les mots utilisés, les variations de registres de langue, ils ont tous une couleur propre. C'est un camaïeu de voix et de gens, tout en nuances et en particularités. On a à peine besoin de lire le nom de la personne en tête de chapitre pour comprendre qu'on est passé à quelqu'un d'autre.

L'autre très belle surprise de ce roman, c'est comme l'auteur ne fait pas que raconter l'histoire de Seth autour de sa mort, mais il réussit aussi à insérer ici et là des indices sur le futur de certains des témoins. Par un lapsus, par une question, par la mention inconsciente de quelque chose...Cela donne aux personnages une dimension très vivace, très organique. En racontant les gens, il raconte Seth, et en racontant Seth, il raconte le monde. Il y a une façon d'intégrer la grande histoire dans les petites, et de tenir tous ces gens qui se sont peut-être, ou peut-être pas, croisés, dans le creux d'une main qui transforme l'expérience de lecture en quelque chose de sublime, au sens littéral du terme.

Aucune information ne manque pour comprendre l'histoire, qui se met en place comme un puzzle, ou plutôt, comme une photo un peu jaunie déchirée années après années, et dont on retrouve les pièces perdues aux 4 vents, jusqu'à ce que le portrait soit de nouveau intact. Ils viennent tous apporter leur fragment de l'image, leur vision de Seth. Un sympathique client ? Un père évanescent ? Un ami ? Un proche ? Une silhouette perdue dans le vague ? le traumatisme de toute une vie ? Un amant ? Un artiste ? Un être humain comme un autre ? L'histoire a beau être la même, celle de cet homme qui a perdu la vie dans cet accident-mais en est-ce vraiment un ?-et pourtant, racontée ainsi, elle devient aussi un peu celle de tout le monde. On mesure à quel point un simple fait peut subir toutes les distorsions possibles selon que son existence est narrée par quelqu'un de proche, par un inconnu, par quelqu'un qui a aimé ou par quelqu'un qui jugera.

Le nom du roman, Takotsubo, évoque une pathologie, celui du coeur brisé sur le plan physique. Mais Yves Rozier ne se contente pas de cette description, il parle des effets catastrophiques de la perte d'un amour, et comme le Takotsubo n'est peut-être pas le produit d'un seul choc, mais des chocs de toute une vie. Il y a un cri d'amour sous-jacent, et comme être gay n'est pas seulement une orientation sexuelle, mais aussi un combat contre la haine, contre le SIDA, contre le rejet de la société, du monde du travail, des institutions, et contre l'envie aussi compréhensible que terrible de ne jamais sortir du placard.

La valse des témoignages est encadrée par deux chapitres importants : un article de presse, froid et impersonnel, et une lettre, enflammée et façon cri de vie à l'aube de la mort. C'est une parenthèse terriblement efficace, de la nuance la plus éloignée à la plus forte, la plus tragique et la plus belle tout à la fois.

On appréciera aussi le traitement de la fin de vie et de l'envie de ne plus aller plus loin, sans sensationnalisme, sans volonté de faire débat, mais dans un constat simple et désarmant, déshabillé de tout jugement. On se surprend à prendre une pause et réfléchir sur la question, et bousculer ses croyances ou ses attentes sur le sujet.

Enfin, que dire de cette légende de l'homme-sirène qui marque les deux romans, et qui est si bien montée et distillée au travers des obsessions des personnages, et surtout, de Seth. le mythe de la sirène qui séduit par son chant et pousse les marins à la noyade devient ici presque un révélateur sur le coeur des hommes, et surtout, celui de ceux qui aiment aussi les autres hommes. Cette légende étrange est si bien capturée par l'auteur qu'on se surprend presque à chercher des cheveux dorés dans les flots au bord de la mer. Et si Yves Rozier n'avait fait que raconter la vérité, et si l'homme-sirène était tout près de nous...?

Au final, un roman court mais magnifique, qui compense sa taille modeste par une richesse et une densité hors du commun. Loin des sentiers des histoires d'amour rentre-dedans, celle-ci est subtile, profonde et bouleversante, et elle donne à réfléchir sur les biais de la société, et sur l'Amour, le vrai, le pur, celui qui passe au delà de la mort.
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: Ce livre se rapproche d'un tome 2 si s'en est pas déjà un, le tome 1 serait le dernier livre que j'ai lu : Seth et le garçon sirène. Comparé au premier tome, j'ai vraiment adoré lire ce livre ! J'étais tellement à font dedans que j'étais super captivé par les personnages, que je connaissais déjà, certes… mais j'avais l'impression de les redécouvrir alors que j'avais lu le premier tome 3 jours auparavant ! Ce livre est vraiment super ! de plus je trouve qu'il n'est pas forcément nécessaire d'avoir lu le premier tome pour comprendre l'histoire, mais j'ai bien aimé que l'auteur fasse une suite à son premier livre, mais une suite totalement différente en style d'écriture ! J'ai beaucoup plus accroché à ce style, que l'on peut qualifier d'enquête peut être… Je n'ai pas la note parfaite puisque pour moi il y a un petit bémol dans ce livre, c'est juste un ressenti personnelle. J'aurais bien aimé que le livre soit plus long (même si les livres court font du bien parfois) puisque je suis resté un peu sur ma faim quand je suis arrivé à la fin de l'histoire… j'aurais aimé une enquête un peu plus longue, qu'il y ait soit plus du suspens sur la cause de la mort du jeune homme, du pourquoi du comment etc. A part cela, la lecture de ce livre était un véritable plaisir ! Je ne me suis pas ennuyé du tout !
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J'ai terminé la lecture les larmes aux yeux, le coeur en miettes et la gorge nouée. 

Quelle belle histoire que celle de Seth à travers les témoignages de ceux qui l'ont croisé, aimé. 

On remonte le temps. Chacun à sa manière raconte, livre ses impressions, ses sentiments bienveillants ou proches de l'indifférence. 

On découvre l'histoire d'une vie faite de rencontres, d'amour, d'acceptation de la maladie (celle qui insidieusement a rongé le coeur et l'âme), faire face au rejet des personnes qui se posent en justiciers de la moralité, torturent et tuent pour l'expression d'un amour différent mais beau et innocent. 

Des années bien sombres où il a fallu garder courage, lutter et avancer même rongé, physiquement et psychologiquement. 

La lumière, la délivrance, viendra d'une personne aussi improbable que fantastique,  le garçon-sirène aux cheveux si blonds, au sourire si brillant, qui insuffle autant la liberté que le désir. 


Les témoignages sont parfois surprenants par leur détachement, cette indifférence face à un être que ces personnes ont côtoyé et au final Seth laisse le monde autour de lui impassible et finit par ne demeurer qu'un vague souvenir. 

Il y a énormément d'analyses dans ce roman où la richesse d'une vie est faite de réussite et de désastre, de rencontre et de solitude, d'espoir et de maladie, mais le rêve final laisse la porte ouverte à la béatitude et au repos éternel. 

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J'ai adoré le livre « Seth et le garçon sirène » alors quand l'auteur m'a proposer de lire ce livre en disant que c'était la suite je n'ai pas hésiter une seule seconde. Ce livre qui est tout aussi incroyable que le premier

Pour preuve je l'ai lu en une traite. Il se lit parfaitement bien. Chaque chapitre est un témoignage de personne qui ont croisé la route de Seth. On y retrouve d'ailleurs les personnages qu'on a pu rencontrer dans le premier livre. Avec des témoignages qui pour la plupart sont touchants et prouve leurs amour envers Seth et pour ma part qui m'ont beaucoup ému. J'ai pris beaucoup de plaisir à lire chaque chapitre et à retrouver des personnes auxquelles on a pu s'y attacher dans le premier livre et notre attachement à eux ne font que de se renforcer dans ce livre. J'ai vraiment eu l'impression d'être la personne à qui chaque personne parle de Seth.

Pour finir je dirai que c'est une belle façon de clore l'histoire de Seth.
Je remercie encore une fois l'auteur pour m'avoir fait découvrir ses deux magnifiques livres. Et encore une fois je le répète cet auteur mérite d'être connu et d'avoir la reconnaissance qu'il mérite.
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De la part de @phildeslectures :

Tout d'abord, je remercie l'auteur
En ce qui concerne cette lecture,
On continue en quelques sortes les aventures de Seth mais cette fois après son décès et grâce aux différents points de vues de son entourage ou des personnes qui l'ont connu avec un témoignage
Les témoignages sont parfois surprenants par leur détachement, cette indifférence face à un être que ces personnes ont côtoyé et au final Seth laisse le monde autour de lui impassible et finit par ne demeurer qu'un vague souvenir
Ce livre m'a encore remuée mais je ne le regrette pas. Ce livre est une petite une fois que tu es dans l'histoire.
Je l'ai lu d'un trait, emporté par la galerie de personnages tous évoqués en creux, par la sensibilité à faire apparaitre par petites touches un personnage proche et touchant
Il y a énormément d'analyses dans ce roman où la richesse d'une vie est faite de réussite et de désastre, de rencontre et de solitude, d'espoir et de maladie, mais le rêve final laisse la porte ouverte à la béatitude et au repos éternel.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Un corps décapité a été découvert le long du chemin des contrebandiers de la côte entre le port et la basse corniche dans la nuit de jeudi à vendredi. Le substitut du procureur s'est rendu sur les lieux. Ce dernier a requis la présence d'un médecin-légiste. Les gendarmes ont bouclé la zone. L'identité du corps demeure toujours inconnue.

Le corps sans tête a été découvert échoué, accroché à des rochers en contrebas du chemin. Il est environ 23 heures lorsque l'alerte est donnée aux pompiers. C'est un promeneur tenant à son anonymat qui se promenait sur le sentier dit des contrebandiers qui a fait cette horrible découverte : celle d'un cadavre dont la tête aurait été coupée. Appelés par le témoin qui a retrouvé le corps mutilé, les pompiers présents ont alors rapidement sécurisé les lieux ne pouvant rien faire pour la victime, et pour ne pas polluer ce qui pourrait s'apparenter à une scène de crime jusqu'à l'arrivée des gendarmes.
L'affaire a été prise très au sérieux pour que dans la nuit même le magistrat du parquet de permanence de la ville se déplace sur le site pour superviser l'enquête.
— En tenant compte des éléments que nous connaissons tout ce que je peux dire, c'est que cette découverte macabre est inattendue et inhabituelle.
Il a tenu à préciser également qu'il faisait appel au concours d'un médecin-légiste pour comprendre ce qui s'est passé.
Selon nos informations, le corps serait celui d'un homme. Dans la nuit, les enquêteurs de la brigade de recherches ont débuté leurs investigations en gelant les lieux sur ce qui pourrait être le théâtre de cette horreur …
Joint par nos soins, ce vendredi, le procureur est encore peu prolixe sur cette affaire hors normes. Pour l'heure, l'identité du corps reste toujours inconnue. La thèse d'un acte terroriste ne serait pas privilégiée. Le parquet national antiterroriste de la capitale nous confirme qu'il n'a pas été saisi.
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.. Depuis que l'on s'est retrouvé dans ce train de nuit, rappelle-toi, nous étions tous les deux militaires, et nous rentrions dans notre ville au bord de la mer. Dans ce train, nous nous sommes reconnus et sans le dire, sans qu'il y est un quelconque contrat, nous ne nous sommes jamais plus éloignés l'un de l'autre. C'est, il me semble dans les années quatre vingt que cela a commencé, en même temps qu'apparaissait le Sida, cette maladie d'amour et de sang, qui nous a figés quand il n'a pas fauché certains de nos amis. Les années qui ont suivies cette nuit-là ont été de belles années. J'ai découvert avec toi la facilité et la simplicité dans les relations ...
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Yves Rozier présente "Seth et le Garçon-Sirène"
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