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Présenté comme un des plus grands écrivains irlandais, je n'avais encore jamais eu la chance de lire un roman de Donald Ryan. Dans ce roman il nous livre le récit déchirant d'une femme qui va se retrouver isolée et rejetée pas ses voisins pendant sa grossesse. Cette solitude la ramène à son mal-être, à ses souvenirs les plus déchirants comme la perte de sa mère, la relation des ses parents, sa meilleure amie qu'elle avait abandonnée. Cette introspection nous permet de comprendre Melody Shee

Dans sa vie Melody n'avait connu qu'un homme, Pat, qu'elle a aimé passionnément, mais cette passion est devenue destructrice surtout lié au fait que le couple n'arrivait pas à avoir d'enfant. Cette douleur ne fera qu'accentuer la destruction du couple. Mais même dans les années de haine, le couple reste proche, la moitié l'un de l'autre. Pat malgré ses erreurs reste touchant, un homme avec ses failles mais qui aime profondément sa femme et cela se ressent. Mais cette grossesse, elle devra la vivre seule. Dans cette solitude, elle pourra compter sur son père qui malgré ses convictions sera toujours présent pour elle, la soutiendra les yeux fermés et acceptera les choix de sa fille. Sa route croisera aussi celle de Mary Crothery, jeune femme de la communauté des gens du voyage, très seule aussi car mise à l'écart des siens. Pourtant différentes, cette solitude rapprochera les deux femmes. Mary et Melody vont alors créer des liens très forts et se sauver mutuellement. L'auteur nous fait aussi entrer dans cette communauté et découvrir leurs valeurs, son fonctionnement, cet honneur qui se lave par le sang, ce que j'ai trouvé très intéressant.

Un roman intense, percutant porté par une plume fluide qui dépeint parfaitement des personnages humains avec leurs failles. le mal-être est palpable, les sensations et sentiments décrits avec justesse. Une introspection prenante qui permet d'espérer de meilleurs jours. La fin émouvante m'a vraiment surprise. Une très jolie découverte que ce roman.
Merci à Babelio et aux Éditions Albin Michel pour cet envoi dans le cadre d'une masse critique privilégiée.
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Un roman à l'ambiance sombre, pesante et torturée, mais parfaitement cohérente avec les sujets abordés et le caractère à la fois profond et complexe des personnages. Un style qui va droit au but et que l'on peut aisément qualifié de percutant. C'est une histoire qui suscite la curiosité, mêlant des motifs sociaux et psychologiques qui trouvent leur résonance dans notre société actuelle. Notons qu'il s'agit également d'un roman émouvant si l'on s'attarde sur la moralité et les remords de l'héroïne. J'ai apprécié cette lecture bien que j'ai parfois trouvé l'atmosphère trop lourde, mais c'est le roman qui veut cela, je ne le lui reprocherai donc pas. Cependant, je tiens à saluer le talent d'écriture de l'auteur qui mieux que personne, sait mettre en scène les réalités et les conséquences des relations toxiques.
Je remercie Albin Michel et Babelio de m'avoir délivré cette lecture en avant-première.
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Melody Shee est enceinte lorsqu'elle commence à écrire son journal intime et à lui confier ses états d'âme. Son récit débute à sa douzième semaine de grossesse, et le moins qu'on puisse dire, c'est qu'elle a des idées noires.
Elle qui a aujourd'hui 33 ans, a étudié l'histoire et la littérature anglaise à l'université et obtenu son master de journalisme, se retrouve femme au foyer. Elle a fait tous les efforts possibles pour se faire connaître, n'a jamais réussi à trouver un emploi stable et bien entendu son mari, plutôt traditionnaliste, en a été fort satisfait. Jusqu'au jour où, des années après avoir mis une petite annonce pour donner des cours particuliers, le père de Martin Toppy , un homme célèbre parmi les gens du voyage car un chef respecté, est venu frapper à sa porte pour qu'elle apprenne à lire et à écrire à son fils, âgé déjà de 17 ans mais en échec scolaire.
Peu à peu, Mélody nous raconte comment elle en est venue à céder à ce jeune garçon, aux yeux si bleus...devenu malgré lui, le père de son bébé.
Elle nous livre peu à peu des détails sur sa vie de couple. Elle a été mariée trop jeune avec Pat, qui vient de la quitter en apprenant qu'elle attendait un enfant. Avec lui, elle a entretenu une relation que l'on peut qualifier de "toxique", car tous deux pendant des années se sont fait beaucoup de mal. Elle a fait de nombreuses fausses couches dans le passé ce qui a mis à mal leur couple et explique la réaction de son mari.
Elle retrace peu à peu tous les instants importants de sa vie, et en particulier ceux où elle a souffert durant son enfance avec une mère, sans nul doute dépressive, en tous les cas absente et enfermée dans sa chambre tout au long de la journée.
Elle raconte les souvenirs qui la hantent parce qu'elle continue à culpabiliser, comme par exemple, la relation qu'elle entretient avec son père, aimant et discret, ou bien encore, le suicide de son amie Breedie qu'elle avait délaissée et fait souffrir pour s'attirer les faveurs de Pat son mari. Elle repense à quel point son rôle a été négatif dans cette terrible histoire... tout cela parce qu'il était entourée d'une cour de filles, toutes amoureuses et qui ne voulaient pas, au départ, la laisser les rejoindre, sauf si elle sacrifiait son amitié et sa loyauté envers Breedie. Certes, elle n'avait que 16 ans, et à cet âge les amitiés comme les amours vont et viennent...mais elle ne se pardonne pas ce qui s'est passé ensuite et se juge responsable.
Alors qu'elle revient vers le camp où vivait Martin, et qu'elle apprend que lui et sa famille sont partis, elle fait la connaissance d'une toute jeune femme, Mary Crothery, mystérieuse et intuitive qui semble tout deviner d'elle. Elle a été rejetée par sa famille et par son mari, et vit toute seule dans sa propre caravane. Toutes deux vont se lier d'amitié...une amitié qui va devenir indispensable à Mélody qui ne pensait pas qu'elle pourrait un jour revivre des instants aussi forts à nouveau, comme quoi la vie peut parfois prendre un tournant inattendu.
Désormais son destin est bel et bien lié pour toujours aux gens du voyage, à ces trimardeurs si peu respectés, se déplaçant de ville en ville pour trouver du travail pour nourrir les leurs, et cela pour le meilleur et pour le pire...

C'est un livre à la fois terriblement triste et énormément prenant, avec des drames relatés avec émotion, et d'autres événements de la vie quotidienne qui le sont avec réalisme, parfois même teintés d'humour.
Le roman est bâti entièrement autour de la grossesse de Mélody, et chacun des chapitres se décline en suivant les semaines de la grossesse, jusqu'à la naissance et au final, terriblement émouvant, et que je n'avais, je l'avoue, pas vu venir du tout, bien qu'au cours de ma lecture, l'idée m'ait effleuré que la vie était décidément bien mal faite pour ces deux jeunes femmes, je ne vous dévoilerai rien.

C'est le premier roman que je lis de cet auteur, et j'avoue que j'avais hésité à l'emprunter à la médiathèque numérique, mais que je n'ai pas eu à le regretter tant j'ai eu du plaisir à découvrir sa plume, sa manière de suggérer plutôt que de décrire, de provoquer de l'émotion au moment où on ne s'y attend pas. Je suis étonnée même qu'un livre écrit par un homme puisse être à ce point capable de décrire les états d'âme de cette jeune femme et son ressenti durant sa grossesse.
Au début cependant, je l'ai trouvé trop triste et je me suis demandée si j'allais continuer ma lecture. Il faut dire aussi que le lecteur entre de plein fouet dans le désarroi de cette jeune femme qui se retrouve enceinte alors qu'elle n'a eu qu'une seule fois, une relation avec ce tout jeune homme. Elle se sent coupable pour tout ce qu'elle a fait dans sa vie. Elle est rongée par cette culpabilité et les regrets de ce qu'elle n'est pas arrivée à accomplir avec son mari. Elle culpabilise aussi de ne pas être à la hauteur avec son propre père et elle met du temps à lui apprendre qu'elle et son mari se sont séparés, et qu'elle est enceinte d'un inconnu. Il accepte tout, et j'ai trouvé son personnage particulièrement touchant et aimant, leur relation emplie de tendresse et de maladresse...l'image de cet homme âgé qui attend sa fille, posté derrière la fenêtre, m'a beaucoup émue.
L'Irlande, conservatrice et intolérante, croyante et "bien pensante", nous apparait comme responsable de toute cette violence qui transparait entre les différents membres des clans des gens du voyage, tenant à rester dignes et à venger les leurs de tout affront, mais aussi, dans la société irlandaise en général, qui masque les problèmes, mais n'en est pas moins violente.
J'ai beaucoup aimé ces deux beaux portraits de femmes...un auteur à découvrir et que je compte bien continuer à lire.
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« Est-ce toi, bébé ? Est-ce toi qui me force la main depuis cette part sombre de moi-même, la seule part encore chaude ? Es-tu en train de me dire tout bas que tu veux que je te raconte mon histoire ?

Au début du roman, Melody est enceinte de douze semaines. Son mari Pat n'est pas le père de l'enfant. On devine que ce qui se joue dans cette grossesse est bien plus compliqué qu'une « simple » histoire d'adultère. de semaine en semaine, Melody se confie, comme elle écrirait un journal.

« Martin Toppy est le fils d'un homme célèbre chez les gens du voyage et le père de mon enfant à naître. Il a dix-sept ans, j'en ai trente-trois. J'étais sa répétitrice. Je me serais tuée depuis longtemps si j'en avais eu le courage. ».

Dans ce roman, nulle liaison sulfureuse, nulle bluette. Donal Ryan nous convie aux antipodes des clichés, dans la vraie vie, peut-être. Un monde où un grand amour peut devenir toxique, où le corps succombe à un désir d'enfant, où l'amitié peut détruire, mais aussi nous aider à renaître.

Tout ce que nous allons savoir est brut de décoffrage, sombre et pétillant. L'écriture est au diapason de son propos et de ses personnages, un brin chaotique, un chouïa poétique, acérée puis mélancolique, tendre autant que percutante. On roule entre souvenirs et progrès de la grossesse, entre l'avant, « ainsi il y a mon père. Et Pat. Et Martin Toppy. Et Breedie Flynn. Et les bébés que je n'ai pas pu porter », et le maintenant, la formidable amitié qui va se nouer entre Melody et Mary Crothery, une jeune femme blessée par la vie. Melody a de sombres facettes. Elle n'a pas sa langue dans sa poche et certains passages sont franchement désopilants. Je pense aux vieilles dames dans le café, à qui elle déballe les quatre vérités sur Pat. Donal Ryan offre une place de choix aux gens du voyage Irlandais dans ce roman, j'ai beaucoup aimé.

Tout ce que nous allons savoir (le titre est tiré d'un poème de Yeats) est un très beau roman, original, plein de lumière et de fureur, qui prend aux tripes et conduit sans arrêt le lecteur où il ne s'y attendait pas. Quand on refoule un sentiment de culpabilité bien trop grand, cela peut devenir un noeud coulant pour tout le reste de sa vie. S'attendrir, alors, serait mourir ?

Un livre à découvrir ! Un très grand merci aux éditions Albin Michel et à Babelio.

« le beau temps a disparu aujourd'hui. Une dépression est arrivée de l'océan comme une horde de barbares venus terrasser l'été avec tonnerre et tempête, et des éclairs ont zébré le ciel. »

De Donal Ryan, j'avais aimé le coeur qui tourne, son premier roman choral, mais je préfère celui-ci ! A l'occasion de son second roman, Une année dans la vie de Johnsey Cunliffe, j'avais eu la chance il y a deux ans d'assister à une très chouette rencontre au Centre Culturel irlandais. Donal Ryan a un accent savoureux !
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Voilà une véritable pépite, un vrai coup de coeur que j'ai eu la chance de découvrir en avant-première et qui sort le 27 mars.

Un récit sombre nimbé d'éclaircies, un ciel d'Irlande à lui tout seul.

Melody Shee, 33 ans, commet l'irréparable en couchant avec son élève Martin Toppy, 17 ans, issu de la communauté des gens du voyage. Et la voilà enceinte, elle qui pourtant a multiplié les fausses couches avec son mari.

La première grossesse, période si particulière, où les changements du corps incitent à l'introspection.

Cette introspection menée par la future mère nous est contée, semaine après semaine, se mêlant aux fracas de sa vie éclatée.

Comment devenir mère lorsqu'on se déteste autant ? Comment trouver la paix lorsqu'on a brisé les autres à force de vouloir se détruire soi-même ?
Quels sont les chemins de la rédemption ?
Donal Ryan, jeune auteur talentueux, mène un récit sur la culpabilité de Melody, ne pouvant se pardonner d'avoir trahie son amie d'enfance, de ne pas avoir su aimer son père ou d'avoir trop aimé son mari au point de le haïr.

Cependant, des bouffées d'oxygène, timides éclaircies, viennent nous réchauffer le corps et le coeur meurtri comme celui de notre héroïne.

Mary, jeune femme issue du même clan que le jeune Martin, vient offrir une raison à Melody de continuer tout en nous offrant une immersion dans la vie du "peuple du vent". Communauté d'honneur et aux règles si particulières où les conflits se règlent avec le sang coulé.

Pourtant, n'allez pas croire que les hommes mènent la danse. C'est un récit de femmes fortes.

Récit de mères aussi : incapables d'aimer, incapables de pardonner, mères en devenir ou mères impossibles.

Récit qui se lit en un souffle mais dont le souvenir reste, depuis, collé à mes pas.

Merci à Babelio et aux éditions Albin Michel.
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Après Paul Lynch et son magnifique Grace, les éditions Albin Michel nous offrent un nouveau roman venu tout droite d'Irlande le quatrième ouvrage de Donal Ryan. L'auteur du Coeur qui tourne et Une année dans la vie de Johnsey Cunliffe profite d'un poème de William Butler Yeats pour construire un roman-journal intitulé Tout ce que que nous allons savoir.
En moins de 300 pages, l'écrivain irlandais nous emmène dans la tête de Melody Shee, une femme rongée par le chagrin et le regret dont l'enfant à naître semble être le dernier espoir dans une vie tombée en poussière.
Un portrait de femme(s) complexe dans une Irlande bouffée par l'intolérance et la violence.

Melody du malheur
Lors de sa douzième semaine de grossesse, Melody Shee décide de coucher sur le papier les démons qui l'assaillent depuis que Pat, son mari, l'a quitté en apprenant la nouvelle : Melody est enceinte…mais pas de lui !
Précipitée trop tôt dans les affres de l'amour, Melody n'aime plus Pat. du moins plus comme par le passé lorsqu'elle découvrait son corps et qu'elle tentait d'oublier le reste autour, lorsqu'elle pensait encore que son couple serait beau et que tous les deux construiraient une famille unie.
Sauf que les fausses couches et les non-dits ont fini par détruire le bonheur de Pat et Melody. D'une histoire d'amour à une histoire de haine, il n'y a qu'un pas glissant que la jeune femme a franchi sans même s'en apercevoir.
Pour échapper aux insultes et au chagrin de sa femme, Pat a trouvé du réconfort dans les bras de prostituées payées pour l'aimer.
Melody, elle, contemplant l'échec de son mariage et de ses rêves, propose ses services d'enseignante à Martin Toppy, un jeune garçon de dix-sept ans, un trimardeur, un de ces gens du voyage qui vivent non loin de sa maison.
Elle n'avait alors pas idée qu'il deviendrait le père de l'enfant qu'elle porte aujourd'hui.
Histoire de chagrins et de vies brisées, Tout ce que nous allons savoir dresse le portrait d'une femme irlandaise qui n'est ni une sainte ni une vipère.
Melody Shee s'affirme au fur et à mesure des pages comme une personne rongée par les chemins qu'elle n'a pas emprunté, ces trajectoires pour toujours inconnues qui l'attirent irrésistiblement, comme un papillon de nuit ne peut se détourner de la flamme qu'il lui brûlera pourtant les ailes.
Cet enfant inattendu, cette faute qui a pourtant le goût d'une libération, voilà ce qu'il reste à Melody qui choisit de retourner au camp des gens du voyage pour apercevoir Martin. Elle y trouve alors quelque chose d'autre, d'encore plus précieux peut-être : l'amitié qu'elle pensait ne plus mériter.

Échos du passé
À partir de sa rencontre avec la jeune Mary Crothery, Melody ne sera plus tout à fait la même.
Mary, double à peine voilée de l'infortunée Melody, ne peut avoir d'enfant et le paye cher. Car chez les gens du voyage, une épouse stérile signifie le déshonneur et Buzzy, le mari de Mary, ne peut l'endurer.
Désormais seule, Mary trouve en Melody une amie inattendue, lui offrant sa bonté naturelle contre une éducation et quelques confidences qu'elle n'a fait à aucune autre. Ici, Donal Ryan explore un nouvel environnement social avec ses règles et sa société brutale, au moins autant que l'impitoyable communauté de la terre qui entoure Melody.
Mary ou Melody, deux déshonneurs, deux façons de payer des péchés définis par des autres forcément plus vertueux ou plus honorables.
Tout au long de son journal, Mary explique sa condition peu enviable et sa place de femme-trophée, de femme-objet, enviant presque la place pourtant déjà peu enviable de Melody qu'on ne bat pas, elle, au moins et qu'on ne traîne pas à l'autre bout de la caravane.
Mais ne nous y trompons pas, si la violence semble moins brutale chez l'Irlandais lambda, elle n'en reste pas moins insidieuse et redoutable.
Melody en fera l'amère expérience durant sa grossesse.
Plus qu'une confidente, Mary devient pour Melody un écho de l'amie qu'elle a lâchement abandonné par le passé, ce spectre qu'elle a sacrifié sur l'autel de la popularité. Breedie Flynn. Morte pour rien, morte pour une réputation et des secrets mis à nus, morte pour un garçon qui finalement n'en valait pas la peine. Forcément. Cet émouvant aveu, en forme de repentir épistolaire, insuffle au roman une tristesse encore plus insondable que celle à laquelle on pouvait déjà s'attendre, empilant les générations gâchées les unes sur les autres, les destins gaspillés que Melody semble collectionner.

Mon père, mon enfant, mon amour en silence
Et puis au milieu de ce journal, de ces semaines qui passent et s'effacent, Melody raconte un drôle de petit personnage : son père près de la fenêtre qui l'attend encore et encore.
Troublant. Ce rapport fait de non-dits et de silences, entre un père aux valeurs si traditionnelles et une fille qui semblent transgresser tous les interdits.
En arrière-plan, Donal Ryan ajoute donc le portrait d'un homme qui sacrifie tout le reste pour sa fille, qui oublie sa santé et sa douleur pour offrir un sourire et un réconfort de tous les instants à sa seule enfant.
La solitude et le regret dépassés par l'amour d'un père.
Un amour qu'il faudra transmettre à l'enfant à naître.
Mais Melody peut-elle pardonner à Pat ? Peut-elle renouer avec Martin ?
Peut-elle seulement redevenir une épouse, ce rôle étriqué qui l'a déjà consumé…?
Sous le vernis social, Donal Ryan raconte finalement la rencontre de deux mondes qui semblaient totalement inconciliables : celui des gens de la terre et celui des gens du voyage. Au-delà des différences, de la violence et des coutumes, que reste-t-il sinon ce sentiment si humain perdu entre amour et amitié, ce sentiment qu'un jour nous serons à nouveau aimés ?

Confessions d'une femme hantée, Tout ce que nous allons savoir dresse des portraits en niveaux de gris et révèle la vérité nue, celle qui se cache quelque part entre nos erreurs et nos espoirs. Donal Ryan unit deux mondes et offre la rédemption par le sacrifice, confiant au lecteur que ni l'amour ni l'amitié ne sont aussi simples qu'on le croit. Un roman poignant, une héroïne magnifique.
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Traduit par Marie Hermet

"Martin Toppy est le fils d'un homme célèbre chez les gens du voyage et le père de mon enfant à naître. Il a dix-sept ans, j'en ai trente-trois. J'étais son professeur particulier."

Je vous préviens : si vous voulez lire une histoire de cougar, avec tout un tas de détails scabreux et obscènes, cette histoire n'est pas pour vous ! Si vous voulez une histoire d'amour avec des violons (ou plutôt du fiddle irlandais), ce n'est pas ça non plus !

Quant au titre, Tout ce que nous allons savoir (All we shall know), c'est un vers du poème "Une chanson à boire" de W. B. Yeats, le grand poète irlandais : "Le vin se boit par la bouche/ Et l'amour se boit par les yeux ;/C'est tout ce que nous allons savoir/Avant de vieillir et mourir/Je lève mon verre à ma bouche,/Je vous regarde, et je soupire."

Alors voilà : Melody Shee nous raconte son histoire, depuis sa douzième semaine de grossesse jusqu'au post-partum. Elle est mariée à Pat, qu'elle connaît depuis ses études, le seul et unique homme qu'elle avait jusque-là embrassé et tout le reste... Pourtant, un soir, elle lui dit de but en blanc qu'elle est enceinte.... mais pas de lui ! "Il s'est assis, et puis il s'est mis debout devant moi et il a crié MERDE ! une seule fois." La seule chose qu'elle trouve à lui répondre est : "Au revoir, Pat". Bref, elle le fiche dehors et c'est son père qui vient chercher les affaires de son fils.
Les jours qui suivent, Melody n'est pas aussi fière qu'elle en a l'air : "Je passe la première heure de chaque jour convaincue que je vais me tuer. Je me sens soulagée. Je passe l'heure suivante à m'inquiéter des conséquences de mon suicide. Mon soulagement s'évapore. Je passe l'heure suivante convaincue que je ne vais pas me tuer. Je suis soulagée de nouveau. Je passe encore une heure à m'inquiéter des conséquences si je décide de rester en vie. le soulagement s'évapore. Je répète ce cycle encore trois fois et je vais me coucher. Je dors huit heure.
Quel lien m'ancre sur cette terre ? La peur de souffrir."

Sa grossesse va être l'occasion de nous raconter sa vie, ses blessures, sa part d'ombre, son couple parti à vaux-l'eau.
Mais cette grossesse va surtout provoquer un changement en elle, pas seulement parce qu'elle est enceinte, mais parce qu'elle va faire une rencontre déterminante qui va bouleverser sa vie. Non, ce n'est pas Martin Toppy, l'adolescent père de son enfant ! C'est une jeune femme : Mary Corthery, 19 ans, une fille des gens du voyage. Cette gamine va devenir le rayon de soleil de Melody. Pour elle, elle donnera tout. Et elle sera l'incarnation de tout ce qu'elle a perdu.

C'est le tour de force littéraire de Donal Ryan. Melody raconte sa grossesse, semaine après semaine, mais surtout, le récit se recentre sur autre chose : une renaissance par l'amitié qui naît entre Melody et Mary. Cette dernier est un personnage solaire, pétillant, courageux, victime d'une vengeance entre clans. Elle va devenir un modèle pour Melody, qui ne pourra plus se passer d'elle. Les deux vont avoir de folles aventures pour se tirer de mauvais pas ! Attention, c'est souvent drôle et tragique à la fois.
Contrairement à Mary, Melody n'est pas un personnage totalement sympathique : ce n'est pas un ange. On découvre sa part d'ombre au fil du récit. Cette grossesse la mettra face aux démons qui la tourmentent. Ce sera une pénitence, qui, elle espère "aura peut-être (une) fin".
Mary est plus mature de son aînée. Elle n'a pas la langue dans sa poche mais s'offusque souvent du langage fleuri de sa "copine" qu'elle trouve un peu folle de se mettre dans des états pas possibles.
Cependant, les deux font la paire : "Ah sérieux, M'dame, on fout drôlement le bordel quand on est ensemble(...). "(...)Nous sommes sorties dans la rue en ondulant des hanches, nous deux."

Et puis il y a ce bébé qui grandit...

J'ai retrouvé avec plaisir toute la verve de Donal Ryan, son humour incroyable pour parler de thèmes tout à fait sérieux. On n'est pas en reste d'émotion ni de rebondissements.

Il a eu l'excellente idée de nous immerger dans la communauté des gens du voyage irlandais, dans ce troisième roman. C'est à souligner aussi.
On retrouve aussi les ragots de villages ; l'honneur salit qu'on veut faire payer, la peur du qu'en-dira-t-on ("Je te conduirais moi-même si tu ne peux pas. Je prendrai une brouette et je la tirerai moi-même rien que pour te voir partir, que Pat puisse t'oublier.")

La fin est une vraie surprise et une habile manière de conclure cette histoire de maternité.

La prose de Donal Ryan vous ensorcelle, croyez-moi !
Une belle histoire d'amitié et de coeurs brisés.
Ce troisième roman est mon préféré. Un coup de coeur.
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Tout d'abord, un grand merci à Babelio ainsi qu'aux éditions Albin Michel pour la découverte de ce roman dans le cadre d'une masse critique privilégiée.

Donal Ryan est un auteur irlandais dont j'avais beaucoup entendu parler et que j'avais vraiment hâte de découvrir. Dans ce roman, il nous plonge au coeur des pensées les plus intimes de Melody, une trentenaire qui a commis un adultère et qui est enceinte d'un jeune homme de dix-sept ans issu de la communauté des gens du voyage à qui elle apprenait à lire. Alors qu'elle tente de rendre un livre au jeune homme en se rendant sur le terrain où il vit, elle fait la rencontre de Mary, une jeune femme rejetée par sa famille en raison de sa stérilité et de l'annulation de son mariage arrangé.

Cette grossesse devient prétexte a une véritable introspection, à un retour sur un mariage perdu d'avance et sur un passé coupable. Sur ce point, j'ai découvert le talent de l'auteur. On est dans la tête et dans le coeur de Melody du début à la fin, un personnage pour lequel il est parfois difficile d'avoir de l'empathie. le ton global est très sombre, très pesant, et la jeune Mary, en dépit des difficultés qu'elle vit, est une véritable bouffée d'air frais dans ce roman qui dépeint une Irlande du "on-dit", de trop petites communautés où il faut rendre des comptes.

Si ce roman a donc des qualités indéniables, il n'empêche que j'ai eu du mal à entrer dans cette atmosphère pesante. Il m'a été difficile de le lire d'une traite pour cette raison et au final ma lecture fractionnée à peut-être joué un rôle dans mon sentiment final mais j'en suis ressortie un peu plombée.

Du point de vue du style, mes attentes ont été largement atteintes, Donal Ryan a un vrai talent pour retranscrire l'intime, en revanche ce ton général très gris, très triste pour une conclusion un peu plate m'a laissé sur le bord de la route.
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J'ai pu découvrir grace à Masse Critique Babelio et en épreuves non corrigées (le charme des coquilles) le troisième roman de Donal Ryan dont j'ai déjà évoqué ici le coeur qui tourne et Une année dans la vie de Johnsey Cunliffe. Toujours prêt pour la littérature irlandaise j'ai accompagné la grossesse de Melody Shee car le roman est chapitré de la douzième à la quarantième semaine et se termine logiquement par Post-partum. Pat, son mari, l'a quittée en apprenant qu'elle attendait un enfant d'un autre. D'un tout jeune homme issu de la communauté des gens du voyage, terme pudique, dix-sept ans, Melody en a le double. Il est illettré, elle lui apprenait à lire..

Malgré son doux prénom rien n'est harmonieux dans la vie de la narratrice. Elle se raconte, à mesure que son bébé se manifeste, promesse d'un avenir incertain. Elle a de très beaux mots pour son père, un homme bon et aimant, discret et malade. Sa mère, psychologiquement très fragile, est morte depuis longtemps. Tout ce que nous allons savoir pointe aussi sans les démagogies habituelles les "tinkers", gens dits du voyage, traditionnellement assez nombreux en Irlande. C'est l'une d'entre elles, Mary, toute jeune aussi, qui transfigurera la vie de Melody.

La presse anglo-saxonne estime ce roman encore meilleur que les deux précédents. Evoquant John McGahern ou William Trevor, dont je viens d'aimer aussi les Très mauvaises nouvelles. Mais j'ai souvent écrit sur William Trevor. The Guardian cite deux héroïnes qui ont fait un peu carrière, Emma et Anna, et dont on connait la fin. Excusez du peu. Il est vrai que Melody, en proie à ses démons intérieurs comme ses deux illustres précédentes, chemine sur une marge étroite entre remords quant à une ancienne amitié, lumière sur une autre amitié, toute récente et interrogations quant à la suite.

Irish Book Tour faisant, c'est permanent chez moi, j'ai lu aussi Une rue étrange de Desmond Hogan. Curieux livre parcouru de nombreuses fulgurances littéraires, des phrases somptueuses, pour un récit qui hélas m'a semblé hermétique, laissant le sentiment de m'être trompé. Il eût fallu au minimum être un historien de l'Irlande pour en saisir la substantifique moëlle. Je n'en suis qu'un amoureux.
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J'avais beaucoup aimé "Le coeur qui tourne" en 2015 puis "Une année dans la vie de Johnsey Cunliffe " (coup de coeur en 2017), je me réjouissais de lire ce nouveau roman de Donal RYAN.
J'ai retrouvé avec le plus grand plaisir une écriture forte et poétique, qui ici prend de l'ampleur, dans une narration parfois effrénée. Il y a tout ce qu'on imagine de l'Irlande dans ce roman qui raconte le destin de deux femmes que presque tout pourrait opposer.
L'une, Melody, adultère, qui porte l'enfant d'un jeune homme qu'elle n'aurait pas dû rencontrer (ni séduire !) et l'autre, Mary, mise à l'écart de sa communauté de gens du voyage parce qu'elle est stérile et que cela discrédité sa famille et le mariage arrangé prévu pour elle.
Deux personnalités étonnantes auxquelles je ne me suis que peu attachée pourtant, leur préférant le père de Melody et Pat, le mari trompé, dans toute sa détresse.
J'ai aimé cet instantané (les 28 dernières semaines de la grossesse de Melody) de l'Irlande et de la vie des gens du voyage, et la façon dont l'auteur décrit les relations amoureuses.
Merci à Babelio Masse Critique et aux Editions Albin Michel pour ce très bon roman qui confirme tout le talent de Donal Ryan.
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