LES CLES ARDENTES
LE PERVERS
Extrait 2
L’orage secouant les continents pervers !
L’orage culbutant les porteurs de doctrine !
L’orage sur le Temple et la Ville en famine !
L’orage dans mon cœur ! L’orage dans mes vers !
Je suis le chevalier servant de l’Infortune,
Je suis le Chasseur d’Ombre et mes chiens rubannés,
Effarés des rayons glauques du clair de lune,
Ont des abois qui font gémir les nouveau-nés.
Je suis le baladin qui danse sur la corde,
Heureux de son vertige et de ses oripeaux,
Et je suis quelquefois l’innocent au berceau
Que le Rêve exaspère et que la Peur déborde.
Je suis un frêle abbé, confesseur de boudoir,
Qui caresse la Mort sous son domino noir
Et qui devant l’amour vivant de deux bohèmes
Pleurerait s’il n’était observé par lui-même.
Et je suis de ceux-là qu’on trouve un soir d’hiver,
Quand le vent fait sombrer le clair espoir des voiles
Blêmes, la corde au col et les yeux grands ouverts
Ivres de la clarté magique des étoiles.
LES CLES ARDENTES
LE PERVERS
Extrait 1
Je vis de ma folie et meurs de ma raison,
Et dédaignant chanter de purs épithalames,
Je sais pour excuser toutes les trahisons
Des mensonges jolis qui séduisent les femmes.
Et les femmes toujours aimant les jeux cruels
M’ont souvent caressé d’un baiser fraternel,
Heureuses de m’avoir vu railler ce que j’aime,
Et m’ont laissé plus triste, hélas, que mes poèmes.
Dans la sérénité grise des demi-jours
Je burine des vers de deuil sur papier rose
Ou bien grave au fronton des monuments moroses
Des distiques sacrant d’impudiques amours.
Parfois, quand un soleil héroïque se taille
Un royaume éclatant dans l’azur délivré,
Je suis, le sang gonflant mon vieux cœur ulcéré,
Comme un enfant qu’enivre un récit de bataille.
Cependant, par delà le royal horizon,
Je vois marcher sur moi le peuple des nuages,
Et, les sens épuisés de heurts et de frissons,
Je n’ai plus qu’un espoir et j’implore l’orage !
…
« Montparnasse : quand Paris éclairait le monde » de Mathyeu le Bal, préfacé par Jeanine Warnod : un livre événement publié chez Albin Michel et disponible dans toutes les bonnes librairies.
« L'arrivée en masse des artistes d'Europe centrale, des Américains, Japonais, Italiens… attirés par la France, constitua un formidable melting-pot. “ L'École de Paris “ était née. » Jeanine Warnod
Au début du XXe siècle, tous les boulevards du monde convergèrent vers Montparnasse, drainant des artistes aux mille parcours.
Ces fils de l'exil vont poser leur valise près du carrefour Vavin où s'exprimera un langage commun : la création. Ce livre unique en son genre raconte dans son extraordinaire globalité ce moment unique dans l'histoire pendant lequel un quartier de Paris fut la capitale mondiale de l'art.
« En 1913, Apollinaire descendait de la Butte Montmartre avec mon père* lui récitant ses premiers vers « d'Alcools ». Ils retrouvaient Paul Fort, André Salmon, Max Jacob à La Closerie des Lilas où des joutes de poésie occupaient toutes les nuits… »
Le célèbre critique d'art André Warnod, qui inventa le terme d'École de Paris dans son livre de référence, publié en 1925 chez Albin Michel.
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