AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
4

sur 111 notes
5
11 avis
4
8 avis
3
3 avis
2
0 avis
1
0 avis

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
J'ai découvert très récemment Lydie Salvayre juste en lisant son livre : Pas pleurer
J'ai aimé la manière dont elle avait organisé son récit le rendant vivant, musical et très singulier. Alors c'est tout naturellement que j'ai voulu poursuivre ma découverte de cette auteure avec La puissance des mouches.

Lydie Salvayre excelle dans les tête-à-tête. C'est un peu comme si elle prenait en charge un personnage, un seul, pour mieux le cerner, le sonder, le triturer, le comprendre, l'entourer et trouver en lui ce qui va servir une belle histoire, une histoire digne d'intérêt. Avant de se consacrer pleinement à l'écriture, Lydie Salvayre exerçait en tant que psychiatre hospitalier. Un pont ? Oui pour moi cela ne fait pas l'ombre d'un doute. Elle fait preuve d'empathie, de compassion et expose les souffrances, les blessures, les traumatismes de ses héros, mieux elle s'en nourrit pour mieux nous les faire apprécier, dévoilant l'espace baigné dans d'ombre et suggérant leur part inévitable de lumière. Elle travaille le rythme s'emballant dans les zones de turbulence et feutrant ses propos dans les moments d'accalmie. Nous avançons à pas lents et calculés. Elle multiplie les indices et nous laisse vérifier nos doutes, apprécier nos sentiments. A nous de voir ! C'est fort je trouve.


La puissance des mouches, c'est un interrogatoire dans une prison.

Celui qui est interrogé. Un meurtrier. Nous l'apprendrons à la moitié du récit. Il est guide à l'Abbaye de Port Royal des champs. Et comme si, encore une fois, l'auteure avait besoin d'une référence de choix, d'un faiseur de morale, d'un donneur de leçons, d'un philosophe patenté, juste pour donner du corps à l'ouvrage. Elle choisit Pascal dont le meurtrier s'éprend comme pour l'aider à ne pas sombrer dans le néant d'une vie ordinaire. Qui mieux que Pascal pourrait investir l'abbaye et son fidèle serviteur ?
Oui, ce prisonnier voue une véritable admiration à Pascal et égraine cette fascination dans une vie sordide pour lui donner un peu de souffle, pour se justifier d'être ce qu'il est, pour comprendre un peu mieux cette haine qui le ronge et qui ne fait que croître.

« Les hommes sont pareils aux chiens…..et en prononçant ces mots, monsieur le juge, je repense à maman qui est morte avant de mourir…. » . Il décrit juste l'enfer dans lequel il a été baigné, quand, enfant il vivait sous le joug d'un père brutal et d'une mère qui ployait sous les coups : « Maman possède un équivalent de la ceinture à clous de Pascal : c'est papa. » et un peu plus loin il résume : »Mon père n'a d'humain docteur, que sa méchanceté. et le meurtrier de poursuivre dans cette boucle infernale de l'existence : « Chaque jour, donc, je travaille à l'éducation de ma femme. Je l'asticote. Je la pique. Je l'attaque. Je la vexe. Je l'accable de sarcasmes et de petites scélératesses. Mon but est d'obtenir qu'elle se défasse entièrement de moi. » Oui….la boucle est bouclée ! La marionnette est dépendante.

.
Celui qui interroge ? Tour à tour un juge d'instruction, un psychiatre (tiens !) l'infirmier de la prison, l'avocat resteront des personnages muets. A nous de comprendre qui ils sont ! à nous de formuler leurs questions en lisant bien les réponses du meurtrier. On le fait sans difficultés. le récit est limpide. La puissance des mouches peut-être la puissance des mots. L'auteure nous dit : « La langue française doit être mise dans un écrin pour la sortir les jours de fête."
Elle nous fait partager quelques jours de fête avec délicatesse, fougue ou n'est-ce simplement que de la générosité.

Nous ne saurons le nom de la victime qu'à la dernière ligne du dernier chapitre, juste avant de fermer le livre.

L'Espagne malmenée en toile de fond, les Pensées de Pascal, la haine, tout est savamment articulé pour donner au lecteur un plaisir actif. Il est témoin dans un coin de la pièce avec une immense fenêtre ouverte sur des horizons de différentes formes et de différentes couleurs.
J'ai lu ce matin une critique de Rabanne qui déclare avoir abandonné sa lecture avant la fin de : Fugitive parce que reine. Trop cruel, trop dur, enfance trop bousculée, et trop c'est trop. J'ai bien compris le ressenti de rabanne et je le partage, mais là, ce n'est pas la même violence du-tout. le personnage gère lui-même cette brutalité et nous laisse en paix. Je ne comprends même pas pourquoi ce ressenti de cruauté tranquille. Je ne saurai l'expliquer. Un savoir-faire. La magie de l'écriture où les mots sont posés au bon endroit?


Pendant des années cette auteure a laissé parler ses patients. Elle a écouté certainement avec une attention toute professionnelle, mais plus encore. Elle a accumulé les vies, a empilé les fonctionnements et les réactions diverses, les expériences, les plaies béantes et les façons de voir. Elle les a gardés en mémoire comme un matériau fondamental qui, ajouté à sa solide formation littéraire et à son histoire familiale forment le creuset d'une source inépuisable de sujets romancés aux accents de vérité et aux touches autobiographiques.

Elle ajoute sa recette personnelle faite d'une infinie puissance et d'une infime légèreté….Exactement comme les mouches.
Commenter  J’apprécie          6219
La gagnante du prix Goncourt 2014 a publié ce roman en 1997. Je pense que Lydie Salvayre s'est bien amusée lorsqu'elle l'a écrit. Entretien entre un assassin nourrit aux pensées de Pascal avec un juge, un infirmier, son avocat et un psychiatre. À savoir que l'autrice a exercé ce dernier métier à Marseille. Tout est à contre-courant et montre tout ce que l'homme a de bas. Associé à la langue acerbe de la grande Lydie Salvayre, c'est jubilatoire !
Commenter  J’apprécie          410
Blaise, Blaise Pascal pense mouche, pense "La puissance des mouches". Un tout petit roman qui fait mouche (Oh , facile !)
Un homme se confie, en altenance, à son juge, son avocat, son docteur. Cet homme parle à tous ces gens de sa prison, accusé de meurtre. On ignore jusqu'à la fin qui est sa victime....
Son enfance? Terrorisé par un père violent, hargneux, ivrogne, monstrueux.
Sa vie adulte? Marié, sans enfant, sans amour.
Son métier? Guide à l'Abbaye Port Royal, il instruit, s'instruit, il réfléchit et fait réfléchir.
Son avenir? Outre le néant, n'importe quoi mais surtout ne pas être comme son père. Ne pas devenir cet être ignoble, plein de haine envers tout et tout le monde car:
"Savez-vous , monsieur Jean, que lorsque la haine vous atteint, elle s'empare de votre être? Et l'infeste. Et le mange tout entier. La haine, monsieur Jean, a la puissance des mouches... La haine , monsieur Jean, est sans discernement. Elle a la bêtise des mouches. ... La haine aime la merde, monsieur Jean. Sa parenté avec les mouches réside encore dans ce trait" (p. 85-86)
Cet homme, en se racontant mord tout autant dans l'ironie, la dérision, l'humour dans une langue variée au vocabulaire riche et érudit.
Avec Lydie Salvayre, Blaise Pascal et l'homme, on discute, on s'interroge et on passe un excellent moment.
Commenter  J’apprécie          150
Excellent livre, monologue d'un fou qui nous emmène très loin... avec Descartes et Pascal. Un livre assez violent aussi.
Commenter  J’apprécie          70
C'est le premier livre que je lis de cette auteure. Facile à lire, j'ai beaucoup aimé le style, la narration d'événements qui font partie d'un quotidien qui pourrait paraitre banal.
Confession sous forme d'un long monologue, le narrateur s'adresse au juge, à l'avocat, à monsieur Jean, infirmier à la prison, au docteur Vilmotte, psychiatre. Sa voix nous envahit et les réflexions se poursuivent encore après la lecture: crime ou acte de pure logique?
Commenter  J’apprécie          70
C'est un long monologue d'un meurtrier (un guide de musée) qui se justifie, se confie devant un juge ; il explique aussi au juge son admiration, sa grande passion pour les Pensées de Blaise Pascal.
Un monologue tragi-comique.
Une plume raffinée, très originale, et pleine de légèreté, pleine de drôlerie, instructive.
"La puissance des mouches", le titre serait relatif à une Pensée de Blaise Pascal.
Un véritable coup de coeur ! un livre magistral à découvrir absolument !!
Commenter  J’apprécie          60
J'aime énormément Lydie Salvayre que j'admire infiniment. En effet, son parcours, son intelligence mais en même temps son honnêteté en tout me touchent. Et je ne parle pas encore de la qualité de ses livres, de son écriture, de la diversité de ses sujets qui ont en commun leur côté addictif chez moi et profondément jouissif. A chaque fois j'en ressors un peu chahutée mais heureuse avec l'impresSion évidemment fausse d'être Moins bête et d'avoir rencontré l'Autre. alors merci Madame de m'apporter tout cela et à toux ceux qui ne connaissent pas je n'aurais qu'une consigne : jetez-vous, vous ne le regretterez pas.
Commenter  J’apprécie          43
Un livre tout à fait remarquable. A se demander si c'est bien un roman, l'auteure étant psychiatre, peut-être a-t-elle tiré le narrateur d'une rencontre avec un patient très particulier. Donc il s'agit du long monologue d'un meurtrier incarcéré qui s'adresse tantôt à un juge, un avocat, à un psychiatre ou un infirmier.
Dès les premières pages on en vient à plaindre ce pauvre homme programmé pour être terriblement malheureux et violent. C'est véritablement le récit d'une vie massacrée par des parents. Fils d'un homme qui a violé sa mère, alors adolescente dans un camp où les français ont parqué les réfugiés espagnols avant de les remettre aux nazis. Depuis il faisait vivre un enfer à sa femme et ses deux enfants. Un sadique violent qui tuera toute joie dans la vie de la famille. Pourtant la fille arrivera à fuir l'amour malsain exclusif et étouffant du père en se mariant. Quant au narrateur, souffre-douleur avec la mère, trouvera un peu de réconfort à travers un travail de guide dans un musée, il se prend de passion pour les pensées de Blaise Pascal qu'il connaît par coeur et cite à tout bout de champ. Des citations dont il émaille les discours aux visiteurs du musée et en abreuve sa femme, malheureuse et inculte, comme le fût sa mère. Sa mère, une victime consentante, trouvant toujours des excuses aux mauvais traitements que leur fait subir son mari harceleur paranoïaque, qui les torture sans relâche.
Et c'est tout naturellement, si on peut dire, que cet homme en arrivera à tuer son ancien supérieur hiérarchique qu'il identifie tout d'abord, à un père bienveillant idéalisé puis haï quand celui-ci est déçu et dont le meurtre l'amène derrières les barreaux. Il s'y trouve tout d'abord en paix puis au fil des monologues, le lecteur prend conscience que la violence des introspections, l'envahit de plus en plus et le perturbe.
Commenter  J’apprécie          20
"La puissance des mouches" nous dépeint un homme, le narrateur, guide dans l'abbaye de Port-Royal. Il a commis un crime. Mais qui a-t-il tué? Ce personnage porte de lourds traumatismes qui ont commencé dès son enfance, et même avant sa naissance. Il s'est ensuite plongé dans Les Pensées de Pascal, qu'il a pris au pied de la lettre et qui en a fait cet homme, d'une culture et d'une langue étonnantes. Il n'en est pas attachant pour autant. Ce livre présente une immense richesse linguistique et l'appétit que l'on a de savoir qui a été tué par notre narrateur nous emmène vers la fin en un clin d'oeil. Il y a toujours une tension qui nous tient en haleine et, personnellement, c'est quelque chose qui m'entraîne réellement dans l'histoire.
Commenter  J’apprécie          10
"La puissance des mouches": le roman tire son titre d'un fragment mystérieux d'une pensée de Pascal, plus développé et expliqué dans un autre fragment: "elles gagnent des batailles, empêchent notre âme d'agir, mangent notre corps" et plus loin encore, à propos de la faiblesse de l'esprit humain: "Ne vous étonnez point s'il ne raisonne pas bien à présent, une mouche bourdonne à ses oreilles: c'en est assez pour le rendre incapable de bon conseil. Si vous voulez qu'il puisse trouver la vérité, chassez cet animal qui tient sa raison en échec et trouble cette puissante intelligence qui gouverne les villes et les royaumes". Bref, l'idée de Pascal est de démontrer la vanité de l'être humain (pour prouver la grandeur de Dieu) qu'une simple mouche peut mettre en échec.
Mais ce qui est formidable avec le roman de Lydie Salvayre, c'est qu'il séduira aussi bien les amateurs de Pascal que ceux qui n'en ont jamais lu une ligne, car il est court, efficace, très bien écrit et facile d'accès. Il se présente comme une sorte de monologue ou une confession d'un narrateur à la personnalité très particulière, qui s'avère être guide de Port-Royal, l'abbaye du courant janséniste, dont Pascal était très proche, et passionné de Pascal. Il s'adresse tantôt à un juge, à un avocat, à un psychiatre, ce qui conduit le lecteur à reconstituer le fil de son histoire. Un roman brillant et mordant.
Commenter  J’apprécie          10




Lecteurs (224) Voir plus



Quiz Voir plus

Lydie Salvayre

Née en ...

1939
1948
1957
1966

12 questions
28 lecteurs ont répondu
Thème : Lydie SalvayreCréer un quiz sur ce livre

{* *}