À cette époque-là, le signor Lélio n’était plus dans tout l’éclat de sa jeunesse ; soit qu’à force de remplir leur office généreux, ses poumons eussent pris un développement auquel avaient obéi les muscles de la poitrine, soit le grand soin que les chanteurs apportent à l’hygiène conservatrice de l’harmonieux instrument, son corps, qu’il appelait joyeusement l’étui de sa voix, avait acquis un assez raisonnable degré d’embonpoint. Cependant sa jambe avait conservé toute son élégance, et l’habitude gracieuse de tous ses gestes en faisait encore ce que sous l’Empire les femmes appelaient un beau cavalier.
Mais si Lélio pouvait encore remplir, sur les planches de la Fenice et de la Scala, l’emploi de primo uomo sans choquer ni le goût ni la vraisemblance ; si sa voix toujours admirable et son grand talent le maintenaient au premier rang des artistes italiens ; si ses abondants cheveux d’un beau gris de perle, et son grand œil noir plein de feu, attiraient encore le regard des femmes, aussi bien dans les salons que sur la scène, Lélio n’en était pas moins un homme sage, plein de réserve et de gravité dans l’occasion. Ce qui nous semblait étrange, c’est qu’avec les agréments que le ciel lui avait départis, avec les succès brillants de son honorable carrière, il n’était point et n’avait jamais été un homme à bonnes fortunes. Il avait, disait-on, inspiré de grandes passions ; mais, soit qu’il ne les eût point partagées, soit qu’il en eût enseveli le roman dans l’oubli d’une conscience généreuse, personne ne pouvait raconter l’issue délicate de ces épisodes mystérieux. De fait, il n’avait compromis aucune femme. Les plus opulentes et les plus illustres maisons de l’Italie et de l’Allemagne l’accueillaient avec empressement ; nulle part il n’avait porté le trouble et le scandale. Partout il jouissait d’une réputation de bonté, de loyauté, de sagesse irréprochable.
Des lettres inédites de la célèbre écrivaine, révélant des échanges inconnus avec de grandes personnalités du XIXe siècle. Un livre exceptionnel !
Lettres réunies et présentées par Thierry Bodin.
Ces 406 nouvelles lettres retrouvées couvrent presque toute la vie de
George Sand, depuis ses quinze ans jusqu'à ses derniers jours. La plupart,
du court billet à la longue missive, sont entièrement inédites et viennent
s'ajouter au corpus de sa volumineuse correspondance. D'autres, dont on
ne connaissait que des extraits, sont ici publiées intégralement pour la
première fois.
Plus de 260 correspondants — dont une cinquantaine de nouveaux — sont
représentés, des moins connus aux plus illustres, comme Barbey d'Aurevilly,
Hector Berlioz, Henri Heine, Nadar, Armand Barbès, Eugène Sue, Victor
Hugo, Louis Blanc, Eugène Fromentin, Jules Favre, Pauline Viardot, la
Taglioni, ainsi que les plus divers : parents, familiers, éditeurs, journalistes
et patrons de presse, acteurs et directeurs de théâtre, écrivains, artistes,
hommes politiques, domestiques, fonctionnaires, commerçants, hommes
d'affaires...
On retrouve dans ces pages toute l'humanité et l'insatiable curiosité de
l'écrivain, que l'on suit jusqu'à ses toutes dernières lettres, en mai 1876,
quelques jours avant sa mort.
Les auteurs :
George Sand (1804-1876) est une romancière, dramaturge et critique littéraire française. Auteure de plus de 70 romans, on lui doit également quelque 25 000 lettres échangées avec toutes les célébrités artistiques de son temps.
Thierry Bodin est libraire-expert en lettres et manuscrits autographes. Ses
travaux sont consacrés au romantisme français, en particulier Honoré de Balzac, Alfred de Vigny et George Sand.
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