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Sommes-nous des planètes qui tournons l'une autour de l'autre dans un ballet confidentiel et mal agencé, dérangé par les discours de nos semblables autant que par nos ressentiments ?
Sommes-nous ces cocons ivres de la vie des autres, de leurs paroles aussi gluantes que le liquide amniotique ambiant censé nous protéger mais qui nous étouffe.
Étouffant. Voilà le mot. L'écriture de Nathalie Sarraute est d'une telle densité, une telle proximité non seulement avec le discours mais avec le vécu, le ressenti, le peu conscient, le refoulé que l'air y circule peu. Dans sa prose à nulle autre comparable, mêlant dialogues, monologues intérieurs, reliquats de pensée, de non-pensée, d'orgueilleux soubresauts de l'âme et de verbeux hoquets de dégoût, l'auteure (ou l'autrice, je ne me suis pas encore décidé) tisse sa toile littéraire, nous enveloppe de tous les sucs sociaux et psychologiques que le langage a pu produire. Les personnages s'y débattent tandis que le lecteur tente de surnager dans le réseau romanesque dans lequel il s'est lui-même jeté en ouvrant ce planétarium. Non ce n'est pas un livre que nous lisons mais une pelote, une jungle, un enchevêtrement d'être soyeux et collant .
C'est un amas de langage à la dynamique étourdissante où les relations interpersonnelles forment un agglomérat informe peu tangible même s'il dégouline de honte, de vanité, veulerie, rancoeurs et faiblesses. Existent-ils autrement que par ces bouts de langage, les Guimier, ? Et Germaine Lemaire (Maine pour les intimes) est-elle autre chose que ce fantasme habillé d'on-dit ?
Telle l'araignée, notre esprit sinon notre corps vrombit à la moindre palpitation de l'une des cordes qui forme la toile de notre lecture, l'une des répliques dites ou pensées par n'importe lequel des personnages. Aussi entrons-nous d'emblée dans ce grand planétarium, dans cette immense toile filée par Nathalie Sarraute avec son roman à la forme bizarre, compacte et mouvante, grossissant sous nos yeux, même le livre refermé.
Des planètes peut-être le sommes-nous mais telles des boules de jongleurs, nous sommes entraînés par le moindre des mouvements de la constellation rayonnant autour de notre orbite - être vivants et personnages de romans compris . Et notre unicité nous ne la devons qu'au contact souvent douloureux et brûlant des corps célestes qui nous entourent.
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Paru en 1959, le Planétarium est un des textes fondateurs du Nouveau Roman. Quelque peu réfractaire à ce courant, je trouve quand même que le style de cet auteur reste facile d'accès. Certes, il est déroutant car Sarraute joue énormément avec la ponctuation. Elle utilise les points de suspension afin d'éluder les pensées de ses personnages ou leurs interruptions. Elle crée, par là-même, une sorte de langage parallèle.

Dans ce livre, ses personnages sont caricaturaux. On trouve ainsi un jeune couple, Gisèle et Alain, ainsi que leur vieille tante, Berthe, qu'ils aimeraient voir partir afin de récupérer son appartement. Sarraute va nous faire part de leurs conversations, les disséquant consciencieusement. le lecteur se retrouve également face à de longs monologues. Pourquoi faire de choses quotidiennes tout un roman ? L'auteur manie ici l'ironie dans toute sa splendeur et le lecteur ne peut qu'adhérer, se retrouvant parfois dans la peau d'un des protagonistes.
Lien : http://www.lydiabonnaventure..
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Nathalie Sarraute a été précurseure du nouveau roman qui prônait la fin des récits, des histoires, et pourtant, il y a dans le planétarium, une sorte de trame narrative avec quelques personnages dénommés et bien identifiés. L'histoire relatée sous forme de monologues par plusieurs protagonistes est celle d'Alain Guimier, jeune thésard marié à Gisèle, qui lorgne désespérément le grand appartement vaguement promis par sa tante. Autour de lui gravitent son père, ses beaux-parents, une écrivaine, diva du ghotta littéraire parisien entourée de ses admirateurs. Alain Guimier, jeune homme qui aime séduire et se plie aisément aux attentes de ses interlocuteurs, souhaiterait se lancer dans l'écriture.
Dans ce roman offrant de multiples niveaux de lecture, Nathalie Sarraute fait évoluer, de manière distanciée, des créatures figées, caricaturales, légèrement enduites de cire ou de fine poussière, apparaissant comme autant de petites planètes ou de satellites en orbite les unes autour des autres.
Elle construit un monde étrange, absurde, où sont observées, sous la lentille du microscope, des créatures qui s'approchent, s'entredévorent, guidées par la soif de possession, de pouvoir, de statut social, de réussite.
Comme dans ses précédents livres, l'autrice se met en quête de ce qui est sous-jacent aux émotions, aux comportements des êtres. Nous sommes dans le domaine du sensible, de l'inexprimé, de l'informe, aux frontières de la conscience, en amont du langage. On pourrait employer le terme d'impulsions, ou de pulsions, ce que Sarraute ne fait pas, rejetant la psychanalyse, son jargon et ses concepts qui enferment.
Des phénomènes, chimiques et physiques, d'attirance et de répulsion relient ou séparent les personnages. Des matières visqueuses, gluantes les enserrent, des forces les séparent ou les relient, symbolisant l'emprise, les rapports de pouvoir, l'osmose, la fusion.
Les relations entre les individus sont empreintes de bassesse, d'envie, de jalousie, d'acrimonie, de cruauté. Une violence sourde et latente plane. Celle-ci se traduit par l'irruption de scènes de la mythologie ou de western, de contes pour enfants, d'histoires de princesses, autant de références à des temps immémoriaux, à une mémoire collective ancestrale.
Dans ce concert de voix indissociées, les monologues s'entremêlent et on découvre à posteriori qui parle. Les mêmes scènes rejouées, relatées par des personnages différents mettent en relief de minuscules détails.
Nous sommes dans l'univers des représentations, des faux-semblants, des êtres se démultipliant en fonction de la perception qu'en ont les autres. de menus éléments de la conversation peuvent déclencher des réactions imprévues. Tout se joue de manière larvée, en deçà du langage convenu, des conventions et des rapports sociaux codifiés.

Le planétarium est également une critique acerbe de l'intelligentsia parisienne, du monde de la culture, où des courtisans entourent de grands noms de la littérature, parmi lesquels on croit reconnaître la silhouette de Sartre.

Une oeuvre passionnante, aux accents métaphysiques, qui ne livre pas d'emblée tous ses secrets.


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Pour les amateurs de "Nouveau Roman". Ce n'est pas un roman facile à lire, ni un roman qui prend aux tripes. C'est un pur exercice de style, selon moi. Il se lit principalement avec l'esprit. On ne s'attache pas du tout aux personnages. Mais l'exercice qu'entreprend là, Nathalie Sarraute, est vraiment étonnant et selon moi, s'il faut lire un roman de cette auteure, c'est celui-ci. C'est très difficile d'en parler mais en gros, l'attrait principal de son écriture, est la manière dont elle parvient à écrire le non-dit, comme elle parvient à faire sentir en quelques fines descriptions les rapports complexes entre les gens, comment une petite réflexion acerbe d'un personnage mine la personne qu'il a en face de lui. Elle met tout cela en scène, comme une naturaliste qui décrirait le comportement des animaux ou des plantes. Guère d'émotions, donc, mais du pain béni pour la curiosité intellectuelle.
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L'image que l'on donne à voir se rapproche-t-elle de la réalité ou non?
Observons un jeune et gentil couple par un trou de souris.
Alain n'en finit pas de préparer sa thèse. Faible, un brin éteignoir,sous la coupe d'un père autoritaire,anxieux, il a toujours manqué de confiance en lui.Il adore faire le pître pour amuser la galerie.
Gisèle sa femme,toujours impeccable,souple et trop gentille a toujours été facile à manipuler par sa mère qui mène son monde au doigt et à l'oeil.
Gentils,gentils c'est vite dit. "Tout le monde a ses petits recoins!" Et ce sucre qu'ils cassent sur le dos des gens!
Seraient-ils faux jetons? Capricieux?Hypocrites?Ambitieux? Snobs?Haineux? Prêts à tout pour atteindre leur but? Manichéens?
Il suffira de simples bergères à choisir à la place de fauteuils clubs en cuir proposés par sa mère à elle, intrusive,tyrannique, il suffira de l'appartement convoité de sa tante Berthe à lui,tatillon,perfectionniste,maniaque,revêche, pour que les balles changent de camps et que les masques tombent.
Une belle caricature d'un milieu intellectuel,futile et bourgeois dont le vernis s'écaille.
Un style à part,de très longues phrases où les paroles s'entremêlent de pensées, dont on perd parfois le fil et où l'on ne sait plus très bien qui fait quoi,qui dit quoi, qui pense quoi, ce qui rend parfaitement plausibles ces relations familiales engluées et les manipulations croisées des uns et des autres.
Une approche psychologique très fine.
Nathalie Sarraute,dont j'ai apprécié enfances,connue dans le monde comme l'un des plus grands écrivains du XX° siècle est l'auteur de romans,pièces et essais et a reçu le Prix international de la littérature pour Les Fruits d'Or.
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C'est une chose qui m'arrive rarement, mais j'ai abandonné au bout de trois chapitres ce livre, vaincu par l'écriture de l'auteur. Ai je eu tort ? Aurais-je dû continuer plus avant ? Je ne sais pas, mais cette écriture sans syntaxe bourrée de point de suspension m'a prodigieusement agacé, au point de me faire renoncer à poursuivre une lecture si difficilement compréhensible.
De plus, je suis réfractaire à cette position du Nouveau Roman qui veut la disparition des personnages et trames narratives classiques. Désolé pour eux, mais le lecteur réac que je suis en a désespérément besoin...
Une rencontre manquée, mais je suis sûr que ce livre saura trouver son public.
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Alain et Gisèle Guimiet se trouvent plutôt à l'étroit dans leur appartement. Tante Berthe vit dans un cinq pièces dans lequel se verrait bien les Guimiet, d'autant que la brave dame vit seule, et on ne rajeuni pas, un appartement plus fonctionnel lui conviendrait bien mieux pensent-ils. Alors quand elle évoque à mot couvert la possibilité de quitter l'appartement, Alain qui a été très proche de tante Berthe dans sa jeunesse, n'aura de cesse de mettre la pression sur elle, d'envoyer son père comme émissaire et d'en venir à la menace pour que la dame âgée libère en vitesse l'appartement convoité. Et puis il y a cette Germaine Lemaire, une auteure en vogue qu'Alain a rencontré et qui lui a fait un accueil gracieux. Il s'imagine déjà avoir ses entrées chez l'artiste.

Le planétarium demande une certaine participation du lecteur, Nathalie Sarraute exploite sa technique de la sous-conversation, un infra-langage où la psychologie et la pensée intime des personnages précéde la formulation par la parole pour confirmer ou infirmer leur vrai mobile. On est pas toujours sûr de l'identité du locuteur, la révélation en est retardé. de plus on a des épisodes qui se répètent du point de vue de personnages différents mais avec un décalage chronologique. C'est surprenant à prime abord mais on s'y fait rapidement. le planétarium met en scène avec férocité les milieux bourgeois. Deuxième incursion dans le nouveau roman, à réitérer.
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Le Planétarium est le premier roman de Sarraute n'employant plus la voix d'un unique narrateur-personnage. Comme son titre l'indique, on se trouve plongé dans un univers de voix fragmenté, univers forcément factice, Sarraute ne trichant pas avec son lecteur. Mais à lire les quelques critiques, on sent que le lecteur aime quand on se joue de lui, et souhaite voir une lanterne quand on lui tend une vessie sous les yeux.
Cette ouverture narrative entraîne donc des erreurs de sens chez le lecteur et des retours en arrière pour retrouver le bon chemin: "Ah! Mais ce n'est pas Alain qui parle? C'est Germaine..." Je comprends que cela agace beaucoup de monde, mais c'est pourtant ce que la littérature devrait toujours offrir: la liberté de construire ses propres chemins de lecture et de sens et faire le choix de l'activité du lecteur plutôt que la passivité. En parodiant une image sarrautienne, je n'aime pas les auteurs qui, du haut de leur notoriété, serrant notre nuque d'une main ferme, nous imposent leur "vérité".
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L'incipit en 4ème de couverture n'en est pas un mais un extrait du livre, le titre m'est resté longtemps énigmatique.
La forme: une avalanche de 3 petits points pour remplacer ...une ellipse, un halètement, donner l'impression de réflexions saccadées ... rien de tout cela ou tout à la fois??
Le fond: entre autre une histoire de points de vue entre les personnages à l'intérieur d'une famille et dans le milieu des Lettres, quand les personnages échangent leur point de vue il y a des "bouleversements" "Tout autour de lui se rétrécit, rapetisse, devient inconsistant léger etc..."
J'ai aimé cet ouvrage, il m'a fallu plusieurs fois revenir en arrière dans ma lecture, et quelquefois avancer en acceptant de ne pas comprendre tout de suite de qui il s'agissait.
Donc style surprenant mais grand moment de lecture.
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Nathalie Sarraute poursuit son exploration des tropismes, l'attitude et le langage sous-jacent situés derrière les mots prononcés conventionnellement dans la vie quotidienne. A partir d'une famille dont elle décrypte les tensions et les menues trahisons, elle met à nu les consciences avec jubilation sous une plume tour à tour empathique et ironique.

Les « cobayes » de Sarraute dans ce livre sont la famille Guimier et leur entourage. Il y a la tante, maniaque, avare, le couple du neveu et de sa femme, qui espèrent mettre la main sur l'appartement de la tante, et l'oncle, frère de celle-ci. Tout ce petit monde en apparence si harmonieux se voue de petites haines, rancoeurs et frustrations. Sarraute déconstruit la banalité du langage pour révéler les intentions et pensées sous-entendues de ses personnages. Il y a certes un petit coté » cobaye » chez eux, puisque le travail de Sarraute est unique, mais en même temps, l'auteur révèle une très grande empathie à cerner ainsi les pensées les plus secrètes de ses protagonistes.
Le style de Sarraute est plein de surprises, de comparaisons et de mises en scène du langage souvent surprenantes et très drôles teintées d'une ironie jamais gratuite, mais visant toujours juste. Evidemment, il ne faut pas recherche d'intrigue à proprement parler ici : c'est le langage et ses silences qui sont l'enjeu principal des livres de l'auteur. Je me suis livré une fois de plus à sa lecture avec une jubilation non dissimulée : personnellement, la lecture de ses livres est aussi haletante que celle d'un polar. Un vrai bonheur de lecture !
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