Il me tardait de rencontrer l'arabe du futur, voilà un moment qu'il me faisait de grands signes derrière ses bulles et ses planches.
Face mon ensevelissement sous mes différentes lectures en cette rentrée littéraire, un cruel dilemme s'offrait à moi, puisque je devrais rendre impérativement cette BD aujourd'hui réservée par une autre personne de bon gout à la bibliothèque. J'avais le choix entre soit lui accorder une bonne heure pour la lire, soit la rendre sans l'avoir lue et retourner à fond la tête dans ma rentrée littéraire.
Comme je l'avais moi-même attendue un certain temps avant de pouvoir l'avoir entre les mains, j'ai décidé de la lire sur le champ. le verdict est finalement mitigé, j'en attendais monts et merveilles après sa note stratosphérique sur Babélio : 4,24 pour 4661 notes.
Je ne vais donc pas faire partie des fans suite à la lecture de ce premier tome, qui raconte l'enfance de
Riad Sattouf de 1978 à 1984.
Le petit Riad est le fils de la bretonne Clémentine et du syrien Abdel-Razak. Si le couple se rencontre à Paris lors de ses études, le brillant étudiant syrien se retrouve frustré, après avoir soutenu sa thèse, de sa mention « honorable » qu'il estime injuste et considère comme une insulte raciste.
Il décide de démarrer sa carrière universitaire loin de la France, en partant à Tripoli dans la Lybie du tout fringuant (à l'époque) colonel Kadhafi, puis rejoint sa Syrie natale sous le joug d'Hazed Al-Assad, près de la tristement célèbre Homs.
Si cette tranche de vie est racontée avec fluidité, c'est avec son regard adulte que
Riad Sattouf la considère. Une sacrée école de vie faite de chocs culturels, de violence. le petit Riad, blond comme les blés, se sent étranger dans tous les pays, en France, comme en Lybie ou en Syrie, il ne réussit à se faire de copains nulle part, trouve les autres au mieux bizarres au pire cruels et barbares. J'ai été triste pour ce petit garçon. Si le lecteur le perçoit enfant plein d'admiration pour son père, seuls quelques maigres bonheurs partagés remontent à la surface. J'ai ressenti avec beaucoup de violence la rancoeur de l'adulte face à ce père pas toujours courageux, qui ne se bat pas pour ses idées, et abandonne bien vite ses illusions d'un monde plus juste pour se transformer en commentateur désabusé et cynique. La mère est une figure assez pâlotte, soumise, pas spécialement réconfortante pour l'enfant. Aussi bien avec les enfants de sa famille, son entourage, Riad est en permanence seul, incompris. Les adultes, éblouis par sa blondeur et sa petite bouille attendrissante ne lui accordent pas beaucoup plus de considération qu'à un objet.
La description de ces pays est saisissante par la violence, la misère matérielle et affective tant entre adultes qu'entre enfants. Il m'a manqué de la tendresse, de l'émotion, de l'amour, de douces madeleines de
Proust, seules les toutes (fruits que son père lui donne lors de promenades) semblent un souvenir réconfortant de cette enfance sans joie.
J'ai déjà le tome 2, je le lirai pour voir si ma première impression est confirmée et si je poursuis ou non ma route sur le chemin de l'enfance grise de
Riad Sattouf.