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sur 432 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Quand Mona lisait...des oeuvres d'art

A 10 ans, Mona n'a encore rien vu. Et pourtant sa vie risque de chavirer dans l'obscurité la plus totale.
Avant de peut-être perdre définitivement l'usage de ses yeux, ses parents et le corps médical mettent tout en oeuvre pour tenter de repousser cette étrange cécité qui la guette.
Son grand-père, quant à lui, a promis de l'emmener tous les mercredi chez le psychologue afin de l'aider à traverser cette épreuve particulièrement compliquée.
Mais Henry, le "Dadé" fantasque ne va pas vraiment tenir sa promesse. En secret, il a décidé de faire découvrir chaque semaine à sa petite-fille une oeuvre d'art dans un grand musée parisien.
Une découverte qui va se dérouler sur 52 semaines, soit l'équivalent d'une année ou d'un jeu de cartes complet.
A travers les yeux de Mona et surtout grâce à l'érudition d'un homme au moins équivalente à celle de trois conservateurs de musée réunis, nous allons nous émerveiller devant les tableaux ou les sculptures de Vermeer, Botticelli, Claudel, Turner, Monet, Manet, Basquiat, Degas, Picasso ou encore Kahlo. En parcourant les galeries du Louvre, d'Orsay et de Beaubourg nous allons assister à un véritable éveil spirituel par le questionnement et l'observation grâce au pouvoir de l'art.
Mona, qui au fil des visites se découvre un "oeil absolu", a à présent toutes les cartes en main pour partir à la recherche de cette lumière qui jaillit en elle pour la guider au coeur d'une nuit qui s'annonce sans fin...

52 chefs-d'oeuvre pour un fabuleux parcours initiatique en compagnie de personnages attachants. Une belle alchimie entre une petite-fille et son grand-père. Des présentations d'oeuvres passionnantes pour le novice ou l'érudit.
Même si la tension narrative perd un peu parfois de sa puissance au profit de celle de l'art qui en impose et impressionne, ce roman n'est jamais ennuyeux ni assommant. On observe, on s'interroge, on apprend aussi. Beaucoup. Sur l'art. Sur soi-même. Une belle invitation à regarder. Sans cesse. Regarder à perte de vue...

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Alors qu'elle est en train de faire ses devoirs, Mona, neuf ans, se retrouve soudain plongée dans le noir total. Durant plus d'une heure, soit une éternité, la fillette va connaître l'angoisse de la cécité, un épisode des plus traumatisant… Dès lors, c'est le branle-bas de combat parmi les spécialistes qui tentent d'élucider ce mystère et de comprendre ce qui provoque ces crises aussi soudaines qu'imprévisibles…
Pour Henry Vuillemin, son grand-père adoré, son “Dadé”, il y a urgence à agir. Hors de question de vivre avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Si sa petite fille doit devenir aveugle, alors il faut avant cela remplir ses yeux et son esprit des plus belles oeuvres artistiques qui composent le monde! Henry lui concocte en conséquence un programme sur un an, avec l'étude approfondie d'une oeuvre d'art par semaine. En passant par Le Louvre, le musée d'Orsay et Beaubourg, ce parcours initiatique va nous faire (re)découvrir 52 oeuvres et artistes qui ont marqué, chacun à leur façon, leur époque.

Comment ne pas succomber au charme de ce roman plein de bienveillance et d'érudition? J'ai adoré déambuler avec nos deux protagonistes à travers les galeries des différents musées, prendre le temps d'observer mais aussi d'apprendre et de comprendre les oeuvres choisies et leur artiste. J'ai aimé voir grandir Mona, suivre l'évolution de sa pensée, véritable terreau fertile dans lequel ce grand-père érudit et pédagogue sème les graines du savoir de manière ludique et didactique, façonnant les prémices d'une réflexion qui ne demande qu'à s'épanouir et faire son chemin…

J'ai trouvé la relation entre ce grand-père, vieil homme taiseux et solitaire depuis la mort de sa femme, et sa petite fille de toute beauté! Entre tendresse et admiration, le lien est profond, marqué par une étonnante maturité. Thomas Schlesser joue, au fil des chapitres, sur le poids de l'héritage familial, laissant planer sur cette relation étroite le fantôme d'une grand-mère partie trop tôt et les non-dits qui entourent sa disparition… le dénouement a beau être prévisible, le mystère qui entoure cette grand-mère, étroitement liée au destin de sa petite fille, n'en reste pas moins prenant!

L'écriture, quant à elle, est relativement simple et pour le moins agréable. L'auteur parvient sans problème à rendre accessible la lecture d'une oeuvre d'art à un lecteur néophyte qui s'y intéresserait sans avoir de connaissances particulières. Comme Mona, on a le sentiment de s'instruire sans se forcer, en mêlant le plaisir de la lecture à l'apprentissage. Seul bémol, le côté très répétitif de la narration, calquée sur le même schéma durant 52 chapitres et découpée ainsi: bref épisode de la vie de Mona/ description d'une oeuvre choisie par le grand-père/ échange autour de l'oeuvre entre les deux protagonistes/ leçon de vie que l'on peut en tirer. Une narration sans surprise donc, voire un peu simpliste mais qui n'ôte en rien la qualité du propos.

Bref, “Les yeux de Mona” reste une très jolie lecture que je me ferai un plaisir de conseiller autour de moi! Mention spéciale à l'éditeur qui a particulièrement su se démarquer dans son travail d'édition en imprimant une jaquette dans laquelle figurent toutes les oeuvres évoquées (et en couleurs!). La couverture se déplie et se déploie, permettant au lecteur de prendre connaissance, en même temps que Mona, de l'oeuvre étudiée. Une attention fort délicate mais surtout utile et moins rébarbative que d'interrompre sa lecture pour aller chercher les infos sur son téléphone!
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Mona, 10 ans, a failli perdre la vue, si ses yeux s'éteignent un jour définitivement, son grand-père, ne veut pas que sa mémoire ne garde que le souvenir de choses clinquantes et vaines. Il décide de lui faire suivre une cure capable de compenser la laideur dont sa jeunesse est abreuvée. Il veut accompagner sa petite fille dans les musées, là où l'on conserve ce que le monde a de plus beau et de plus humain.

J'ai eu beaucoup de mal à entrer dans ce roman, je n'ai pas l'habitude d'abandonner une lecture, j'ai eu raison de persévérer. Peu à peu, je me suis pris au jeu et j'ai déambulé avec plaisir dans les salles du Louvre, d'Orsay, de Beaubourg en compagnie d'Henry et Mona. À chaque nouvelle visite, l'auteur nous offre une description précise de l'oeuvre, les circonstances de son exécution, des informations sur le peintre ou le sculpteur, sur son époque. Il faut du temps pour pénétrer la profondeur de l'art. C'est un exercice fastidieux.
À travers chaque oeuvre le grand-père délivre à sa petite fille un message : fais confiance à ton imagination, cultive le détachement, souris à la vie, apprends à recevoir, il n'existe pas de sexe faible, laisse tes sentiments s'exprimer, sache dire « non ». Ces visites hebdomadaires vont faire office de soin de l'âme de Mona.
Un roman d'apprentissage, une relation touchante entre un grand-père et sa petite fille, l'évocation tout en sensibilité de l'euthanasie et du droit à mourir dignement. Une grande leçon d'art, d'Histoire et de vie. J'ai lu que ce roman serait bientôt adapté au cinéma, j'ai hâte de voir comment un cinéaste pourra retranscrire la profondeur de ce livre.



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« Avancer dans la vie, c'est faire cet effort ingrat de mettre au jour des blessures qu'on n'avait pas vues venir et qui, par leur discrétion même, traumatisent l'être tout au fond de son abîme. »

Lorsque l'on aime l'art comme moi, il n'est pas compliqué de comprendre les raisons qui m'ont poussée à lire ce roman.
J'ai été attirée par le regard de la jeune fille à la perle qui fixe le lecteur et l'invite à une sorte d'intimité, d'intériorité avec les oeuvres. Par ce choix, j'avais aussi envie de partir à la rencontre des oeuvres d'art tout autant que de Mona.

*
Ce roman raconte l'histoire d'une petite fille de dix ans, Mona, qui a des problèmes de vue et risque de devenir aveugle. Au lieu de l'accompagner chez un pédopsychiatre comme convenu, son grand-père, un vieil homme érudit et passionné de peinture, va décider de la conduire, en secret, tous les mercredis après-midi, dans un grand musée parisien.
En effet, ce grand-père protecteur et sensible trouve essentiel que la mémoire de sa petite-fille s'imprègne de la beauté du monde si jamais ses yeux s'éteignaient. Il va l'emmener d'abord au palais du Louvre, ensuite à Orsay, et enfin au Centre Pompidou.

Pendant un an, au rythme d'une oeuvre par semaine, Mona et son « Dadé » vont découvrir ensemble, un tableau, une sculpture, une fresque, un dessin, une photographie ou une installation, et bien sûr un artiste et son époque.

« Si je deviens aveugle, le paradis des couleurs, j'espère qu'il sera dans ma tête. »

J'ai aimé l'approche et la sensibilité du vieil homme qui laisse le temps à l'enfant d'observer l'oeuvre pour en décrypter le sens caché. Ainsi, Mona apprend à regarder les matières et les couleurs, les jeux d'ombre et de lumière, les formes et les volumes, la composition et les techniques picturales. Ensuite, il lui apprend à analyser, juger, faire des liens entre les oeuvres. de manière concise, didactique et accessible, le grand-père l'initie aux principaux courants artistiques et lui délivre des clés de compréhension. Il la guide avec bienveillance et douceur dans ses pensées et ses réflexions jusqu'à ce qu'une leçon d'art et de vie en émerge, leçon que l'enfant s'approprie.
En voici quelques-unes que je fais mienne :

« Connais-toi toi-même. »
« Ce qui ne tue pas rend plus fort. »
« Oublie le négatif ; garde sans cesse la lumière en toi. »

*
L'auteur nous propose un superbe parcours initiatique de la Renaissance italienne à l'une des dernières grandes figures de l'art moderne, Pierre Soulages. Thomas Schlesser nous amène à examiner les 52 chefs-d'oeuvre pour un résultat particulièrement éclectique. Pour plus de praticité, l'éditeur a eu l'excellente idée de glisser dans le livre une jaquette contenant la reproduction de chacune des oeuvres citées.

C'est un voyage fascinant et incroyablement érudit dans l'histoire de l'art occidental, mais pas uniquement : l'auteur aborde également un vaste éventail de sujets, comme la vie des artistes, L Histoire, la religion, la philosophie, …
Si la plupart des artistes sont connus, j'ai trouvé le choix des oeuvres original et pertinent, Thomas Schlesser ne cherchant pas forcément des oeuvres connues du grand public. Chacune d'entre elles s'inscrit dans une époque, un style, une intention, ce qui permet d'avoir une vue d'ensemble des principaux mouvements artistiques, comme le classicisme, le romantisme, l'impressionnisme, le surréalisme, le cubisme, …
En les ordonnant chronologiquement, elles semblent reliées les unes aux autres par un fil invisible mais très fort comme si les mouvements artistiques s'influençaient et se répondaient.

Au cours de ces 52 semaines, je suis devenue une petite souris, m'approchant au plus près de ces oeuvres majeures, faisant abstraction du bruit ambiant des visiteurs, prenant le temps de m'imprégner des oeuvres et d'aiguiser mon regard, d'écouter les échanges entre l'enfant et le vieil homme.
Et si j'ai tout de même un regret, c'est celui de ne pas avoir pu les découvrir comme Mona, me rendant moi-même dans ces trois magnifiques musées, le roman à la main, pour ne découvrir qu'une seule oeuvre d'art à chacune de mes visites.

« Ces gens autour de nous aimeraient tout avaler d'un coup, et ils se perdent sans savoir comment ménager leurs envies. »

*
« Les yeux de Mona » est une tranche de vie profondément ancrée dans l'art, mais le roman ne parle pas uniquement de cela. La fiction s'invite, permettant de découvrir le quotidien de Mona, rythmée par les visites médicales, l'école, les heures passées dans la brocante de son père, lieu de toutes les découvertes.
Ce qui m'a plu dans cette histoire familiale qui se superpose à l'art et lie l'ensemble, c'est la relation entre la petite-fille et « ce grand-père sémaphore, ce monument, ce silex adoré ». J'ai aimé cette petite fille vive, intelligente, curieuse, mâture et ce grand-père pédagogue, attentionné.

« Des grands-parents aux petits-enfants, des petits-enfants aux grands-parents, se crée parfois un lien miraculeux, qui tient au fait que, par une sorte de courbe existentielle, les aînés reviennent, du haut de leur vieil âge, aux sentiments de leur prime jeunesse et saisissent, mieux que quiconque, le printemps de la vie. »

*
Entre essai, roman d'initiation à l'art et fiction, « Les yeux de Mona » est une « invitation au voyage, une lucarne pour le rêve. »
A découvrir pour apprendre, comprendre, aimer, rêver.
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Phoenix vous présente…
"Les Yeux de Mona", un Livre de Thomas Schlesser (Français né en 1977), 496 pages, Albin Michel. 31 Janvier 2024.
Du jour au lendemain, alors qu'elle faisait ses travaux d'écolière, Mona, 10 ans, se voit perdre la vue peu à peu …
« Pourtant, si : on devient aussi aveugle « comme ça », la preuve. »
Alors qu'il ne semble avoir aucune cause apparente.
J'en ai un peu marre des livres « difficiles d'accès »…
Donc voilà la Fillette devient bit by bit aveugle et avant qu'il ne soit trop tard, sa famille lui fait découvrir tout un tas de belles choses, notamment des oeuvres d'art.
C'est d'ailleurs une métaphore pour « Carpe Diem » « Cueille le jour présent sans te soucier du lendemain »
Bonnes Lectures
Phoenix
++
Lien : https://linktr.ee/phoenixtcg
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478 pages.
52 chapitres, 52 semaines, 52 oeuvres d'art.
Trois musées parisiens : Le Louvre, Orsay et Beaubourg.
C'est le programme concocté par Dadé pour sa petite-fille Mona, en lieu et place de séances chez le pédopsychiatre. La petite Mona, vive et sensible, apprend peu à peu au contact de l'aïeul à regarder et à voir, à décrypter et à comprendre le contexte de la genèse de l'oeuvre, les intentions de l'artiste et ses possibles interprétations.

Au fil des pages nous déambulons aux côtés de Mona et Dadé, avec eux nous prenons le temps de contempler, méditer et nous cultiver.

Je salue l'originalité du roman, l'éclectisme des oeuvres présentées (des oeuvres « phares », que l'on pourra qualifier d' « incontournables » en ce qu'elles illustrent toutes un courant artistique propre à leur époque), la précision de leur description (notons que de surcroît les photographies de ces 52 oeuvres sont présentées dans la jaquette dépliable ; annexe très appréciable), la finesse des analyses.

Le roman peut se lire sur plusieurs niveaux : l'initiation à l'histoire de l'art est résolument didactique ; la relation singulière qui lie Mona à son aïeul peut se rapprocher d'un conte tel que L'alchimiste (Paolo Coelho), Jonathan Livingston le goéland (Richard Bach) ou même le petit prince ; chaque oeuvre, enfin, est prétexte à une « leçon » de sagesse ou de morale, comme dans les célèbres Fables de la Fontaine par exemple.
« Une initiation à la beauté et à la vie en 52 chefs-d'oeuvre »

Un ouvrage « différent » donc, à découvrir « en prenant son temps », comme on déambule d'une oeuvre à l'autre lors de la visite d'un musée. Un roman qui nous permet de (re)découvrir les oeuvres majeures de la peinture et de la sculpture et qui rend possible leur lecture à ceux qui ne peuvent pas les voir (d'autant plus que l'ouvrage sera également publié en gros caractères et en braille aux éditions Voir de près).

À lire. À offrir. À conserver soigneusement comme ouvrage de référence, aux côtés de ces livres d'art que l'on prend plaisir à feuilleter.
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J'ai été attirée par cette couverture qui me faisait de l'oeil, l'oeil de la jeune fille à la perle. Et ce prénom, Mona...(un peu facile pour appâter le lecteur... !)
L'histoire : Mona une petite fille de dix ans est aveugle pendant une heure. Tout est noir. Et puis
"Maman, papa, ça revient !"
Les examens médicaux ne décèlent rien.
Cette cécité temporaire inquiète Mona et ses parents. Personne ne peut affirmer que ça ne se reproduira pas.
Il est décidé, pour l'équilibre de Mona, que tous les mercredis, Henry, le grand-père l'accompagnera chez un pédopsychiatre. Henry a une autre idée, il emmènera sa petite fille au musée. Au Louvre, à Orsay, à Beaubourg.
Le programme s'étend sur cinquante deux semaines. Mona doit observer une seule oeuvre à chaque visite, un long moment et en silence. Ensuite elle doit s'exprimer sur ce qu'elle a vu et ressenti. Henry après avoir raconté l'histoire de l'oeuvre et de l'artiste, entame une discussion avec Mona. Une vraie leçon de philosophie de la vie se tisse de semaine en semaine.
Henry ne traite pas sa petite fille comme une enfant mais comme une adulte en devenir.
Ces visites sont un secret entre Mona et Henry.
Et si Mona devait perdre la vue elle aurait en elle un capital de beauté.
Alors que retenir de ce livre?
Tout d'abord une façon intelligente d'aller au musée. On ne court pas, on regarde, on scrute, on observe, on ressent. On s'approche, on s'éloigne, on aime, on n'aime pas, on rentre dans le tableau, on effleure la sculpture, on la caresse. ( Discrètement, c'est interdit !)
Ensuite que l'art d'être grands-parents c'est de transmettre mais surtout de prendre le temps d'écouter les enfants. de les laisser s'exprimer tranquillement et d'échanger avec eux.
Ce livre est une bonne leçon d'art et une belle histoire d'amour.
Un petit bémol : le rythme très répétitif, le ton très didactique (trop), le très (trop) grand savoir du grand-père, gomment un peu l'émotion que j'aurais aimé ressentir.
Ce livre écrit en dix ans, traduit en plus de vingt langues et en braille est une initiation à l'art et à la philosophie.

PS : toutes les oeuvres sont en photo dans la couverture.
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Au Musée avec Mona et son grand-père balafré. Faut-il chercher les raisons du succès éditorial de ce livre du côté de la découverte du parcours artistique savamment décrypté qu'il offre au public au sein de trois des plus grands musées parisiens connus ? Où alors dans le naturel (quoique pas toujours..) de personnages attachants qu'on y côtoie (dont fait partie le père brocanteur de Mona, Paul) ? Où bien peut-être dans la simplicité d'une narration évoquant celle d'un conte moral dont la construction est en phase avec le temps fictif du roman qui est celui de la durée de la cure médicale, artistique et psychique de Mona (découpage en cinquante deux chapitres/semaines) ? Où est-ce le propos tenant à distance certaine médiocrité contemporaine et mettant en avant la beauté intemporelle du geste inspiré en peinture (depuis la Renaissance jusqu'à aujourd'hui), le questionnement suscité par toute création qui séduisent et retiennent ici ? Tout cela ensemble sans doute concourt au charme de cette lecture et à faire de ce roman un bon livre même si l'impression de "récité" affecte à mon goût quelques dialogues entre Mona et son grand-père et certaines séquences devant les oeuvres.

Rien de tel qu'un face à face avec l'art entre ombres et lumières pour apprendre à dépasser les affres et les incertitudes de la condition humaine. Mona dix ans en fait l'expérience pendant un an avec la complicité du bienveillant Henry Vuillemin ("Dadé" pour sa petite fille) à la suite d'un épisode temporaire de cécité qui chamboule sa dernière année d'école primaire laissant planer un doute sérieux sur l'avenir de sa perception oculaire. À côté de la surveillance médicale resserrée qui s'instaure immédiatement autour de l'existence de Mona, son grand-père décide pour eux deux d'un rituel muséal tous les mercredis : une oeuvre à chaque fois différente sera soumise tour à tour à leurs regards et leurs appréciations respectives ; échappée salutaire qui les conduit, à l'insu des parents de Mona et hors des préconisations pédopsychiatriques prévues, devant dix-neuf oeuvres au Louvre, quinze à Orsay et dix-huit au Centre Pompidou.

Le parcours de soins de Mona a l'allure d'une initiation artistique intimiste, esthétique et sensorielle, où elle exerce son oeil au fil des semaines - parfois son toucher au risque de faire se déclencher d'une alarme ou même son odorat devant Thomas Gainsborough ! - et prête une oreille sensible aux leçons des grands maîtres sous l'autorité intellectuelle et l'immense affection de son grand-père, entre une fresque lumineuse de Botticelli et l'outre noir de Pierre Soulages et de Magritte à Louise Bourgeois. La fillette pourra, au seuil de l'adolescence, apprivoiser la nuit grâce à Van Gogh ou croire au miracle avec Philippe de Champaigne et, en brisant le tabou familial entourant l'absence de sa grand-mère trop tôt disparue, s'émanciper définitivement des terreurs de l'enfance pour atteindre au détachement de la Belle jardinière enseigné par Raphaël, quand bien même partout sévissent les monstres selon la leçon de Goya.
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Alors qu'elle fait ses devoirs, Mona, dix ans, se retrouve subitement atteinte de cécité. Soixante-trois minutes, c'est le temps qu'aura duré ce noir complet. Soixante-trois minutes qui vont paraître une éternité à l'enfant et à ses parents. Soixante-trois minutes d'angoisse, que ne parviendront pas totalement à apaiser les résultats d'examens du médecin, inapte à fournir une explication quant à cet évènement. Alors, pour que Mona puisse affronter son anxiété, Henry, son grand-père, est chargé de l'accompagner tous les mercredis chez un pédopsychiatre. Mais le « Dadé » a un tout autre projet. À la place, il décide de la conduire chaque semaine en cachette au musée du Louvre, pour qu'elle puisse y admirer les splendeurs du monde.

Avec Les yeux de Mona, Thomas Schlesser nous emmène à la découverte de cinquante-deux oeuvres d'art, peintures, sculptures, ou encore performances. Cinquante-deux chapitres, à travers lesquels nous arpenterons, une année durant, les couloirs de trois musées parisiens, Le Louvre, Orsay et Beaubourg. Suivant une trame chronologique, nous allons explorer cinq siècles d'art, de la Renaissance en passant par l'époque moderne puis contemporaine.

L'auteur est particulièrement pédagogue. Grâce à lui, j'ai redécouvert certaines oeuvres, j'ai appris à les regarder autrement, laissant de côté les quelques clés fournies par mes études d'histoire de l'art. J'ai retrouvé ce qui m'avait tant plu dans le célèbre ouvrage de Daniel Arasse, On n'y voit rien, cette manière ludique de transmettre les connaissances et d'exercer son oeil. Si certains historiens d'art m'ont laissé une image parfois un peu rigide, chez Thomas Schlesser j'ai ressenti une simplicité et une passion communicative. Ainsi, l'une des premières « leçons » de Mona est d'apprendre à contempler une oeuvre, l'observer, s'en imprégner jusqu'à s'animer à son contact.

J'ai été ravie de commencer ce parcours par un artiste que j'adore, Botticelli, et sa fresque Vénus et les trois Grâces offrant des présents à une jeune fille. de même, il y a des artistes que je ne connaissais que de nom, et que je n'avais jamais étudiés, je pense notamment aux femmes, Marie-Guillemine Benoist, Marguerite Gérard, Hannah Höch, Camille Claudel, etc. J'ai aimé découvrir des anecdotes sur les artistes, sur le contexte historique des oeuvres, comment, par exemple, Frida Kahlo a tenté d' « apprivoiser la souffrance morale et physique » grâce à la peinture, ou encore comment Nicolas Poussin, malgré ses tremblements, proposait des oeuvres « d'une extraordinaire stabilité esthétique ».

Cela étant, le fil conducteur de cette histoire reste Mona, qui évolue grâce aux enseignements artistiques dispensés par son grand-père, la vie des oeuvres et des artistes s'entremêlant subtilement à la sienne comme les pièces d'un immense puzzle. Une narration qui peut parfois sembler un peu répétitive, ou tout du moins suivre le même schéma à chaque chapitre, malgré tout, j'ai apprécié cette belle histoire. J'ai apprécié les protagonistes, Mona et sa famille, son père, notamment, mais aussi les thèmes évoqués par l'auteur, à travers le personnage de Colette particulièrement.

Les yeux de Mona est un joli roman initiatique, qui ravira aussi bien les amateurs d'art que les amateurs de belles histoires. Alors, suivez le guide !

Mon avis sur la version audio Audiolib :
On pourrait croire que ce roman qui parle d'art, plus particulièrement d'art visuel, ne se prêterait peut-être pas au format audio. Eh bien si ! Les images se dessinent sans peine dans notre esprit, grâce aux descriptions habiles de l'auteur. Par ailleurs, François Cognard, le narrateur, m'a plongée d'emblée dans le récit avec sa voix grave et harmonieuse. Il a ce timbre profond dont j'aime entendre les nuances grâce à mes écouteurs. Il interprète aussi bien le grand-père, imposant et parfois un peu froid, que Mina, dont l'espièglerie et la bonté illuminent cette histoire. L'entretien avec Thomas Schlesser en fin d'écoute est particulièrement intéressant, aussi j'ai découvert avec joie cet auteur et le contexte de création de son roman. Une belle écoute !

Roman lu dans le cadre du Prix Audiolib 2024. Je remercie la maison d'édition pour l'envoi de ce roman.

Chronique détaillée sur le blog.
Caroline - le murmure des âmes livres
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À ne surtout pas lire en étudiant les tableaux cités. Ce ne serait pas rendre justice à l'ambition de l'auteur : nous apprendre à voir au-delà de l'oeuvre. Il faut convoquer les images avec pour seules indications la description formelle du tableau et les commentaires qu'en font Mona, la petite fille, et Henry, son grand-père érudit.
C'est une initiation qui oscille entre « L'histoire de l'art pour les nuls » et le cours magistral d'un universitaire - tantôt simpliste, tantôt virtuose. On l'aura compris, ce livre a le défaut de sa qualité : la vulgarisation. Les plus snobs le bouderont, les autres se laisseront happer par le plaisir de la découverte. Ce fut mon cas.
Quel bonheur de retrouver Marguerite Gérard (p142), Marie-Guillemine Benoist (p160), Rosa Bonheur (p213), Julia Margaret Cameron (p232), Anna-Eva Bergman (p422) et l'immense Louise Bourgois (p437). Je sais, que de femmes, on ne se refait pas.
L'auteur traque le détail, le clin d'oeil, l'anomalie qui donnent à l'oeuvre son caractère transgressif et sa postérité. L'Histoire ne retient pas le conformisme. Pour la séduire, il faut sortir du cadre, briser les codes et s'affranchir des lieux communs. Cette quête, essentielle et sublime, valait un roman, qu'il faut lire comme on visite un musée, en accélérant le pas dans certaines salles, parce que la vie de Mona tient du prétexte. L'exceptionnelle maturité de cette petite fille manque de crédibilité. le roman devient catalogue si on met de côté son histoire qui ne manque pas de charme et d'intelligence par ailleurs : l'indicible, ce que l'on refuse de voir, la peur de la perte, et cette magnifique trouvaille, conclure avec l'outre-noir de Soulages.
Le livre de Thomas Schlesser m'a fait penser, dans ses intentions, au « Monde de Sophie » de Jostein Gaarder. L'instruction par le roman est un exercice périlleux (car le didactisme guette). Umberto Eco en reste le maître incontesté.
Bilan : 🌹🌹
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