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Jorge Semprun revient sur les deux années d'internement au camp de Buchenwald pendant la seconde guerre mondiale dans un récit poignant, à la fois source et témoignage inestimable pour la mémoire collective.
Les conditions inhumaines dans lesquels ces hommes jouent leur survie est terrible, bouleversante. Comment faire pour vivre un jour de plus ? D'autres scènes décrites semblent tout bonnement surréalistes (un orchestre de jazz improvisé en catimini, la présence d'une bibliothèque au sein même du camp, Semprun y lira Faulkner notamment).
Mais le texte de Semprun qui aura toute sa vie combattu dans ces actes puis par les mots le fascisme et le nazisme est aussi l'occasion pour l'intellectuel qu'il est, de revenir sur des instantanés de vie d'avant et après son internement.
Et c'est dans ces moments là que j'ai par instant ressenti une baisse d'intérêt. Quand l'auteur de « L'écriture ou la vie » semble se disperser dans son récit. Autre petit bémol, le choix de Semprun de ne pas traduire certains passages en allemand ou en espagnol (je suis une brèle en langue et pas d'allusion salace Hugo) qui sont forcément frustrants. Mis à part cela, s'est bien évidemment un texte au combien précieux.
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Sur la demande d'un de ses amis, rescapé de Buchenwald comme lui, Semprun écrit à nouveau sur sa détention dans ce camp de concentration. Et, 55 ans après cette épreuve, les souvenirs resurgissent . Semprun, 19 ans alors, raconte comment il mobilise ces souvenirs en se rappelant des références littéraires qu'il avait à l'époque pour tenir dans des conditions inhumaines. Il se voit par exemple se récitant à soi les poèmes de Rimbaud, Lorca ou Valéry dans les endroits les plus puants du camp comme les latrines ou les crématoires.

Ce livre est aussi parsemé de références musicales, au camp, le dimanche, dans le block des Norvégiens, moins surveillé que les autres, il allait écouter des concerts de musique interdite par les Nazis "In the shade of an old apple tree" de Louis Armstrong. Sa déjà très grande culture, son combat politique en faveur du communisme (il raconte qu'à l'époque il était bien naïf sur les bienfaits de cette idéologie) et surtout son combat contre les "fachos"accompagnent le jeune Semprun et l'aident à survivre, à ne pas sombrer: sous les coups de matraques au camp de travail, à cause du manque de nourriture, ou du manque d'hygiène et surtout, surtout, "à cause de la promiscuité".

La bibliothèque du camp le nourrit, intellectuellement: Goethe, Faulkner... un demi-siècle plus tard, il semble les considérer comme des compagnons d'alors.
Cependant, une menace pèse particulièrement sur lui: la Gestapo souhaiterait l'interroger dans quelques jours. le livre commence quand le réseau communiste clandestin du camp veut alors le sauver de cet interrogatoire et lui annonce qu'ils ont trouvé "le mort qu'il faut", un mort à sa place, même âge, même apparence et surtout numéro proche de déporté.
La suite du récit porte sur les démarches du jeune Semprun pour faire la connaissance de ce double qui va mourir à sa place. On peut s'attendre à une certaine émotion au moment où ils font connaissance. Ce récit n'est pourtant pas larmoyant.

le vieil homme, en 2000, retrouve le portrait de lui-même à 19-20 ans il s'en émeut quand il se souvient de tous ceux qui sont tombés sous les coups des Nazis et plus tard, sous la botte communiste.

Semprun est un auteur que je découvre dans la cour des grands.





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C'est à un douloureux travail de souvenir que l'auteur, rescapé de Buchenwald, nous invite. Sans se complaire aucunement, à aucun moment dans sa propre misère, il nous décrit la vie, la lutte quotidienne pour survivre.
Il nous raconte surtout, fait que j'ignorais, toute l'incroyable organisation que les détenus sont parvenus à mettre en place et enfin la petite société avec ses langues, ses cultures, ses castes aussi que constitue cet univers concentrationnaire.
Il nous relate par le détail l'organisation que tous les membres de toute nationalité du parti communiste internés ont mise en place pour résister encore modestement mais efficacement contre la folie nazie.
C'est surtout, au travers de cette vie réduite à presque rien, un hymne à la grandeur de la philosophie, à la pensée et à la force des convictions, à la poésie aussi que nombre des détenus récitent seuls ou ensemble, un appel à l'humanisme tout court enfin.
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On retrouve dans ce roman à forte teneur autobiographique Jorge Semprun écrivain d'une humanité à la fois généreuse et pudique. Bien sûr, il nous parle de Buchenwald, mais à la façon de celui qui a su trouver en lui-même les ressources lui permettant de se donner des chances de surmonter cette dévastation, en étant bien conscient que cette volonté ne suffit pas, il lui a fallu aussi beaucoup de chance. La littérature n'est jamais bien loin et fait partie intégrante de cette résistance intérieure et de la façon dont il la reconstruit dans ses romans : notamment, on ne soulignera jamais assez l'importance capitale des digressions dans le style et dans le récit de l'auteur Semprun!
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Quel coup de poing dans le ventre que ce livre !

Car Semprun y raconte son expérience de déporté à Buchenwald. Autant dire que l'ambiance est très lourde.

Heureusement, l'auteur nous épargne les images de violence ; la description de la vie au camp suffit amplement à comprendre. Malgré le contexte terrible du livre, j'en retiens la belle plume de Semprun, son extraordinaire érudition, ses réflexions philosophiques puissantes. Et puis l'humour dont il arrive malgré tout à parer ces horreurs, sans doute pour mieux s'en extraire.

Au coeur de l'inhumanité, Semprun raconte les bouts d'humanité, qu'il cultive comme des fleurs fragiles qui vont grandir un jour et peut-être parvenir à effacer le reste.

J'ai refermé le livre en poussant un « ouf » de soulagement. Ouf, d'avoir la chance de pouvoir m'enfuir de cet enfer. Ouf de pouvoir retrouver ma vie tranquille, ouf de n'avoir pas eu à me plaindre d'autre chose que de la cantine du resto U, lorsque j'avais 20 ans.

Je ne relirai sans doute pas du Semprun, ce n'est pas une expérience franchement agréable. Mais il faut l'avoir lu, au moins une fois. Comme un livre-vaccin, pour ne pas oublier que la bête immonde est toujours là, en nous, cachée sous le vernis fragile de la « civilisation ». Qu'elle est prête à se réveiller à la moindre frustration, au moindre affront, au moindre visage différent du nôtre. À Srebrenica, à Alep, à Marioupol, elle a montré qu'elle n'avait rien perdu de sa vigueur, que rien n'avait changé.

D'ailleurs, moi, est-ce que je suis bien sûr de ne pas l'abriter aussi un peu, derrière mes colères, mes agacements, mes rancunes ?

Lien : https://marc-torres.fr/
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Dans ce livre, Jorge Semprun nous convoque 40 ans en arrière, à Buchenwald, le temps d'un week-end.
Une lettre, en provenance de Berlin pourrait mettre la vie de Jorge Semprun en péril. L'organisation communiste clandestine du camp décide alors de lui faire endosser l'identité d'un moribond, « le mort qu'il faut », pour tenter de lui sauver la vie. Allongé dans l'infirmerie du camp à côté de cet homme du même âge que lui, arrivé au camp en même temps que lui, avec qui il a eu l'occasion de discuter, il nous confie ses tourments, ses réflexions, son organisation psychique, pour résister à l'horreur du camp.
Sa planche de salut pour résister à l'oppression allemande : une activité solidaire (en tant que militant au sein de l'organisation communiste infiltrée à l'intérieure du camp ; engagement qui lui sauvera la vie) ; activité sociale et intellectuelle (en tant que participant à des discussions sur Gide, Giraudoux, Faulkner…, près des latrines –seul endroit que fuyaient les SS-, et malgré la chaleur et la pestilence) ; activité onirique (dans sa recherche d'intimité et de solitude, loin des regards omniprésents des « autres », par l'invitation intime de poètes tels que Baudelaire, Verlaine, …
Plus globalement, à travers ce témoignage, c'est une réflexion sur la vie, la mort, la chance, le hasard, la volonté, la cruauté, la solidarité, dans un cadre hors du commun, que nous livre l'auteur.
Un bémol me concernant : les digressions soudaines et permanentes de l'auteur, les citations en allemand, espagnol… (pas toujours traduites), les références littéraires et philosophiques multiples, bref, UN style, occasionnant quelques « décrochages » dans le plaisir de lire.
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Où s'arrête l'autobiographie et où commence la fiction ? Si l'auteur nous livre quelques clefs, elles ne sont pas suffisantes pour déterminer si ce “mort qu'il faut” est un simple alter ego ou une victime ayant réellement existé.

Par contre on comprend mieux les rouages de ce camp de “rééducation” que fut Buchenwald oú l'extermination des opposants et des droits communs essentiellement s'effectua pas l'épuisement et la faim, ouvrant la porte á l'impitoyable sélection naturelle: Semprun insiste sur la vitale autodiscipline imposant une hygiène scrupuleuse malgré la promiscuité, le froid et les miasmes des fosses d'aisance repoussantes converties en lieu de convivialité car hors des regards des gardiens.

De même apprend-t-on comment la rigoureuse organisation communiste a réussi à tisser un réseau de solidarité au sein même de l'administration pénitentiaire et comment ensuite la plupart de ces militants et résistants payeront de leur vie ce passé dans les purges staliniennes.

Un livre recommandable pour qui ne rechigne pas à s'immerger dans un passé où le confort se retrouve cantonné dans l'imaginaire et la nostalgie, la douleur et la faim sont une compagnie impitoyable et la mort une présence quotidienne avec pour guide la force morale maintenue par l'espoir (les Étasuniens devant impérativement tenir á Bastogne).
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Au début de l'année, nous commémorions les 70 ans de la libération du camp d'Auschwitz et il m'est soudainement revenu à la mémoire que j'avais acheté, il y a de ça quelques années, quelques romans de Jorge Semprun qui racontaient sa vie dans ces camps de la mort et je me suis dit qu'il serait intéressant de lire l'un d'entre eux et mon intérêt s'est donc porté sur ce roman : le mort qu'il faut.

Dès le début du roman, l'auteur nous plonge dans l'horrible ambiance des camps de la mort, entre les divers baraquements, les soldats SS (inutile de dire qu'ils sont peu sympathiques), les corps amoindris, voire déjà éteints, les fours crématoires…, même si Semprun semble les regarder selon un double regard : à certains moments, il semble les regarder de loin, car, dans ce roman, il dit travailler à l'Arbeitsstatistik, sorte de bureau de comptabilité des camps de la mort, fruit, apparemment, d'une montée en grade, car, il nous décrit à d'autres moments, les instants où il était plus proche des détenus, à son arrivée au camp. Mais très vite, cette ambiance morbide laisse place à une galerie de personnages, tantôt fictifs, tantôt réels et tantôt uniquement fictifs de par leur patronyme (comme l'explique Semprun à la fin du livre), une galerie de personnages extrêmement intéressants qui couvre à merveille tous les types de personnages que l'on aurait pu rencontrer dans ces « camps de la mort », allant des juifs allemands engagés aux divers emprisonnés, que l'auteur avait connus avant sa captivité : allant des juifs aux communistes, en passant par les russes et les résistants.

Semprun nous fait également part, via quelques éléments plus étonnants, comme la bibliothèque du camp, par exemple, de ses souvenirs d'avant son enfermement, de ses études, de ses lectures, de ses pensées. En bref, il m'est apparu que le camp d'Auschwitz apparaissait davantage comme une contextualisation dans laquelle Semprun peut nous évoquer divers souvenirs et divers pans de sa pensée. Cependant, il nous arrive que l'auteur nous replonge directement, pour quelques pages, dans l'univers sordide des camps, comme pour que nous ne perdions pas de vue, qu'il s'agit d'un roman sur son expérience auschwitzienne.

Une autre qualité de ce roman de Semprun est le suspense que l'auteur tient à conserver pour garder en haleine son lecteur, en particulier, lorsqu'il s'agit de ce fameux mort, dont il nous parle dans le titre. En effet, Semprun nous en parle dans le tout premier chapitre et ensuite, il faudra attendre environ 200 pages pour comprendre l'identité de ce fameux mort.

En résumé, un livre extrêmement bien écrit, où à partir d'un contexte grave, l'auteur allège quelque peu son propos en variant les sujets à plaisir et où l'auteur s'occupe de préserver un certain suspense, pour maintenir le lecteur dans son désir de lire. Un plaisir de lecture !

Lien : http://leslecturesduprofesse..
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Excellente histoire que celle que nous narre Jorge Semprun, surtout quand on sait que cette histoire sur les camps de Buchenwald est la sienne, et ce malgré des répétitions à l'appel, et des passages en allemand non traduits. Je reprocherai quand même à l'auteur de ne pas nous avoir briffé sur la situation historique, pour les gens comme moi pour qui les cours d'histoire sont déjà d'une autre époque.
Même si la première partie du livre nous amène l'intrique ; ma préférence va à la seconde, on ne peut plus émouvante, avec le décès de François, et les souvenirs qui affluent.
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En 1944, alors qu'il est interné à Buchenwald Jorge Semprun doit se faire passer pour mort afin d'échapper à une enquête nazie. Ses camarades lui trouvent "le mort qu'il faut", celui avec lequel il pourra échanger son identité.
Auprès du grabat où l'Autre agonise, Semprun s'interroge sur leurs deux destins.
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