Ce roman brosse un portrait au vitriol du fils d'un rabbin lettré qui ressemble, d'après sa biographie (merci wiki) à l'auteur prix Nobel de littérature. C'est donc une espèce d'autocritique au style très enlevé, et non dénué d'un certain humour : l'auteur opérant une distanciation sarcastique vis à vis de son personnage (lui-même) assez réussie.
Coureur de jupons, émigré juif polonais et intrinsèquement veule, Hertz Minsker vit à New York en 1940 avec Bronia son épouse juive qui a abandonné son époux et ses enfants à Varsovie dans les années 40, ce qui n'est pas la meilleure période pour avoir l'esprit tranquille. Tout cela pour suivre le fameux fils de Rabbin.
Ce roman est donc essentiellement juif puisque tous les protagonistes le sont et ne jurent que par leur appartenance à cette communauté. Chacun pourra néanmoins apprécier la galerie de personnages, je ne les décris pas en détail, c'est un peu l'objet du roman, mais il y a un peu de tout : le riche propriétaire avare et complètement obsédé par le statut d'intellectuel de son protégé au grand coeur (Hertz . . . verstehen Sie ?), sa femme infidèle mais sachant prioritairement regarder du côté de ses intérêts financiers, l'ex-mari de cette dernière, trafiquant de tableaux dont on n'est pas très sûr de la provenance à part qu'ils viennent d'Europe dont le martyr vient de commencer en passant par l'Afrique du Nord qui sert de base de repli et de transfert ..., etc etc... bref que du beau monde dans cette diaspora devenue états-unienne.
Isaac Bashevis Singer nous emporte dans un tourbillon de rencontres, de situations toutes plus grotesques et invraisemblables les unes que les autres, cela tourbillonne, cela virevolte dans tous les sens.
Aucune considération politique ne vient entraver leurs quêtes de réalisation personnelle (financière essentiellement), des lamentations oui, cela ne manque pas, c'est un peu le deuxième objet du roman, mais à propos des malheurs qui les accablent quand ils sont pris en train de tricher, voler ou tromper Ses personnages ont un point commun : ils sont complètement égocentriques. Ils ont fui la Pologne pour se forger avec succès ici, aux états unis, une vie avantageuse.
Sexe, amour et promotion sociales sont les maîtres mots. Des phrases pseudo religieuses (autant que je puisse savoir) viennent justifier les turpitudes des personnages tous très croyants comme : "on doit pouvoir choisir aussi ses péchés".
Isaac Bashevis Singer semble, à chaque instant se moquer de cette communauté à laquelle il appartient, mais comme il a été nourri à cette culture, qu'elle le définit en quelques sortes, il le fait avec humour, sarcasme et détachement. Il réussit ainsi à faire sourire le lecteur même si celui-ci n'éprouve aucune sympathie pour ses personnages.