C'est avec en tête le coup de coeur que j'ai eu pour Quand vient la horde chez le même éditeur et les avis plus que positifs que j'ai lu sur la blogosphère, que je me suis lancée dans cette aventure hivernale pleine de promesses. Après un début des plus laborieux, j'ai fini par être emportée moi aussi par le froid coupable qui régnait chez les héros et qui ne demandait qu'à être réchauffé, mais cela n'a pas été le coup de coeur escompté.
J'ai un réel souci parfois avec les éditeurs au positionnement flou. Je sais que ça ne plaira pas à tout le monde, mais personnellement, quand je m'engage dans une lecture, j'aime savoir si elle a été écrite pour un public de jeunes ou d'adultes, car j'y vois une vraie différence, souvent, à la lecture. le problème de ScriNeo, c'est qu'ils flirtent un peu entre les deux. Parfois, on va tomber sur des textes résolument adultes, comme les
Aurélie Wellenstein. D'autrefois, ce sont des textes plus destiné à la jeunesse. Ce fut le cas ici et je ne m'y attendais pas à ce point, surtout au début.
A cause de cela, je dois dire que j'ai mis du temps à entrer dans l'histoire. J'ai trouvé le début terriblement plat et ce n'est pas la plume un peu trop concise de l'autrice avec ses phrases très courtes et ses arcs narratifs manquant de développements qui m'ont aidée. Je me suis terriblement ennuyée pendant le premier quart de l'histoire, ne voyant que peu d'intérêt à ce qui se produisait lors de la séparation d'Eonak et Leythe suite à une razzia orchestrée par des marchands d'esclaves d'un clan voisin. C'est raconté de manière assez plate, avec peu d'empathie, peu de détails aussi et un décor pas beaucoup développé. Bref, rien pour sortir du lot. Heureusement, j'ai insisté. Ce n'était pas possible dans mon esprit que tant d'amis blogueurs aient aimé si l'ensemble du texte était ainsi. Il devait y avoir quelque chose d'autre et ce fut le cas.
Comme il est existe des slow burn en romance, j'ai découvert ici qu'il y avait des slow burn en fantasy. Une fois que l'autrice a eu fait le choix, discutable, d'axer plus son récit sur Eonak, celui capturé par les esclavagistes et de décrire son parcours avec en focus sa relation avec le chef de ceux s'en étant pris à son clan, ce fut lumineux - ou plutôt sombrement complexe - et j'ai adoré cela ! L'autrice nous conte alors quelque chose de bien plus à vif : comment un enfant peut se construire quand il a été maltraité par ses parents ? Va-t-il sans cesse reproduire ce qu'il a vécu ? Est-il destiné à se mettre sans cesse sous le joug de quelqu'un ? Est-ce que tous ceux qui vont le prendre sous leur aile sont forcément toxique ? J'ai beaucoup aimé ces thématiques.
Ainsi à partir de là, ce fut un réel plaisir de suivre le destin d'Eonak, même si j'ai continué à trouver la plume de l'autrice assez maladroite car manquant d'assurance et vacillant à de nombreuses reprises ce qui se sent dans le manque de développement d'à peu près tout... Cependant, il se dégage quelque chose de la relation entre Eonak et Amarok qui m'a totalement séduite. J'ai adoré suivre leur étrange rapprochement et tout ce qu'il implique. J'ai adoré leurs échanges sur le poids de l'héritage, sur leurs différents modes de vie, l'un étant nomade par tradition et l'autre s'étant sorti de cette condition. J'ai aimé aussi leurs discussions sur l'esclavagisme et les modèles de sociétés qu'ils imaginaient. Ce dernier point aurait peut-être pu être plus poussé. de manière assez symétrique, j'ai apprécié la relation qu'Eonak va aussi tisser avec un autre prisonnier, ami et confident de sa mère qui elle-même était battue par son époux, ami qui n'a rien fait et s'en veut. C'est un tout autre pan d'Eonak qu'on découvre avec lui et ce fut bouleversant. Cette double thématique de l'enfant victime et du poids de l'héritage et de la tradition fut fort intéressante.
Cependant comme je le disais, c'est un roman très lent, un peu mollasson également et dans lequel, j'ai trouvé que la soeur, Leythe, avait un rôle bien moindre, voire qui s'efface presque au fil des chapitres face à la montée en force des tourments de son frère qui, lui, cherche sa place, là où elle, semble l'avoir trouvée. J'ai trouvé dommage que ce soit encore le personnage masculin qui soit mis en avant au détriment du féminin. On me dira qu'on est essentiellement avec des sociétés patriarcales et que c'est peut-être pour cela. Je rétorquerais que la mère du duo était une sorte de chef de clan et une grande guerrière, la bascule était donc possible et je regrette son absence. J'ai trouvé que l'autrice choisissait ainsi la facilité en choisissant Eonak dans ce contexte et que son écriture de Leythe était des plus maladroite, à l'image de ce revirement soudain entre elle et Sakari, la femme enceinte qui l'accompagne, dans les ultimes pages, que j'ai trouvé incongru au vu du reste du récit. L'autrice aurait pris soin de développer ses personnages féminins, je n'aurais rien eu à dire, mais là, ça sort de nulle part !
Cette aventure est donc pleine de riches idées mais également de maladresses qui rendent la lecture bancale. Il n'y a pas vraiment de rythme. le décor hivernal est mal exploité car trop souvent oublié en arrière arrière-plan. Il ne se passe pas grand-chose au final et ce qui se produit est sans surprise de bout en bout. En même temps, c'est le récit de la vie de clans dans le Grand Nord et c'était chouette aussi de découvrir ce quotidien avec des clans voisins aux traditions pourtant différentes, à la vie différente. J'aurais juste aimé que ce soit vraiment développé et pas juste posé pour ensuite ne pas vraiment l'exploiter.
Je me retrouve donc assez partagée à la fin de cette lecture. Comme sa couverture, il y a réellement deux temps, deux ambiances, deux sentiments avec lesquels je me retrouve. J'ai aimé suivre Eonak pour le voir se libérer de ce qui lui pèse sur le coeur et oser pousser son premier cri comme le loup de la couverture qu'il incarne. J'ai trouvé, malheureusement, Leythe bien plus timide à l'image de ce cerf sur la couverture qui a des allures plus douces, comme s'il soufflait juste un filet d'air, ce qui la représente bien. Je suis déçue de bien des choix de l'autrice concernant sa faible utilisation de ce décor des clans du Nord qui aurait pu être tellement plus riche ou sa mise en avant d'un héros masculin au détriment de la fille de l'histoire. Mais j'ai adoré la force qu'elle a mise pour décrire les souffrances et le mal être de son héros et la relation ambiguë qu'il tisse avec ses pères de substitution. Alors je ne peux pas dire que je n'ai pas aimé, mais je ne peux pas non plus occulter les nombreux défauts de l'oeuvre. Il va falloir que l'autrice nous propose un nouveau texte pour m'aider à trancher ;)
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