« Durant ces premiers jours, il était encore inconcevable que la civilisation puisse ne pas s'en remettre du tout. »
«
Ravage » de
Barjavel et « Malevil » de Merle sont les deux seuls ouvrages que j'ai lus et que je me souviens avoir associés à une « fin du monde » provoquée par des catastrophes qui, à l'époque me paraissaient très lointaines voire impossibles.
Un pur sentiment de vraie science-fiction.
Probablement après avoir subi comme tout le monde la Covid 19, la lecture de «
Station Eleven » a, dès les premiers chapitres, sournoisement provoqué en moi une impression d'éventuelle réalité, de possible anticipation. le ver était dans ma pomme.
J'étais mûr à point pour gober toutes les répercussions envisagées par l'arrivée d'une grippe de Russie (pour changer) qui tue en deux jours la majorité de la population du globe.
J'entame donc ce roman comme un futur manuel « Castor junior » du survivant de la pandémie avec ses lots de désarrois et d'anxiétés pour le citadin que j'ai toujours été.
Ma dépendance n'a d'égal que mon incapacité à vivre sans l'assistance du modernisme.
Que ferais-je sans électricité, sans eau, sans nourriture aisément accessible, sans moyen de me déplacer, sans communication et enfin sans amour, ni ami ?
Emily St John Mandel a écrit un roman attrayant par son habile construction, un peu long parfois par son manque d'action mais toujours anxiogène par sa formulation.
An 20 après le cataclysme : Tous les survivants sont en quête d'un être cher, d'un refuge calme et serein ou simplement d'une réponse, ils endurent chaque jour les drames d'une existence de déracinés. Ils sont pour la plupart liés par leur amour de la musique et du théâtre au sein d'une troupe, la Symphonie Itinérante dont Kirsten est le personnage principal.
Cette jeune femme avait cinq ans et faisait de la figuration dans la pièce de
Shakespeare «
le roi Lear » lorsque sur scène meurt Arthur, une star du théâtre et du cinéma et que débute l'épidémie destructrice de la civilisation…
Le charme de ce roman réside dans les multiples liaisons que tissent l'auteure entre les différents protagonistes, dont «
Station Eleven » en est l'axe central et Arthur le bras armé.
Son bras qu'avec respect toute la presse people admire.
J'ai refermé mon livre, j'avais fini. J'ai levé le nez, un peu dérouté et je suis parti un peu comme un zombi faire les courses en vélo à la superette du coin. La caissière m'a souri, ma carte bleue a fonctionné, mon réfrigérateur ronronne comme le chat que je n'ai pas.
La vie est sur « on ». J'ai tellement eu peur !