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Très belle découverte que ce roman, qui m'a emmenée un peu plus loin que je ne l'aurais cru ; je crois même qu'il est la cause d'une rare et longue insomnie cette semaine, après avoir lu la longue scène sur la vie qui se réinstalle dans l'aéroport de Severn City au lendemain du drame.
La construction impeccable du récit, faite d'aller retours entre le monde d'avant la grippe qui a décimé plus de 99% des humains et le monde post-apocalyptique, où les avions ne volent plus, où plus rien n'est à portée de main ou de clic, et dont il émane une étrange poésie malgré sa violence et son aridité, renvoie à une réflexion troublante sur ce qui fait notre civilisation occidentale.

Même pitch que « le fléau » de Stephen King, mais avec un propos plus mature quoi que pas tout à fait abouti. M'est avis qu'il y aura un deuxième tome et qu'il s'appellera Docteur Eleven, à l'instar de ce roman graphique prémonitoire qui sert de fil rouge aux deux périodes du roman, et que ce deuxième tome creusera plus en profondeur les personnalités des survivants et le sens de leurs agissements individuels et collectifs, ce qui n'est qu'abordé que superficiellement dans « Station Eleven » qui s'attache plus à ce qui disparaît du monde d'avant.
Je prends les paris !
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Station Eleven est un des romans évenements de cette rentrée littéraire, très remarqué dans le monde anglo-saxon et sacré par le Prix Arthur C. Clarke qui récompense chaque année le meilleur roman de science-fiction publié au Royaume-Uni.

Station Eleven marque l'entrée de son auteur dans le monde de la science-fiction, alors qu'elle était auparavant plutôt tournée vers le genre du polar , et on peut dire que cela reste une vraie curiosité en France, comme toute tentative de littérature de science fiction ayant des ambitions plus grand public.

Station Eleven est en effet un roman du genre post apocalyptique écrit par un auteur de littérature blanche dans la veine du roman culte " La Route" de McCarthy, .

Si le genre du roman post apocalyptique ne me séduit pas outre mesure a priori, la profession des protagonistes de l'histoire en revanche ne peut que me passionner : En effet, les personnages principaux du roman Station Eleven, sont des artistes itinérants, qui traversent le pays et vont de communautés en communautés.

Et contrairement à ce que l'on pourrait penser, c'est bien cet élément particulier qui a donné naissance au roman , l'auteur reconnaissant ne pas avoir du tout en tête l'aspect apocalyptique et voulait avant tout se focaliser sur cette troupe itinérante qui envers et contre tout poursuit l'illusion, le rêve.

Des personnages qui restent profondément humain, ce qui est rare dans les livres de SF- là je me mets tous les fans de science fiction sur le dos- qui gagnent en profondeur grâce à de beaux flash backs qui leur donnent une vraie épaisseur psychologique.

Car et c'est un des gros atouts de ce livre, station eleve est ce genre de romans construit comme un puzzle, dont les pièces vont peu à peu se mettre en place sous les yeux du lecteur.

Le récit de Mandel se pose la question de savoir quelle oeuvre, quelle culture survivrait à notre époque si la civilisation venait à être décimée objets culturels suite à une apocalypse ? "The show must go on", sembler clamer ce roman à toutes les pages, et c'est l'idée magnifique de ce livre important de la rentrée 2016.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Et si une grippe devenait soudain mortelle et emportait 99 % de la population… une maladie foudroyante qui tue les contaminés en quelques heures. Et ceux qui en réchappent n'auront peut-être rien de mieux à faire que de s'entretuer?

Dans ce monde de cadavres, les avions cessent de voler, les villes sont immobilisées et bientôt, l'électricité manque. Il n'y a plus de téléphone ou d'internet, plus de transport ou d'agriculture. C'est cette civilisation en ruine que raconte Emily St-John Mandel dans ce roman.

Mais n'est pas juste un récit post-apocalyptique, c'est aussi la vie de ses personnages juste avant et pendant la contamination. Des personnages complexes qui gravitent autour d'un acteur célèbre : son meilleur ami, son ex-femme auteure de romans graphiques, un secouriste, une petite fille comédienne, etc.

Une belle écriture qui nous plonge vraiment dans ce monde où tous ces objets du quotidien sont devenus inutiles et qui touche des réflexions le sens de la vie et de la célébrité, sur l'amour et l'amitié.

Un coup de coeur que ce roman qu'on classe en science-fiction, mais qui est surtout psychologique et réaliste.
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Beau roman sur un thème un peu rebattu : la pandémie fatale à l'humanité...
Je cite de mémoire : le fléau de King, la trilogie de Margaret Atwood, la route de McCarthy, en un monde parfait de Laura Kasischke et d'autres encore sans doute...Dans tous ces romans - y compris celui d'Emily Saint John Mandel, la civilisation s'effondre totalement...Retour a l'âge de pierre...Et pour la première fois je me suis demandée : mais pourquoi cet effondrement total du système ? En terme de pandémie, on ne peut pas faire mieux que la peste noire de 1348, et, que je sache, tous les États ont tenu, de même que les systèmes economiques, le commerce etc... Donc, cette histoire d'effondrement total, c'est un fantasme de civilisation ultra avancée en terme de technologie ...Le seul exemple que je trouve comparable, c'est la chute de l'Empire romain, avec son eau courante, ses autoroutes, ses aqueducs, ses piscines chauffées, sa poste etc ...Bref, une poignée de personnages se retrouvent à vivre dans un monde anarchique sans électricité, internet ni portable...Rien que de très banal, finalement, pour ce genre de texte. Ce qui est joli, c'est la structure. le point central est le personnage d'Arthur Leander, grand acteur hollywoodien sur le retour, qui meurt d'une crise cardiaque en jouant le roi Lear...Il doit y avoir un sens symbolique à ce rôle, que je ne connais pas...En tout cas, dans sa chute, il entraine le monde...Le texte se partage ensuite entre les personnages qui l'ont connu, s'ils ont survécu et comment. On revient sur le passé, le monde ancien, et ses échos dans le monde nouveau.
Ce qui est original : l'idée qu'en 20 ans, il n'y a déjà plus grand monde pour se souvenir d'autrefois. A quel point l'humanité est toujours une bande de jeunes perdreaux de l'année qui a hérité d'un monde très ancien, qu'ils n'ont pas conçu. Et qui peut disparaitre des mémoires en une génération.
Une bonne lecture, donc, et très bien écrite.
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Je remercie Babelio et les éditions Payot-Rivages de m'avoir donné la possibilité de lire Station Eleven d'Emily St. John Mandel, et d'en faire la critique.
Ce soir-là, à l'Elgin Theater de Toronto, Arthur Leander qui interprète le Roi Lear s'effondre sur scène victime d'une crise cardiaque. Malgré tous les efforts d'un secouriste présent dans la salle, Jeevan, il ne sera pas possible de le ranimer. Jeevan prend le temps de réconforter une fillette, qui fait partie de la troupe d'acteurs et a assisté à la mort d'Arthur. En rentrant chez lui, apprend par un ami médecin qu'une mystérieuse épidémie de grippe de Géorgie a éclaté et se développe à Toronto. C'est le début de la pandémie, qui entraîne dans son sillage l'effondrement progressif de la civilisation.

Vingt ans plus tard, Kirsten Raymonde, la petite fille de l'Elgin Theater de Toronto, fait partie d'une troupe d'acteurs et de musiciens appelée la « Symphonie itinérante», qui se produit dans la région des Grands Lacs, interprétant des pièces de Shakespeare et jouant du Beethoven.
Station Eleven nous dépeint l'histoire d'une poignée de survivants, hommes et femmes qui ont tous connu Arthur Leander. Kirsten, la petite fille du théâtre, Clark Thompson, un britannique qui vit à New-York, ami de Leander qui prend un vol pour Toronto pour assister aux obsèques de l'acteur et qui va se retrouver bloqué avec d'autres passagers dans un aéroport du Michigan, à Severn City avec lesquels il va devoir réapprendre à vivre.

J'ai beaucoup aimé ce roman de science-fiction, la manière originale avec la quelle Emily St. John Mandel a construit une histoire complexe, dans laquelle elle mêle les destins de personnages au demeurant ordinaires, qui font preuve d'un courage et d'une humanité exceptionnels. Dans un environnement totalement dégradé, ils gardent espoir et veillent à préserver l'art et la culture ; Clark invente un "Musée de la Civilisation, dans lequel il garde tous les objets du passé devenus inutiles : Iphones, tablettes, cartes de crédit, chaussures à talon haut et prend plaisir à expliquer à tous ceux qui ne les ont pas connus le fonctionnement de ces objets dépassés.... Kirsten et la troupe de la Symphonie itinérante, parviennent à distraire et instruire les survivants.... Leur tâche est immense et d'une grande importance pour la survie "mentale" des hommes et des femmes "post-apocalypse". Cette approche humaniste et fraternelle s'oppose à celle de personnages sombres comme le Prophète qui s'érigent en maîtres et font régner la terreur.
J'ai beaucoup apprécié l'écriture simple, très poétique de ce roman, et les images fortes de fin du monde que l'auteur a su évoquer. L'idée de faire relier les héros de l'histoire par la connaissance d'un homme, l'acteur, et par une bande dessinée, Station Eleven, m'a paru originale - comme si cette bande dessinée d'anticipation reflétait à sa manière le destin de tous ces hommes brusquement plongés dans un futur qui les dépasse.

Un roman original porté par une écriture travaillée... des thèmes qui ne nous laissent pas indifférents. Station Eleven et ses héros n'ont pas fini de nous interpeller.


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J'annonce la couleur : Station Eleven est une de mes meilleures lectures de l'année.

Un soir, un célèbre acteur hollywoodien s'effondre et meurt sur scène lors d'une représentation du Roi Lear malgré l'intervention d'un spectateur. La presse n'aura guère le temps de se faire l'écho du décès de la star car quelques heures plus tard, le monde tel que nous le connaissons va se dissoudre. Une grippe porcine va provoquer très rapidement une pandémie mondiale dévastatrice, amenant l'humanité à un retour aux âges archaïques, privés de toute forme de confort, de technologie et de sécurité. le compteur du temps est remis à zéro, la notion d'espace est à reconquérir. Dans ce monde post apocalyptique, la Symphonie itinérante (troupe de théâtre-orchestre) sillonne le pays, essayant de maintenir en vie et en mémoire des générations futures des trésors culturels dont l'oeuvre de Shakespeare. En un perpétuel aller-retour dans le temps, Station Eleven va retracer l'étrange destin qui lie six personnes : l'acteur, l'homme qui a tenté de le sauver, la première femme de l'acteur, son plus vieil ami, une jeune actrice de la Symphonie ambulante et un dangereux prophète autoproclamé.

J'ai très vite été happée par la construction de ce roman. C'est un puzzle, un vertige avec une structure non linéaire, avec un plan de narration étourdissant mais totalement cohérent.
Une fois séduite par la forme il restait donc à voir le fond et je n'ai pas été déçue, car n'allez surtout pas croire que nous sommes dans un simple récit de survivance dans un monde hostile. On est plutôt dans de la science-fiction anthropologique. Emily St John Mandel nous amène dans de profondes réflexions sur le caractère éphémère de nos vies, de la célébrité par rapport à la persistance de l'art, sur ce qui fait que l'on reste humain quand le monde s'assombrit, sur ce que l'on doit à tout prix préserver de notre monde. Chaque lecteur pourra puiser d'autres questionnements tout aussi percutants ; la richesse de cette histoire étant presque infinie.

Si « Hôtel de verre » , le dernier roman d'Emily St John Mandel, m'avait interpellée, « Station Eleven » m'a carrément scotché. Ce livre est purement obsédant.

Traduit par Gerard de Cherge
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STATION ELEVEN, page 353, Elizabeth et Clark, coincés dans un aéroport, alors qu'une nouvelle pandémie mondiale de grippe porcine vient de décimer en un très court espace de temps, 99% de la population mondiale :
«Ça ne tient pas debout, insista Elizabeth. Sommes-nous censés croire que la civilisation a pris fin d'un seul coup ?
-Ma foi, avança Clark, elle a toujours été un peu fragile, vous ne trouvez pas ? »
«Je ne sais pas, murmura Elizabeth d'une voix lente en observant le tarmac. J'ai suivi des cours d'histoire de l'art (…) l'histoire de l'art est indissociable de l'histoire tout court : on voit que les catastrophes se sont succédé, qu'il y a eu des évènements terribles, des moments où les humains ont dû imaginer que c'était la fin du monde. Mais tous ces moments-là ont été transitoires. Ils passent toujours.»
Clark garda le silence. Il ne pensait pas que celui-ci passerait.
Elizabeth se mit à lui parler d'un livre qu'elle avait lu des années auparavant (…) c'était une histoire de vampirisme (…) on s'apercevait que ce n'était pas la civilisation tout entière qui avait disparu, mais seulement l'Amérique du Nord qui avait été placée en quarantaine pour empêcher le vampirisme de se propager.
« Je ne pense pas qu'il s'agisse d'une quarantaine, objecta Clark. Je pense qu'il ne reste vraiment rien dans le monde extérieur – du moins, rien de bon.» (…)
Mais Elizabeth demeure inébranlable dans ses convictions. Rien n'arrive sans raison, dit-elle. Ce moment passera. Tout passe.»

Outre le fait que cet extrait constitue de mon point de vue un échantillon très représentatif de la tonalité générale et de la qualité des échanges entre les personnages de ce livre, mes sentiments et mes impressions personnelles à propos de STATION ELEVEN y sont d'autre part merveilleusement condensés : «ça ne tient pas debout», «c'est fragile», «pas grand-chose de bon», «tout passe» (ça se lit assez vite).

A la limite, j'aurais pu arrêter ici ce billet, qui, autrement, je le crains (et je préfère vous le prévenir d'entrée de jeu, comme ça, au cas où, vous pouvez passer tout de suite à autre chose…), sera assez impitoyable - complètement à contre-courant aussi des avis très majoritairement enthousiastes dont font l'objet ce récit apocalyptique, finaliste du National Book Award l'année de sa parution, ainsi que la plume de cette jeune auteure canadienne, présentée par la critique en général, aussi bien Outre-Atlantique qu'en France, comme l'une des plus prometteuses de sa génération.
Au risque donc de passer pour l'insensible de service, celui en tout cas qui n'aura rien compris, il m'incomberait néanmoins d'essayer de développer un peu plus en profondeur mes réels motifs d'une telle déception, si tant est qu'il soit vrai, comme vient de conclure avec brio Elizabeth, que «rien n'arrive sans raison»…
Ainsi, entre manquements objectifs d'un récit dystopique, ou bien égarements subjectifs d'un lecteur dysphorique, je laisserai à vous le choix de décider...
Premier manquement de taille de mon point de vue: la toile de fond proposée par l'auteure. Imaginez : vous prenez des places à l'Elgin Theater de Toronto pour aller voir le Roi Lear, joué par un très célèbre acteur de cinéma hollywoodien. Non seulement il vous arrive le désagrément de devoir quitter la séance avant la fin de l'acte IV, suite à l'effondrement sur scène dudit acteur, terrassé par un infarctus, mais, surtout, surtout ! quelle mauvaise idée d'être allé au théâtre ce soir-là !, figurez-vous qu'entre le début du spectacle et votre départ intempestif de la salle, une pandémie dévastatrice provoquée par un nouveau virus de type SRAS s'était manifestée et avait déjà occasionné la mort de centaines de personnes à Toronto. Vous apprenez en somme que tout va basculer d'un moment à l'autre dans l'horreur la plus totale. Les gens commenceront à fuir à tout prix la ville. Dans les heures et les jours qui suivront, d'immenses embouteillages se formeront sur toutes les routes du Canada et des Etats-Unis– longues processions de voitures bloquées à tout jamais sur des milliers de kilomètres, si bien que, quelques temps après la catastrophe, les rares survivants immunisés contre le virus découvriront, entre autres choses, terrifiés, un grand nombre de squelettes toujours assis à leur volant (sic!) dans leurs voitures – Mais enfin, pour aller où exactement ? Les chaînes d'information débitant l'horreur en boucle, l'on sait pertinemment que tout le territoire de l'Amérique du Nord (ainsi que le reste du monde) est concerné. Puis, pour quelle raison exactement ? Pourquoi un virus aussi contagieux et mortel n'inciterait pas plutôt à vouloir se terrer chez soi ? Bref, quoiqu'il en soit, et sans qu'aucune précision vienne éclaircir celles-ci, comme d'ailleurs toute autre question préalable qu'un lecteur un peu cartésien, pratiquant à minima la méthode paranoïaque-critique prônée par Salvador Dali, aurait pu spontanément se poser, une semaine après, de toute façon, c'est cuit, c'est plié, la chute de l'Empire est consommée et la boucle est bouclée. Une nouvelle ère des ténèbres et de barbarie vient de s'ouvrir en grande fanfare : plus d'électricité, plus de transports, plus d'autorité d'Etat, plus nada de nada, on se débrouille, on erre sur les routes, dans le meilleur des cas on se retrouve dans de petites colonies de quelques dizaines d'individus squattant les locaux abandonnées et vides d'un MacDo ou d'un Walmart dévastés, on se défend comme on peut du pillage des quelques affaires qu'on avait réussi à se trimballer, on se tire dessus… Parce que les armes, les fusils (y compris ceux de Tchekov, ai-je envie de rajouter, nombreux aussi !), dans cette histoire, il en restera pas mal, des munitions également, (il en restera même encore à l'an 20 après catastrophe, pour vous dire l'incroyable immensité des réserves existantes à ce niveau aux Etats-Unis!). Toutes ces questions donc, et encore plein d'autres, m'ont terriblement tracassé - c'est idiot, direz-vous, l'essentiel n'est pas là , à perdre son temps et son intérêt de lecteur à se demander, par exemple, pourquoi diable sur le 1% de la population restante d'après l'auteure (sur quelques 300 millions d'américains, si mes calculs sont corrects, cela aurait fait environ 3 millions d'individus), personne n'aurait été fichu de faire fonctionner une centrale électrique, voire même pas quelques panneaux solaires par-ci par-là…
Vous devez vous en rendre compte à ce stade (si vous êtes toujours là…) du souci important d'adhésion auquel je me suis ainsi confronté, et qui n'a cessé de croître au fur et à mesure de ma lecture, aboutissant, malgré ma bonne volonté au départ, à une rupture définitive de tout «pacte fictionnel» possible avec l'auteure . Quand je lis de la fiction, si l'auteur me dit : « Et la lumière fut», ma nature bon public me conduira à le prendre, en attendant, pour de l'argent comptant, et à m'abandonner à la suite de l'histoire. Un autre récit du même genre, «La Route», de Cormac McCarthy, d'un tour d'ellipse à quasiment 360° faisant l'impasse sur les causes directes ayant déclenché la fin de notre civilisation, m'a embarqué sans aucun problème dans la magnifique suite développée à partir de là. Si, par contre, comme ce fut le cas ici, on se met d'entrée de jeu à vous donner profusion de détails à propos des phénomènes complexes à l'origine de la luminescence, mon potentiel ludique de feintise risque de s'étioler face à d'éventuelles incohérences internes à l'exposé, finissant par céder place à un satané «cogito» dont, dès lors, je ne pourrai plus me départir facilement…Je n'y peux rien, dans STATION ELEVEN, j'ai été extrêmement gêné dans mon plaisir de lecteur par un nombre à mon sens incalculable de boulettes concernant le cadre du récit, dont je ne vous ai cité que quelques exemples…
Dans un cas pareil, de quoi pourrait disposer un auteur comme possibilité de sauver les meubles de sa fiction aux yeux déjà désenchantés d'un lecteur comme moi? Des personnages incarnés, originaux, marquants. Une plume, un style, des propos faisant réfléchir, ou alors juste déployés en toute simplicité et sonnant «vrai», ou bien juste beaux, touchants dans et par leur poésie propre, intrinsèque...
Hélas, je n'ai rien trouvé de tout cela non plus dans ce livre. Les personnages y manquent cruellement de profondeur, se résument à quelques aspects superficiels liés aux besoins de l'intrigue : Arthur, un acteur de cinéma harcelé par ses ex-épouses et par la presse people, Clark, son meilleur ami, dont on ne saura en fin de compte pas grand-chose, Miranda une des ex-épouses, auteure d'une bande dessinée donnant son titre à l'ouvrage, «Station Eleven», sur laquelle elle travaille obsessionnellement depuis de très longues années et qu'elle hésite au fond à publier ( pourquoi tout ça, au fait ?), très épanouie néanmoins dans son job de cadre dans une multinationale, enfin, last but not least, tous les acteurs et musiciens, Kirsten, Dieter, August et une ribambelle d'autres personnages parmi les membres de la Symphonie, une troupe d'acteurs et de musiciens sillonnant les routes parmi les décombres de la civilisation, afin de jouer (oh !) du Shakespeare et du Beethoven sans aucune autre contrepartie, juste pour l'amour de l'Art, au risque de leur vie. Pourquoi du Shakespeare ? On nous en dit pas grande chose non plus, d'après la cheffe de la troupe, ce serait parce que le public aurait en fin de compte préféré ainsi (bien-sûr, voyons, n'importe qui sait parfaitement qu'aucun épisode de America's Got Talent ne serait en mesure, de nos jours, de battre à l'audiomètre américain une retransmission exceptionnelle du Songe d'une Nuit d'Eté en direct du Royal Shakespeare Theater!!)
Que reste-il au bout du compte? Rien que quelques ficelles tirées, il faut bien le reconnaître, de façon assez astucieuse dans la construction d'une intrigue entre l'avant et l'après apocalypse. Pas suffisantes, en tout cas et en ce qui me concerne, pour faire un bon livre, censé en plus, selon son aguicheuse quatrième de couverture, constituer «une élégie sur la condition humaine». STATION ELEVEN m'a plutôt fait penser à un puzzle juvénile où la découpe des pièces et leur agencement aurait largement primé sur l'image qu'il en résulterait, une fois les pièces assemblées : comme bâclée, tirée à gros traits, immature et sans intérêt, vite oubliée.
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Alors qu'Arthur Leander est victime d'une crise cardiaque en pleine représentation du Roi Lear de Shakespeare à Toronto, une épidémie de grippe de Géorgie est en train de détruire l'humanité. Kirsten, une des petites actrices présente ce soir-là, sera une des rares survivantes. Très peu vont survivre. La civilisation va s'éteindre progressivement avec la disparition de l'électricité et de toutes les sources d'énergie. Les survivants vont s'organiser, vivre de chasse et de pêche et oublier peu à peu l'ancien monde… Et face à ce désastre une troupe d'artistes, la Symphonie va déambuler dans la région du lac Michigan pour jouer des pièces de Shakespeare et de la musique de Beethoven…car survivre ne suffit pas, telle est la devise qu'ils opposeront à ce monde fantomatique. Kirsten en fait partie.

L'action se déroule en l'an 20, alors que la vie sur terre semble s'être stabilisée, est devenue moins dangereuse. de nombreux périls ont forcé les rescapés à s'unir : bandes armées, pilleurs, fanatiques religieux, conditions climatiques difficiles, épidémies. le groupe est devenu une condition de survie.

Le point central où s'organisent à la fois la survie de l'humanité, un lien avec le passé – sous forme d'un musée où seront conservés nos objets quotidiens tels grille-pain, ordinateurs, smartphones… - et l'espoir d'un renouveau, est l'aéroport de Severn City. A l'image de la station spatiale du docteur Eleven, personnage de bande dessinée crée par la première femme d'Arthur Leander, Miranda…Une nouvelle vie s'organise, des enfants naissent, une renaissance semble possible…L'esprit s'évade enfin loin des avions immobilisés, des autoroutes jonchées d'épaves de voitures, des immeubles et des maisons en ruines…

C'est un roman agréable à lire, sans complaisance pour l'horreur, ni trop pessimiste malgré la disparition de presque toute l'humanité et de notre civilisation. Il se lit comme un conte nous amenant à réfléchir sur la fragilité et le caractère éphémère de notre monde moderne, simple goutte d'eau dans l'océan du temps. Et notre dépendance à un mode de vie qui n'est pas éternel. Mais si tout peut s'arrêter, l'expression artistique demeure et poursuit sa route, composante essentielle de l'existence humaine. le récit s'articule autour des deux époques, avant et après, retraçant d'une part l'histoire d'Arthur et de ses proches, d'autre part l'évolution du monde après la catastrophe. C'est cette proximité qui le rend crédible et d'autant plus inquiétant…Une réussite ! Merci à Babelio et aux éditions Rivages pour cette lecture et la rencontre prochaine avec l'auteure.
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Un roman post apo intéressant puisque cette fois la narration se passe bien après l'évènement apocalyptique. On découvre nos personnages quelques jours avant l'arrivée de la grippe mortelle ( écrit avant la Covid !) puis quelques jours après, puis quelques années jusqu'à la date du récit actuel, qui se déroule donc vingt ans après. Alors ça ne m'a pas laissé le temps de m'attacher vraiment à eux mais on voit comment ils ont pu survivre et continuer à vivre dans un monde où quatre-vingt-dix-neuf pour cent des Hommes ont disparus. C'est prenant, les liens entre les personnages vont apparaitre au fur et à mesure et tous vont se retrouver sur un même lieu. Quelques disparitions inquiétantes, un prophète un peu flippant font tenir le récit en haleine. Côté survie, je pensais voir plus de difficultés mais il reste tellement peu de monde que cela se tient.
Un roman post-apo bien sympa donc !
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Une superbe lecture.
Un roman post apo, loin des clichés sombres du genre. Un récit qui se démarque également par son ton résolument optimiste.

Écrit en 2013, Station Eleven nous raconte le destin de plusieurs personnages à la suite d'une pandémie mortelle à 99 %, résultat d'une mutation de la peste porcine. L'humanité a été réduite à néant ou presque.
Le récit commence avec les premiers symptômes qui apparaissent chez les humains puis fait un bond temporel d'une vingtaine d'années.
Nous suivons une troupe de comédiens et musiciens sur les routes. A travers eux, nous observons les rares survivants occupés à reconstruire.
Le rythme du roman est bien maintenu entre suspense, extraits de journaux, des flashbacks sur les moments sombres de la pandémie, la situation des survivants et un fil rouge bien trouvé pour lier le tout.
Les personnages sont émouvants et très humains.
C'est un récit optimiste sur nos capacités.
Enfin un post-apo qui sort du lot et ça fait du bien !
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