Surnommé "Tanizaki le grand", c'est dire son statut au Japon, Jun'chirô fût d'abord censuré en 1913 car jugé immoral, traducteur d'
Oscar Wilde (
L'éventail de Lady Windermere) et du roman "
Le dit du Genji" de
Murasaki Shikibu, puis, après une quantité d oeuvres audacieuses, retenu parmi les six derniers candidats pour le prix nobel de littérature en 1964.
À ce jour, en son honneur, le prix Tanizaki
reste la principale récompense littéraire au japon.
Pourquoi commencer par une brève biographie ?
Pour remettre Tanizaki au milieu de la place littéraire, dans l'oeil du lecteur, afin que celui-ci adopte le démon qui habite chacun d'entre nous.
Et pour l'heure, son oeil scrutateur dénué de moralisation afin d'explorer la nature profonde de l'homme nous entraine dans les abîmes du machiavélisme et du voyeurisme, nous invitant à le devenir à notre tour afin d'apercevoir une mise à mort servie par l'élégance et l'éclat des mots de Tanizaki, éloignant, alors , toute forme de sordide.
L'âge d'or du roman japonais dit moderne à l'époque est bien sous nos yeux, indocile et intense, l'auteur se joue tantôt de la beauté et de l'amour , tantôt de cette fascinante perversion qui habite l'humanité dans un jeu de miroir captivant.
Quant à l'érotisme poétique japonais , singulier, immuable, de Kawabata à Tanizaki, il se glisse comme un spectre ensorceleur au gré des pages, se faufile, fuselé et aérien dans chaque interstice du texte, chaque contour, vallon du corps féminin, exultant cette sensualité suave, enchanteresse, explosive d'harmonies.
La délicatesse enveloppe la noirceur du contexte d'un voile de lumière esthétique , d'ailleurs ne dit-on pas que "le diable est beau comme un dieu ? "
Sonomura et Takahashi, nos deux amis sont le reflet immémorial de l'étrangeté de l'humain, l'illusoire masque de vertus qui nous falsifie tombé, reste l'irrévocable visage de l'ambiguïté et des paradoxes.
Dans l'oeil du démon, La folie, antichambre enfermant les passions les plus excentriques, assaisonne l'étrange, apprête le plaisir et relève l'illusion au rang d'ivresse, de liberté infinie.
Un roman envoûtant diaboliquement profond.