La situation devient délicate si le corps est un corps de femme, parce que notre culture aggrave, accentue chez elle cette césure entre corps et âme. Le corporel masculin est normé, propre et comme objectif, sans complications. Le sujet masculin est censé pouvoir s’approprier sans grande difficulté, appréhender même son propre corps. On associe davantage la féminité à la matérialité du corps et au sexe ; la femme qui cherche son âme et revendique son droit à une subjectivité singulière devra livrer combat avec son corps. Pour son corps. Pour le droit d’être à la fois moi, et mon corps. D’être celle qui raconte.
Serait elle un ange ?
La question la taraude. Elle y revient régulièrement : une créature invisible, en apesanteur, sans problèmes ni avec l'espace, ni avec le langage, c'est peut-être une solution. Ce jeune prodige encore adolescent, libre, pure incarnation du génie de l'ange un peu démoniaque, met en oeuvre d'éphémères actions photographiques, à la limite du visible, parfois.
Ouverte à tous les vents de la destruction, elle chantepour la petite fille perdue : son amulette pour conjurer le sort. Et il passede la brume verte sur ses lèvres et dans ses yeux du gris très froid,sa voix abolit la distance qui s’ouvre entre son être et sa main qui cherche son verre. Pizarnik.
Nous vivons ici-bas une main serrée sur la gorge. Que rien ne soit possible était chose connue de ceux qui inventaient des pluies et tissaient des mots avec la torture de l’absence. C’est pourquoi il y avait dans leurs prières un son de mains éprises du brouillard. Alejandra Pizarnik.
« Les anges ne sont qu’un exemple de la méthode adoptée par l’artiste, qui consiste à se mettre en scène, corps et visage. »
Anna Tellgren