Je connais
Sharko et Hennebelle pour avoir lu leurs enquêtes en commun depuis
le Syndrome E, mais je me suis rendu compte que je n'avais pas lu les tous premiers livres de la série sur
Sharko. Après avoir découvert les débuts de
Sharko dans
1991, je recommence donc depuis le début avec
Train d'enfer pour ange rouge. Un titre bien énigmatique qui prendra son sens au cours de la lecture.
Ce roman nous ramène en 2002, il y a presque 20 ans. Si dans
1991 les rappels à l'époque pouvaient sembler un peu forcés, avec l'insistance sur le minitel, sur l'absence de portables, etc., ici tout est plus naturel puisque le livre a été écrit dans ces années-là. Et autant dire qu'en 2002, malgré la percée d'internet et des téléphones portables, on est encore bien loin d'aujourd'hui, de l'omniprésence actuelle des smartphones et des réseaux sociaux. Et pourtant, c'est bien sur ce terrain-là que nous emmène l'auteur, en nous faisant naviguer dans les eaux troubles d'internet et en nous montrant tout ce qu'on pouvait déjà y trouver de mal, à peine une dizaine d'années après son développement. Pour en revenir sur le matériel, certains passages m'ont bien fait rire : les graveurs CD et les écrans « à » plasma étaient la pointe de la technologie !
C'est donc dans
Train d'enfer pour ange rouge que le lecteur découvre pour la première fois le personnage de Franck
Sharko, bien connu des fans de thrillers pour être le héros notamment du Syndrome E,
Gataca,
Angor,
Atomka,
Pandemia,
Luca, etc. Suzanne, sa femme, a disparu depuis six mois quand
Sharko est embarqué dans une enquête suite à la découverte du corps d'une femme, décapité. Dans ses recherches, le commissaire va baigner dans des milieux fort peu recommandables. D'habitude, dans ses romans,
Franck Thilliez développe des aspects scientifiques en lien avec l'enquête. Très documentés, je trouve ces passages toujours intéressants, et j'aime bien la façon dont il construit l'enquête autour de la science. Pour ce premier roman, ce n'était pas le cas, même si on sent déjà l'intérêt de l'auteur : internet et les « nouvelles » technologies prennent une part importante dans l'histoire. le lecteur se retrouve plutôt face à une enquête assez classique, qui se démarque par la perversité des crimes commis. J'avoue m'être senti assez mal à l'aise par moments.
Le roman est écrit à la première personne, on est plongé dans la tête de Franck
Sharko. Un
Sharko donc omniprésent tout au long du livre, ne laissant de place à aucun personnage secondaire. Seule peut-être Elisabeth Williams réussit à tirer son épingle du jeu, mettant en avant la profession peu connue à l'époque de profiler, devenue peu originale aujourd'hui puisque largement représentée dans les séries depuis. Certes, certains enquêteurs apparaissent tout au long de l'histoire, mais je n'ai pas réussi à m'y attacher, et ils s'effacent face au commissaire.
Thilliez a pourtant essayé de développer l'histoire personnelle d'un des enquêteurs, avec une femme et la naissance d'un enfant, mais cela n'apporte rien, on ne s'y intéresse pas.
L'enquête est menée tambour battant par un
Sharko totalement désespéré et qui ne s'embête pas avec les autorisations ou les mandats (je ne suis pas flic, mais à mon avis ce n'est pas comme ça qu'on procède). Niveau zéro de la subtilité. A chaque fois, c'est le même cirque,
Sharko a une idée soudaine, il prend sa voiture, son flingue et ses gros muscles, et va « taper du méchant ». Les interrogatoires sont toujours menés de la même façon : la personne n'a pas le temps de répondre aux questions,
Sharko insiste, et finalement l'interrogé raconte tout. le pompon, c'est le fameux « Explique-toi ! », j'aurais dû compter le nombre de fois que cette réplique apparait au cours du livre.
Autre chose insupportable, au niveau du style d'écriture cette fois-ci, les points de suspension et les points d'exclamation. Alors, les premiers se retrouvent quasiment à chaque fin de paragraphe, probablement pour laisser le lecteur comprendre les implications de la phase qu'ils terminent. A chaque fois, je m'amusais dans ma tête à les remplacer par un point, et ça marchait très bien également. Ensuite, les points d'exclamation... eh bien, peut-être ne fais-je pas bien attention dans mes lectures, mais ici on les retrouve à la fin de la plupart des répliques de
Sharko. Pourquoi ? Pour dynamiser les propos ? Il faut dire que les dialogues sont souvent fort peu développés, très plats voire parfois simplement inutiles.
La solution à l'enquête est amenée comme un cheveu sur la soupe. Il s'est dit, allez, j'en ai marre d'ajouter des crimes supplémentaires, je vais faire ma révélation inattendue. Alors, pour être totalement honnête, je ne l'avais pas vu venir. Mais avec un peu de réflexion et d'attention, oui, on s'en rend compte bien avant. L'épilogue est assez mystérieux, et suscite l'envie de lire la suite,
Deuils de miel.
Alors, pourquoi mettre trois étoiles avec toutes les critiques que je viens d'émettre ? Pour plusieurs raisons. La première, c'est qu'il faut remettre le livre dans son contexte de 2002. Si je l'avais lu à l'époque (enfin, j'avais 11 ans donc vu le contenu du bouquin, il aurait mieux valu que je ne le lise pas pour préserver ma santé mentale), j'aurais certainement trouvé ça très bien. le problème à le lire aujourd'hui réside dans l'existence de dizaines de thrillers tout aussi glauques mais bien meilleurs, ne seraient-ce que les autres tomes de la série sur
Sharko dont je suis fan. La seconde raison, je viens de l'énoncer : j'adore les Syndrome E,
Gataca,
Pandemia, etc., donc j'ai eu plaisir à découvrir le roman qui a donné naissance à toute cette série. Enfin, il faut souligner que ce premier roman propose une histoire assez bien ficelée qui laisse ne présager que du bon pour la suite !