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sur 223 notes
Vailhauquès, Hérault ; un jour de 1884, sous le regard de la population villageoise, une longue théorie d'enfants malingres, en haillons, couverts de crasse et de traces de coups s'égrènent dans la nature au sortir d'une “colonie d'éducation surveillée”, en d'autres mots un bagne pour enfants. Tous ceux qui y étaient internés ne sont pas là, nombreux sont morts avant d'y avoir passé plus de deux ou trois ans, souvent avant d'avoir atteint l'âge de quinze ans.
1901, au village. Des faits inexplicables se produisent : une jument agonise le corps couvert d'abcès ; des meules de foin s'embrasent la nuit ; un troupeau de chèvres est décimé par une maladie étrange… Inévitablement les esprits s'échauffent, la peur sourd inexorablement, le doute s'insinue, tel un venin qui vient détériorer encore davantage les rapports chaotiques de ces paysans taiseux, rudes à l'ouvrage comme dans leurs relations. Il y a la jeune Blanche soumise aux ordres et abus de son oncle Ernest ; Jeanne et son Léon exploitant sans vergogne Étienne, orphelin bon à tout faire ; Angèle “La Cruère” qui, sous couvert d'accueil de nourrissons non désirés, s'enrichit et guigne sur les terres d'Alphonse l'alcoolique, à qui elle prodigue ses faveurs de son corps sans plaisir. le docteur Morluc s'occupe aussi bien des hommes que des bêtes et s'abrutit dans l'alcool pour oublier sa condition. L'instituteur pourvoyeur d'enfants et le curé qui ne voit la rédemption et le salut des âmes que dans la souffrance. Tous ces gens à peine sortis de siècles de labeur et qui vont rentrer (ou pas) dans celui de la modernité. Inévitablement, malgré l'autorité « morale » du curé, chacun voit l'oeuvre du malin, du diable et du démon, la trinité maudite qui pourrit leur vie misérable et, sans se concerter, tous imaginent la vengeance des enfants qui ont disparu des années auparavant, morts dans ou dehors le bagne omniprésent. Et puis il y a Géraud, cet homme insaisissable qui vit libre dans la montagne, parle au ciel et défie le village et ses bassesses.

L'histoire est inhumaine, les destins inexorablement implacables. L'écriture aussi est dure, violente dans son verbe comme ces corps emmêlés dans des coïts brutaux et brefs. Quelquefois le texte est flamboyant comme cette nature sauvage, parfois il est sordide et acide comme le mauvais vin dont s'abreuvent les personnages.
Les chapitres sont courts, c'est normal, les gens parlent peu. Et comme une épitaphe, chacun de ces chapitres s'ouvre sur quelques lignes, résumant en peu de mots la courte vie d'un enfant bagnard.
Les chapitres sont courts, et comme ils sont nombreux, on peine à suivre l'ensemble, on saute d'une histoire à l'autre sans lien apparent, même si l'on sait que ces histoires s'entre-mêlent d'une manière ou d'une autre avec comme point commun la terreur qui se glisse dans chaque personnage. Et malgré mon envie d'avancer dans l'histoire, je ne pouvais pas lire plus d'un ou deux de ces chapitres chaque soir, tant l'amertume me gagnait, quand ce n'était pas la nausée.
Quand enfin j'ai terminé la lecture de ce roman, dont j'attendais qu'il me donne les clefs pour tout relier et comprendre, j'ai été encore plus déçu de cette fin si banale qu'on avait imaginé quasiment dès le début. Tout ça pour ça ! Au-delà de la noirceur du récit, que dis-je l'horreur, on aurait été en droit de lire un scénario plus élaboré, une intrigue plus tordue, une vérité explosant comme une délivrance. Mais de cela, point.

Je ne connaissais pas Jean-Christophe Tixier jusqu'ici, et en allant naviguer sur son site et d'autres, j'ai découvert un auteur assez renommé qui exerce davantage dans le roman jeunesse. J'espère qu'il ne décevra pas ses lecteurs avec ce nouveau livre dont je ne pense pas qu'il leur soit destiné.

Sollicité par Babelio, dans une opération Masse Critique découverte d'un roman, j'aurais aimé être plus emballé, plus accroché, mais c'est fort dépité que je remercie cependant Albin Michel et Babelio de leur confiance pour cette critique
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Lecture qui ne laisse pas indifférent..forçément, le thème abordé, les bagnes pour enfants, donne froid dans le dos...
L'écriture est fluide ( j'ai parfois pensé à l'écriture "terroir" de F. Bouysse ou des premiers livres de S. Collette), commence lentement pour gagner en intensité. Les personnages sont fouillés, on suit leur évolution et on assiste impuissant à tous ces drames qui font écho à des évènements passés où tous finalement sont impliqués...
C'est noir, c'est puissant, bien écrit; j'ai beaucoup aimé, même si encore une fois le thème est révoltant ( comme dans "The magdalene sisters").
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Jean-Christophe Tixier qui bien souvent écrit des romans jeunesse (dont deux que j'avais bien aimés, Demain il sera trop tard et Quand vient la vague), nous propose cette fois un roman adulte, sombre, rendant hommage aux enfants des bagnes de la fin du XIXème, début du XXème siècle.

J'hésite toujours sur le thème dans lequel positionner ce roman, thriller ? suspense ? roman noir ? roman historique ? roman du terroir ? je pense qu'il ne se met finalement pas dans une case mais qu'il est tout cela à la fois.

Une chose est certaine, c'est que l'histoire ne peut laisser indifférent de par son sujet de départ, les enfants des bagnes, on y apprend les horreurs qui leurs étaient faites, brimades, violences, jeûne, viols, meurtres, tel de la marchandise sans aucune valeur.
Ici hommage leur est rendu dans l'histoire mais aussi au début de chaque chapitre où l'auteur nous soumet la fiche identitaire d'un des enfants mort dans un bagne, j'ai trouvé cela dur mais tellement nécessaire.

Le déroulement du livre en lui-même commence de manière calme, voir contemplatif, pour vite s'accélérer et nous emporter dans un maelström comme seuls les villages isolés plein de non-dits et de secrets savent le faire. L'écriture est fluide et la construction se fait avec de courts chapitres qui donnent une impulsion permanente dans la lecture, on ne lâche pas le livre et on ne s'arrête pas avant la fin.

Parmi les personnages (car ici il n'y a pas de personnage principal mais un village), certains m'ont plus, surtout le personnage de « Blanche » pour qui on ne peut avoir que de la compassion, mais les autres m'ont tellement mis en colère que je ne les ai pas appréciés, c'est voulu par l'auteur car le récit reflète la réalité du passé, les horreurs et les secrets, mais il n'empêche que sans pouvoir s'accrocher à autre chose qu'un seul personnage quand il y en a tant, c'est difficile. Ne vous inquiétez pas trop tout de même car ils sont nécessaires et le récit vaut le coup d'être lu de bout en bout.

En conclusion, « Les mal-aimés » est un roman de superstitions, de non-dits et de secrets, à lire pour sa noirceur, mais aussi pour comprendre encore un peu plus à quoi ressemble la stupidité humaine, à lire également pour le devoir de mémoire envers ces enfants, ces mal-aimés.

Sur le blog :
Lien : https://unbouquinsinonrien.b..
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Le roman se situe en 1901. Il y a déjà dix-sept ans que le bagne pour enfants est fermé. Ils étaient nombreux, venus de loin parfois, d'Aquitaine jusqu'à la Provence. On les a vus partir lors de la fermeture de l'établissement, hâves, sales, à peine couverts de haillons, mal nourris, mal soignés, désespérés. Les paysans du village les ont regardés partir, en silence. Avec eux partaient des emplois chichement rémunérés mais si utiles en cette région où la terre peine à produire !
Il y a ceux qui les encadrent, celui qui les soigne, le docteur Emile Merluc, celle qui lave leurs draps souillés, la lingère un peu sorcière surnommée la Cruere ; celui qui les récupère quand un autre les a laissés s'échapper, pour les revendre comme bras aux paysans. Et on s'affole de savoir qu'il s'agit de l'instituteur ! Et au-dessus de tout cela, celui qui traite avec Dieu et les évêques, dans l'espoir un jour de porter la pourpre lui aussi :le curé du village.

Tout ce petit monde vit près du bagne, sinistre forteresse qui attire le regard et suscite la colère et le mépris. La peur aussi. Personne n'imagine autre traitement pour remettre les gamins perdus dans le droit chemin. Des coups, des abus sexuels, une nourriture quasi abstraite, un travail à échiner un boeuf.

C'était il y a moins de 150 ans, nos grands-parents et arrière-grands parents auraient pu côtoyer ce monde-là.

L'auteur nous happe, d'une plume pittoresque et précise, qui ne laisse dans l'ombre ni les paysages somptueux et redoutables, ni la psychologie fruste et roublarde des paysans et de leurs « notables », ni l'influence de la croyance religieuse, encore profonde malgré le contexte historique de la IIIème République où on commence à vouloir « bouffer du curé ».

Un roman sur fond de faits authentiques, qui ont perduré des décennies (les enfants placés, les orphelins de l'Assistance publique, exploités, maltraités dans les campagnes profondes, on en parlait encore dans les années 50). J'ai aimé la force des scènes évoquées (un homme qui brûle parmi ses chèvres dans sa grange ; un autre, pris d'une terreur mystique, qui se suspend, nu comme un ver, à la statue d'une sainte de l'église ; un pendu dans sa grange, une paysanne qui, telle une image de la Vierge, rassure doucement son mari terrifié ; une jeune fille qui caresse son ventre arrondi du fruit de l'inceste.
Peu de douceur dans ce livre où il semble que l'auteur ait voulu voir incarner les sept péchés capitaux. Peu de rédemption promise à ces damnés de la Terre. On ne peut ni juger ni condamner. Seulement compatir et espérer que ce monde-là est révolu.

La terrible vengeance des enfants mal-aimés du bagne est en marche.
Une lecture dont on ne sort pas indemne.

Un grand merci à Babelio pour son opération Masse critique privilégiée et aux éditions Albin Michel.
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Voici un roman très sombre sur un sujet qui a fait honte dans l'histoire des XIX et XX siècles, à savoir, les bagnes pour enfants nommés injustement « Maison d'éducation surveillée ».
Nous sommes en 1901 dans l'arrière pays héraultais, une terre pauvre sur laquelle trime une communauté misérable .Le « bagne pour enfants » qui domine cette terre reculée et oubliée de tous, a permis aux habitants d'améliorer leur ordinaire en leur offrant un travail mais aussi en les laissant se livrer à des commerces moins avouables. Dix sept ans après la fermeture du bagne, des évènements, somme toute normaux, comme des animaux qui tombent malades ou des hommes qui se blessent et meurent, viennent réveiller des peurs enfouies, des superstitions selon lesquelles les enfants morts au bagne sous les mauvais traitements de leurs tortionnaires reviendraient se venger.
Ce roman particulièrement noir, est âpre et troublant. Il décrit la vie misérable de cette communauté qui a beaucoup à se reprocher, entre ceux qui ont participé aux mauvais traitements envers les enfants du bagne et ceux qui se sont tus par lâcheté ou profit.
Au fil des chapitres alternant les points de vue, l'auteur nous permet d'assembler les pièces du puzzle pendant que monte une tension qui mènera à l'inéluctable explosion finale.
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Il m'aura fallu pas moins de dix jours pour pouvoir digérer ce roman, et m'atteler à la rédaction d'un avis, qui sera qu'un pâle reflet de ce que j'ai pu ressentir lors de ma lecture.

Nous sommes à la veille de la loi de 1901, dans un village isolé des Cévennes. La vie est rude, les habitants semblent assez rustiques ; mais tout semble sans histoire ; en tout cas en apparence. Parce que si l'on gratte un peu…
L'ordre des choses soudain perd le nord. Entre les brebis atteintes d'un mal étrange, des morts subites, des meules de foin qui s'embrasent, un bébé mort-né, la jument d'Ernest qui se putréfie…‶Les enfants se vengent″ souffle l'un des villageois…

Dix-sept ans auparavant, ils ont vu les enfants quitter le bagne des environs ; des cadavres ambulants, chétifs, rachitiques, anéantis. Des enfants, considérés alors comme des délinquants, et condamnés à la correction, enfermés et laissés à l'abandon et dont chaque habitant porte une part de responsabilité.
Des enfants que l'on croyait oubliés à jamais et qui dix-sept plus tard n'ont pas tout à fait quitté les lieux…

Dans ce village où chacun aurait quelque chose à dire, personne ne parle ; pas plus du passé que du présent, et de ce qui se passe dans la ferme entre le vieil Ernest et sa nièce Blanche. Blanche qui rêve d'une autre vie, mais qui renonce. ″ Elle ressemble à ces plaques de givre, l'hiver, qui reculent à mesure que le soleil avance. ‶

L'Eglise complice et cynique se tait, elle règne en maître, mais plus pour très longtemps, la séparation de l'Eglise et de l'Etat est en marche.

Ce roman prend aux tripes, dès les premières pages, dès le premier chapitre, qui comme les suivants commencera par un extrait de registre d'écrou donnant au livre le ton glaçant qui ne le quittera pas.

Dans ce roman à l'écriture addictive, et à la construction impeccable, Jean-Christophe Texier y aborde l'enfance maltraitée, le silence coupable des civils et des religieux et de l'état. La lecture en est épouvante et poignante.
Je ne l'oublierai pas de sitôt !

Merci aux éditions Albin Michel pour l'envoi de ce livre dans le cadre d'une masse critique Babélio.

Lien : https://leblogdemimipinson.b..
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Hou ! C'est glauque... c'est extrêmement sombre et d'autant plus terrifiant que basé sur des faits historiques ne remontant qu'à une centaine d'années...
Un village au début du vingtième siècle, dont la terre aride rend les conditions de vie inhumaines, se laisse emporter par la folie d'une rumeur qui fait rejaillir un secret honteux bien mal enfoui. Les villageois ont assisté et participé au fonctionnement d'un bagne pour enfants en contrebas.
Le lecteur découvre avec effroi les conditions de vie de ces enfants affamés, battus, violés et esclaves sans espoir d'avenir.
Mais ce que le récit montre de la vie quotidienne de ce monde rural, même après la fermeture de l'institution, c'est que la misère pousse les hommes et les femmes à des atrocités au sein même de leur entourage.
Une lecture éprouvante.
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Roman découvert par hasard dans les rayons de ma médiathèque, Les Mal-Aimés de Jean-Christophe Tixier est un livre bouleversant autour d'un sujet difficile: celui des bagnes pour enfants des dix-neuf et début vingtième siècles. Oui, vous avez bien lu: à une époque pas si ancienne (qu'est-ce que cent, cent cinquante ans ?), pour un vol de gâteau ou pour « vagabondage », la justice des hommes pouvait condamner un enfant au bagne jusqu'à sa majorité… Incarcérés dans des lieux insalubres, les jeunes étaient écroués dans des conditions désastreuses, sous le joug de gardiens violents et abusifs…

Dans ce roman, le bagne de Vailhauquès situé dans l'Hérault, ferme ses portes en 1884. le premier chapitre s'ouvre sur le défilé de jeunes garçons qui sortent de l'établissement, libres mais intérieurement dans un état que l'on devine déplorable au vue des sévices subis. Une vingtaine d'années plus tard, la vie suit son cours au village, quelques habitants parmi les plus rustres avaient « travaillé » dans ce bagne, soit comme gardien, soit comme lingère ou cuisinière… Tous vivent dans le silence des évènements passés : l'omerta dirige les relations entre les villageois, tous savent et se taisent. Jusqu'à ce que des faits étranges que l'on attribue trop vite au surnaturel entachent la communauté : morts soudaines, maladies, bruits suspects… Est-ce le Diable ou les enfants qui reviennent se venger « comme les loups quand la faim les ronge« ?

Le bagne accable le village de sa présence, bride de son souvenir honteux les habitants de la vallée. A l'image de la photographie de couverture, le bagne n'est plus qu'un bâtiment désaffecté dans lequel il s'est passé de mauvaises choses. C'est autour de lui que gravite l'histoire inventée par J.C Tixier, sans jamais y entrer. C'est là que le lecteur est surpris par la tournure que prend le récit, puisque l'on reste dans le village, à une époque différente de celle du bagne en activité. Mais le roman entier est porté par une écriture poétique qui n'est pas sans rappeler celle de Jean Giono: on se laisse entrainer par la puissance des mots, des images sombres de ce roman noir rural, portrait profond du siècle passé dans nos campagnes, portrait au vitriol des représentants de la religion, des membres de l'éducation nationale, de la justice, qui à une époque faisaient bien peu de cas des enfants…

Une belle découverte pour moi que cette plume poétique sur un fond historique intéressant.
Lien : https://loeilnoir.wordpress...
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Un roman sur la noirceur humaine.
La vie est dure pour les paysans des Cévennes au début du XXème siècle. Une vie de labeur sans amour, sans pitié et ses habitants ne dépendant finalement que des aléas météorologiques. Un bagne recevant de jeunes délinquants, non loin de là, a été fermé quelques années auparavant. L'horreur régnait là-aussi : on était convaincu qu'un régime des plus stricts permettrait à ces jeunes de revenir sur la bonne pente. Malfamés, non soignés et travaillant dur, beaucoup d'entre eux ne sont pas sortis vivants. Quelques paysans ont vu une opportunité : libérer ces jeunes pour les exploiter à leur tour, une main d'oeuvre gratuite. C'est l'un des secrets qui unit ces paysans. Quelques années plus tard, c'est là que commence notre roman, ces paysans n'ont toujours ni bonne conscience, ni bonne morale. Ernest viole sa nièce depuis son plus jeune âge. Léon n'hésite pas à battre son ouvrier. Jeanne n'hésite pas à gagner quelques sous de l'Etat en "se chargeant" d'enfants abandonnés (tout autant abandonnés par elle). D'autres s'enfoncent dans l'alcool. Quand rien ne va plus, quand les malheurs s'accumulent dans les différentes familles (maladie du bétail, accidents mortels ou incendies), alors les paysans n'ont plus de doute, c'est l'oeuvre du diable. Les enfants morts au temps du bagne se sont réveillés et crient vengeance.
Un texte magnifique. Contrairement à d'habitude, aucune larme mais plutôt de l'écoeurement. Merci à Babelio et les éditions Albin Michel pour cette belle découverte.
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“𝐶'𝑒𝑠𝑡 𝑒𝑙𝑙𝑒 [𝑙𝑎 𝑓𝑎𝑙𝑎𝑖𝑠𝑒] 𝑞𝑢𝑖 𝑟𝑒𝑛𝑑 𝑛𝑜𝑠 ℎ𝑜𝑚𝑚𝑒𝑠 𝑠𝑖𝑙𝑒𝑛𝑐𝑖𝑒𝑢𝑥 𝑒𝑛 𝑙𝑒𝑠 𝑒𝑚𝑝𝑒̂𝑐ℎ𝑎𝑛𝑡 𝑑𝑒 𝑣𝑜𝑖𝑟 𝑎𝑢 𝑙𝑜𝑖𝑛. 𝐼𝑙𝑠 𝑛'𝑎𝑖𝑚𝑒𝑛𝑡 𝑝𝑎𝑠 𝑒𝑛𝑡𝑒𝑛𝑑𝑟𝑒 𝑙'𝑒́𝑐ℎ𝑜 𝑑𝑒 𝑙𝑒𝑢𝑟𝑠 𝑑𝑜𝑢𝑡𝑒𝑠.“

Sachez que si vous n'avez pas le moral, ce n'est absolument pas la lecture qu'il vous faut. Avec ce roman rural noir – vraiment très noir –, l'auteur se base sur un fait réel pour construire sa fiction.

La maison d'éducation surveillée de Vailhauquès faisait partie des « maisons de correction » où étaient envoyés les enfants jugés coupables de petits délits, ou même simplement indisciplinés… Soyons francs : ils y étaient torturés, voire assassinés.

D'ailleurs, Antoine, né à Bayonne le 11 mai 1865, a été jugé pour vol le 16 août 1872. Condamné à la correction jusqu'à ses 18 ans, il mesurait 1m20 à l'entrée. N° d'écrou : 937. Causes de la sortie : Décédé le 17 janvier 1874…

Avec ce roman, J.-C. Tixier raconte les non-dits, la honte d'une communauté pourrie par l'horreur des bagnes pour enfants. Une sublime écriture, poétique et juste, sert le récit.

Blanche, Étienne, Émile Morluc, Angèle Cruere, Alphonse, Géraud, Jeanne, Léon, Ernest… Tous, d'une manière ou d'une autre, sont touchés par cet environnement malsain dans lequel ils vivent et évoluent. le silence les noie. Ils étouffent, et déraillent.

Ces hommes sont hantés par leurs remords, la culpabilité. Ce qu'ils voient, là-haut, cette bâtisse, leur rappelle tout ce qu'ils voudraient oublier. Et la peur de voir ressurgir ces souvenirs… et bien, c'est cette peur qu'ils qualifient de diable. le diable se cache dans les croyances et superstitions qu'ils nourrissent et qui les nourrissent, au contraire de leurs terres si sèches.

Vous serez hypnotisés par cette histoire. N'y cherchez pas d'intrigue – elle est seulement très légère –, tout réside dans l'ambiance, l'atmosphère. Tout réside dans les âmes de ces hommes. Certains innocents. Pour d'autres, ce n'est pas beau à voir… C'est, par contre, tellement beau à lire !
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