Un soir qu'il dînait chez le duc de Sully, Voltaire fut invité à sortir, - quelqu'un désirant lui parler.
Le poète d'OEdipe se rendit à l'invitation; mais aussitôt les valets du chevalier de Rohan l'insultèrent et le frappèrent au nom de leur maître.
Il y avait là, certainement, quelque basse vengeance ou une piètre jalousie.
Toujours est-il que non-seulement Voltaire ne put obtenir aucune satisfaction de cette grossière insulte, mais qu'encore il fut emprisonné à la Bastille.
A sa sortie de la prison féodale, le poète libéral reçut un nouvel ordre d'exil.
Les gouvernements despotiques ont toujours agi sourdement vis-à-vis des apôtres de l'intelligence; l'outrage fait à Voltaire, son emprisonnement et son exil en seraient une preuve suffisante, si, depuis cette époque, de nouveaux faits n'étaient venus surabondamment prouver cette vérité: que
la tyrannie est l'ennemie de la libre pensée.
A Londres, où il passa cette fois trois années, Voltaire, se pénétrant à fond de la philosophie rationnelle, se forma, contre la cléricature, une opinion qui — souvent varia de forme, il est vrai, — mais demeura toujours sur une base inébranlable: l'examen libre des dogmes et la libre pensée de l'homme.
Voici le temps de l'aimable Régençe,
Temps fortuné marqué par la licence,
Où la Folie, agitant son grelot,
D'un pied léger parcourt toute la France,
Où nul mortel ne daigne être dévot,
Où l'on fait tout, excepté pénitence.