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EAN : 9782253041610
Le Livre de Poche (31/10/2015)
4/5   2 notes
Résumé :
Si c'était un roman, quel roman ! Imaginez un peu : une enfant abandonnée par ses parents, père alcoolique et mère tzigane volage, qui survit à mille morts - le froid, la maladie, la famine, les persécutions de toutes sortes - et devient une cantatrice adulée du monde entier, la femme de Rostropovitch, l'amie des plus grands de la terre ...
Et tout cela grâce à trois dons des fées : la beauté, un caractère à toute épreuve et, surtout, une voix divine.
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Galina Vichnevskaïa, 1926 - 2012, fut un témoin de premier plan du vingtième siècle. Sa biographie, parue en 1984 se dévore comme un bon roman, dont les 650 pages filent d'une traite, dans une évocation de son enfance, de sa prestigieuse carrière, de son mariage avec Rostropovitch, des tracasseries que le régime soviétique leur a infligées à elle et à son mari, pour avoir eu le front de soutenir Sakharov et Soljénitsine ....
Dans l'impossibilité où ils devinrent d'accomplir leur carrière artistique en URSS, ils quittèrent leur pays en 1974 et vécurent d'abord aux Etats-Unis puis en France. Déchus de la nationalité soviétique en 1978, ils revinrent s'établir à Moscou en 1990, grâce à Gorbatchev.

Cette existence riche et mouvementée mérite un plus large commentaire. Avec sincérité et humour, Galina Vichnevskaïa évoque plus de cinquante années de vie sous le régime soviétique, avec le joug pesant des années staliniennes, dont elle eut comme tant d'autres à subir les conséquences.
Et elle n'hésite pas à se lancer dans une critique cinglante de "l'art de vivre" sous la férule soviétique. Ce qui fait froid dans le dos dans ces souvenirs, c'est la déshumanisation que l'Etat soviétique a imposée au peuple russe ! Commencée sous Staline, cette politique de terreur, de mise à la botte de tout un peuple a hélas perduré quasiment jusqu'au bout, provoquant de graves dommages dans le comportement de beaucoup de russes !

Mais revenons sur son existence personnelle. Elle évoque sans fard les difficultés de son enfance et adolescence :
- l'alcoolisme des mâles de sa famille, son père d'abord que, toute petite fille, elle aura en horreur, son oncle qui mourra écrasé sous les rues d'un autobus, ensuite le mari d'une de ses tantes ... et puis :
"mon grand-oncle avait une fille dont le mari, s'étant soûlé un soir, attrapa une hache et, sous l'effet de la jalousie et de la colère, massacra son épouse et sa belle-soeur, avant de se donner la mort d'un coup de couteau. Qu'ajouter à cela ? Au milieu de l'éthylisme invétéré des russes, la violence fait forcément irruption au moindre prétexte, si insignifiant soit-il. Je passai mon enfance environnée de vapeurs d'alcool et j'en ai gardé une sainte horreur des ivrognes. Vodka et grandiloquence, voilà à quoi se résume la Russie d'aujourd'hui.

- les difficultés de la vie quotidienne en URSS avant et pendant la guerre : la vie en appartements communautaires qu'elle décrit avec humour, mais qui n'avait rien de vraiment bien drôle,
- l'époque des grande purges staliniennes :
"A l"école, le professeur nous lisait le journal. Nous devions absolument savoir que le grand Staline avait démasqué les ennemis trotskystes ..... le matin, des enfants arrivaient en classe, avec des yeux rougis, pleins de larmes. Et nous savions ce que cela signifiait. La nuit, on avait arrêté leur père ou leur mère...."
- l'existence épouvantable à Léningrad, pendant le siège, où elle vécut pendant toute la durée de la guerre.
- la facilité avec laquelle le régime à la fin de la guerre, se remit à procéder à de nouvelles vagues d'arrestation, envoyant les gens au goulag, "car le pays était en ruine et avait besoin de travailleurs non rémunérés, d'une armée entière d'esclaves. Dans notre système, l'Etat ne peut payer la main d'oeuvre à son prix, mais le Parti, dans sa sagesse possédait une solide expérience dans ce domaine.... Et après la guerre, sous la houlette de notre sage Père et Maître, de fonctionnaires zélés bourrèrent le goulag d'hommes et de femmes, sous des prétextes politiques inventés de toutes pièces pour la circonstance. Leurs victimes devaient alors s'échiner pendant dix ans au minimum, sans que le gouvernement fût tenu de leur verser un kopek. Pas de salaires à payer, pas de chômage. C'était un trait de génie !"
Pour avoir plaisanté sur Staline, le père de Galina Vichnevskaïa fut expédié au goulag.

Enfin sa vie professionnelle prend son envol, grâce à son talent de chanteuse, très tôt révélé. En effet, pendant sa période scolaire, son professeur de musique avait remarqué son don et l'avait intégrée à la chorale qu'il dirigeait. A la fin de la guerre, elle fit partie d'une troupe itinérante, apprenant ainsi "sur le tas" son métier d'actrice. Enfin elle rencontra le professeur qui l'aida "à trouver sa voix" pourrait-on dire et fit d'elle la cantatrice qu'elle est devenue. Elle remporta en 1952 un concours organisé par le Bolchoï, où elle entra l'année suivante et dont elle devint rapidement soliste principale. Elle y restera jusqu'en 1974 et son récit fourmille d'anecdotes amusantes, croustillantes, truculentes ou sinistres sur les "petites" jalousies, "petites" haines et autres "petitesses"au sein de la troupe du prestigieux établissement.

Mais ce qui importe avant tout, c'est son énorme capacité de travail, son acharnement à obtenir la perfection, à restituer avec la plus grande fidélité les intentions artistiques des compositeurs qu'elle eut le bonheur de servir !
Eblouissante interprète de Tatiana, l'émouvante héroïne de Eugène Onéguine de Tchaïkovski, rôle dans lequel elle fit ses débuts en 1953, suivi peu de temps après de la Léonore du Fidelio de Beethoven, elle parcourra les scènes internationales jusqu'en 1982, date à laquelle elle interrompit sa carrière en interprétant une dernière fois son rôle fétiche de Tatiana, dans lequel elle excellait !

Epouse de Rostropovitch dont elle partage l'existence de 1955 jusqu'à la mort de ce dernier en 2007.
Amie avec son époux de Chostakovitch, de Britten, de Bernstein et de tant d'autres, sans oublier Sakharov et Soljenitsyne qu'ils hébergent quatre ans durant dans leur datcha. Leur amitié avec ces deux derniers leur valut moult tracasseries administratives et déboires avec les autorités soviétiques dans l'accomplissement de leur métier !

Une vie plutôt bien remplie avec des compagnons de marque !
Et une somme fascinante d'expériences et de rencontres. Les amateurs d'opéra y trouveront leur compte. Mais point n'est besoin d'en faire partie pour apprécier à sa juste valeur la richesse de cette autobiographie !
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Un jour où il s'apprêtait à entrer sans montrer patte blanche au portier - après tout, c'était quand même le premier chef d'orchestre -, celui-ci s'interposa : "Votre laissez-passer !
- Quel laissez-passer ? qu'est-ce que tu racontes ? tu ne me reconnais pas peut-être !
- Votre laissez-passer, s'il vous plaît."
Golovanov sortit le document et le lui montra. Et alors, séance tenante, le papier lui fut retiré et on lui interdit de pénétrer à l'intérieur du théâtre. Ce fut ainsi que cet homme haut placé et apparemment tout-puissant apprit qu'il n'était plus premier chef d'orchestre du Bolchoï et qu'il n'y travaillait même plus. Il mourut quelques mois plus tard, incapable de survivre à cette humiliation - il n'avait que soixante-deux ans.
Telle était l'auguste demeure en 1952.
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Video de Galina Vichnevskaïa (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Galina Vichnevskaïa
This is the last appearance of Galina Vishnevskaya as Tatiana. She is surrounded by a solid cast. Benjamin Luxon is a very good Onegin while Neil Shicoff is a Lensky of anthology. At last but not the least, the conductor is Rostropovich. Paris Opera, 1982.
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