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3,9

sur 167 notes
Je dois avouer que j'ai été secouée mais charmée par la plume d'Aurélie Wellenstein, dont je n'avais encore jamais lu de roman.
Yardam est un récit puissant, très puissant, aux confins du brutal et du cru par moments, mais ce n'est pas pour me déplaire! J'ai surtout apprécié la profondeur et l'épaisseur des personnages (ce qui n'est pas toujours d'usage dans ce registre).
Bref une très bonne lecture, plutôt adulte qu'ado cependant.
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Autrice prolifique, Aurélie Wellenstein est parvenue depuis 2015 a maintenir le rythme d'un roman par an, chacun consacré à un sujet très différent mais tous mettant en scène le voyage initiatique d'un ou d'une adolescent(e), que ce soit dans un Paris en proie à des bouleversements temporels (« La mort du temps »), sur une île d'inspiration polynésienne (« Le dieu oiseau ») ou à bord d'un bateau pirate naviguant sur des marées fantômes (« Mers mortes »). Cette année, l'autrice revient avec un roman un peu différent et qui s'adresse cette fois clairement à un public adulte. le sujet, lui, est malheureusement d'actualité, et se distingue comme d'habitude par son originalité. Jugez plutôt. Dans la cité de Yardam, une mystérieuse épidémie sévit depuis quelque temps et change les individus contaminés en véritables loques humaines. Privées de leurs souvenirs, de leur intelligence, et même peu à peu de leur apparence, les « coquilles » se multiplient à une telle vitesse depuis plusieurs mois que l'empereur a pris la décision de placer la ville en quarantaine. Personne ne peut plus ni y entrer, ni en sortir, ce qui ne manque pas de provoquer une véritable panique chez les habitants qui s'inquiètent, qui d'un parent momentanément absent, qui du risque de contamination, ou qui encore de la possibilité d'une pénurie alimentaire. le seul espoir de la population repose entre les mains des médecins envoyés sur place pour tenter de juguler l'épidémie et comprendre son origine. Féliks et Nadja sont de ceux là, et ils vont bénéficier de l'assistance d'un allier inattendu, un certain Kazan, voleur accro à la sirène (une drogue locale) qui, dans un premier temps, ne leur inspire pas confiance. Mais l'homme a pour lui plusieurs avantages : un physique imposant, une connaissance parfaite des méandres de la ville, et surtout une farouche détermination à vouloir aider les médecins dans leur quête. Noble initiative ? Pas vraiment, car Kazan le sait, la seule et unique cause de l'épidémie, c'est lui. Enfin, lui et ses semblables : des sortes de vampires psychiques qui avalent l'âme de leur victime, ainsi que leurs souvenirs, leurs aptitudes, leurs talents, pour ensuite les stocker à l'intérieur de leur tête. Un pouvoir grisant, dans un premier temps, mais la contrepartie est de taille : sexuellement transmissible, le virus finit inévitablement par provoquer la mort de son porteur, rendu fou par toutes les personnalités engrangées et qui n'aspirent qu'à la mort de leur bourreau.

Épidémie, quarantaine, virus : « pour oublier l'anxiogène contexte mondial actuel, c'est raté ! », serait-on tenté de penser. Pourtant, en dépit de ces apparentes similitudes, le récit n'a pas grand-chose à voir avec notre situation aujourd'hui. Outre le fait qu'il s'agit d'un virus sexuellement transmissible, les circonstances diffèrent aussi en ce qui concerne le cadre qui s'apparente ici à une ville du XVIII ou XIXe, même si l'autrice donne peu de précisions concernant l'univers en général (on ne rien de cet empire qui est seulement mentionné ni de la place qu'y occupe Yardam). Cela ne nuit en tout cas nullement à l'immersion du lecteur qui arpente avec plaisir les coins et recoins de la cité, du musée à l'institut médical, en passant par une taverne abritant une fumerie clandestine, une grande place de marché, des quartiers résidentiels ou ouvriers, de grandes demeures bourgeoises… le décor est franchement réussi, à la fois parce qu'il change des cités d'inspiration médiévale auxquelles on a habituellement affaire, mais aussi parce qu'il règne une ambiance très particulière dans cette cité confinée en proie aux comportements humains les moins reluisants. Scènes de panique, désignation de bouc-émissaires, lynchages, émeutes, hystérie collective… : l'atmosphère est délétère, et c'est ce côté crépusculaire qui donne une grande partie de son charme au roman. Les coeurs sensibles feraient bien de s'abstenir, car le récit dégage une noirceur clairement identifiable à la fois par les thématiques qui y sont abordées (l'ambivalence de la nature humaine, la dépendance, la monstruosité cachée en chacun de nous…), mais aussi par la présence de passages clairement destinés à un public adulte. Au risque d'en faire parfois un peu trop. Si la plupart des scènes de violence ou de sexe dépeintes dans le roman présentent effectivement un intérêt pour l'intrigue, on a parfois du mal à se départir de l'idée que certains détails glauques ou macabres ne sont là que pour souligner la volonté de l'autrice de s'adresser à des lecteurs plus matures (même s'il faut admettre que tous ses précédents romans étaient eux aussi emprunt d'une certaine noirceur et que celle-ci n'a jamais cherché à épargner à ses lecteurs les détails les plus sanglants).

Outre l'originalité de l'intrigue et la qualité de son décor, le roman dispose d'un autre atout : ses personnages. Et là encore, impossible de ne pas faire la différence avec les précédents romans « young adult » de l'autrice (même si, encore une fois, ses précédents héros n'avaient rien de lisses ou de « gentillets »). Kazan est un personnage complexe et surtout très ambivalent, tour à tour détestable ou sympathique. On compatit de le voir lutter contre sa dépendance et sa maladie, on s'amuse de l'un de ses traits d'humour qui nous le rendent attachant... et puis on le voit se livrer à un acte monstrueux qui nous rappelle à quel genre de personnage on a affaire. Cette ambiguïté favorise l'installation d'un malaise chez le lecteur qui ne sait plus s'il doit être horrifié ou désolé. Par cet aspect, le roman m'a beaucoup fait penser à « Entretien avec un vampire » d'Anne Rice, notamment en ce qui concerne la relation entre Kazan et son « mentor », et celle entre Kazan et son « apprentie ». le thème du vampirisme n'est évidemment pas étranger à cette association car, même s'il s'agit ici d'un vampirisme psychique, le lien entre le prédateur et la proie tel que décrit par Aurélie Wellenstein reste malgré tout très charnel (l'aspiration passe par un baiser, la transmission du virus ou le « déchargement » d'une voix implique une relation sexuelle…). Kazan n'est toutefois pas le seul personnage ambivalent du roman car les habitants de Yardam sont loin d'être des enfants de coeur (surtout dans un contexte tel que celui-ci). On pourrait ainsi être tenté de penser que le sort horrible réservé aux victimes du voleur d'esprits nous inciterait à accorder à ces pauvres gens toute notre sympathie, or il n'en est rien tant certains de ces individus se révèlent franchement détestables. A ce sujet, il est d'ailleurs intéressant de noter que les voleurs d'esprits rencontrés sont loin d'avoir tous les mêmes techniques de chasse, ni les mêmes ambitions. Ainsi, si certains se servent du virus pour éliminer de la société les pires individus possibles (se condamnant ainsi eux-mêmes à vivre avec le souvenir de leurs atrocités), d'autres y voient l'occasion de s'élever dans la société. La folie qui rôde autour de ces ambitieux ne manque évidemment pas de favoriser l'apparition de comportements déviants ou cruels qui viennent renforcer la noirceur du récit et le malaise du lecteur (la scène de la « chasse à courre » est particulièrement marquante). le seul îlot de pureté dans cet océan de tristesse et de cruauté réside finalement dans ce couple de médecins, Féliks et Nadja, dont l'histoire d'amour se révèle d'autant plus touchante qu'elle va se retrouver sacrément malmenée.

Avec « Yardam », Aurélie Wellenstein rompt avec ce à quoi elle nous avait habitué dans ses précédents romans (youn adult, récit initiatique, omniprésence du thème de la relation homme/animal…) pour nous offrir un texte plus adulte, plus sombre, mais aussi plus immersif et plus intense. Grâce à une intrigue bien rythmée et qui ne connaît que peu de temps mort, l'autrice parvient à accrocher efficacement le lecteur qui se prend à lire avec avidité le destin tragique de cette cité, de ce couple, et surtout de ce héros qui séduit autant qu'il dégoûte. Une belle découverte, à réserver toutefois à un public averti.
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À sa sortie, « Yardam » me faisait très envie ! En effet, j'apprécie généralement la plume d'Aurélie Wellenstein qui a toujours beaucoup d'imagination, des univers originaux et sombres, des personnages dérangeants au caractère fort, des thématiques actuelles aussi puissantes que touchantes ainsi des dénouements difficiles avec un effet « coup de poing ». Cet ouvrage rentre dans le moule et ne laissera pas ses lecteurs indifférents !

Le monde obscur de ce nouveau titre rappelle l'actualité, tout en s'en détachant. Pas de Covid-19, mais quelque chose d'aussi dévastateur… Dans la ville de Yardam, une pandémie fait rage : des personnes absorbent les âmes des citoyens d'un simple baiser et transmettent leur maladie via le sexe -souvent via le viol- ou le sang. Ce mal est particulier car, à la fois don et malédiction, il permet de voler les pensées, l'esprit ainsi que les capacités des gens. Imaginez : vous apprenez à peindre en embrassant un artiste talentueux ! À moins que vous ne préfériez savoir cuisiner comme un grand chef, avoir les codes confidentiels d'une banque pour la piller ou que vous préféreriez maîtriser l'art du combat ? Les possibilités sont infinies et on comprend que certains malades souhaitent acquérir le plus de compétences possible… Cependant, cet apprentissage instantané demande un sacrifice chez la victime et le porteur… Une personne embrassée devient une simple coquille vide, qui déambule sans but et dépérit. de son côté, le malade « voleur d'esprits » intègrera la personnalité d'un innocent qui continuera de s'exprimer dans sa tête. Cohabiter avec plusieurs personnalités est difficile, voire chaotique ! Imaginez cinq personnalités hurlant sans arrêt dans votre tête ou vous insultant dès que vous ouvrez les yeux… Les malades se dirigent donc doucement vers la folie ! Pour aller mieux, rien de plus simple : coucher avec quelqu'un et le contaminer. Lorsque l'on a des rapports intimes, on se déleste d'une voix/d'un talent. Puisqu'il est l'un des éléments déclencheurs de la maladie, autant dire que le sexe a énormément de place dans le récit. de ce fait, je ne conseillerais pas ce récit aux jeunes lecteurs, ni aux ados. On est sur un écrit dédié aux adultes, avec des moments obscènes, des actes non consentis, des orgies explicites, etc. Lecteurs non-avertis et âmes sensibles, il vaut peut-être mieux passer votre chemin… Pour les autres, vous savez dorénavant à quoi vous attendre !

En plus d'un contexte sanitaire particulier et d'un virus aussi atypique que révoltant, ce one-shot propose plusieurs personnages peu communs que je ne qualifierais pas de héros. Kazan, Feliks, Nadja, le Maréchal Elijas, Jiri, … Aucun d'entre eux est un citoyen « gentil » et honnête. Il y a un « monstre » en chacun d'eux. Même Feliks et Nadja, pourtant médecins chargés de stopper l'épidémie, auront un caractère et des agissements nuancés, voire souvent toxiques. Cela dit, celui qui divisera le plus les lecteurs sera bien le personnage principal. Pour ma part, j'ai été très intéressée par Kazan qui possède une personnalité complexe, ambiguë, noire, travaillée et originale. Toutefois, je peux parfaitement comprendre que l'on ne s'attache pas à lui ou qu'on fasse un blocage vis-à-vis de son comportement ! Ce qu'il fera tout au long du roman est intolérable ! Bien souvent, il enchaînera les mauvais choix, aura un esprit retors, se droguera et fera preuve d'égoïsme. C'est un anti-héros peu conventionnel qui m'aura souvent surprise, si bien que j'ai été curieuse de suivre son évolution. À plusieurs reprises, Aurélie Wellenstein va mettre en avant le fait que Kazan est une personne à la fois unique et ambivalente. Il ne semble ressembler à personne… Pas même à ses semblables ! En effet, bien qu'il existe d'autres « voleurs d'esprits », chacun a ses ambitions ainsi que sa propre façon de procéder pour devenir plus fort ou contaminer autrui. Découvrir le fonctionnement de chacun fut passionnant.

Malgré l'épaisseur du livre, les chapitres défilent facilement. Avec une curiosité assez malsaine, j'ai désiré savoir où toute cette histoire aller me mener ou ce qu'il allait advenir de Kazan, des deux aimés médecins ainsi que de la pandémie, … La seule chose dont j'étais sûre, c'est que l'on serait loin du happy-end, car l'auteure n'a jamais conclu de façon positive et semble adorer malmener ses protagonistes ! Or, je n'ai pas été déçue par les dernières pages. Bien que l'on ne possède pas toutes les réponses, c'était assez logique, horrible et marquant. Une fois encore, Aurélie Wellenstein aura su explorer les vices et les bas-fonds de l'âme humaine !
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Lire un roman d'Aurélie Wellenstein, c'est une aventure en soi. Celui-ci emmène le lecteur dans un univers médiéval où des peurs obsessionnelles suscitées par les plus bas instincts de l'homme vont se réveiller. L'humain combat le fantastique, et de cet équilibre émerge une humanité sensible. Dans un contexte d'épidémie, une ville est plongée en quarantaine. Les portes sont closes, les démons ricanent : enfermés dans les murailles de leur cité, les habitants se retrouvent brutalement pris au piège d'une maladie inconnue et de leurs pairs. La première transforme les êtres, modifie leur substance. Parmi les seconds, des prédateurs insoupçonnés jettent leur dévolu sur la population. Deux étrangers, résolus à découvrir le mystère du mal, parviennent à entrer. Sont-ils des sauveurs providentiels ou simplement deux proies de plus dans une bergerie grouillant de loups déguisés en moutons ? Les gens contaminés traînent leurs carcasses vides à travers les rues, dans l'attente de cette lune vorace qui fascine et apaise. En dehors de leurs rêves désincarnés c'est le chaos. Les rescapés livrés à eux-mêmes sont la proie de leurs propres fantasmes. Intrigue solide, rebondissements qui fusent, personnages originaux dont défauts et qualités fusionnent avec nuances et finesse, à l'instar du principal protagoniste. Héros ? Anti-héros ? Avec sa gueule d'ange et la noirceur de son esprit, ce funambule machiavélique mène la danse et allume des foyers d'incendies.
Le rythme alerte du récit s'adoucit de plages introspectives et libère alors une puissance onirique qui ramène le lecteur à ses cauchemars. Evoluant au fil des mots comme le ferait un tableau selon la lumière, Yardam se décline en couleurs changeantes sous lesquelles l'auteure, au gré de son pinceau, nous transporte dans et à l'extérieur d'un cadre dérangeant et glaçant qui sert fort bien son propos. Prix de la 25ème Heure du livre du Mans en 2021.
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Une épidémie sévit à Yardam. Kazan est un voleur de haut vol mais aussi un voleur d'esprit : d'un simple baiser, il peut aspirer la personnalité, les souvenirs et les talents de sa proie. de plus en plus d'habitants sont ainsi transformés en coquilles vides, ce qui pousse l'empereur à décréter une quarantaine. Un couple de médecins, Feliks et Nadja, veulent comprendre ce qui se passe et trouver un remède pour mettre fin à cette pandémie. Mais leur rencontre avec Kazan va bouleverser leurs 3 destins...
Ce roman de fantasy n'est clairement pas à mettre entre toutes les mains : sexe, drogue, violence et folie sont au programme.
Pour ma part, j'ai vraiment bien aimé, surtout le personnage complexe de Kazan, attachant par certains côtés et vraiment détestables par d'autres. Les voix intérieures de ses victimes agissent comme une conscience qu'il a souvent du mal à faire taire.
Un roman vraiment dérangeant qui trouve cependant un écho particulier dans notre actualité.
Je remercie les éditions Scrinéo et Babelio pour cette lecture faite dans le cadre de masse critique.
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« Yardam » c'est une cité tentaculaire, sombre, que l'on parcours souvent de nuit pendant le récit (pas que, mais souvent), l'ambiance est vraiment dark et j'adore ça, tout est décrit avec finesse tout en gardant un récit très dynamique.


Les personnages sont très travaillés, tout d'abord « Kazan », l'anti-héro que l'on aime à voir évoluer autant dans le récit, dans sa vie et dans sa tête (une des choses principales du livre), je l'ai trouvé excellent, plein de charisme mais aussi empli de doute et et de désespoir.


Il y a aussi Nadja et Feliks, un couple de médecins venus d'une autre ville pour aider à Yardam sur l'épidémie qui sévit et semble inarrêtable qui mettra la ville en quarantaine, puis il y a le maréchal, un étrange personnage vil, perfide et calculateur.


On aborde des sujets très variés tels que l'accoutumance à la drogue, les maladies sexuellement transmissibles, la folie collective due à des croyances erronées, les cultes et les religions, leur dérives, la famine. Mais il y a aussi l'espoir, l'amour, la compassion, donc même s'il est vrai que beaucoup de lecteurs/trices ont trouvés ce récit plein de noirceur, ce qui est vrai, je vous assure qu'il y a un petit coin pour la lumière.


Attention tout de même aux âmes sensibles sur les scènes de violences ou sexuellement explicites.
Le récit est vraiment dynamique, il y a beaucoup d'action, il y a de l'infiltration, des bagarres de rue, des combats, des chasses à l'homme, des pogroms, c'est littéralement un récit de survie urbaine, mêlé à une réflexion psychologique sur les troubles de la personnalité multiple.


Ce livre ne laissera pas indifférent, vous aimerez ou passerez complètement à côté (surtout si vous attendez des princesses et des intrigues pleines de magie féérique).


« Yardam » est certainement le plus sombre récit d'Aurélie Wellenstein à ce jour, mais aussi un de ses meilleurs.
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Yardam est le dernier roman paru d'Aurélie Wellenstein, d'abord chez Scrinéo en mars 2020 puis chez Pocket 2 ans plus tard. Aurélie Wellenstein a publié une dizaine de romans en jeunesse et Young adult. Yardam est son premier roman étiqueté adulte. Un roman sombre et d'actualité où il est question d'une mystérieuse épidémie, sorti en mars 2020. C'est peu dire que c'est assez étrange à lire en ce moment.

La cité de Yardam est frappée par une mystérieuse épidémie qui transforme les individus touchés en « coquille », c'est à dire des personnes sans souvenirs ni intelligence, devenant juste un corps sans esprit. Devant l'ampleur des cas, l'Empereur décide de placer la ville en quarantaine pour une durée indéterminée et d'instaurer un couvre-feu. Les habitants paniquent autant pour la maladie que pour la quarantaine qui peut entrainer des risques de pénurie. Des médecins sont envoyés sur place pour tenter de comprendre d'où vient l'épidémie, et essayer de la stopper. Féliks et Nadja arrivent dans la ville, persuadés de pouvoir trouver la solution à tout ça. Ils vont recevoir l'aide inattendue de Kazan, jeune voleur qui va leur faire connaitre la cité. Ce dernier semble vouloir plus que tout les aider à trouver le moyen de guérir les malades. Mais il est loin d'agir par altruisme, car il connait l'origine de l'épidémie. Tout vient de personnes comme lui, détenant un grand pouvoir leur permettant de voler l'âme de leur victime en même temps que ses aptitudes, connaissances et souvenirs. Cette capacité provient d'un virus sexuellement transmissible, qui ronge à long terme son porteur qui devient fou à cause des personnalités engrangées dans sa tête.

On sait assez peu de choses sur l'univers ou sur l'époque ou se déroule le roman. Les techniques de médecine employées font penser à la fin du 19e siècle. J'aurais aimé un peu plus de détails sur le monde mis en place, cela aurait permis de mieux comprendre certains petits détails. Néanmoins, le fait de situer son histoire dans un univers clos et fictif permet beaucoup de libertés à l'autrice, qui en tire le meilleur parti en offrant à cette cité une véritable ambiance sombre et glauque par moments. le récit établit une véritable atmosphère oppressante autant par le huis-clos, par l'épidémie que par les habitants qui sombrent peu à peu vers la folie. Cette folie personnifiée par la maladie mais aussi par la cité en elle-même et l'effet de groupe, le dérives humaines. Surtout qu'Aurélie Wellenstein n'épargne pas ses lecteurs ni ses personnages. C'est violent, glauque, les tourments de l'âme humaine sont bien présents et on a parfois l'impression d'assister à une fin d'un monde, ce qui est en partie le cas puisque la ville de Yardam se meurt peu à peu en sombrant dans la folie.

L'intrigue est porté par le personnage de Kazan qui est totalement paumé. Il ne sait pas comment gérer sa maladie, ses démons, les relations qu'il entretient et choisit de se réfugier dans la drogue pour essayer de s'évader de tout cela. Il est parfois difficile à suivre tant sa personnalité est trouble. Il est loin d'être une victime, il a choisi son état en connaissance de causes. Il est très complexe et ambivalent. On l'apprécie et le déteste à la fois. Ceci vaut aussi pour les autres personnages dont le comportement devient ambigu sous l'influence de Kazan. Les relations entre les différents protagonistes sont troubles également, seule celle entre Féliks et Nadja est différente et fait office de lumière dans un monde de ténèbres. Cela a tendance à instaurer un malaise chez le lecteur qui ressent ce qui se déroule en ne sachant plus vraiment sur quel pied danser. Aurélie Wellenstein décrit avec brio les liens du type mentor / apprenti(e), et la maladie est liée au vampirisme, ceux qui la transmettent sont appelés des vampires psychiques. Cependant, il reste parfois difficile de vraiment s'attacher aux personnages ou de ressentir de l'empathie pour eux. La plume d'Aurélie Wellenstein rend le récit très immersif et on se laisse prendre au jeu, mais il subsiste tout de même ce sentiment de malaise tout au long de la lecture.

Yardam est donc un roman beaucoup plus sombre et glauque que les autres romans d'Aurélie Wellenstein. Il est à réserver à un public averti (comme on dit). Pourtant, c'est une véritable réussite au niveau de la description de la folie, de la maladie insidieuse et des relations torturées qui peuvent lier des personnes.
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J'ai découvert la plume d'Aurélie Wellenstein l'an passé avec le roi des Fauves et j'ai dévoré une grande partie de sa bibliographie depuis avec parfois de gros coups de coeur et d'autres de légères déceptions. Je sais donc qu'avec elle, ça passe ou ça casse. Cette fois, c'est passé mais ce n'est quand même pas un coup de coeur, juste une très chouette lecture.

L'autrice m'avait habituée dans ses précédents titres à suivre des héros adolescents ou tout juste entrés dans l'âge adulte qui vivaient bien des épreuves dans un monde souvent sombre et suffocant à la limite du supportable. Je m'attendais donc à retrouver cette même teinte ici et ce fut le cas, mais pas tout à fait ^^!

En effet, cette fois, c'est un homme adulte dont nous suivons les aventures, première entorse à ce que j'attendais de l'autrice. Ensuite, oui l'univers sera sombre et dérangeant, mais finalement moins que ce qu'elle a déjà pu proposé et je suis restée un peu sur ma faim à cause de cela.

Cependant, Aurélie Wellenstein offre un univers vraiment intéressant dans Yardam. Dans une sorte de huis clos, elle nous conte comment la folie peut s'emparer collectivement d'une population quand un virus inconnu vient semer le désordre et qu'on arrive pas à le comprendre, le cerner et le maîtriser. Ce virus qui n'a pas de nom se transmet lors de relations sexuelles quand il s'agit de reproduire les "contaminateurs" si je puis dire, mais il peut aussi se transmettre lors d'un simple baiser et faire ainsi encore plus de ravages lorsqu'il s'agit de faire "des victimes" afin que les "contaminateurs" puissent continuer à vivre sans devenir fou. Notre héros est l'un de ces "contaminateurs" mais il est lui aussi une des victimes et c'est cela qui est terrible.

J'ai véritablement été plus fascinée par l'univers mis en scène par l'autrice que par ses personnages qui n'en sont que les dramatiques outils. En effet, cette maladie à l'origine de tout, qui fait des ravages et qui enferme la ville de Yardam dans une quarantaine inextricable, est terrible. Elle frappe aussi bien les victimes des baisers qui deviennent des coquilles vides, que les "contaminateurs" qui deviennent des sortes de vampires pris dans un cercle vicieux, celui de devoir coucher pour partager leur trop plein d'âmes et ainsi répandre le virus, puis celui d'embrasser pour voler des âmes sous peine d'être en manque, répandant à nouveau le virus dans une autre direction. C'est sans fin. En plus, ils doivent vivre avec ce qu'ils font au quotidien, littéralement, puisqu'ils entendent dans leur tête les voix de ceux qu'ils absorbent, et tout le monde n'est pas assez doué pour faire un choix raisonné quant à celle-ci, ça peut donc vite devenir le chaos dans leur tête.

Le héros, Kazan, est à l'image de ceux de l'autrice, un pauvre bougre qui n'a rien demandé, qui subit et est dramatiquement touché par tout ça. Pour une fois, c'est un homme adulte à qui on a affaire, ce que j'ai apprécié. Il a un parcours de vie assez terrible avec ce rejet de la part de sa famille à cause de la façon dont est morte sa mère. Il s'est donc construit de travers et cela va tout faire capoter dans notre histoire. D'un "pouvoir" qui aurait pu le tirer vers le haut, il le ressent lui comme une malédiction et une fois cela posé, tout est dit. L'histoire qu'il va vivre et qu'on va vivre avec lui ne peut être que dramatique.

Tout commence, lorsque la quarantaine est annoncée. Kazan essaie de s'échapper mais se faisant il fait une rencontre qui va tout changer en croisant la route de deux médecins qui souhaitent absolument entrer pour venir en aide à la population de Yardam. Sans trop savoir pourquoi, Kazan va les aider et une fois leur chemin croisé, beaucoup de choses vont être chamboulées dans sa vie.

Ce qui est surprenant dans ce récit, comme souvent dans ceux d'Aurélie Wellenstein, c'est qu'elle ne nous emmène pas forcément là on pouvoir le croire. Tout au long du récit, elle fait rebondir celui-ci dans des directions surprenantes et inattendues, allongeant ses fils narratifs, en créant de nouveaux ou en coupant des non prometteurs, tout cela pour créer au final une histoire dramatique et puissante.

Dans ce récit, beaucoup d'éléments m'ont frappée : l'utilisation de la ville, la vie de misère du héros, la folie de la population quant à ce virus. Mais surprenamment ce que je garde en tête une fois le tome refermé, ce n'est pas tout ça, non, c'est la superbe histoire tragique tissée entre Kazan et les deux médecins : Feliks et Nadja. Il est dur d'en parler sans spoiler un certain événement qui arrive assez tôt, qui surprend et qui fait tout basculer mais je vais essayer. Avec eux, Kazan va former un bien étrange triangle amoureux et c'est dans celui-ci que j'ai retrouvé tout ce que j'aime chez l'autrice. Sa description des sentiments de Kazan, la façon dont il peine tant à les gérer, dont ça le chamboule jusqu'au plus profond de lui-même est juste poignante. Ça prend aux tripes et ça ne nous lâche plus, au point de totalement transformer également la vision que l'on pouvait avoir des personnages et de l'histoire. Les pages qui lui sont consacrées sont magiques !

Cependant, l'autrice se limite par trop dans l'expression finale à celle d'une pandémie. J'ai été frustrée de ne pas retrouver toute la terrible noirceur dont elle avait su faire preuve dans le roi des Fauves et le Dieu Oiseau. Je l'ai trouvé bien soft ici. Alors certes, on parle de relations forcées, de viols, il y a pas mal de violence, on passe un temps fou dans la partie la plus miséreuse de la ville, on assiste à ce qu'il y a de pire dans un hospice, mais l'autrice m'avait habituée à aller plus loin et à être plus dérangeante. Ici, elle s'arrête avant que ça le devienne vraiment, retenant toujours ses coups et cela se sent. Avec un cadre aussi prometteur, elle aurait pu aller bien plus loin dans les sévices et la folie. Je ressors donc un poil déçue, ce qui m'empêche ici d'avoir un coup de coeur.

Faisant le pari d'un titre qui s'adresse à un public plus âgé, avec un héros de leur âge, paradoxalement l'autrice propose au final un titre moins dur. Alors que le roi des Fauves et le Dieu Oiseau s'adresse à un public de jeunes adultes mais conviennent plus à des adultes, selon moi, ici c'est l'inverse, je trouve que Yardam passeraient très bien avec un public plus jeune car il remue moins et va moins dans ce qui pourrait choquer. du coup, même si c'est comme toujours très bien écrit, que j'ai adoré le développement autour du virus, de la ville et du héros, je reste sur ma faim. J'attendais et j'aurais aimé quelque chose de plus rude.
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Je me plonge toujours avec autant de plaisir dans un livre d'Aurélie Wellenstein, autrice que je suis assidûment depuis que je l'ai découvert avec le roi des fauves.
Mon intérêt pour elle, pour son style la qualité d'écriture, la simplicité et la facilité avec lesquelles elle nous entraîne dans ces univers, univers qui font preuve d'une originalité et d'un imaginaire renouvelés.
Pour moi, Aurélie Wellenstein fait parti de ces autrices qui réinventent le genre. Certes elle ne le révolutionne pas,mais elle apporte sa sensibilité et sa vision toutes particulières à des histoires qu'on auraient pu vous raconter mille fois. Enfin pas tout le temps, car inventer une maladie qui transmet la folie sexuellement, il fallait y penser. Et je ne peux m'empêcher de penser qu'en y regardant de plus près, il s'agit là d'un sujet on ne peut plus actuel, dans le sens où l'autrice explore les thèmes liés à une épidémie, l'isolement, la quarantaine, la folie....
J'ai vraiment pris beaucoup de plaisir à lire Yardam, à en explorer toutes les facettes, me laissant guider par le style fluide, évocateur et simple d'Aurélie. Yardam est constitué de presque 500 pages qui s'avalent comme des petits pains ( ou des m&ms, ou une tablette de chocolat, ou des mao croqui!!). On se laisse happer et emporter dans l'histoire presque à notre insu, et très vite les dernières pages sont là. Et c'est la frustration. Déjà fini...!! Vivement son prochain bouquin....
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Aurélien Police a créé pour ce roman un écrin à la hauteur du texte, résumant parfaitement la teneur du mal qui dévore Kazan, et l'ambiance du roman, envoûtante et oppressante à la fois. C'est clairement un roman adulte, et non ado, non seulement de par sa thématique, mais surtout de par la façon dont l'autrice a choisi de la traiter, sans aucun tabou, de façon frontale, ce qui donne de fait des scènes qui à l'écran seraient interdites aux mineurs !
J'ai un rapport particulier à ce roman… je l'ai commencé début mars, avec pour objectif de publier cette chronique autour du 19, pour la sortie du roman. Les événements ont fait que les librairies ont fermé le 17 mars, alors que le roman était arrivé en librairie, mais pas encore en rayon. Je l'ai lu en deux fois, car avec l'arrivée du CoViD et le début du confinement, je n'avais pas franchement envie de lire cette histoire de quarantaine. Non pas que je n'aimais pas le livre, loin de là, simplement que j'avais besoin d'air et que son atmosphère n'était pas idéale à ce moment là. Ceci-dit, quand je l'ai repris il y a huit jours, je l'ai fini d'une traite, car il n'y a pas à dire, Aurélie Wellenstein est très douée pour créer des univers à la fois dérangeants et addictifs.
Dès les premières pages, on plonge dans la cité aux côtés de Kazan, jeune homme donc on découvre très vite qu'il n'est pas seul dans sa tête. Il dispose des compétences d'hommes et de femmes qui ont eu le malheur de croiser son chemin. On pense rapidement à la schizophrénie même si la syphilis n'est pas loin non plus quand on voit les ravages de sa maladie. Kazan vit à Yardam, une cité dont on assiste à la mise en quarantaine à cause d'un mystérieux mal qui semble vider les êtres de leur humanité. le peuple les a surnommés les « coquilles ». Quel est ce virus qui les mets dans un tel état ?
Déroutant, envoûtant, oppressant, dérangeant, addictif, ce sont les adjectifs que j'ai utilisés jusqu'ici pour décrire l'univers et l'ambiance de Yardam. Une ville aux multiples facettes, qui fascine par son originalité, dérange par le mal qui la ronge, oppresse par ses ruelles sombres. C'est une ville qui envoûte, qui fascine, et qui dégoûte par la saleté et la puanteur de ses rues, par l'injustice que subit son peuple au quotidien. Et pourtant, c'est une ville qu'on a du mal à quitter, tout comme Kazan, personnage aussi haïssable par son comportement qu'attachant par son histoire. Comme mes sentiments à sa lecture, tout est dual dans ce roman, pas pour autant en délicatesse, loin de là ! Délicatesse n'est pas une caractéristique que j'attribuerais à ce roman, ni aux autres de l'autrice que j'ai déjà lus… C'est un roman brut, âpre comme l'est à priori la vie à Yardam.
Le parcours de Kazan est aussi chaotique que la vie dans la cité de Yardam fur et à mesure que la quarantaine se prolonge. Les conditions sanitaires de la ville se dégradent à la même vitesse que la santé de mentale du jeune homme. Jusqu'où Aurélie Wellenstein a-t-elle l'intention d'emmener ses personnages et ses lecteurs ? Loin, très loin dans les bas-fonds de Yardam. En immersion totale derrière les hautes murailles de la cité.
La cité de Yardam se trouve dans un univers d'inspiration slave, région que je n'ai pas souvent rencontrée jusqu'à maintenant dans mes lectures de fantasy. et que je trouve pourtant attirante et dépaysante. Un empire étendu, tellement vaste que d'un bout à l'autre, les traditions sont on ne peut plus différentes. A Yardam, les femmes sont cantonnées à la maison quand à Joukovski, les femmes peuvent étudier, et même pratiquer la médecine. C'est de là que viennent Nadja et Feliks, et Nadja a bien du mal à concevoir de ne pas pouvoir exercer son métier, de pouvoir juste, à la rigueur, assister son mari.
Je ne sais pas si je peux dire avoir adoré ma ma lecture sans passer pour masochiste, j'ai pourtant passé un excellent moment de lecture quand j'ai repris le livre, ce qui m'a fait regretter de l'avoir mis de côté, car si la quarantaine me paraissait résonner avec notre situation, au bout du compte, on est dans un univers tellement loin de notre quotidien (et heureusement quelque part^^)… J'ai eu une petite déception avec la fin, que j'ai trouvé un peu mièvre par rapport au reste du roman, même si elle apparaît comme logique au vu des événements du récit. Je vais peut-être paraître horrible, mais j'aurais aimé une fin plus rude, à l'image de la cité de Yardam.
Yardam est un roman tout en contrastes, qui ne ménage ni ses personnages, ni ses lecteurs, comme sait si bien le faire Aurélie Wellenstein. le décalage entre la douceur qu'elle dégage quand on la rencontre et la violence de ses textes est impressionnant !!! Et le pire (ou le mieux^^) c'est que j'en redemande… Après avoir découvert trois de ses romans, j'ai très envie d'en lire plus. Masochiste, je vous dis.
Yardam est une lecture sombre et étouffante, rude, mais surtout envoûtante. Une fois que cette cité vous aura pris dans ses filets, elle ne vous lâchera pas, elle vous entraînera aux côtés de Kazan et des autres dans la fuite en avant de sa quarantaine. Prêt pour le voyage ?
J'ai reçu la version papier de ce livre dans le cadre de ma participation au Club des lecteurs Scrineo pour l'année 2020. Merci à eux pour la confiance.
Lien : https://leslecturesdesophieb..
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