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EAN : 9782749257921
203 pages
Erès (24/10/2018)
2/5   1 notes
Résumé :
Après les interrogations produites par les mouvements LGBTI, les personnes qui se pensaient « normales » se sont découvertes « hétérosexuelles » dans les années 1990. Aujourd’hui, de nombreux et nombreuses hétéros interrogent tout à la fois les identités sexuelles (les bisexualités, l’asexualité, le libertinage, le triolisme, le candaulisme, le bdsm…), les identités de genre (cisgenre, bigenre, non-genre, genre fluide, travesti, hétéroqueer…) et les dispositions sex... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Le paratexte de ce court essai promet la réflexion suivante : « les interrogations produites par les mouvements LGBTI » ont produit, depuis les années 1990, une multiplication des formes non seulement d'homosexualité (et transsexualité, etc. etc.) mais aussi une pluralité d'hétérosexualités nouvelles, dont une liste apparaît d'ailleurs en guise de sous-titre sur la couverture même : « hétéroqueers, candaulisme, polyamour, libertinage, exhibe, asexualité, pansexualité, hétéronorme, BDSM, non-genre, bi-genre, cis-genre, bisexualités, travestis, aromantisme ». Je me suis senti justifié à m'attendre d'un sociologue universitaire l'éclaircissement de ces termes, et en général une posture de neutralité scientifique – non de militantisme – et de formalisation-analyse des ensembles de concepts proches, toujours problématiques, de sexe/genre/sexualité et d'identités sexuelles/identités de genre/dispositions sexuelles/orientations sexuelles. Au lieu de cela, j'ai trouvé dans ces pages une grande confusion, un certain anti-moralisme (qui est toujours un jugement de valeur), voire par moments un dogmatisme prescriptif dans la sommation à avancer dans la « révolution de genre que nous sommes en train de vivre » (p. 188).
Les confusions. Il faudrait tôt ou tard ouvrir un dictionnaire et relever que le champ sémantique du « normal » possède dans notre langue au moins trois significations qu'il est bon de distinguer : 1) l'ordinaire ; 2) le plus fréquent en termes statistiques ; 3) le résultat d'une norme, d'un pouvoir normatif. Ainsi, « hétéronorme », la norme hétérosexuelle, peut ne pas être toujours synonyme d'une affreuse domination masculine, d'un carcan binaire, d'une discrimination ou persécution homophobe dont il convient de se débarrasser...
L'auteur se revendique expressément d'une analyse queer « qui dépasse les seules assignations sexuelles » (p. 18). Très bien. Jugeons toutefois des présupposés qu'implique cette analyse :
« L'analyse queer est une perspective sociologique et politique. Dans cette approche, la matrice hétéronormative est un dispositif de contrôle social des hommes et des femmes pour leur assigner des places conformes à l'ordre de genre, qui intègre domination et violence masculines, conformité des corps à la division stricte en deux sexes dits "naturels", fétichisation et mise en scène érotique de la différence des sexes, enfermement conjugal dans les deux sous prétexte d'amour, et stigmatisation des sexualités non hétéronormatives. » (p. 17)
Autre postulat difficile à accepter, malgré deux références : « Les dominants [Nicole-Claude Mathieu (1985)] connaissent la machinerie de la domination, partagent des secrets entre eux pour maintenir la domination et occulter les mécanismes de pouvoir [… Maurice Godelier (1982)]. Mais les dominants n'ont que peu de conscience des effets de cette domination. La domination crée une asymétrie des positions et des connaissances. » (p. 23).
En joignant les deux : les hétéronormatifs, hétérosexuels, cis-genre, monogames, et autres adeptes du « couple traditionnel » seraient incapables jusque de la prise de conscience de la domination qu'ils infligent...
Et d'ailleurs, ils ne seraient pas les seuls. Dans un paragraphe intitulé : « L'hétéronorme des LGBTQI » (p. 94 et ss.), où l'on apprend que « Ce sont les queers qui aujourd'hui ont repris le flambeau de la lutte contre les dominations hétéronormatives » (p. 95), ainsi qu'en conclusion de celui qui porte le titre : « Qui sont ces nouveaux et nouvelles venues dans l'incertitude de genre ? », on parvient à l'apparent paradoxe suivant – qui, dans toute autre perspective d'analyse, ne serait aucunement étonnant :
« Observons le cocasse de la nouvelle situation des sexualités : ceux, celles et les autres qui se vivaient comme le socle du système de genre et de sexualités constituent aujourd'hui les marges de ce même système de genre quand les LGBTQI réclament les structures sociales (couple, PMA...) héritées de l'hétéronorme. » (p. 179)
Mais il y a pis. Si, dans la foulée de Judith Butler et de ses disciples, l'explication de la sexualité et du genre consiste à multiplier au libitum les catégories – pourvu de sortir du binaire – et à accepter comme principe explicatif les auto-définitions d'identité de chacun – pourvu de sortir de l'assignation –, nous tombons dans les confusions suivantes : confusions entre sexe/genre/sexualité ; une difficulté à associer une certaine permanence ou stabilité à la notion d'identité – d'où le « genre fluide » ; enfin un évident arbitraire à distinguer entre « identités sexuelles » (trans, intersexes, travesti-e-s, virtuel et réel numérique, les bisexualités, l'asexualité, la pansexualité, l'aromantisme, les queers, le BDSM...), « identités de genre » (cis-genre, bi-genre, non-genre, genre fluide, travesti, hétéroqueer...), et les « dispositions sexuelles » (échangisme, libertinage, coming out libertin, candaulisme, polyamour, anarchie relationnelle, BDSM, dispositions sexuelles à travers le nombre de partenaires, exhibitionnisme). Cette tripartition, qui dans un ordre différent, se reflète dans les ch. 2, 3 et 4 du livre, montre ses limites puisque les contenus effectivement traités ne se recoupent pas exactement dans les trois listes ; peut-être veut-on juste éviter d'invoquer la catégorie « pratiques sexuelles », qui ouvrirait éventuellement la question de leurs régularité et diffusion, voire d'autres questions sociologiques transversales...

En fin de compte, entre a-priori militants, moralisme antimoraliste, manque de clarté des concepts et conséquents défauts dans la structure de l'exposé, il reste ce que l'on apprend de ces « nouvelles hétérosexualités », par une méthode d'enquête de terrain très peu exposée : mais là aussi, je reste sur ma faim, car je n'apprends guère davantage que l'existence de ces « pratiques », sans aucune problématisation sociologique. Pour moi, la « révolution de genre » ne viendra donc assurément pas de là, et ce n'est pas l'écriture inclusive, ni le refrain : « les hommes, les femmes et les autres » qui m'y conduiront...
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"Autobiographie d'un mec sociologue du genre" :
Retour sur 35 ans de recherches critiques
Daniel Welzer-Lang, sociologue engagé, revisite 35 années de militantisme et de recherches sur le genre et les sexualités à travers son regard de « mec ». Critique acerbe de la domination masculine et de la virilité obligatoire homophobe, il plaide pour s'intéresser aussi aux hommes et au masculin, l'autre versant du genre si souvent oublié ou caricaturé.
« J'essaie de comprendre pourquoi je suis, et je reste, un homme, même si je ne suis pas que cela.»
Daniel Welzer-Lang, homme et sociologue, professeur en études genre à Toulouse, décrit son parcours où expériences personnelles et recherches sont intimement liées. Il montre comment l'étude des hommes, de leurs changements comme de leurs résistances, enrichit l'analyse globale de la domination masculine hétéronormative.
Auteur de plus d'une vingtaine de livres sur le genre, le masculin et les sexualités, témoin et souvent acteur des évolutions sur le genre depuis plus d'une trentaine d'années, il ethnographie les coulisses du masculin, y compris dans les lieux de sexualités gais, bisexuels et libertins.
Tout en explicitant ses méthodes empiriques, il présente ses analyses de la révolution actuelle du genre qui traversent époques et thèmes : de l'accueil des hommes violents par des hommes antisexistes dans les années 1980 à l'expression des fluidités de genre au sein des nouvelles générations, en passant par les liens entre homophobie et violences faites aux femmes, les renégociations sur le propre et le rangé dans l'espace domestique ou les questions sur le libertinage comme utopie.
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