Ah, que voilà un livre difficile à noter... «
Une belle pour un hors-la-loi » est-il mauvais, ou simplement bof ? Et surtout, pourquoi ? Pour pouvoir répondre à cette question, celui-là, il va falloir le décortiquer.
Premièrement, il s'agit d'un huis-clos. En pleine nature, certes, mais reste que les personnages sont coincés en tête-à-tête au même endroit pendant tout le livre. Dès lors, il est logique que toute l'intrigue repose sur leur psychologie et l'évolution des rapports entre eux, sans vrais rebondissements.
Là où le bât blesse, c'est que dans une histoire de ce type, il vaut mieux avoir des protagonistes solidement construits, sinon, ça ne fonctionne pas. Tu peux avoir le plus beau décor du monde, bien maîtriser le rythme de ton histoire, lorsque celle-ci repose sur des bases branlantes, tu ne peux pas sauver si facilement les meubles.
L'idée de personnages se cachant mutuellement leurs identités était pourtant sympa. Si l'on connaît celle de Sarah dès le départ, il ne faut hélas pas bien longtemps pour percer à jour celle de Jesse, tant les indices disséminés sont énormes. Ceci dit, pas surprenant que Sarah, elle, ne percute pas, tant la jeune femme s'avère... stupide. Et encore, ça, c'est être trop gentil. Non seulement elle n'a clairement pas inventé la poudre ni l'eau chaude, mais en plus, elle possède la maturité d'une gamine de dix ans. Quoique, en litté jeunesse, on trouve des persos de cet âge ayant bien plus les pieds sur terre. Perso, à dix ans, j'étais déjà au courant que les hors-la-loi façon western, ça n'existe plus. Mais Sarah, elle, ne l'est pas et se monte toute seule un scénario abracadabrant au sujet de Jesse. Au début, c'est rigolo, mais quand on se rend compte qu'elle est sérieuse et que son délire va durer 149 pages, ça ne l'est plus du tout. Quand en plus la moitié de l'histoire se consacre à l'éveil de cette femme-enfant ayant grandi dans un cocon, surprotégée autant que manipulée, tu commences à te demander si tu lis une romance ou bien autre chose. Pourtant, cette évolution n'est pas trop mal foutue en soi, hein... Mais ça prend tellement de place, et Sarah est tellement paumée, que la relation induit un sentiment de malaise. Mentalement, Sarah n'est pas une adulte, et le fait qu'elle trouve sa voie en cours de route ne change pas grand-chose à son manque de recul et de discernement. Les « péripéties » ne font qu'aggraver cette impression : Sarah essaie de conduire un camion (et le plante dans un arbre deux mètres plus loin), apprend à faire du vélo, du bateau, à nager, à pêcher, à trouver des plantes comestibles, à monter une tente... pour un peu, on croirait presque lire « Martine et la vie en forêt ». Il y a des moments touchants là-dedans, mais ça ne fait que renforcer un peu plus l'impression que Sarah ne sait rien faire de ses dix doigts et ne connaît rien de la vie.
Bref, ça aurait pu être sympa, ce petit huis-clos au milieu des bois sur fond de cachotteries, ça n'est pas mal écrit... mais non. Quelque chose ne passe pas.