J'ai adorez-me plonger dans ce livre, très enrichissant.
La qualité de ce récit, fournit au lecteur une image précise de ce que l'auteur cherche à nous faire comprendre.
Je ne connaissais pas cet auteur et je pense bien me plonger activement dans d'autres livres de son répertoire.
Sans hésitation je le recommande.
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Ce livre propose donc une expérience de pensée. Que se passerait-il si les animaux s'installaient massivement dans nos villes? Tous les accueillir parmi nous, à notre contact, est impensable. Les rejeter, impossible. Les exterminer, cruel et dangereux pour les équilibres écologiques. Que faire ? A partir d'une démarche d'enquête qui propose de voyager à travers les disciplines, les expériences et les frontières, ce livre, au-delà du caractère plaisant de l'exercice, permet, plus fondamentalement, d'interroger la ville, ses limites, ses insuffisances, les sacrifices qu'elle impose et que nous ressentons de plus en plus vivement. Il offre aussi l'occasion de repenser les relations entre espèces. Car il suffit qu'un canard se dandine sur un passage clouté pour que nos représentations les plus ancrées soient remises en question. Les animaux font plus qu'offrir la perspective d'une nouvelle géographie urbaine. Ils nous contraignent à interroger nos conditions de vie.
Que dit de notre conception de la ville, et plus largement de la vie humaine, l'impression dominante que les animaux, si fascinants qu'ils soient, n'y sont pas à leur place? Pourrait on au contraire imaginer une ville dans laquelle les espaces organiseraient les "barrières" nécessaires et rendraient envisageable la coexistence avec les bêtes sauvages ; une ville multispéciste qui ne serait plus pensée contre eux, ni d'ailleurs pour eux, mais avec eux? Comment, en somme, à l'heure des grands bouleversements écologiques, construire une nouvelle arche de Noé?
Faute de normes claires, l'opinion et la sensibilité des uns et des autres déterminent les décisions. Parfois, par désir d'exotisme, compassion, solidarité, l'animal est admiré, pris en photo, nourri, parfois accueilli, soigné s'il est blessé, placé dans un refuge, protégé, sans aucune considération quant aux conséquences de ces actions. Parfois au contraire, et bien plus souvent, le simple fait d'éprouver un désagrément autorise une action radicale de contrôle par déplacement ou euthanasie.
En regard de la domus, les valeurs attribuées au sauvage et au domestique s'inversent: en exerçant sur l'animal une pression telle que ce dernier devient prisonnier d'un cercle sans fin de servilité et de dépendance, l'homme s'élève au-dessus de sa condition primitive et de sa propre animalité. En soumettant la nature, il s'arrache à la sienne. Or, plus l'homme s'éloigne de son état primitif, plus la distance avec la condition animale s'accroît, plus cette animalité est vue comme pure et simple bestialité. La présence d'un animal tend d'ailleurs à "décivilisé" la ville en la salissant.
Enfermer un tigre dans une cage placée sur le toit d'un immeuble, consommer des animaux exotiques acheminés par bateau depuis des pays lointains ou, encore éradiquer le patois comme l'a fait la IIIème République pour que les "sauvages" des provinces et des colonies profitent du génie de la langue française et créer de cette façon l'unité et détruire sa spécificité. La pluralité est un régime de liberté.
Tant qu'il ne faisait que chasser et pêcher, il demeurait une brute aussi animale que ses proies. À partir du moment où il domestique les animaux, et par ailleurs maîtrise l'agriculture, il en tire des profits, rationnalise sa production, prévoit son action, organise un stockage.
Présenté par Raphael Zagury-Orly
Avec
Guillaume le Blanc, philosophe
Joëlle Zask, philosophe
Que la sobriété est difficile à percevoir, et à maintenir! Etymologiquement, elle renvoie à «sine ebrietas», absence d'ébriété. On est sobre si on n'est pas ivre (ebrius), soûl, aviné, et, par extension, grisé, exalté, excessif, immodéré, sans frein (bien qu'on puisse être tout cela en étant abstinent). Assez sereine et posée, elle ressemble peu à l'austérité, obligée, sévère, grise et ennuyeuse. Son amie la plus proche serait la tempérance, louée depuis l'Antiquité: ni trop ni trop peu, et encore moins pas assez – car la sobriété n'est pas la pauvreté. Elle suppose avoirs et biens, mais les gère et en jouit en évitant qu'ils excèdent ou s'hypertrophient. Mettant en acte la «juste mesure», elle se pose comme le contraire de cette pseudo-autonomie radicale par quoi on se permet tout, foulant aux pieds les besoins, les désirs, les aspirations, les droits et les libertés des autres. Certes, dans une société ivre de biens matériels, de plaisirs et de pouvoirs, où l'arc des inégalités sans cesse s'écarte, où la vocifération se substitue à la parole, l'invective au dialogue, le mépris au respect, le rejet à l'accueil, où seuls le buzz, l'outrance et le clash s'entendent, la place de la sobriété, comme vertu, semble bien exiguë. Aussi ne peut-elle revivre que par nécessité, sous forme du soin qu'exige la planète – et de la conscience que les excès et les gâchis sont nocifs non seulement du point de vue économique et écologique mais aussi de celui de la sécurité, de la santé et de la stabilité sociale. Elle sera alors vertu sociale et civique, style de vie partagé, changement d'habitudes, de principes et de croyances, et signifiera, non plus accumuler, gâcher, polluer, mais prendre soin, protéger, réutiliser, recycler, récupérer, réparer.
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