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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Pot-Bouille, c'est du très bon Zola. Peut-être pas le meilleur qui soit, mais sans nul doute du très bon, bien plus agréable à mes yeux que les deux volumes précédents, Une Page D'Amour et Nana.
On renoue ici avec une mouture que j'aime assez, une façon d'écrire qui me rappelle celle de la Conquête de Plassans ou qui annonce déjà celle de la Terre, par exemple.
À bien des égards, cet opus n°10 fait figure de diptyque : une sorte de dédoublement du n°7, L'Assommoir en version bourgeoise ou bien alors, une manière de préambule au n°11, le célèbre Au Bonheur Des Dames.
Tout d'abord évoquons ce titre étonnant, difficile à comprendre de nos jours, mélange de pot au feu et de bouillabaisse, rimant admirablement avec tambouille et évoquant la "petite cuisine", comme on dit, ce qui se passe en arrière-cour, loin des façades sublimes, parfaitement lisses et polies, agrémentées de brillants et de couleurs affriolantes.
Là, pas d'erreur, qu'on ne s'y méprenne pas, on est dans la crasse, dans l'égout, dans la vomissure, dans la pourriture glauque et flasque que les gens "comme il faut", que les "braves gens" s'ingénient à minutieusement dissimuler derrière des sourires de façade, de belles manières et des attitudes altières.
L'idée d'Émile Zola est manifestement, après la joute en direction de la classe ouvrière qu'était L'Assommoir, de rentrer dans le lard de la bourgeoisie, en peignant ces familles "dignes" qui se bouffent la rate, et en lui signifiant bien qu'elle ne vaut rien, absolument rien de mieux que le bas peuple, l'hypocrisie en plus.
On assiste donc à l'arrivée à Paris d'Octave Mouret (le frère de l'abbé Mouret du tome n°5), jeune loup aux dents longues, qui rêve de conquêtes, que ce soit de femmes ou de commerce ; il veut faire un magasin éblouissant qui rayonnera loin à la ronde et qui écrasera tout.
Celui-ci est donc introduit par l'architecte Campardon dans un immeuble bourgeois, typiquement haussmannien, qui se targue d'une très haute respectabilité et d'une morale impeccable.
L'auteur utilise admirablement le contraste naturel, technique presque, entre l'escalier principal, grand, beau, majestueux, grandiloquent, illuminé, orné d'un tapis rouge, destiné à être vu et montré, et l'autre escalier, l'escalier de service, dissimulé aux regards, celui qu'on veut absolument cacher, étroit, ténébreux, crépusculaire et où pourtant circulent et se passent beaucoup de choses, pour ne pas dire, les principales.
Tout au long du roman, Zola s'applique à descendre en flèche chacun des locataires de chaque étage, de la loge du concierge jusqu'aux chambres de bonnes, sans oublier les propriétaires. Tout le monde y passe, à tour de rôle, à l'exception notoire d'un foyer, siège énigmatique de la famille d'un écrivain qui passe son temps à calomnier la bourgeoisie...
Tiens, tiens..., mais qui cela pourrait-il bien être ? Aucune idée !
Bah oui, il ne pouvait pas trop faire autrement notre Zozo qui accuse, que de se ménager une petite porte de sortie car il crache un peu dans la soupe, lui qui, à cette époque-là, s'était mis à vivre exactement comme les bourgeois sur lesquels il tirait à boulets rouges.
Ce genre de dissonances mises à part (il en était de même pour Hugo), l'écrivain signe un livre féroce, impitoyable à l'égard de l'absence de moralité de cette classe, dont la réalité exsude par la bouche des domestiques, qui vident le fiel côté cour, par la fenêtre des cuisines, non loin de l'escalier de service.
On est lubrique, adultère, cupide, calculateur, mesquin, hypocrite, menteur, faux-dévot, insensible, inconséquent, etc., etc., etc.
Pas besoin de vous faire un plus ample dessin, vous avez bien compris qu'elle sent le gâté cette pot-bouille, mais qu'elle vaut le détour. Ceci dit, ce n'est là que mon avis, c'est-à-dire, bien peu de choses.
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Pot-bouille, l'équivalent de popotte, de tambouille, d'une mitonnée ordinaire et juste destinée à combler le manque de la faim. Est-ce à cette idée de médiocrité que Zola assimile la vie ordinaire de cet immeuble plutôt cossu, où débarque le jeune Octave Mouret, arrivant tout droit de Plassans, plein d'ambitions, d'idées et de volonté de se faire un nom?

C'est avec naïveté que le jeune homme tente sa chance auprès des jeunes demoiselles, voire des femmes mariées pour assouvir des désirs naturels, assortis d'un attrait pour la réussite sociale. Il faut dire qu'il s'en passe de belles, dans l'immeuble, malgré la vigilance aigrie de Mr Gourd, le concierge garant de la moralité de ces messieurs-dames.

Les cornes fleurissent sur tous les paliers et derrière les portes closes, les corps exultent en bafouant les serments prononcés lors des noces.

Parlons-en des noces : la recherche de l'époux pour les jeunes filles plus ou moins gracieuses et plus ou moins fortunées est une occupation à plein temps pour les mères en quête du gendre idéal, quitte à dépenser des fortunes qu'elles n'ont pas pour parer des atours masquant les disgrâces les jeunes filles en mal de maris. Promesses et trahison, pièges à gogo, tous les stratagèmes sont permis.

L'empereur n'a plus la cote, les électeurs sont prêts à lui donner une leçon. Ambiance de fin de règne

Zola n'est pas tendre pour ce milieu bourgeois, arriviste, et bas de plafond. Aucun personnage n'est paré d'une quelconque aura spirituelle, même les prêtres sont prêts à accepter la compromission. Les hommes sont dominés par leurs instincts de conquête féminine et les femmes ne songent qu'à s'orner de parures clinquantes.

Pas de fin dramatique comme dans la plupart des opus, mais l'on pressent que ce tome n'est le le préquel du récit consacré à l'ascension du jeune Mouret, dans Au bonheur des dames.
Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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10e livre des Rougon, avant " Au bonheur des dames", mon préféré.
Octave Mouret monte de Plassans à Paris. Il est accueilli par Achille Campardon, qui le connaît de Plassans. Celui-ci lui trouve un logement au 4è étage de son immeuble, rue Choiseul.
On fait la connaissance de la terrible Mme Josserand, qui veut absolument se débarraser de ses filles, Javotte et Anastasie.. Non, Hortense et Berthe. Lors d'un thé chez Clotilde Duveyrier, la fille du propriétaire, le vieux Vabre que tout le monde imagine riche, elle pousse Berthe dans les bras d'Auguste, le fils du propriétaire, afin de la "placer" etde les marier, mais il faut payer la dot de 50.000 francs qu'ils n'ont pas. Elle harcèle son frère, Narcisse Bachelard, vieux négociant ivrogne, qui les lui a promis.
.
C'est un roman réaliste, non complexe, mais compliqué, car il faut faire un arbre généalogique de l'immeuble. Il s'agit d'un immeuble bourgeois avec commerçants et magistrats ; Emile Zola se propose ici de faire l'analyse des bourgeois parisiens. Cela se passe au Second Empire, et c'est de la sociologie mise en pratique. En effet, je me demandais, presque jusqu'à la fin qui était Pot-Bouille ? Ce n'était pas la bonne question. La bonne question, c'est : que veut dire l'expression "pot-bouille" ?
Faire pot-bouille avec quelqu'un, c'est se mettre en ménage avec cette personne ; Pot-Bouille, c'est la vie pas possible de tous les habitants de l'immeuble !
Un immeuble bourgeois, qui vit avec dignité, honnêteté, honneur, tact, et des principes moraux.
Mais un immeuble, je reprends les expressions des habitants au fil des pages, plein de saletés, affaires, tourments, où l'on cache le mot de "maîtresse", cochonneries, "ça" (pour le sexe), salopes, vilains, coups de plumeaux, saletés, dégoûts, bêtises, adultères, bons moments, explications...
Bref, ce qu'on appelle aujourd'hui les prises de têtes, les scènes de ménage.
L'hypocrisie bourgeoise prend ici "son paquet" par Emile Zola.
Les bourgeois c'est comme les cochons
Plus ça devient vieux plus ça devient bête
Les bourgeois c'est comme les cochons
… Plus ça devient vieux plus ça devient c...
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Présentation de quelques personnages.
Octave, du 4è étage, notre "héros", est le Casanova de ces dames qui s'ennuient, ou en pleurs. C'est un calicot.
Marie Pichon, du 4è, douce et passive, dont le mari Jules rentre à pas d'heures, tombe dans les bras de qui vous savez.
Mme Eleonore Josserand, du 3è étage, est une maîtresse femme qui crie tout le temps.
Mr Jusserand, employé dominé par sa femme, en crève de détresse.
le fils Léon Jusserand, parti, de caractère rogue, cherche à se faire placer par mme veuve Dambreville.
le fils fou Saturnin, protège Berthe. Tout le monde en a peur sauf elle.
"Sitarane larivé avec grand couteau dans la main,
mi koné Sitarane lé mauvé li lé volèr mauvais kèr"
La fille Hortense plane sur Verdier qui ne lâche pas sa maîtresse.
Enfin Berthe, docile, obéit à sa maman, et devient auprès de son mari Auguste une deuxième Eléonore, reprenant les même arguments qu'elle.
Enfin, dans la famille Josserand, je voudrais l'oncle, Narcisse Bachelard, qui vit à l'extérieur. C'est un sympathique commerçant au nez rouge, qui aurait pu être joué par Galabru en son temps.
La douce Mme Juzeur, du 3è étage aussi, a été plantée là par son mari après une semaine de mariage. C'est "madame Tout-mais-pas-ça".
Au 3è, le couple Campardon, lui architecte, et Rose mélancolique, et leur fille Angèle. Mais il est amoureux de sa cousine Gasparine qui, on dirait perverse narcissique au XXIè siècle, avaleuse de pied de riz à La Réunion, le bouffe entièrement,
Au premier étage, il y a un monsieur inconnu, un "duc".
Il y a aussi la famille Duveyrier, lui magistrat, qui se fait bouffer par sa maîtresse Clarisse qu'il a dans la peau, lui impose sa famille souillon, puis le jette, pour son plus grand bonheur car il en aurait crevé, car elle a trouvé un nouveau vieux riche.Sa femme Clotilde, fille Vabre, pianiste, obsédée de trouver des ténors pour jouer son morceau lors des thés qu'elle propose. Il y a aussi leur fils Gustave, et le vieux Vabre, propriétaire.
Lorsqu'il meurt, tous se déchirent pour un héritage presqu'inexistant.
Je dis, argent, trop cher
Trop grand
La vie n'a pas de prix
Argent, trop cher
Trop grand
La vie n'a pas de prix, pas de prix
Au premier, il y a aussi Auguste Vabre, éternel enrhumé, qui tient le magasin de tissus au rez-de-chaussée, ave sa femme Berthe qui elle, ne pense qu'à soutirer de l'argent à son mari pour faire les boutiques.
Enfin, le dernier enfant Vabre, Théophile, malade chronique aussi, excité et jaloux, vit avec sa femme Valérie aux yeux de feu, avec qui notre play-boy s'est pris un rateau.
Il y a aussi le couple Gourd, concierges, lui grognon moralisateur, mais ce qui se passe dans l'immeuble,
tout-à-fait (Thierry) ! cela ne nous regarde pas ! cela ne nous regarde pas !
Enfin, il y a toutes les bonnes qui se jettent des injures dans la cour des cuisines, et commèrent des la-dit-la-fait ( ladilafé) sur leurs bourgeois et leurs bourgeoises, mais les bonnes, je ne vous en parle même pas !

Bref, une très belle mise en scène de Zola ! je me suis régalé, mais j'ai mis du temps car il fallait que je fabrique et consulte mon arbre généalogique de l'immeuble Pot-Bouille !
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Sur cette couverture, je pense qu'on voit Berthe en chemise, éperdue, sortant de chez Octave Mouret, alors que son mari Auguste ayant découvert le cocufiage, gifle l'amant.
Ma couverture ( le livre de poche, 1957 ) représente un couple. Il pourrait s'agir de Mr Josserand qui essaye de calmer Eléonore, sa femme, qui lui jette un regard noir. Mais si elle fait les yeux doux ( on a du mal à percevoir comment elle le regarde), cela peut être Octave Mouret qui console Marie Pichon... Il y a tellement de situations qu'on peut tout imaginer !


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"Pot-Bouille" est le dixième volet des Rougon-Macquart, histoire naturelle et sociale d'une famille sous le Second Empire. On suit l'ascension d'Octave Mouret, fils des cousins et époux François Mouret et Marthe Rougon, petit-fils des frère et soeur Pierre Rougon et Ursule Macquart, de son arrivée à Paris à son mariage. Ce livre est le prélude du onzième tome, "Au bonheur des dames" (mon préféré pour le moment), dans lequel Octave Mouret nous emmène dans le monde des grands magasins.

Le titre "Pot-Bouille" a été choisi pour définir ce que Zola appelle le "pot-au-feu bourgeois", sorte de tambouille dans laquelle "mijotent toutes les pourritures de la famille et tous les relâchements de la morale". Inutile de préciser que c'était parfaitement bien trouvé et que ce livre porte son titre à merveille, il résume à lui seul toute l'histoire.

Les événements se déroulent à Paris, essentiellement dans un immeuble bourgeois de la rue de Choiseul. Par le biais d'Octave Mouret, qui cherche une maîtresse pour s'élever socialement, Zola dépeint tout au long de son récit la vie bourgeoise et tous ses travers. Il en va des rapports entre voisins, entre les hommes et les femmes, entre les membres d'une même famille, mais aussi avec la domesticité. On suit toute une flopée de personnages à la moralité, au savoir-vivre et au raffinement irréprochables, mais d'apparence seulement : égoïsme, arrogance, faux-semblants, mensonges, cocufiages, cancans, rancunes et hypocrisies révèlent la personnalité de tous (ou presque) les protagonistes. Zola n'y va pas de main morte avec eux, il frappe fort, exagère sans doute un peu : chacun des personnages (ou presque) est abject, plein de préjugés, méchant, aveugle (idiot ?), magouilleur, mesquin. Les femmes, particulièrement, en prennent pour leur grade.

Avec inhabituellement très peu de descriptions, Zola se concentre davantage sur ses personnages et leurs actes, me donnant l'impression d'avoir tourné les pages plus rapidement que d'habitude. Les chapitres relativement courts rendent également la lecture plus dynamique. le style de l'auteur est toujours aussi agréable, facile et (exagérément) réaliste.

Après un début laborieux (avec ces grosses chaleurs, accumulées avec plusieurs nuits sans sommeil, je n'arrivais pas à m'y mettre pour de bon), et après finalement une sieste de plusieurs heures, j'ai repris ma lecture depuis le début et ai quasiment tout lu d'une traite. C'était cruel, humainement décevant et affligeant, mais passionnant et percutant.

Un roman transcendant (tel que Zola m'a habituée) avec un finale tout en douceur, ni trop tragique, ni catastrophique (tel que Zola m'a peu habituée).
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Ah Zola !!! Quel plaisir chaque fois renouvelé lorsqu'on ouvre l'une de ses oeuvres... Ici ne fait vraiment pas exception. Nous suivons un Mouret cette fois, Octave, plus précisément. Parti de sa campagne, il débarque à Paris, dans le but avoué de la conquérir. Il prends rapidement ses marques, mais l'ascension ne se fait pas assez rapidement. Sa solution : séduire, toujours, toute le temps et beaucoup... Mais ce ne sera pas sans heurts. Zola s'attaque encore une fois à la Haute, et n'est vraiment pas tendre... Mais c'est bien ce que l'on aime de lui... Sa plume incisive, vivante et piquante. Ses personnages aussi, qu'il sait très bien présenté et développé... Un vrai régal.
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Zola atteint des sommets de réalisme, cruel et cynique, sans jamais se montrer moralisateur ni se départir de son regard d'investigateur éclairé.

Avec les Rougon-Macquart, il précise avoir voulu décrire "la bousculade des ambitions et des appétits" et dans ce dixième épisode s'attaquer plus précisément aux "vanités imbéciles des petits appartements bourgeois".
De fait, il expose ici la chronique de la vie d'un immeuble bourgeois parisien, topographie d'un plaisir clandestin, avec des adultères sans passions à tous les étages. Nous assistons à une représentation de cirque, d'une ménagerie aux dessous nauséabonds mise à nue, ramassis abject de grotesques abrutis.
Oui... la pourriture est ici dévoilée avec une esthétique crudité : des mesquines intrigues pour des magots inexistants à la lubricité violente qui sévit contre les femmes. Tout cela en catimini, entre deux confessions à l'église, en gueulardise avant le buffet des hypocrites où chacun flattera ses flétrissures avec d'ineptes grimaces de complicité , comédie pour mieux briller en société.
"Quels gredins que les honnêtes gens !", s'exclamait Claude Lantier dans "Le Ventre de Paris". Ici, leur frénésie d'instincts débridés, leur avide fourberie enrobée d'inculture, leurs unions d'aliénations nous imposent ce constat : dans les cloaques bourgeois aux tapisseries brodées de soie, la névrose est reine.
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Aujourd'hui et les jours à venir, ce sont les portes ouvertes, rue de Choiseul, dans une belle maison bourgeoise, une maison tout à fait bien. Les ornements extérieurs, les rosaces et panneaux de faux marbre flattent l'oeil du visiteur. Les escaliers sont chauffés et leurs marches sont revêtues de tapis rouge, enfin seulement jusqu'au troisième étage car pour le quatrième et les chambres de bonnes du cinquième ce luxe n'est plus nécessaire, il ne se voit pas par les honnêtes gens qui, en principe, ne monte pas si haut.

Pour cette visite, Zola ne rentre pas du tout comme à son habitude dans le détail des lieux, il nous donne juste les indices nécessaires pour nous situer. Toutefois, avec son inimitable écriture si minutieuse, les quelques jolies phrases qui plantent le décor suffisent à nous ancrer dans les différents étages.
Ce sera donc une visite inhabituelle qui s'attachera plutôt à gratter le vernis de la petite bourgeoisie occupant ces lieux, sans oublier les domestiques à demeure. Un vernis bien fin qui s'écaille rapidement au moindre petit coup d'ongle.

Octave Mouret, sûrement trop fier et surtout trop ambitieux pour croupir en province, vient conquérir Paris et s'installe justement dans cette maison respectable où ne vivent que des gens honnêtes, ou presque…
Eau, gaz et moralité à tous les étages donc Octave ne doit pas y ramener de femme. Il se servira alors directement dans l'immeuble, papillonnant à droite, à gauche, en toute immoralité. Pour assouvir fortune ou plaisir, aucune ne doit lui résister mais ce ne sera pas sans peine car la gent féminine est loin d'être si docile sous la plume de Zola.

D'étage en étage, la visite se fera en fustigeant avec recherche et élégance tous les travers de ces gens se proclamant si convenables. Certains se permettent même de pointer leurs voisins en condamnant leur légèreté alors qu'ils vivent en ménage à trois ! Les portes s'ouvrent très souvent sur des adultères en tous genres, parfois risibles, parfois écoeurants.
Un appartement abrite une mégère que l'auteur ne pouvait pas nous rendre plus détestable. Et pourtant, pour monter encore plus haut dans la condamnation de toute cette petite bourgeoisie, Zola lui donne comme mari le seul résident qui montre une réelle honnêteté : cruelle ironie qui n'épargnera pas ce malheureux luttant contre un mépris démesuré.
L'attaque virulente de Zola atteindra les moindres recoins de cette belle maison de la rue de Choiseul. Côté cour intérieure, les fenêtres des cuisines laissent échapper les rires gras et les invectives de la domesticité, accompagnés des relents douteux de ces pièces mal tenues.

La couche de vernis est belle et clinquante. Elle n'est pas bien épaisse mais Zola la décape pourtant avec une sacrée dose d'acide ! Il vaut mieux bien refermer les portes à la fin de la visite pour éviter que toute cette respectabilité ne s'échappe, elle est si volatile.
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Pot-Bouille traine dans ma PAL depuis bien trop longtemps et je suis contente de l'en avoir sorti grâce à cette lecture commune organisée sur Livraddict par Mypianocanta.

Quel plaisir de retrouver Zola et sa plume si particulière, ses descriptions qui vous font revivre toute une époque. Il dresse ici le portrait d'une maison bourgeoise qui se veut respectable au premier abord. On y découvre les différentes familles qui y vivent et on pénètre dans leur intimité. Leurs petits secrets sont révélés et l'hypocrisie bourgeoise trône en grande place. C'est un portrait sans concession, parfois cruel et l'auteur ne mâche pas ses mots puisque tout y passe : mariage arrangé, problème financier, adultère….

Personnages très intéressants, surtout dans l'opposition bourgeois et domesticité. C'est un peu comme dans un épisode de Downtown abbey mais en bien plus cru. Les domestiques ne mâchent pas leurs mots et ne se font aucun cadeau.

Un Zola très moderne, avec des scènes de sexe que j'ai trouvé osé pour l'époque. J'ai aussi été impressionné par la scène de l'accouchement qui est incroyablement bien décrit venant de la plume d'un homme. Pourtant, on sent que le point de vue d'un homme de son temps quand a la description générale des femmes qui semblent toutes futiles et faibles.

Une petite déception en ce qui concerne la fin. J'attendais un événement, un retournement de situation et finalement tout ça retombe un peu comme un soufflé.
Lien : https://missmolko1.blogspot...
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Féroce ! C'est le mot qui me vient à l'esprit dès les premiers chapitres du livre. le roman aborde des thèmes qui sont « dans l'air du temps », mais on sent tout de suite que Zola n'a aucune sympathie pour ses personnages, et qu'il va tirer à boulets rouges sur ce microcosme que constitue l'immeuble de la rue de Choiseul, dans lequel l'intrigue se situe tout entière.
Nous voici chez les Josserand : un couple dont le principal souci est de trouver des maris pour ses deux filles. Cela vous rappelle peut-être un autre roman ? Oui, « Orgueil et préjugés », de Jane Austen ! Mais la similitude s'arrête bien vite : le ton du roman anglais est plutôt léger et élégant, éclairé par l'humour de Mr. Benett. Ici, rien de tel, Mme Josserand est obsédée par le besoin de trouver des mariages avantageux, de faire cracher la dot par son frère, alors que son mari, complètement dépassé, en est réduit à passer ses nuits à copier des adresses pour combler les besoins du ménage qui vit au-dessus de ses moyens. Elle a clamé au début du livre sa doctrine :
« Dans la vie, il n'y a que les plus honteux qui perdent. L'argent est l'argent : quand on n'en a pas, le plus court est de se coucher. Moi, lorsque j'ai eu vingt sous, j'ai toujours dit que j'en avais quarante ; car toute la sagesse est là, il vaut mieux faire envie que pitié… On a beau avoir reçu de l'instruction, si l'on n'est pas bien mis, les gens vous méprisent. Ce n'est pas juste, mais c'est ainsi… Je porterais plutôt des jupons sales qu'une robe d'indienne. Mangez des pommes de terre, mais ayez un poulet, quand vous avez du monde à dîner… Et ceux qui disent le contraire sont des imbéciles ! »
Et elle a si bien inculqué cette doctrine à sa famille, que sa fille Berthe, mal mariée à Auguste, reprend la même formulation mot pour mot.
Et puis le principal personnage, Octave Mouret, qui est-il ? le frère de l'abbé Mouret, que nous avons suivi cinq volumes plus tôt, dans son délire mystique … mais Octave n'a rien d'un religieux, il est terrestre et charnel. Son projet ? Venir de Plassans à Paris pour faire fortune, en utilisant les femmes. Voilà qui rappelle un autre héros romantique, un certain Julien Sorel … mais Octave est bien loin de tenir la comparaison. C'est un séducteur besogneux, qui échoue dans ses premières tentatives, et doit se contenter de la conquête peu glorieuse de la douce et insignifiante Marie, sa voisine. Il vise ensuite un peu plus haut avec la femme de son patron, Berthe. Mais il y a peu de sentiment dans tout cela, et lorsque Octave arrive à « conclure » avec chacune de ses maîtresses, il se soucie bien peu de savoir si la dame est vraiment consentante…
L'immeuble de la rue de Choiseul symbolise la vision de Zola sur la société bourgeoise de son temps. Il y a l'escalier principal, là où résident le propriétaire et les familles importantes, avec tapis rouge et portes d'acajou… jusqu'au troisième étage ; après, on reste dans la bourgeoisie, mais à un niveau inférieur, et le tapis est « une simple toile grise ». Puis, il y a l'escalier de service, celui des bonnes et des domestiques, celui dans lequel se glissent les messieurs bourgeois en quête d'aventures. C'est l'accès au « monde du dessous », là où les serviteurs mettent à nu la vulgarité et la rapacité de leurs maîtres dans des conversations sans pitié. Monsieur Gourd, le concierge, règne en petit chef sur l'immeuble, et veille à entretenir par-dessus tout l'image du bon ordre bourgeois, quitte à martyriser les plus faibles.

Dans les volumes précédents des Rougon-Macquart, j'ai souvent évoqué, pour caractériser la manière dont Zola décrit les lieux et les ambiances, les tableaux des impressionnistes : Manet, Renoir, Degas … Mais ici, les descriptions évoquent bien plus les rudes caricaturistes que furent Daumier ou Gavarni. le trait est simple et direct, les personnages sont sans nuances, et tous plutôt antipathiques.
A la fin du volume, alors que la bonne Adèle se remet à grand'peine de son accouchement clandestin, Octave semble être parvenu à ses fins en ayant enfin épousé Madame Hédouin, la patronne du magasin « Au bonheur des dames ». Et la domestique Julie conclut sur un constat : « …Celle-ci ou celle-là, toutes les baraques se ressemblent. Au jour d'aujourd'hui, qui a fait l'une a fait l'autre. C'est cochon et compagnie. »
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Pot-Bouille est le second volume de Zola consacré aux Rougon-Macquart.
L ' auteur a visité les pauvres où chez-eux tout est visible car ils n ' ont rien à
cacher et vivent sans avoir quoi que soit à cacher. IL est allé chez les bourgeois
et là le décors est autre car dans ce milieu, il y a le côté cour et le côté jardin et
selon les circonstances on vous présente un visage: selon Zola, ce milieu baigne
dans l 'hypocrisie la plus abjecte.La société bourgeoise prétend représenter les
valeurs humaines et sociales telles que ; l' honneur, la morale, la famille etc....
c' est-à-dire qu' ils se présentent comme les tuteurs de la société ou les gardiens
du temple! Faux, leur répond, Zola, vous êtres le mensonge de tout cela. Votre
pot-bouille est la marmite où mijotent toutes les pourritures de la famille .
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