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La voleuse de livres", roman à succès qui a reçu de nombreuses récompenses, avoisine presque les 10000 lecteurs sur Babelio et 5000 sur Booknode, lui attribuant à ce jour une moyenne de 4,28/5 pour les premiers et 8,74/10 pour les seconds. le genre de livres donc dont j'attends beaucoup ! Trouvé dans une boîte à livres il y a déjà plusieurs mois, il attendait patiemment que je l'ouvre enfin et ce sera encore une fois une lecture commune qui m'en donnera l'occasion. En ce mois de novembre, sur le thème de la mort, quoi de mieux qu'un livre dont la narratrice est la Mort elle-même ? Me voilà donc à découvrir un livre que j'avais envie de lire depuis très longtemps. Et ce fut une lecture captivante, qui m'amène à me poser la question : pourquoi ne l'ai-je pas lu plus tôt ?
Comme je viens de le dire, la narratrice n'est autre que la Mort. En cette période 1939 à 1945, dans une Allemagne nazie, autant dire que ce n'est pas le travail qui lui manque. Pourtant, une petite fille, qu'elle croisera par trois fois durant son labeur, marquera son "existence" d'une façon inhabituelle. C'est parce qu'elle a son livre en sa possession, dont on ne saura qu'à la fin comment elle a pu se le procurer, qu'elle se permet de nous raconter l'histoire de cette fillette, Liesel, qui a mis en mots les différentes épreuves par lesquelles elle est passée. Tout commence dans un train qui les mène, elle et son frère, à Molching, près de Munich, vers leurs parents nourriciers. À partir de là, bien des événements la marqueront à jamais. Elle aura faim, elle apprendra à voler (et pas que de la nourriture comme le titre l'indique), elle cachera un juif dans son sous-sol, elle connaîtra l'amitié grâce à Rudy et l'amour grâce à ses parents adoptifs, elle grandira au rythme des bombardements, elle perdra des êtres chers. Elle apprendra aussi le pouvoir des mots, grâce aux livres qui lui tomberont sous la main.
Un peu perturbée au départ par le style de narration et la mise en forme, j'ai eu tôt fait de m'y habituer, au point d'avoir été totalement immergée dans le récit. Si j'ai lu les 100 premières pages tout tranquillement, j'ai lu en revanche les 550 autres d'une seule traite. Plus possible de m'arrêter, comme si j'avais été soudainement harponnée sans pouvoir me libérer jusqu'à ce que j'atteigne la fin.
Un livre intense dans tous les domaines : intense dans les événements, intense dans les émotions, intense dans les ressentis de Liesel, sans parler du contexte historique bien implanté (guerre, bombardements, nazisme, antisémitisme, hitlérisme, rationnement, pauvreté, etc). Au coeur d'une période tragique, la Mort, qui ramasse des milliers et des milliers d'âmes au quotidien, n'en a pas moins un caractère humain, et c'est ce qui rend l'histoire de Liesel encore plus poignante et intense.
Il y a pourtant peu de suspense. La Mort sait entretenir un minimum de mystère à son histoire, mais dans l'ensemble elle dévoile assez tôt certains faits à venir, elle nous donne un aperçu de ce qui nous attend. Comme un avertissement, elle nous permet de mieux nous y préparer. Et pourtant, j'ai eu de nombreuses fois la gorge serrée, et n'ai pu m'empêcher de verser quelques larmes à la fin, qui est bouleversante.
J'ai adoré la petite Liesel, qui tente tant bien que mal de se reconstruire dans ce chaos, qui n'arrive pas à surmonter ses cauchemars, qui vit dans la peur pour son ami Max, qui trouve refuge dans ses livres. J'ai adoré Hans, son Papa adoptif, j'ai adoré l'imaginer jouer de son accordéon, consoler Liesel de ses cauchemars, lui apprendre à lire et à écrire. J'ai adoré son ami Rudy, partagé entre l'amitié et l'amour, qui apprend à Liesel le foot, le vol, la loyauté. J'ai appris à apprécier de plus en plus Rosa, sa Maman adoptive, qui sous ses apparences bourrues a un coeur en or. Et puis, il y a aussi Max, cet homme juif qui deviendra un ami cher à son coeur ; Ilsa, la femme du maire qui se laisse volontairement voler ses livres ; Frau Holtzapfel, voisine irascible à qui Liesel fait la lecture. Et bien d'autres encore, pas tous attachants évidemment, mais toujours intéressants, intrigants.
L'action se déroulant pendant la Seconde Guerre mondiale, l'un de mes sujets de prédilection, on ne peut que constater le contexte bien implanté et réaliste, grâce au travail de recherche de l'auteur. Les personnages, la Mort comprise, sont adroitement bien campés, aboutis, attachants, touchants. L'intrigue (et par conséquent l'histoire de Liesel) est rondement bien construite, prenante, désarmante, vibrante. La fin est bouleversante. Je ressors de cette lecture totalement séduite.
Un très beau livre, qui aborde de manière très réaliste des sujets durs, comme la guerre, le nazisme ou l'antisémitisme, tout en laissant une place importante à la dimension humaine, à la bienfaisance, à l'empathie, à la sensibilité.
Un joli coup de coeur.