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4,25

sur 3615 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Stefan Zweig, on le sait, est un des plus grands auteurs du XXème siècle, et sans aucun doute, de la littérature universelle. Son oeuvre littéraire toute entière fait de lui une « conscience » en même temps qu'un « phare ». La finesse de son observation sur la société de son temps est remarquable. Tout autant, et plus encore peut-être est celle qu'il fait de la nature humaine. A cet égard, « La confusion des sentiments » est un modèle d'analyse : l'auteur se livre à une exploration à la fois précise et pleine de compassion des tréfonds de l'âme humaine.
Le narrateur, Roland de D., au soir de sa vie, raconte un des épisodes les plus marquants de sa vie : la relation troublante qu'il a eue, au temps de ses études, avec un professeur de philologie. Les circonstances ont fait qu'à l'âge de 19 ans, il est hébergé chez ce professeur émérite, grand admirateur de Shakespeare, mari d'une jeune femme, jolie et aimable, mais délaissée. Un sentiment trouble lie les deux hommes. La description de cette relation constitue le corps de cette courte nouvelle d'une rare intelligence, d'une précision clinique quasi psychanalytique (Freud l'a saluée), et d'une immense connaissance de l'âme humaine, de ses zones de lumière et de ses zones d'ombre.
« La confusion des sentiments », le titre est on ne peut plus approprié. Car enfin, de quels sentiments s'agit-il ? L'ambiguïté règne à tous les niveaux : la relation entre Roland et le professeur est du type attirance/répulsion : attirance à cause de l'admiration « professionnelle » pour le travail du professeur (notamment à cause de Shakespeare) et répulsion, parce qu'il ne sait trop où il va (il s'agit quand même d'homosexualité, même si ce n'est pas ouvertement avoué). Cette ambiguïté amour/amitié, doublée par cette ambiguïté sur l'amour entre deux personnes du même sexe, est aggravée encore par la présence de la femme du professeur : on a tendance à se focaliser sur les deux hommes, mais la jeune femme n'est pas épargnée dans l'histoire, il lui faut même un sacré courage et une sacrée force d'âme pour supporter cette situation.
Ce sont des thèmes éternels, bien sûr : les adolescents que nous avons été (et que nous sommes encore pour certains d'entre nous) sont passés par ce stade amour/amitié. Les plus anciens d'entre vous se souviendront peut-être de cette magnifique chanson de Pierre Vassiliu « Amour-amitié » (1970) :
Amour, amitié,
Je ne sais pas si par dépit par pitié
Je franchirai cet océan
Qui va de l'ami à l'amant

Et à l'époque, il ne parlait pas d'homosexualité !

Au-delà de ces ambiguïtés multiples, c'est bien l'amour et ses méandres, ses non-dits, ses avancées et ses reculs, ses audaces et ses pudeurs, sa peur de choquer, celle de faire mal, et le regard, ce fichu regard, celui des autres, et le sien propre, et la morale, et la religion…
Stefan Zweig, nous raconte tout ça avec une délicatesse, une pudeur infinie. le sujet était pourtant scabreux pour l'époque (nous sommes en 1927). Mais il nous dit les choses sans les juger, le jugement émane tout seul de la situation, pour arriver à cette conclusion, qui est celle de tous les grands romans d'amour (et là, j'emprunte le titre d'une autre chanson de l'immense Gilles Vigneault) :

Qu'il est difficile d'aimer
Qu'il est difficile !
Qu'il est difficile d'aimer
Qu'il est difficile !

Peut-être la meilleure oeuvre de Stéfan Zweig, juste devant « Vingt-quatre heures de la vie d'une femme », « Lettre à une inconnue » et « le joueur d'échecs »


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Quelle écriture, quelle sensibilité. le sujet ne m'attirait pas vraiment et j'ai entrepris cette lecture un peu par hasard après avoir lu "le joueur d'échec". J'avais apprécié ce dernier mais "la confusion des sentiments" est encore plus beau. Un véritable travail d'orfèvrerie où chaque mot participe d'un ensemble délicat et puissant à la fois, et où l'homosexualité est traitée avec beaucoup de pudeur et de délicatesse.
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Les visages, les décors, les dialogues de Zweig, servis par une langue riche, mais néanmoins rythmée et souple, dessinent une intrigue claire où les sentiments se révèlent peu à peu.
En relisant ce roman, j'ai pensé aux tableaux de Georges de la Tour : la source lumineuse est souvent dissimulée, mais dévoile des lignes franches, très nettes, très détaillées. La différence essentielle est que, dans "La Confusion des Sentiments", Stefan Zweig nous propose, à la fin, de changer de point de vue par rapport au tableau, comme si on pouvait entrer dedans et nous placer de façon à voir directement la source de la lumière. Les ombres précédemment exposées prennent alors un tout autre sens. Et paraissent d'autant plus admirablement dépeintes.
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Un roman intemporel : un jeune étudiant, Roland, est tenté de profiter de cette liberté nouvelle qui s'offre à lui à Berlin : les filles, les bars, les copains, ... jusqu'à ce que son père lui pose une question toute simple "que restera-t-il de cette période?"
Une prise de conscience brutale le pousse à s'inscrire dans une université d'une petite ville où il rencontre un professeur de littérature anglaise charismatique. Cet homme le fascine car il transmet sa passion pour Shakespeare d'une manière brillante et suscite l'envie d'apprendre.
Confusion des sentiments? Oui car à côté des cours enflammés existe aussi une part plus sombre, plus triste et renfermée du professeur. Pourquoi ce côté terne? Pourquoi ce silence avec sa femme?
Une très belle lecture
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Roland, professeur de philologie, se voit offrir par ses élèves et collègues un ouvrage réunissant ses écrits pour ses soixante ans. En feuilletant les pages, il s'aperçoit que tout y est sauf l'essentiel. Il se remémore alors sa rencontre avec celui qui a changé son existence à tout jamais, lui a donné le goût de la littérature. Il raconte sa relation ambiguë et passionnée avec son professeur dans une université de province alors qu'il était un jeune étudiant frivole sans la moindre appétence pour les études. le Maître le fait entrer dans son antre et dans son intimité. le professeur, reconnu de tous comme émérite, est pourtant mis au ban par la petite société. Il a pour toute compagnie sa femme avec laquelle il a une relation étrange ; dans ce foyer, l'atmosphère y est pesante et Roland perçoit que le couple, mal assorti, est lié par un secret qu'il ne parvient à déceler. le Maître a des réactions étranges et soudaines qui font terriblement souffrir Roland qui confie son désarroi à sa femme qui semble le comprendre, le console ou le réprimande. Il ne parvient à s'expliquer les absences mystérieuses de son mentor ainsi que ses sautes d'humeur incompréhensibles. Malgré les signaux de la femme de son professeur, Roland demeure naïf et ne peut pas (ou ne veut pas) voir. le titre : La confusion des sentiments résume parfaitement l'épilogue et la sensation de Roland, tiraillé entre son âme et sa chair. Cette rencontre était avant tout celle de deux âmes.
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Encore et toujours sous le charme de cet homme... Chaque lecture de Zweig m'amène quasi en état de grâce... J'admire sa capacité à nous livrer, en si peu de pages, une oeuvre puissante, de par les mots et le propos. Ces phrases qui sonnent toujours justes, qui coulent, facilement, tendres et dures... Des personnages magnifiquement construits, avec une psychologie déployée, assumée... Chaque fois, c'est un voyage, dans lequel je me sens moi et bien, dont je me lasse jamais.
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S.Sweig, tant recommandé, tant encensé...je me suis dis "allons voir!"....alors oui! je dis oui! c'est une magnifique plume! c'est une description si délicate des sentiments, si belle et touchante, que je ne peux que confirmer et recommander à mon tour cet auteur !
Je ne résume jamais l'oeuvre dans mes critiques, la quatrième de couverture est faite pour cela, gardons intact la découverte des personnages , l'intrigue, laissons nous porter page après page...Mr Sweig nous embarque , nous pousse à l'empathie tant il est juste dans la description du mal-être que l'Homme peut vivre parfois rejeté et incompris des autres.
Il initie une certaine ouverture d'esprit chez le lecteur disposé à garder le souvenir de ce roman dans un coin de sa tête ....
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J'ai reçu gratuitement ce petit livre à l'achat de deux autres "livres de poche", mais si c'était à refaire, je n'hésiterais pas à acheter "La Confusion des sentiments" et avec lui, d'autres ouvrages de Stefan Zweig.
J'avais déjà adoré "Le Joueur d'échec", mais cette histoire vient confirmer mon goût pour l'auteur autrichien. Stefan Zweig excelle dans le genre de la nouvelle et a fait mon bonheur le temps d'un après-midi avec l'histoire de Roland et de son maître.

C'est à mes yeux une des plus belles histoires d'amour qu'il m'ait été donné de lire. La tension entre les deux personnages principaux était palpable, matérielle, et pourtant le tout était raconté de façon très pudique.
Cette nouvelle a du faire un tel scandale à l'époque de sa parution!
On évoque souvent de l'homosexualité masculine dans un roman tel que "Le portrait de Dorian Gray", mais elle est beaucoup trop implicite à mes yeux que pour avoir choqué les moeurs de l'époque. Dans "La Confusion des sentiments", rien que le titre ne laisse aucun doute sur le lien qui unit les deux hommes...
Je n'en suis pas à mon premier récit homosexuel, mais celui-ci m'a charmée par sa justesse, sa subtilité. Cinq étoiles, sans hésiter.
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Stefan ZWEIG explore les sentiments et les tourments de l'âme dans un style d'une puissance subtile. C'est magnifique.
*
Le professeur Roland de D, aujourd'hui âgé de soixante ans, reçoit un cadeau de la part de ses étudiants et collègues ; recueil biographique de trente années d'enseignement universitaire.

« Ce livre ignore tout du plus intime secret de mon éveil à la vie intellectuelle : c'est pourquoi il m'a fait sourire. Tout y est vrai – il n'y manque que l'essentiel. Il se contente de me décrire, sans rien dire à mon sujet. Il se contente de parler de moi, sans me révéler ».

Le professeur raconte alors les souvenirs de sa rencontre, lorsqu'il était encore étudiant, avec un professeur qui devint rapidement son maître.
Un mentor qui exerce une véritable fascination sur son élève.
Roland lui voue une formidable admiration, une vénération, mêlant frénésie intellectuelle et passion aveuglante. Un enthousiasme en pleine fougue de la jeunesse.
Ce professeur agit sur lui comme une révélation pour l'esprit.
Une influence d'une effervescence tumultueuse.

Analyse des sentiments qui emplissent ou vident de toute substance.
La lisière d'un crépuscule. Silence et savoir. Précieux instants. La connaissance.
Richesse du savoir nourricier.
Ivresse et extase de l'esprit formaient une osmose intellectuelle enivrante et exaltante.
Troubles de la passion ardente et inavouée, désir, pudeur, et fulgurance émotionnelle.

Secrets subtilement devinés dans les non-dits.
« Car un secret, j'en avais conscience de plus en plus vivement, un secret étrange et inquiétant était tapi dans l'abîme envoûtant de son être ».

Une plongée dans les pensées intimes profondes et confuses.
La force et les mystères des sentiments. Une musicalité du sentiment.
*
De nouveau charmée par la plume excellente et sensible de Stefan ZWEIG.
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Deuxième ouvrage de cet auteur pour moi, et deuxième claque.
Ici , un professeur partant à la retraite reçoit des mains de ses collègues et de ses élèves une biographie relatant son parcours professionnel. Cela ramène le narrateur au déclenchement de cette carrière.Sa rencontre à 19 ans avec un autre professeur.

Comme lors du précédent ouvrage , la langue est magnifique et l'adjectif si bien adapté au récit qu'on a l'impression qu'il obscurcit la pièce ou l'éclaire suivant les états d'âme des protagonistes.
Là où l'on tire au génie, c'est que ce n'est pas juste du style mais que cette aisance d'écriture se trouve au service d'une histoire bouleversante dont certaines composantes pointent assez vite mais dont d'autres sont des surprises magistralement orchestrées.
Ce roman est fondé sur la relation de deux hommes , élève et enseignant.
L'auteur nous relate cette relation du côté de l'élève sur quasi tout l'ouvrage et décrit remarquablement , encore une fois avec une langue précise et optimisée, l'indécision de ses sentiments. A la lecture , on ressent ce que vivent les tripes face à un être aimé ou ici idolâtré : La perte de notion complète des repères spatiaux temporels, le dévouement, jusqu'à l'avilissement , le reniement de ses sources d'intérêts , la volonté de plaire à tout prix ...
La vision de la relation par l'enseignant achève en apothéose ce court roman , qui m'apparaît comme un véritable tour de force.
Merci de me l'avoir conseillé.
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