Ayant terminé avec succès ma relecture du génial Gokinjo, j'ai logiquement enchaîné avec une petite relecture de Paradise Kiss, spin-off de la saga qui reprend le même univers mais avec la soeur de Mikako, le fils de Risa et celui de Hiroyuki.
L'histoire de ce titre est assez particulière. Série 5 tomes à l'origine mais existant aussi sous forme d'un volume unique chez nous, dont on aimerait bien une réimpression au passage, la série est sortie au Japon non pas dans un magazine de prépublication comme d'habitude mais dans un magazine de mode, le Zipper, entre 2000 et 2003. Il est arrivé ensuite très rapidement chez nous, en 2004, alors que le tome 1 de Gokinjo venait tout juste de sortir lui aussi un mois plus tôt. J'ai donc en fait, à l'époque, découvert les deux titres en parallèle ^^!
Ainsi, comme Gokinjo la série est forcément très orientée mode, peut-être même encore plus, ce qui n'est pas pour me déplaire. La parution dans le Zipper a d'autres incidence du côté de la narration avec des chapitres un peu plus décousus les uns par rapport aux autres au début, plus courts aussi, un air plus mature et surtout un format plus grand, inhabituel chez l'autrice, mais parfait pour admirer ses superbes dessins. D'ailleurs, je préfère largement la première édition de Kana pour cela à l'intégrale version pavé sortie ensuite... Dans la première édition, on a des couvertures qui font gravure de mode et chaque tome s'ouvre sur une des créations de George sur son mannequin (l'objet) avec un papier calque du meilleur effet. J'adore !
Mais venons-en à l'histoire. Celle-ci se passe donc longtemps après la fin de Gokinjo, on y retrouve la petite soeur de Mikako, Miwako, qui va désormais elle aussi à Yaz'Art, l'école de mode où a été sa soeur. Mais ce n'est pas elle l'héroïne, c'est Yukari, aka Caroline, une lycéenne banale qui tente de passer les concours des grandes universités pour assurer son avenir. Elle n'a rien à voir avec la mode mais le hasard va changer les choses quand Arashi (fils de Risa) va tomber sur elle et même flasher sur elle, voyant en elle, le mannequin parfait pour leur défilé de fin d'année. Le styliste de ce défilé, c'est l'excentrique George, un gentleman aux cheveux bleus complètement farfelu. La vie de Yukari va prendre un tournant à 180°.
Au début, j'ai eu du mal à m'habituer au changement de ton de Paradise Kiss par rapport à son aîné. Celle-ci était plus farfelue, plus décousue, mais sa maturité m'a convaincue au fur et à mesure. J'ai beaucoup aimé la présence bien plus importante que dans la première série de la mode et de la création artistique. L'autrice fait un excellent choix en situant son histoire dans le même cadre mais en n'en faisant pas une copie. Elle choisit un angle différent en se centrant sur le futur défilé de nos élèves et en choisissant des héros qui n'ont rien à avoir avec Gokinjo, les enfants et soeurs de la première série étant plutôt les personnages secondaires. Bref, elle fait du neuf avec du vieux et c'est très réussi.
Les personnages sont vraiment typés et donc accrocheurs. Yukari est l'exemple même de la jeune lycéenne japonaise typique mais elle cache une beauté froide et intemporelle que nos apprentis artistes vont révéler. C'est une jeune fille attachante car peu sûre d'elle. Elle ne sait pas encore ce qu'elle veut faire dans la vie. Elle est gentille et maladroite également aussi bien en amitié qu'en amour et ça la rend particulièrement touchante. George, lui, est aux antipodes. Il affiche une assurance à toute épreuve. C'est le styliste farfelu et racé par excellence. Il a aussi un côté très mystérieux. Il n'a aucune gêne à s'avouer bi ou à faire du rentre dedans à l'héroïne, mais le styliste est SA grande passion.
A côté d'eux, nous avons un quatuor de personnages tout aussi marquants et travaillés, et ce dès le premier tome. Miwako et Arashi, les rejetons de la première série, sont l'autre couple de l'histoire mais leur romance n'a rien de simple. L'autrice l'avait déjà esquissé à la fin de Gokinjo. Il y a en effet un triangle amoureux complexe autour de Miwako, cette jeune fille qui souffre depuis toujours de terribles angoisses. Arashi, derrière son look grunge, est adorable mais très possessif envers elle. Miwako lui cache pas mal de choses. C'est donc une relation potentiellement explosive. La cinquième roue du carrosse, c'est Hiroyuki, le fils de l'ancien patron du bar qu'ils ont transformé en atelier, lui aussi connait Miwako depuis toujours et a / a eu (?) des sentiments pour elle. C'est le beau gosse premier de la classe typique et on le découvre ici à travers le regard de Yukari avec qui il va au lycée. Reste Isabella, homme ou femme, on ne sait au début, mais iel impressionne par son look très excentrique mais superbe, on dirait le/la grand(e) frère/soeur de la troupe.
Il y a une excellente alchimie entre eux. Les camarades de Yaz'Art bossent dans un bel esprit de camaraderie sur les pièces de leur défilé et plus. En effet, ils ont déjà créé leur propre marque et en vise la vente dans des boutiques de mode. L'autrice glisse également beaucoup d'humour dans leurs échanges, des blagues parfois même en-dessous de la ceinture qui m'ont bien amusée, c'est super agréable. Ça crée un cocon plein de bonne entente comme dans Gokinjo. La seule différence, c'est qu'ici on sent aussi qu'il y a des turpitudes cachées en chacun et entre certains qui pourraient faire tout exploser à un moment donné.
L'arrivée de Yukari va bouleverser un peu l'équilibre du groupe. Miwako va tout de suite l'adopter et la rebaptiser (lol), ce qui lui fait enfin une amie proche fille, ce dont elle avait besoin. Quant à George, il semble pour le moment se plaire à la titiller, la tester et il y a des étincelles entre eux. Mais tout va un peu vite à mon goût, Yukari se précipitant un peu tellement elle tombe sous son charme mystérieux et ravageur.
Ravageurs, les dessins le sont également. L'autrice a encore gagné en profondeur et en finesse depuis Gokinjo qui avait bien 5 ans de plus. Le découpage des cases est vif et percutant, le rythme est d'emblée rapide même si l'autrice se réserve des petites poses humoristiques ou romantiques. Le design des looks des différents personnages est juste sublime aussi bien les pièces de modes que les looks plus casual. Je suis complètement sous le charme. Le trait d'Ai Yazawa est toujours aussi expressif et varié, notamment dans les visages des personnages. Ils font toujours autant grandes gigues mais c'est mieux proportionné que dans Gokinjo. J'ai juste du mal avec la tête de George, son cou est parfois bien trop épais et l'implantation de ses cheveux trop haute, ça me perturbe. Pour le reste, c'est sublime et l'édition de Kana est à la hauteur.
Un dernier mot sur celle-ci, dans ma première édition, il y a pas mal de coquilles, textes inversés dans les bulles ou entre les bulles et les pensées hors bulles des personnages, erreurs de noms, petites fautes d'orthographe. Pour que je les note, il faut vraiment que ça fasse tache, parce que souvent j'y suis insensible et je ne les vois pas ^^!
Avec un premier tome vraiment dynamique et percutant, Paradise Kiss offre une belle suite à Gokinjo, une suite qui propose vraiment quelque chose de plus avec ses personnages plus matures, ses propos plus diversifiés et sa mode bien plus présente sûrement grâce au choix du magazine de publication. Le grand format lui convient à merveille. On s'amuse énormément mais on ressent aussi de belles bouffées d'émotion et on sent que le drame et les questions existentielles ne sont jamais bien loin. J'ai hâte de relire également la suite !
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