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Citations de Antoine Choplin (343)


Les pensées de Gouri vagabondent, de moins en moins consistantes. Elles gravitent alentour de cette masse sans réalité qui renâcle à renvoyer la lumière. C'est quelque chose comme le sentiment de l'abandon. Qui recroqueville les bustes, replie les horizons.
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Comment dire. Au début, quand tu te promènes dans Pripiat, la seule chose que tu vois, c'est la ville morte. La ville fantôme. Les immeubles vides, les herbes qui poussent dans les fissures du béton. Toutes ces rues abandonnées. Au début, c'est ça qui te prend les tripes. Mais avec le temps, ce qui finit par te sauter en premier à la figure, ce serait plutôt cette sorte de jus qui suinte partout, comme quelque chose qui palpiterait encore. Quelque chose de bien vivant et c'est ça qui te colle la trouille. ça, c'est une vrai poisse, un truc qui t'attrape partout. Et d'abord là-dedans.
De son pouce, il tapote plusieurs fois son crâne.
Je sais de quoi je parle.
Gouri pose sa joue sur son poing fermé.
Moi, poursuit kouzma, des fois, je pense au diable et je me dis tiens, si ça se trouve, il a installé ses quartiers dans le coin et il est là, à bricoler. Il profite de l'aubaine pour se fabriquer un monde à lui. A son image. Un monde qui se foutrait pas mal des hommes. Et qu'aurait surtout pas besoin d'eux. ça colle le vertige, ça, quand on y pense. Un monde qui continue sans nous. Hein.
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« C’est une drôle de chose les musées. En fait, une sorte de trahison. Quand on pense à toutes ces œuvres façonnées dans la solitude, souvent créées dans le dénuement, sans souci les unes des autres, et qu’on retrouve là, les unes à côté des autres, accrochées dans ces salons d’apparat à haut plafond, au parquet bien lustré, les musées, ce devrait être les ateliers d’artistes, avec leur vraie lumière, avec les chiffons salis et les odeurs de vernis. Alors là. » (p. 53)
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Mais il y a la peur, aussi.
Qui le fige...
Il envisage sa lâcheté.
Les horizons se replient encore un peu plus.
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A qui s'approche de lui, il ne tarde jamais à parler de cette femme qu'il a connue un soir de 1909 et avec qui il a dansé toute la nuit, ici même sur la Plaza las Escuelas et qui un jour ou l'autre, c'est sûr, finira par revenir comme elle le lui a juré.
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la ruine est une chose. Le vide infect installé désormais au revers de ces murs, une autre chose.
C'est ce que Gouri tâche de se répéter au pied de ces immeubles. Car, de retour chez lui, il cherche une fois de plus à se convaincre des nécessités de l'exil ; flairer la réalité des ces puissances cruelles, imperceptibles et assassines, et préservant étrangement l'apparence du monde. En découdre avec elles, comme il l'avait fait, d'une autre manière, à coups de pelletées brûlantes sur le toit du réacteur n°4.
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Lorsque Simon arrive à Auschwitz, l'un des collaborateurs du commandant, Richard Baer, le reconnaît. Un nazi du nom d'Achill Flantzer, lui même amateur d'échecs. Il le sauve d'une mort immédiate en le recrutant comme secrétaire particulier. Avec l'idée, surtout, de passer du bon temps sur l'échiquier face à un joueur de grande valeur.
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Sur l'échiquier finement marqueté, les pièces projettent leurs ombres élégantes. Avec nonchalance, l'index de l'homme qui s'est passé en face de moi glisse un instant sur le plateau pour épouser les contours de deux ou trois d'entre elles. Puis, après un regard vers moi, il pousse son pion en E4
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La peinture on sait bien que c'est pas la réalité. Et c'est bien normal, le pinceau, c'est pas une plaque photographique.
Un temps.
Évidemment, dit le curé. Tu vois, je me demande si, toi et moi, on s'intéresse pas aux mêmes choses en fait.
Basilio lève les yeux. Toutes les choses qu'on ne voit pas. Tout ce qui palpite sans figurer sur les images, ce qu'on éprouve avec force et qui se refuse à nos sens premiers. Et dont on voudrait tellement témoigner pourtant.
Ah oui, ça c'est vrai, cette envie de témoigner, dit Basilio.
Eh bien, tout ce vivant invisible qui ne rentre dans aucun cadre pour la bonne raison qu'il est lui-même le cadre de tout, je crois bien qu'il porte un nom. Et c'est notre Seigneur Dieu tout-pissant, qu'il s'appelle.
Le regard de Basilio s'attarde un instant sur le visage du curé avant de glisser vers le côté, en direction de l'église, puis des espaces au-delà.
C'est quand même une drôle d'idée, dit Basilio au bout d'un moment.
Je préfère parler plutôt de foi plutôt que de drôle d'idée, fait le père Eusebio en souriant.
C'est une drôle d'idée, continue Basilio comme s'il n'avait pas entendu le curé, le front tendu vers l'horizon aux carlingues, parce que si c'est ça, j'aimerais bien savoir à quoi il pense, ton Seigneur Dieu tout-puissant, une journée comme aujourd'hui.
Eusebio, un instant silencieux.
Il ne nous abandonnera pas, finit-il par dire. Il faut garder espoir.
Vraiment, mais à quoi est-ce qu'il peut bien penser, bredouille encore Basilio, les yeux vides.

p.109
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Ce qui se fabrique ici, en pleine nuit, est d'une nature différente. Car il ne s'agit plus de répondre à la litanie des commandes obligatoires, plans, aménagements, embellissements, façades, architectures en quête d'apparat ou d'efficience. Il s'agirait plutôt, c'est ce qu'ils ont décidé, de dédier ce temps à la représentation de la réalité, sensible et nue. Voilà ce dont il est question pour ces hommes assemblés, femmes aussi parfois, dans le silence parfait, sous les halos rabougris des lampes amenées au plus près des traits de plume : dessiner, peindre un peu de la vérité de Terezin. Chacun librement, sans consigne d'aucune sorte.
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Toi, Tayna, on dirait que pour ce qui est de soigner les blessures, tu sais t'y prendre, dit Garri.
Ça dépend.
T'aurais pas appris à faire le médecin, au moins ? demande Garri.
Non. J'ai seulement aidé à accoucher des femmes. Et c'était il y a bien longtemps.
C'est déjà ça, dit Emmet.
Alors c'était ton métier, avant ? demande Garri.
Disons que je commençais juste à l'apprendre. Mais je travaillais aussi avec mon frère et ça aussi, ça me prenait du temps. Il avait une imprimerie à lui.
Sûr que c'est pas la même chose, fait Garri.
Il y a des jours où je mettais des enfants au monde, et d'autres fois, c'étaient des livres, dit Tanya avec légèreté.
Ah, c'est drôlement bien de mettre des choses au monde, lance Emmet.
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Rien que ça, une bicyclette qui repose à terre, au milieu d’une place déserte. Je crois que c’est pas mal pour donner à deviner tout ce qu’on ne voit pas sur l’image. Toutes ces choses qui flottent dans l’air et qui fabriquent notre peur de maintenant. Qu’on peut pas graver sur du papier mais qui nous empêchent presque de respirer, par moment. Tu vois ce que je veux dire ? (p. 107)
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Après un moment, il est repris par la lumière vive du jour.
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Leo lui fait signe de se tenir immobile quelques instants encore. Il dessine maintenant par petites touches, estompant parfois ce qu’il vient de tracer du tranchant de sa main.
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Il n'y a pas longtemps, quelqu'un m'a dit que là-bas, certaines nuits, les arbres se mettaient à rougeoyer.
J'ai vu ça de mes propres yeux. On a vu ça, avec les gars. Un truc étrange. Tu regardes ça et même si t'as une grande gueule je peux te dire que ça te ferme le clapet.
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Parce que juste après, les gros engins avec leurs énormes pelles dentées, ils se ramènent à trois et ils t'attrapent la baraque au niveau des fondations et ils te ramassent ça ni plus ni moins que comme une merde de chien...
Et on a regardé ça, mon père et moi...
Ce dont je me souviens le mieux, c'est des choses qu'on voyait parfois tomber dans le trou au milieu d'une pelletée de gravats. Des choses qu'on n'avait pas eu le temps ou même l'idée d'emporter et qui nous passaient sous le nez. sauf qu'à chacune d'elle s'accrochaient des petits morceaux de vie et que c'était ça qui défilait devant vous.
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« Les deux fois où je l'ai vue, la mer, ici dans le Nord, fait Ahmed, elle était de la couleur de la boue. C'est pas la même que la nôtre de là-bas, que je me suis dit chaque fois que je l'ai vue. C'est pas possible, mon frère.
T'as raison, Ahmed, c'est pas la même mer que chez toi, au Sud. Mais quand même, elles sont reliées l'une à l'autre. Il y a forcément un endroit où elles mélangent leurs couleurs, et dans ta mer aussi on doit retrouver un peu de boue, à des endroits. »
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Son corps entier frissonne.
A cause, peut-être, des solitudes amoncelées.
Emboîtées comme des poupées gigognes. La sienne propre à Gouri, d'homme singulier; celle de cette zone maudite, ce trou noir du monde; celle aussi de son espèce, humaine, et de son vaisseau terrestre qui s'est fichu là, au coeur de l'immensité.
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Il y a eu la vie ici
Il faudra le raconter à ceux qui reviendront
Les enfants enlaçaient les arbres
Et les femmes de grands paniers de fruits
On marchait sur les routes
On avait à faire
Au soir
Les liqueur gonflaient les sangs
Et les colères insignifiantes
On moquait les torses bombés
Et l'oreille rouge des amoureux
On trouvait du bonheur au coin des cabanes
Il y a eu la vie ici
Il faudra le raconter
Et s'en souvenir nous autres en allés
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Mais avec le temps, ce qui finit par te sauter en premier à la figure, ce serait plutôt cette sorte de jus qui suinte de partout, comme quelque chose qui palpiterait encore. Quelque chose de bien vivant et c’est ça qui te colle la trouille. Ça c’est une vraie poisse, un truc qui t'attrape partout. Et d’abord là-dedans. De son pouce, il tapote plusieurs fois son crâne.
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