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Citations de Curzio Malaparte (230)


On n’avait jamais vu de telles choses à Naples, au cours de tant de siècles de misère et d’esclavage. On avait vendu de tout à Naples, toujours, mais jamais des enfants. […] A Naples, les enfants sont sacrés.
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Tout le monde pleurait, car un deuil, à Naples, est un deuil commun, non pas d’un seul, ni de quelques-uns, ou de plusieurs, mais de tous ; la douleur de chacun est la douleur de toute la ville, la faim d’un seul est la faim de tous.
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- Vous êtes un honnête homme, dit le général Guillaume, vous ne vendriez pas vos enfants.
- Qui sait ? répondis-je à voix basse, il ne s’agit pas d’être un honnête homme. Cela n’a rien à voir, d’être un homme convenable. Ce n’est une question d’honnêteté personnelle. C’est la civilisation moderne, cette civilisation sans Dieu, qui oblige les hommes à donner une telle importance à leur peau.
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Quand souffle le sirocco, la peau humaine se couvre de taches de moisi, les pommettes luisent dans des figures moites d’une sueur terne, où un noir duvet répand une ombre molle et sale autour des yeux, des lèvres, des oreilles. Les voix elles-mêmes sonnent grasses et paresseuses, et les mots ont un autre sens que d’habitude, une signification mystérieuse, comme les mots d’un jargon défendu. Les gens se promènent en silence, comme oppressés par une secrète angoisse, et les enfants passent de longues heures assis par terre, sans parler, rongeant une croûte de pain, ou quelque fruit noir de mouches, en contemplant les murs crevassés où se dessinent les lézards immobiles que grave la mousse dans le vieux crépi. Sur les rebords des fenêtres les œillets brûlent, fumeux dans les pots de terre cuite, et une voix de femme s’élève tantôt ici, tantôt là, chantant : ce chant vole lentement de fenêtre en fenêtre, et se pose sur les balcons comme un oiseau fatigué.
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Kamenev, le compagnon de Lénine, le triumvir que Lénine avait élevé au pouvoir avec Zinoviev et Boukharine, avait été arrêté. La grande épuration commençait.
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Le peuple a besoin de vérité plus que de toute autre chose. Plus encore que de pain. Le pain d'un peuple provient de la vérité qui est synonyme de liberté, et non du mensonge, qui est synonyme de servitude.
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« C'est avec beaucoup d'amertume que je procède à l'examen des méthodes utilisées par Mussolini pour avilir et humilier systématiquement la conscience des Italiens. Pour ma part, je n'ai jamais hésité, pendant dix ans, à hausser le ton, avec une hardiesse qui m'a valu beaucoup d'ennemis mais aussi beaucoup d'amis […]
Pendant dix ans, je n'ai jamais eu d'autre préoccupation que de sauver mon âme. Il se peut que ma conduite politique n'ait pas été très avisée, que je n'aie pas fait honneur à la patrie de Machiavel […]
Mon œuvre littéraire hétérodoxe, mes imprudences politiques, mes polémiques, mes duels, mes mésaventures, la situation intenable que je me suis créée au sein du fascisme par mes positions anticonformistes témoignent de ce que tous les jeunes, en Italie, n'approuvent pas avec enthousiasme une politique qui n'a d'autre résultat que d'habituer le peuple italien à tenir les yeux baissés et à perdre peu à peu tout sens de la dignité morale et civile.
Pourtant, je me demande parfois, en écrivant ces pages, si ceux qui critiquent les méthodes appliquées par Mussolini pour réduire l'Italie à une énorme prison-modèle, décorée de bannières et d'arcs de triomphe, retentissante de musiques militaires et d'applaudissements disciplinés, dans laquelle vivent depuis dix ans quarante millions d'hommes, n'ont pas tort. » (pp. 98-99)
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« La condition indispensable pour réussir était que le fascisme n'ait ni programme défini, ni idées claires, ni buts précis. Depuis le début, Mussolini a toujours pris soin d'empêcher que la conscience de la petite bourgeoisie et des masses, dans ce chaos qu'était l'Italie d'après-guerre, trouve un point d'appui concret. Il fallait éviter que le peuple italien, sur cette mer démontée, eût une bouée quelconque à laquelle se raccrocher.
Le Duce, qui possède à un très haut degré la fourberie et le cynisme qui reviennent si souvent dans l'histoire des servitudes politiques en Italie, a eu la grande habileté tactique de faire émerger ce fond trouble de fanatisme qui alourdit et obscurcit la conscience des masses catholiques. » (p. 63)
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La noblesse marxiste ne tolère pas que l'on parle d'elle, de ses affaires, de ses destins. Elle exige le silence autour d'elle. Aux écrivains soviétiques, elle impose leurs sujets, et ces sujets obligatoires sont la vie des masses prolétariennes, la lutte pour la construction du socialisme, l'éloge de l'état, le conformisme le plus étroit, le plus absolu, le plus aveugle.
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le paysage de suède est un cheval au galop.
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On ne gagne pas des batailles, livrées au nom de la liberté, avec des soldats habitués à baisser les yeux.
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Nous étions des hommes vivants dans un monde mort. Je n'avais plus honte d'être un homme. Que m'importait que les hommes fussent innocents ou coupables ? Sur la terre, il n'y avait que des hommes vivants et des hommes morts. Tout le reste n'était que peur, désespoir, regrets, haine, pardon, espérance.
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Et pourtant à Prato aussi, comme dans toutes les villes d'Italie, comme dans toutes les villes d'Europe, les faux "résistants", les faux défenseurs de la liberté, les héros de demain, étaient tapis, pâles et tremblants, dans les caves. Les imbéciles et les fous qui avaient pris le maquis, rejoignant les bandes de partisans, combattaient aux côtés des Alliés ou se balançaient, pendus aux réverbères des villes : mais les sages, les prudents, tous ceux qui, un jour, une fois,le danger passé, allaient rire de nous et de nos uniformes souillés de boue et de sang, étaient là, terrés dans la sécurité de leurs cachettes, attendant de pouvoir se précipiter sans danger dans la rue pour crier : "Vive la liberté !"
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Il n'y a que les Américains, sur cette terre, qui puissent évoluer avec tant de grâce libre et souriante au milieu de gens sales, affamés, malheureux. Ce n'est pas un signe d'insensibilité : c'est un signe d'optimisme et, en même temps, d'ingénuité. Les Américains ne sont pas cyniques, ils sont optimistes. Et l'optimisme est souvent par lui-même un signe d'ingénuité. Celui qui ne fait pas, et n'imagine pas le mal, est porté non pas à nier l'existence du mal, mais à refuser de croire à la fatalité du mal, à se refuser d'admettre que le mal soit inévitable et inguérissable. Les Américains croient que la misère, la faim, la douleur, tout peut être combattu, que l'on peut guérir de la misère, de la faim, de la douleur, qu'à tout mal il y a remède. Ils ne savent pas que le mal est inguérissable. Bien qu'ils soient, sous de nombreux aspects, la nation la plus chrétienne du monde, ils ne savent pas que sans le mal le Christ ne saurait exister. No love, no nothin'. Pas de mal, pas de Christ. Moins de mal dans le monde, moins de Christ dans le monde. Les Américains sont bons. Devant la misère, la faim, la douleur, leur premier mouvement instinctif est d'aider ceux qui souffrent de la faim, de la misère, de la douleur. Il n'est pas de peuple au monde qui possède un sens de la solidarité humaine aussi fort, aussi pur, aussi sincère. Mais le Christ exige des hommes la pitié, non la solidarité. La solidarité n'est pas un sentiment chrétien.
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Depuis quelques jours, les prix des fillettes et des garçonnets avaient chuté et continuaient à baisser. Mais le prix du sucre, de l'huile, de la farine, de la viande, du pain, avaient augmenté. Le prix de la chair humaine baissait de jour en jour.
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Depuis toujours la défaite représente pour les populations misérables, malheureuses, une sorte de merveilleuse et terrible occasion de liberté, de vie nouvelle plus aisée et plus digne.
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Ils s'arrêtent sur une place, près du squelette d'un autocar sans roue et sans moteur et, après s'être occupé de l'âne, Calusia s'étend sur un peu de paille que la femme a ramassée çà et là. Pendant qu'elle prépare quelque chose à manger, il la regarde admiratif. Puis elle s'approche de Roméo, détache le matelas de sa croupe et le pose sur sa tête avec le geste antique de la paysanne.

"Qu'est-ce-que tu fais ? lui demande Calusia en se soulevant les coudes.

- Je m'en vais, répond Mariagiulia. tu n'as plus besoin de moi maintenant...

- non, tu... tu... dois pas partir ! bégaie Calusia. Pourquoi veux-tu me quitter ?

- Tu es arrivé à Naples, répond la femme. J'ai souvent pensé à m'en aller, mais je voulais t'aider à ramener ton lieutenant mort à sa mère.

- Co... comment le sais-tu ? bégaie Calusia.

- Je le sais depuis longtemps... tu en parles presque toutes les nuits, dans ton sommeil.

- Ne t'en va pas, dit Calusia. On a tellement souffert ensemble... Et puis, la famille de mon lieutenant est riche, c'est une famille noble, ils habitent un palais... tu verras, ils vont nous dire de rester avec eux, dans leur palais, toi et moi...

- Non, toi peut-être, pas moi, ils ne voudront pas de moi.

- Je dirai que tu es la fiancée de mon frère, dit Calusia.

- Ton frère ! Comment il s'appelle, ton frère ? Tu ne m'as jamais dit son prénom.

- Il s'appelle... il s'appelle Giovanni, balbutie Calusia. C'est un brave garçon... il t'aimera, il t'épousera..."

La femme le regarde en silence et Calusia rougit.

- Toi aussi tu es un brave garçon, dit Mariagiulia en lui passant la main dans les cheveux. Je n'ai pas envie de te quitter, mais je dois m'en aller... adieu, Calusia...

- Non, je ne veux pas te laisser partir, s'écrie Calusia en la prenant par le bras. Tu es seule, tu n'as personne, tu ne sais pas où aller... et puis, et puis je dois t'avouer...

- Ne me dis rien. Je sais déjà.

-Mon frère est mort à la guerre... en Albanie... je t'ai menti, parce que je n'avais pas le courage..."

La femme garde le silence, elle continue à lui passer la main dans les cheveux.

" - J'osais pas te faire comprendre que je t'aime... beaucoup."
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Peu à peu, le vent balaie le rideau de fumée et de brouillard, le soleil illumine la campagne déserte, la mer encore incertaine dans la brume des explosions, le terrain jonchés de cadavres.
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Un drapeau de peau humaine. Notre véritable patrie est notre peau.
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- Tu le sais bien, toi aussi, qu'il n'est pas vrai que le Christ ait sauvé le monde une fois pour toutes. Le Christ est mort pour nous enseigner que chacun de nous peut devenir un Christ, que chaque homme peut, par son propre sacrifice, sauver le monde. Le Christ, lui aussi, serait mort inutilement si chaque homme ne pouvait devenir un Christ et sauver le monde.
- Un homme n'est jamais qu'un homme, dit Jimmy.
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