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EAN : 9782246139836
224 pages
Grasset (14/03/2008)
4.15/5   46 notes
Résumé :
Comment on s'empare d'un Etat moderne et comment on le défend : à l'aide d'exemples pris dans l'histoire (le 18 Brumaire de Bonaparte) ou dans l'actualité plus proche (le coup d'État bolchevique de 1917, la marche sur Rome de Mussolini, l'inexorable montée de Hitler), Malaparte analyse les diverses méthodes d'insurrection moderne. Le Duce lui fit payer la justesse de ses réflexions de plusieurs mois de prison et de cinq ans d'assignation à résidence... A sa sortie e... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Le lendemain de la Première Guerre mondiale et durant la décennie 1920 [et que dire de la suivante!] les démocraties libérales européennes sont menacées par des coups d'État communistes et fascistes. En saisissant le Zeitgeist de l'époque, avant qu'il ne fût devenu évident que certains parmi ces putschs, les quelques-uns « réussis », se transformeraient en régimes dictatoriaux durables et qu'ils mèneraient à une guerre énormément destructrice et à des génocides, on apprend même qu'une certaine désillusion, voire une franche hostilité contre le parlementarisme étaient des sentiments diffus, se superposant avec une conscience de classe en formation mais ne la recouvrant pas. C'est à ce moment-là que Malaparte, fasciste précoce, abjure cette idéologie, et cet essai, écrit en France provisoirement à l'abri des persécutions, ainsi que quelques autres ouvrages satiriques publiés aussi par Bernard Grasset autour de 1930-31, en constitue l'acte le plus sérieux et le plus riche de conséquences. Il est précieux parce qu'il représente une théorisation « sur le vif », se référant à des personnages vivants et parfois au pouvoir, qui lui en tiendront rigueur (même Trotzky qui pourtant eût pu se sentir vengé...), parce qu'il a été rédigé à partir de séjours – en Pologne, en URSS – qui auraient pu aboutir à de simples reportages d'actualité, alors qu'il les dépasse grandement par son caractère comparatif et « systémique » - comme on dira en relations internationales quelques décennies plus tard.
Coup d'État bolchevique réussi en 1917, manqué de Trotzky contre Staline dix ans plus tard (1927) ; manqués deux fois par Pilsudzki en Pologne en 1920 et 1926 ; manqué en Allemagne par Kapp en 1920 et une première fois par Hitler et alliés en 1923 ; manqué en Espagne par Primo de Rivera manipulé par Alphonse XIII en 1923 [en attendant Franco] ; réussi en Italie par Mussolini en 1922... Les conditions politiques de ces pays sont très différentes, et Malaparte démontre avec talent qu'elles n'ont quasiment rien à voir avec l'aboutissement de la tentative insurrectionnelle. Car cette dernière n'est qu'une question de tactique, de technique, mais aussi de conscience de la modernité (le rôle des structures et organisations syndicales, les infrastructures-clés et centres névralgiques de transmission des ordres, la prise de contrôle des systèmes de production...) et la capacité de ces Sylla, Jules César et Catilina modernes d'abandonner un prototype qui ne réside pas autant dans la Rome antique que dans le 18 Brumaire de Bonaparte.
« Bonaparte, ou le premier coup d'État moderne » : il aurait peut-être été logique de se plier à l'ordre chronologique et d'en faire le chapitre Ier – alors que c'est le 5ème. L'esprit du 18 Brumaire se traduit dans un souci de « rentrer dans la légalité », de recevoir un aval parlementaire, mais ça ne fonctionne plus désormais ; la seule tactique efficace à présent est celle de Trotzky en 1917, plutôt que d'un Lénine qui eût été plus bonapartiste... Une tactique que Staline aura comprise et qu'il empêchera de se reproduire en 1927, notamment par la ruse de l'antisémitisme russe. Mussolini, expert dans la chose marxiste, se départ aussi assez progressivement du modèle napoléonien, avec force casses de grèves et huile de ricin. Quant à Hitler, qui à part son éloquence est qualifié des pires attributs, dont celui de femme – ce qui n'est autre qu'une preuve de la misogynie de Malaparte... - il n'a pour lui qu'une « organisation de combat du parti national-socialiste calquée sur [… celle] du fascisme entre 1919 et 1922 » (p. 192), mais, n'étant qu'une « caricature de Mussolini » (p. 190), l'issue de sa démarche est incertaine selon l'auteur et à l'heure où il écrit. Ce dont Malaparte ne doute pas, c'est que «la légitimité d'une dictature consiste en sa violence révolutionnaire » (p. 203) et qu'elle a donc pour effet de « corrompre, humilier, asservir tout le peuple » (p. 201) : un projet qui répugne à tout homme libre.
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Curzio Malaparte est un auteur génial mais déroutant, à moins que ce ne soit l'inverse. Francophile, il a combattu - à l'instar de Blaise Cendrars - dans la Légion étrangère durant la Grande Guerre.

Sympathisant précoce et opposant non moins précoce au fascisme italien Malaparte analyse intelligemment les conditions nouvelles de prise du pouvoir dans un Etat moderne autour d'exemples tirés de l'histoire contemporaine (de Napoléon à Mussolini) ainsi l'action exemplairement efficace menée par Trotsky durant la révolution russe.

Pour avoir ainsi mis en lumière les faiblesses des démocraties occidentales face au risque de coups d'Etats menés par groupes peu nombreux de révolutionnaires bien entraînés et dénoncé l'ampleur du danger que représentait le mouvement hitlérien, Malaparte est devenu suspect - son livre malvenu en Allemagne et en Italie où il sera d'ailleurs condamné à l'emprisonnement sur les îles Lipari.

Un livre court, accessible et passionnant d'un écrivain fascinant dont on découvrira les formidables qualités littéraires dans Kaputt ou La peau.
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Auteur italien, livre exceptionnel fort probablement
à cause des origines de l'auteur.

Écrit en 1930 et paru en France une année plus tard. Il décrit des tentatives de coups d'états qui ont échouées ou réussies dont celle d'Octobre 1917 par les bolchéviques, celle de Bonaparte, celle de Mussolini mais aussi les expériences Allemandes, Polonaises et Espagnoles. Enfin le dernier chapitre est consacré à Hitler qui y est décrit comme une femme. L'auteur exprime en fin de livre qu'il n'y a rien à changer dans ce chapitre consacré à ce dernier dictateur national-socialiste où il a su si bien définir et prévoir les évènements dans ce pays, ce qui est stupéfiant car il n'a jamais rencontré de sa vie le personnage.
L'idée phare, qui consiste à expliquer qu'avec seulement 1000 hommes extrêmement déterminés il est facile de conquérir un état, est parfaitement illustrée.
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Lecture vivement recommandée aux lycéens et étudiants ou à tout autre personne en quête de compréhension des réalités historiques à travers une analyse dépourvue de parti pris politique.
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A ne pas mettre entre toutes les mains ! C'est un livre qu'il est important d'avoir lu, surtout en ces temps troublés. Ni les moyens ni les cibles tactiques ne sont désormais les mêmes. Les forces en jeu portent d'autres oripeaux mais tout le reste, en définitive, semble identique ...et malheureusement je peux parier sans trop prendre de risque que les résultats se répèteront.
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Ce n'est point vrai, comme se plaignait Jonathan Swift, que la défense de la liberté ne rapporte pas. Elle rapporte : ne fût-ce que la conscience de son propre esclavage, à laquelle l'homme libre se reconnaît des autres. Car le "propre de l'homme libre ce n'est pas de vivre libre en liberté, mais libre dans une prison".
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« Quiconque observe sans idée préconçue la situation européenne au cours des années 1919 et 1920, ne peut s'empêcher de se demander par quel miracle l'Europe a pu sortir d'une crise révolutionnaire aussi grave. Dans presque tous les pays, la bourgeoisie libérale se montrait incapable de défendre l'État. Sa méthode défensive consistait, et consiste encore, dans l'application pure et simple des systèmes de police auxquels de tous temps, jusqu'à nos jours, on a vu se confier les gouvernements absolus comme les gouvernements libéraux. Mais l'incapacité de la bourgeoisie à défendre l'État était compensée par l'incapacité des partis révolutionnaires à opposer une tactique offensive moderne à la méthode défensive désuète des gouvernements […]
[…] ni les catilinaires de droite ni les catilinaires de gauche n'ont su mettre l'expérience de la révolution bolchevique à profit. » (p. 116)
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« Il ne faut pas faire un grief à Hitler d'être arrivé, par sa seule éloquence, à imposer une discipline de fer à des centaines de milliers d'hommes raisonnables, recrutés parmi d'anciens combattants au cœur durci par quatre années de guerre. Il serait injuste de le blâmer d'avoir été capable de persuader six millions d'électeurs de voter pour un programme politique, social et économique qui fait, lui aussi, partie de son éloquence. […] Ce n'est ni sur leur éloquence ni sur leur programme qu'on juge les catilinaires : mais sur leur tactique révolutionnaire. Il s'agit de dire si l'Allemagne de Weimar est réellement menacée d'un coup d'État hitlérien, c'est-à-dire de savoir quelle est la tactique révolutionnaire de ce Catilina trop éloquent, qui veut s'emparer du Reich et imposer sa dictature personnelle au peuple allemand. » (p. 191)
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« Le problème de l'État n'est plus seulement un problème d'autorité : c'est aussi un problème de liberté. Si les systèmes de police se révèlent insuffisants à défendre l'État contre l'éventualité d'une tentative communiste ou fasciste, à quelles mesures peut et doit recourir un gouvernement sans mettre en danger la liberté du peuple ? Voilà les termes dans lesquels se pose le problème de la défense de l'État dans presque tous les pays. » (p. 207)
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La troupe d'assaut de Trotsky se compose d' un millier d'ouvrier, de soldats et de matelots (...) Pendant dix jours, sous le commandement d'Antonoff Ovsienko, ces hommes, les gardes rouges, se livrèrent à toute une série de "manœuvres invisibles" dans le centre même de la ville. Parmi la foule de déserteurs qui encombrent les rues, au milieu du désordre qui règne dans les palais du gouvernement, dans les ministères, dans les bureaux de l'état major, général, dans les postes, dans les centraux téléphoniques et télégraphiques, dans les gares, dans les casernes, ils s'entrainent, en plein jour, sans armes, à la tactique insurrectionnelle, et leurs groupes peu nombreux (trois ou quatre hommes) passent inaperçus.
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Videos de Curzio Malaparte (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Curzio Malaparte
D'après un roman de Curzio Malaparte, voici une singulière histoire. En 1943, la guerre est perdue pour l'Italie. Les libérateurs américains débarquent, et les voleurs sillonnent la péninsule. Un soldat italien, Calusia, charge une énorme caisse sur le dos de son âne. Que contient cette caisse ? Mystère… Ce que l'on sait, c'est qu'il doit livrer la caisse à Naples puis rentrer chez lui, à Bergame.
>Sciences sociales>Science politique>Types d'Etats et de gouvernements (94)
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