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Citations de Curzio Malaparte (230)


Leurs sourcils aussi étaient noirs, et noir le duvet du visage, qui , blanchit par la poudre, s'épaississait et devenait plus sombre au-dessus de la lèvre supérieure et le long de la mâchoire.
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Sans ces spectacles- là, comment feriez -vous pour vous sentir vainqueurs? (…)
Si ces choses ne vous plaisaient pas, si ces spectacles ne vous amusaient pas, cela n'arriverait pas à Naples (…).
Pour se sentir des héros, tous les vainqueurs ont besoin de voir ces choses -là. (…) - J'aime mieux avoir perdu la guerre, dis-je et être assis sur ce lit comme cette pauvre fille, plutôt que d'aller fourrer mon doigt entre les jambes d'une vierge pour avoir le plaisir et l'orgueil de me sentir vainqueur. (…)
Nous sommes un merveilleux peuple de vaincus. (…)
- Et Naples apprécie la chance qu'elle a d'être à la fois libérée et vaincue, de devoir s'humilier pour que vous puissiez vous sentir vainqueur, de devoir vous vendre ses femmes et ses enfants pour que vous puissiez vous sentir conquérants. Il n'y a pas de spectacle plus triste, plus répugnant qu'un homme ou un peuple qui triomphe. Crois- moi, c'est une honte de gagner la guerre.
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... aux cheveux transparents de la couleur de l'aile des cigales, ...
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Or voici que l'odeur de la charogne entra de nouveau, s'arrêta sur le seuil. Je n'étais pas complètement éveillé ; j'avais encore les yeux fermés et je sentais que l'odeur me regardait. C'était une puanteur molle et grasse, une odeur dense et gluante, une odeur jaune mais toute tachée de vert. J'ouvris les yeux, c'était l'aube.
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eh;que voulez-vous,Monsieur,ce sont les mouches qui ont gagné!
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Curzio Malaparte
C’était une soirée pâle et douce : une lune gonflée s’élevait lentement sur les collines au fond de l’horizon, en faisant scintiller les eaux du Danube. Et tandis que d’une pièce que j’avais dans une bâtisse écroulée, je regardais la lune s’élever lentement dans le ciel (le ciel était d’un rose brillant, comme les ongles d’enfants) le chœur plaintif des chiens s’élevait autour de moi. Il n’y a pas de voix humaine qui puisse égaler celle des chiens dans l’expression de la douleur universelle. Aucune musique, pas même la musique la plus pure ne parvient à exprimer la douleur du monde aussi bien que la voix des chiens. C’était des notes modulées, vibrantes, maintenues sur le fil d’une respiration longue et égale, qui se brisait tout à coup en un sanglot profond et clair. C’étaient des appels éperdus, des appels déserts au milieu des marais, des fourrés, des champs de roseaux et de joncs où le vent passait avec un murmure et un frisson.
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Un jour, je demandai à un gurba du 10 bataillon s'il savait ce qu'est un chat.
- Oui, monsieur, me répondit-il; le chat est un animal carré, qui a une patte dans chaque coin.
À un autre qui me montrait un écureuil qui avait grimpé à la cime d'un arbre, je demandai s'il savait quelle race d'animal c'était.
- Oui, monsieur, me répondit-il ; c'est cet animal qui ressemble à une cafetière italienne.
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Depuis le premier jour où j'ai mis les pieds en Érythrée, j'ai l'impression de me trouver dans un pays qui appartient au monde de ma culture, au monde de mon grec et de mon latin. L'arrière-pays éthiopien n'est pas l'Afrique, mais l'Europe. Une Europe passée et future, celle comprise dans l'arc qui va de Mycènes à Manhattan.
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« Un je-ne-sais-quoi de féminin était vraiment dans l’air. Le capitaine se sentait dans les membres une étrange léthargie, il marchait comme étourdi. À un certain moment, il laissa le chemin muletier, pénétra dans le bois. Le murmure d’un ruisseau rendait les feuilles tendres et fragiles, encore durcies par le gel hivernal. La couleur du printemps (ou c’était une odeur, un parfum) naissait à peine dans l’air, encore vague, incertaine, presque hostile. Odeur d’eau, de glacier, odeur de dégel, de feuilles putrides, de terre pourrie. Le printemps, en montagne, c’est l’eau qui l’annonce de sa voix de femme, de son parfum de chair, de sa couleur de lait. Le capitaine s’enfonçait dans le bois, respirant profondément, le chapeau rejeté en arrière sur la nuque pour se libérer le front. Il s’étendit dans l’herbe, près d’une épaisse tache de gentianes, d’anémones pourpres, de violettes. Des violettes gigantesques, ouvertes comme des tournesols, droites sur leur tige hors de l’herbe délicate et molle, avec un impudique orgueil. Par milliers, en minuscules forêts, ici et là ; rien de chaste en elles : mais quelque chose d’audacieux, de sensuel. Elles semblaient de chair. Et les gentianes bleues, et certains chardons sans poils, chauves et doux au toucher. L’herbe très tendre, d’un vert tantôt pâle tantôt soutenu, coulait entre les doigts comme de l’eau. La mousse comme des cheveux. Un vent léger courait sur le pré, inclinant les fleurs en de suaves révérences, et celles qui résistaient davantage à ses amoureuses rafales, il les secouait avec grâce et prudence, presque avec crainte de leur faire du mal : jusqu’au moment où les gentianes et les altières violettes courbaient la tête avec respect, en un jeu libre et courtois.
Étendu dans l’herbe, le capitaine admirait les nuages roses qui se posaient légèrement sur les montagnes et écoutait la voix du torrent fuir sous les branches, s’évanouir, puis reprendre soudain plus proche, plus haute, plus vibrante, une froide voix métallique. Dans l’intervalle de ces brèves pauses, un son de cloche lui arrivait, profond ; la cloche, pensait-il, d’une vache errant dans le bois. Le capitaine se leva, se dirigea entre les arbres vers ce son doux et grave ; arrivé au torrent, entre les branches d’un mélèze, il vit sortir de l’eau, poussant devant lui une vache, un jeune homme nu : lequel après s’être mis à courir de-ci de-là dans le pré, en batifolant, vint s’étendre sur la rive au soleil, presque sous le ventre de la vache qui ruminait paisible et absorbée. Il lui sembla reconnaître ce visage puéril, envahi de poils brillants, blonds et frisés, ces épaules athlétiques, ce cou inséré avec violence dans la poitrine large et musclée. Oui, l’alpin de l’Edolo, celui qu’il avait vu passer à Morgex, le bras autour du cou d’une vache, l’alpin que le colonel Lavizzari appelait Calusia, que tous les garçons de Morgex appellent Calusia. Maintenant Calusia s’est agenouillé sous le ventre de la vache, il lui caresse les mamelles doucement, de ses mains de montagnard énormes et délicates, et un sourire de joie, un sourire ineffable, presque sévère, illumine son visage dur et puéril… »
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es imbéciles et les fous qui avaient pris le maquis,rejoignant les bandes de partisans,combattaient aux côtés des alliés ou se balançaient ,pendus aux réverbères des villes:mais les sages , les prudents , tous ceux qui , un jour, une fois le danger passé ,allaient rire de nous et de nos uniformes souillés de boue et de sang , étaient là , terrés dans la sécurité de leurs cachettes,attendant de pouvoir sa précipiter sans danger dans la rue pour crier "Vive la liberté!"
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- Ce qui corrompt les hommes, ce qui les rend méchants, lâches, égoïstes, c'est la conscience de la mort. Les bêtes n'ont que l'instinct de conservation, peut-être un pressentiment lointain. Mais elles n'ont pas la conscience de la mort. Elles savent qu'elles “peuvent” mourir mais non qu'elles “doivent” mourir.
- Si elles apprenaient un jour qu'elles doivent mourir, dit Zanelli en penchant en avant son visage de braque, tu ne crois pas que les bêtes se révolteraient contre les hommes ?
Le Capitaine saisit Zanelli par un bras, le regarde avec une espèce de triomphe dans les yeux :
- Elles nous accuseraient de l'avoir inventée, la mort. Oui, nous. Est-ce que ce n'est pas nous peut-être qui l'avons inventée, la mort ? et il se met à rire, regardant fixement Zanelli avec une lueur de triomphe dans les yeux. (p. 128)
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Quand vous lui aurez appris à se faire une réputation d'homme, personne ne le prendra pour ce qu'il est, mais pour ce qu'il voudra paraître. Les gens ne jugent pas par la tête ou par la queue, mais par la manière d'être ou par les intentions. S'il n'en était pas ainsi, aucune humanité, aucune vie civilisée ne serait possible.
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- Dans toute l'Afrique du Nord, dit Jack, les indigènes se sont immédiatement accoutumés à la civilisation américaine. Depuis que nous avons débarqué en Afrique, il est indéniable que les populations du Maroc, de l'Algérie et de la Tunisie ont fait de réels progrès.
- Quels progrès ? demanda, étonné, Pierre Lyautey.
- Avant le débarquement, dit Jack, l'Arabe allait à cheval, et sa femme le suivait à pied, derrière la queue du cheval, son enfant sur le dos et un gros paquet en équilibre sur la tête. Depuis que les Américains ont débarqué en Afrique du Nord, il y a eu un profond changement. Certes, l'Arabe va toujours à cheval, et sa femme continue de l'accompagner à pied, comme par le passé, son enfant sur le dos et son fardeau sur la tête. Mais elle ne marche plus derrière la queue du cheval : maintenant elle marche devant le cheval. À cause des mines.
(Chapitre X - Le drapeau - page 409 de l'édition Livre de Poche de 1963).
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Les rapports du consul royal d'Italie à Hambourg racontaient des faits terrifiants. Les bombes au phosphore avaient mis le feu à des quartiers entiers de cette ville, faisant un grand nombre de victimes. Jusque-là rien d'extraordinaire : même les Allemands sont mortels. Mais des milliers et des milliers de malheureux, ruisselants de phosphore ardent, dans l'espoir d'éteindre le feu qui les dévorait, s'étaient jetés dans les canaux qui traversent Hambourg en tout sens, dans le port, le fleuve, les étangs, jusque dans les bassins des jardins publics ou s'étaient fait recouvrir de terre dans les tranchées creusées ça et là sur les places et dans les rues pour servir d'abri aux passants en cas de bombardement.
Agrippés à la rive et aux barques, plongés dans l'eau jusqu'à la bouche, ou ensevelis dans la terre jusqu'au cou, ils attendaient que les autorités trouvassent un remède quelconque contre ce feu perfide. Car le phosphore est tel qu'il se colle à la peau comme une lèpre gluante, et ne brûle qu'au contact de l'air. Dès que ces malheureux sortaient un bras de la terre ou de l'eau, le bras s'enflammait comme une torche. Pour échapper au fléau, ces malheureux étaient contraints de rester immobiles dans l'eau ou ensevelis dans la terre comme les damnés de Dante (...).
Pendant quelques jours, Hambourg offrit l'aspect de Dité, la Cité infernale (...).
Le septième jour, ordre fut donné d'éloigner la population civile des lieux où les damnés étaient ensevelis dans la terre ou plongés dans l'eau (...). Les damnés restèrent seuls (...). Puis la nuit descendit. Des ombres mystérieuses rodèrent autour des damnés, se penchèrent sur eux, en silence. Des colonnes de camions arrivaient, les phares éteints, s'arrêtaient, repartaient. De toutes parts on entendait un bruit de pioches et de pelles, des coups sourds de rames dans des barques, des cris aussitôt étouffés, des plaintes et des claquements secs de revolver.
(Chapitre IV - Les roses de chair - pages 158 à 161 de l'édition Livre de Poche de 1963).
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Le long de l'escalier était encombré de femmes, assises l'une près de l'autre, comme sur les gradins d'un amphithéâtre (...).
Cette foule de femmes déployées sur cet escalier semblable à l'escalier des Anges dans le songe de Jacob paraissaient réunies là pour quelque fête, ou pour quelque spectacle dont elles eussent été à la fois actrices et spectatrices (...).
Tout à coup, au moment où je mettais le pied sur la première marche, elles se turent : un étrange silence se posa légèrement, palpitant, comme un immense papillon bariolé, sur l'escalier fourmillant de femmes.
Devant moi montaient quelques soldats noirs. Serrés dans leur uniforme couleur kaki, ils se balançaient sur leurs pieds plats, chaussés de fins souliers de cuir jaune, luisants comme des souliers d'or. Ils montaient lentement, dans ce silence soudain, avec la dignité solitaire du nègre. A mesure qu'ils gravissaient les marches, dans le passage étroit laissé libre à travers cette foule muette de femmes assises, je voyais les jambes de ces malheureuses s'ouvrir lentement, s'écarter d'une façon horrible, montrant leur noir pubis dans la lueur rose de la chair nue. "Five dollars! Five dollars!" se mirent-elles à crier toutes ensemble d'une voix rauque, mais sans faire un geste, et cette absence de gestes ajoutait encore à l'obscénité des voix et des mots. A mesure que les nègres montaient, la clameur augmentait : les cris se faisaient plus perçants et plus rauques les voix des horribles mégères qui, penchées aux balcons, exhortaient les nègres en leur criant elles aussi : "Five dollars! Five dollars! Go, Joe! Go, go, Joe, go!"
(Chapitre II - La vierge de Naples - pages 80 à 83 de l'édition Livre de Poche de 1963).
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La jeune fille jeta sa cigarette, prit du bout de ses doigts les bords de sa jupe et la souleva lentement : d'abord apparurent ses genoux doucement gainés par la soie des bas, puis la peau nue des cuisses, puis l'ombre du pubis. Elle demeura un instant dans cette attitude, triste Véronique, le visage sévère, la bouche méprisante. Puis, se renversant lentement en arrière, elle s'étendit sur le lit et écarta doucement les jambes. Comme fait l'horrible langouste en amour, quand elle ouvre lentement les tenailles de ses pattes, en regardant fixement le mâle de ses yeux ronds, noirs et luisants, puis reste immobile et menaçante, ainsi fit la jeune fille, ouvrant lentement les tenailles roses et noires de ses chairs, et restant immobile, les yeux fixés sur les spectateurs. Un profond silence régnait dans la pièce.
(Chapitre II - La vierge de Naples - page 72 de l'édition Livre de Poche de 1963).
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Le Pendino di Santa Barbara est fameux par les nombreuses naines qui y habitent. Elles sont si petites, qu'elles arrivent à peine au genou d'un homme de taille moyenne. Laides et ridées, elles sont parmi les naines les plus affreuses qui soient au monde. Il existe, en Espagne, des naines très belles, aux membres et aux traits bien proportionnés. Et j'en ai vu, en Angleterre, qui étaient vraiment très belles, roses et blondes, presque des Vénus en miniature. Mais les naines du Pendino di Santa Barbara sont horribles, et toutes, même les plus jeunes, ont l'aspect de très anciennes vieilles femmes, tant leur visage est flétri, leur front rugueux, leurs mèches rares et décolorées.
Ce qui est le plus étonnant dans cette ruelle fétide, parmi cette horrible population de naines, c'est la beauté des hommes, qui sont tous de haute taille, ont les yeux et les cheveux très noirs, des gestes lents et nobles, la voix claire et sonore. On ne voit pas d'hommes nains, dans le Pendino di Santa Barbara. Ce qui porte à croire que les nains mâles meurent au berceau, ou que la petitesse des membres est une monstrueuse hérédité réservée par le sort aux femmes seulement.
(Chapitre I - La peste - page 41 de l'édition Livre de Poche de 1963).
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J’ai un profond respect pour tous ceux qui se prostituent à cause de la faim, répondis-je ; si j’avais faim et si je ne pouvais m’ôter la faim d’une autre manière, je n’hésiterais pas un instant à vendre ma faim, même pour un paquet de cigarettes.
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Un silence gêné accueillit mes paroles. Tous me regardèrent stupéfaits et peinés : c’étaient des hommes simples, honnêtes, c’étaient des Américains, les plus purs et les plus justes des hommes, et ils me regardaient avec une sympathie muette, stupéfaits et peinés de ce que la vérité contenue dans mes paroles les contraignait à rougir.
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Mais leur accent avait parfois une certaine dureté, quelque chose d’orgueilleux, s’il est vrai que l’orgueil particulier des invertis n’est que l’envers de l’humiliation.
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